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Actualité juridique Assurance responsabilité civile : la Cour supérieure du Québec se prononce sur la question des dommages continus et progressifs et le partage au prorata entre assureurs successifs Juin 2014 Assurance 1 Le 12 juin 2014, l’honorable Michel Richard a rendu un jugement de plus de 250 pages (« jugement-phare ») dans les dossiers relatifs à la problématique de la pyrrhotite dans lesquels plus de 800 propriétaires de résidences et 18 propriétaires de commerces réclamaient une indemnité totalisant approximativement 200 M$ pour le remplacement des fondations de leurs immeubles. Les propriétaires prétendaient que les fondations et autres ouvrages de béton devaient être remplacés vu la présence de pyrite et de pyrrhotite dans le granulat utilisé pour la fabrication du béton. Le juge Richard a accordé pour l’essentiel les demandes d’indemnisation des propriétaires des immeubles affectés et a réparti la responsabilité des défendeurs principaux selon le rôle qu’ils ont joué, soit entre les entrepreneurs généraux/coffreurs, les bétonnières, la carrière et le géologue. Chacune des parties tenues responsables avait plusieurs assureurs responsabilité civile, à la fois de première ligne et complémentaires, s’étant succédés depuis le début des années 2000. L’une des questions déterminantes qui se posaient consistait à déterminer quels assureurs devaient payer l’indemnisation et dans quelle proportion. Le juge Richard a conclu que l’indemnité payable dans un contexte de dommages continus et progressifs devait être répartie entre les assureurs au prorata de la période de couverture des diverses polices d’assurance applicables émises par chacun. Par exemple, si le dommage survient sur une période de 10 ans et qu’un assureur garantit les conséquences pécuniaires découlant de la responsabilité civile de son assuré pendant 2 années, il sera responsable de 20 % de l’indemnité. Il importe de souligner que dans le cadre de son analyse, le juge a d’abord conclu, en s’appuyant sur la preuve d’expert présentée, que les dommages étaient progressifs et continus et que leur première manifestation correspondait à la date de coulée de la fondation. Le juge Richard a dû s’inspirer de la common law canadienne et américaine pour répartir l’indemnité payable entre les assureurs successifs d’un assuré commun en l’absence de règle à cet égard dans le Code civil du Québec et dans la jurisprudence québécoise. Le juge a conclu que la méthode au prorata des périodes de couverture devait être retenue pour les motifs, in extensio, suivants : PAGE 2 il s’agit de la façon la plus juste, prévisible, équitable et efficace de tenir compte à la fois de l’obligation in solidum entre assureurs et des éventuels recours en subrogation entre ceux-ci, ce qui est conforme aux principes du droit québécois en matière d’obligations et d’assurance; d’ailleurs, la common law canadienne et surtout la doctrine américaine, plus élaborée à ce sujet, confirment que la méthode au prorata des périodes de couverture est celle qui doit être préconisée et, de fait, est celle qui est retenue par la majorité des juridictions américaines; ainsi l’assuré se retrouvera indemnisé pour les dommages subis et les assureurs assumeront leur responsabilité, chacun en fonction de la durée de la couverture offerte, ce qui respecte la logique du contrat d’assurance; compte tenu de l’ensemble des faits au dossier, le tribunal éliminera toute éventualité de recours subrogatoires (et autres) entre assureurs, sans toutefois « surindemniser » l’assuré, s’il détermine d’emblée et de façon équitable le partage de responsabilité exigé par l’article 469 Cpc en matière de responsabilité solidaire selon la méthode au prorata. Sans l’indiquer explicitement dans son jugement, le juge Richard applique la « Continuous Trigger Theory », connue en common law canadienne et américaine, pour en arriver à un partage au prorata. Selon cette théorie, toutes les polices en vigueur entre le moment de l’exposition au fait générateur du dommage (insertion de pyrrhotite dans les mélanges de béton) et la survenance de l’« événement » doivent s’appliquer. En l’espèce, les parties ont admis que cette dernière date correspondait à la date où des fissures visibles à l’œil nu étaient apparues dans les fondations. Cette théorie se distingue des trois autres théories utilisées en common law pour déterminer la ou les polices applicables (trigger theories) et que le juge Richard aurait pu choisir d’appliquer, soit : Trigger Theories Principes et exemples d’application aux dossiers de la pyrrhotite Théorie de l’exposition (Exposure Theory) La police applicable est celle qui est en vigueur au moment de l’exposition au fait générateur du dommage, soit lorsque la pyrrhotite fut intégrée aux mélanges à béton utilisés pour la coulée des fondations. Théorie de la manifestation du dommage (Manifestation Theory) La police applicable est celle qui est en vigueur au moment où le dommage se manifeste pour la première fois, soit le moment du gonflement et de la fissuration des fondations de béton. Théorie de la survenance du dommage (Injury-in-fact Theory) La police applicable est celle qui est en vigueur à la « survenance » du dommage, soit lorsque la réaction chimique provoquant des microfissures dans le béton survient, par exemple. Élif Oral Jérôme Cantin PAGE 3 Notes 1. Deguise c Montminy, 2014 QCCS 2672. Pour plus de renseignements sur le sujet abordé dans ce bulletin, veuillez communiquer avec l’un des avocats mentionnés ci-dessous : > André Legrand Montréal +1 514.847.4412 [email protected] > Charles Taschereau Québec +1 418.640.5948 [email protected] > Sally A. Gomery Ottawa +1 613.780.8604 [email protected] > Randy C. Sutton Toronto +1 416.216.4046 [email protected] > Alan Rudakoff, c.r. Calgary +1 403.267.8270 [email protected] Norton Rose Fulbright LLP, Norton Rose Fulbright Australia, Norton Rose Fulbright Canada S.E.N.C.R.L., s.r.l., Norton Rose Fulbright South Africa (constituée sous le nom de Deneys Reitz Inc.) et Fulbright & Jaworski LLP, chacune étant une entité juridique distincte, sont membres du Verein Norton Rose Fulbright, un Verein suisse (« membres de Norton Rose Fulbright »). Le Verein Norton Rose Fulbright aide à coordonner les activités des membres de Norton Rose Fulbright, mais il ne fournit aucun service juridique aux clients. Les mentions de « Norton Rose Fulbright », du « cabinet », du « cabinet d’avocats » et de la « pratique juridique » renvoient à un ou à plusieurs membres de Norton Rose Fulbright ou à une de leurs sociétés affiliées respectives (collectivement, « entité/entités Norton Rose Fulbright »). 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