dibr Usufruit et nue propriété

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dibr Usufruit et nue propriété
L’USUFRUIT ET LA NUE
PROPRIETE
Le démembrement d’une forêt entre la nu-propriété et l’usufruit, avec donation de la nue-propriété, est
relativement fréquent pour les propriétés importantes. Nous en verrons quel en est la définition, avec le
cas particulier de la forêt, ainsi que les précautions à prendre pour éviter des difficultés quelques
années après cette même donation.
Définition
La définition de l’usufruit est donnée par l’article 578 du Code Civil : "L’usufruit est le droit de jouir des
choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d’en conserver
la substance".
L’existence de biens en usufruit ou en nue-propriété est consécutive à la volonté d’une transmission de
biens dans l’objectif de réduction des droits de mutation. Ce cas est relativement fréquent en Limousin
sur les propriétés boisées de plus de 25 hectares.
La loi du 30 décembre 2005 a profondément remanié le régime fiscal des successions, dont les
donations. Actuellement, la réduction sur les donations en nue-propriété est de 35 % lorsque le
donateur est âgé de moins de soixante-dix ans et de 10 % lorsqu'il est âgé de soixante-dix ans révolus
et de moins de quatre-vingts ans. Ces réductions s'appliquent à concurrence de la fraction de la valeur
des biens transmis représentative directement ou indirectement de la nue-propriété de biens (article
790 du code des impôts).
Les droits de l’usufruitier dont définis par l’article 582 du Code Civil : "L’usufruitier a le droit de jouir de
toute espèce de fruits, soit naturels, soit industriels, soit civils que peut produire l’objet dont il a
l’usufruit".
Cet usufruit a été défini au départ pour des usages civils, et a été complété pour les conditions
d’exploitation des forêts à l’époque de leur mise en vigueur en 1804. Les dispositions sont restée
inchangées alors que les modes de gestion et les sylvicultures pratiquées ont évolué.
Spécificités de la forêt
Elles sont reprises dans les articles 590 à 593 du Code Civil, exposés ci-après avant commentaires :
Article 590 : "Si l’usufruit comprend des bois taillis, l’usufruitier est tenu d’observer l’ordre et la quotité
des coupes, conformément à l’aménagement ou à l’usage constant des propriétaires ; sans indemnité
toutefois en faveur de l’usufruitier ou de ses héritiers, pour les coupes ordinaires, soit de taillis, soit de
baliveaux, soit de futaie, qu’il n’aurait pas faites pendant sa jouissance.
Les arbres qu’on peut tirer d’une pépinière sans la dégrader, ne font aussi partie de l’usufruit qu’à la
charge par l’usufruitier de se conformer aux usages des lieux pour le remplacement."
Article 591 : "L’usufruitier profite encore, toujours en se conformant aux époques et à l’usage des
anciens propriétaires, des parties de bois de haute futaie qui ont été mises en coupes réglées, soit que
ces coupes se fassent périodiquement sur une certaine étendue de terrain, soit qu’elles se fassent
d’une certaine quantité d’arbres pris indistinctement sur toute la surface du domaine."
Article 592 : "Dans tous les autres cas, l’usufruitier ne peut toucher aux arbres de haute futaie : il peut
seulement employer, pour faire les réparations dont il est tenu, les arbres arrachés ou brisés par
accident ; il peut même, pour cet objet, en faire abattre s’il est nécessaire, mais à la charge d’en faire
constater la nécessité avec le propriétaire".
Article 593 : "Il peut prendre, dans les bois, des échalas pour les vignes ; il peut aussi prendre, sur les
arbres, des produits annuels ou périodiques ; le tout suivant l’usage du pays ou la coutume des
propriétaires."
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En d’autres termes, le Code Civil, sous sa forme actuelle, stipule que l’usufruitier n’a jamais droit aux
arbres de haute futaie en dehors des coupes réglées, et que par contre il a droit aux coupes de taillis.
L’évolution de la sylviculture a provoqué une jurisprudence, d’où il ressort que :
− les coupes d’éclaircie ne reviennent pas forcement à l’usufruitier ; la situation est appréciée de façon
variable en fonction des sylvicultures pratiquées ;
− les pins et les peupliers sont des arbres de haute futaie.
