Date de formation du contrat de prêt d`argent entre

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Date de formation du contrat de prêt d`argent entre
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Date de formation du contrat de prêt d’argent entre
particuliers
le 20 février 2012
CIVIL | Contrat et obligations
Le contrat de prêt de somme d’argent entre particuliers, contrat réel, est formé par la remise des
fonds à l’emprunteur et non pas par l’établissement par celui-ci d’une reconnaissance de dette.
Civ. 1re, 9 févr. 2012, F-P+B+I, n° 10-27.785
À quelle date est formé le contrat de prêt de somme d’argent entre particuliers ? C’est à cette
question, qui n’est simple qu’en apparence, que la Cour de cassation est invitée à répondre.
Contrairement au prêt consenti par un professionnel du crédit (Civ. 1re, 28 mars 2000, D. 2000. Jur.
482, note S. Piedelièvre ; ibid. Somm. 358, obs. P. Delebecque ; ibid. 2002. Somm. 640, obs. D. R.
Martin ; JCP 2000. II. 10296, concl. Sainte-Rose), le prêt entre particuliers demeure un contrat réel.
Il suppose donc, pour sa formation, non seulement un échange de consentements, mais également
la remise des fonds qui en est l’objet. Il s’agit là d’un fait juridique, qui, en pratique, peut être
difficile à établir. En l’occurrence, sans doute animés par un souci de simplification, les juges du
fond avaient considéré que la reconnaissance de la dette fait présumer la remise des fonds. En
d’autres termes, la date de la remise était supposée être la date d’établissement de la
reconnaissance de dette.
C’est ce raisonnement, fondé sur une présomption, qui est condamné par la haute juridiction. Fort
curieusement, elle se fonde sur un élément purement factuel pour le détruire, qui tient à ce que la
reconnaissance de dette en question (établie le 31 oct. 1987) prévoyait expressément que la
remise des fonds n’interviendrait que quelque deux mois plus tard (précisément le 1er janv. 1988).
Elle en déduit que, à la date de la reconnaissance de dette litigieuse, le contrat de prêt ne pouvait
être définitivement formé. La Cour de cassation fournit tout de même fort habilement à sa
démarche un habillage juridique, fondé sur la notion de présomption d’existence de la cause,
elle-même dégagée par la jurisprudence à partir de l’article 1132 du code civil (V. par ex. Civ. 1re,
14 juin 1988, Bull. civ. I, n° 190 ; Gaz. Pal. 24 août 1989. Jur. 625, note Taisne ; pour rappel, cette
notion est destinée à permettre de valider le contrat, lorsque la cause n’est pas exprimée, sans
avoir à prouver celle-ci). On sait, en effet, de longue date que, en matière de prêt, la cause de
l’obligation de l’emprunteur réside dans la mise à disposition des fonds (Civ. 1re, 20 nov. 1974, Bull.
civ. I, n° 311 ; JCP 1975. II. 18109, note Calais-Auloy). Pour la Cour de cassation, cette discordance
de dates « ne pouvait faire présumer [l’existence de] la cause de l’obligation de l’emprunteur
prétendument constituée par cette remise » à la date de l’établissement de la reconnaissance de
dette. Il appartiendra donc à la juridiction de renvoi de rechercher la date effective de remise des
fonds, probablement par une démarche très empirique, consistant par exemple en l’analyse des
mouvements de fonds intervenus sur les comptes bancaires de l’emprunteur au cours de la période
litigieuse.
Site de la Cour de cassation
par X. Delpech
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