ble de lui donner la jouissance de la maison pour

Transcription

ble de lui donner la jouissance de la maison pour
Prévoyance
et impôts
Pour protéger son conjoint tant sur le plan financier que vis-à-vis des autres héritiers, il est possible de lui donner la jouissance de la maison pourtant léguée aux enfants. Non sans écueils.
Les pièges
de l’usufruit
Martine Dutruit
ment qui est occupé en commun par les
époux. Ce droit ne peut donc pas être revendiqué en cas de vie séparée, et seul le
logement principal est concerné, à l’exclusion d’une résidence secondaire.
La loi donne la préférence à l’usufruit,
sans exclure le droit pour le conjoint survivant de revendiquer l’attribution en
propriété si les circonstances le justifient,
entre autres parce que le défunt n’a pas
de descendants ou si les relations avec les
enfants sont mauvaises et laissent augurer
des dissensions.
L
L’usufruit
permet
de
confier la propriété d’un
bien, une maison par exemple, à une personne (le nupropriétaire), tout en faisant
profiter une autre de sa jouissance et de
ses revenus (l’usufruitier). Il est souvent
prévu dans un testament.
En général, l’attribution de l’usufruit à
son conjoint est destiné à le protéger le
mieux possible, tant financièrement que
vis-à-vis des autres héritiers. On constate
toutefois que ce souci légitime est régulièrement mis à mal dans la réalité.
Logement de famille
Même si rien n’a été prévu dans un testament, le Code civil prévoit la possibilité pour le conjoint survivant de demander, afin d’assurer le maintien de son
niveau de vie, qu’un droit d’usufruit lui
soit attribué sur l’immeuble ou l’appartement du couple. Il doit s’agir du loge-
Problèmes fiscaux
Du point de vue fiscal, l’usufruitier doit
déclarer dans sa fortune le bien soumis à
usufruit. Il est imposé sur le revenu qui
en provient. Le risque existe donc qu’il
paie des impôts élevés, sur la fortune et la
valeur locative, sans avoir des ressources
suffisantes. Les veuves «millionnaires sur
le papier» sont nombreuses, alors que
leurs moyens d’existence sont faibles et
qu’elles n’ont aucune possibilité d’emprunter sur la valeur de la maison, en
l’occurrence.
Les charges d’entretien
L’usufruitier a aussi la charge ordinaire
d’entretien et les intérêts des dettes dont
la chose est grevée. La situation peut devenir épineuse lorsque des travaux d’entretien plus importants (travaux de toiture, remplacement de la chaudière,
réfection des murs et des sols, etc.) sont
nécessaires et que le nu-propriétaire refuse de les prendre normalement à sa
charge. Il est malheureusement fréquent,
dans la pratique, que l’usufruitier doive
alors les assumer, sans possibilité de récupérer quoi que ce soit auprès du nu-propriétaire.
Actions d’une société
Le testament permet également d’attribuer à son conjoint sa part dans la suc-
cession sous la forme de l’usufruit du
tout. S’il y a des enfants, ceux-ci devront
attendre le décès du survivant pour devenir pleinement propriétaires.
Lorsque il existe une entreprise de famille, le survivant peut donc exercer les
droits de vote sur les actions, lors de l’assemblée générale, nommer ou révoquer
le dirigeant, décider de l’octroi ou non
d’un dividende, etc. Il risque dès lors de
se retrouver en train d’arbitrer des litiges
éventuels entre les héritiers nu-propriétaires des actions et de générer un climat
de tension. On songe notamment à l’enfant qui souhaite reprendre l’entreprise
et qui assume le risque économique, sans
avoir la maîtrise complète de cette entreprise.
Trouver les liquidités
Enfin, dans les cantons de Vaud, du Jura et
de Genève, le conjoint et les enfants doivent payer des impôts de succession. Mais
si le conjoint survivant reçoit l’usufruit
de toute la succession, les enfants ont
beau n’être que des nus-propriétaires, ils
doivent malgré tout payer l’impôt, sans
recevoir immédiatement quoi que ce soit
en pièces sonnantes et trébuchantes! Ils
ne pourront donc «se rembourser» qu’à
la disparition de leur parent survivant, au
moment où ils disposeront de la succession.
Conclusion
L’attribution de l’usufruit à son conjoint
est une démarche courante. L’expérience
de tous les jours montre malheureusement qu’elle est de nature à créer des
tensions familiales ou financières chez les
héritiers. Ces écueils sont méconnus.
Une véritable planification est donc nécessaire, à laquelle les deux conjoints devraient participer.
Pascal Favre
Fiduciaire Michel Favre SA, Lausanne
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9 juillet 2003 NO 3
. Tout Compte Fait . 21

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