Par ailleurs, l’existence d’un plan simple de gestion ne suffit pas à régler le problème : la planification
de la production prévue ne peut être assimilée à une coupe réglée, seuls les faits pouvant servir de
preuve de coupe régulière.
Quelques précautions à prendre
Cette situation, qui constitue une solution permettant de transférer une propriété à ses enfants tout en
diminuant les fais de mutation, comporte deux dangers : le premier est de provoquer des conflits entre
les deux générations concernées, et l’autre est d’ordre fiscal, tous deux liés à une définition insuffisante
des produits revenant au nu-propriétaire et à l’usufruitier.
De l’intérêt d’un contrat entre le nu-propriétaire et l’usufruitier
Devant cette situation confuse, la solution est un aménagement contractuel des rapports entre le nupropriétaire et l’usufruitier. A noter que le CRPF demande les signatures du nu-propriétaire et de
l’usufruitier dans le cas de la présentation d’un Plan Simple de Gestion sans pour autant s’intéresser à
la répartition des charges et des produits.
L’examen des points suivants doit permettre de limiter les conflits ultérieurs :
− Définition des biens objets du démembrement : ceci suppose la description d’un point de vue
forestier de ces biens.
− Contraintes réglementaires applicables aux biens concernés : assujettissement et/ou existence d’un
plan simple de gestion, réglementations diverses, adhésion à un système de certification de la
gestion durable.
− Fixation des droits et obligations respectifs du nu-propriétaire et de l’usufruitier. Il convient de
préciser, en l’absence d’événement exceptionnel :
• pour chaque type de peuplement : le mode d’exploitation retenu, la nature des produits
attendus, lors de chaque intervention et leur qualité de revenu revenant alors à l’usufruitier, ou
de produit revenant alors au nu-propriétaire ;
• la nature de chacune des charges prévisibles et la répartition de leur prise en charge entre le
nu-propriétaire et l’usufruitier.
• en cas de document de gestion applicable (plan simple de gestion, code de bonne pratique
sylvicole, règlement type de gestion) obligation de l’usufruitier d’en respecter les contraintes ou
de participer à leur établissement s’ils deviennent applicables au cours de l’usufruit ;
• la charge de l’assurance éventuelle et sa nature ;
• la nature et le contenu des interventions qui seront permises respectivement au nu-propriétaire
et à l’usufruitier ;
• l’attribution du produits de chablis.
− Dans le cas d’un événement exceptionnel comme par exemple une tempête, les procédures à
définir pour les produits (vente de produits accidentels, obtention d’aides), la rédaction des
demandes d’aides à la reconstitution, l’exécution des travaux et la souscription aux engagements
pris.
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Et de deux comptes bancaires séparés
Il arrive très fréquemment que les produits et charges liés à la gestion de la forêt transitent par un seul
compte géré par l’usufruitier (en l’occurrence les parents), la redistribution de l’argent entre le nu
propriétaire et l’usufruitier se faisant à partir de ce même compte. Dans ce cas, le risque est grand que
le fisc considère que les sommes versées sur ce compte reviennent définitivement à l’usufruitier
puisque détenu à un moment ou à un autre par lui. Le jour de son décès, elles sont censées faire
partie de sa succession et par là même être taxables, à moins que les héritiers puissent démontrer le
contraire.
Aussi, la tranquillité fiscale impose l’existence de deux comptes bancaires séparés. D’où l’intérêt du
contrat cité séparément. Le vieux proverbe "Les bons comptes font les bons amis" bien connu des
notaires reste d’actualité.
Fin de l’usufruit
L’usufruit prend fin par :
− l’arrivée du terme fixé, le plus souvent le décès de l’usufruitier ;
− la consolidation qui se produit lorsque, par exemple par succession, le droit réel de nue-propriété
est transmis à l’usufruitier ;
− le non usage trentenaire;
− la perte totale du bien grevé d’usufruit ;
− l’abus de jouissance entraînant déchéance des droits de l’usufruitier ;
− la renonciation de l’usufruitier.
Pour en savoir plus
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