LA COMMUNICATION DE CRISE – Thierry LIBAERT

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LA COMMUNICATION DE CRISE – Thierry LIBAERT
Communiquer avec les médias
LA COMMUNICATION DE CRISE
Thierry LIBAERT,
enseignant en sciences de l'information et de la communication
1. Conduire sa communication
Faire la cartographie complète des cibles ;
se mettre dans la logique de l’interlocuteur (ce qu’il attend) ;
être attentif à la cohérence des messages ;
prendre des initiatives (ne pas être défensif) ;
ne pas oublier l’information interne ;
communiquer par la preuve ;
s’appuyer sur des relais d’opinion crédibles ;
hiérarchiser les cibles prioritaires : parents d’élèves, élèves, hiérarchie, médias, leaders
d’opinion.
2. Les principes des relations presse
Un porte-parole unique habilité à représenter l’établissement scolaire par les procédures
(le directeur de l’école) ou expressément désigné par la cellule de crise ;
la règle : le communiqué de presse, pour maîtriser sa communication ;
l’exception : le point presse ;
se préparer aux quatre questions de base :
- Que s’est-il passé ?
- Quelles sont les conséquences ?
- Que faites-vous ?
- Quand la situation pourra-t-elle redevenir normale ?
il est nécessaire de codiriger l’interview (ne pas se contenter de répondre aux
questions) ;
se renseigner avant sur les conditions de l’interview ;
ne jamais répondre directement sans avoir préparé son texte.
3. Les dix conseils de la Communication de crise
Être disponible ;
être réactif ;
être humain (témoigner de la solidarité du collège des enseignants) ;
être crédible, fiable (exclure toute hypothèse) ;
être réaliste (ne pas minimiser) ;
être simple, clair, concret ;
être prudent (éviter le OFF) ;
être cohérent (attention aux contradictions) ;
être rassurant (s’exprimer avec calme, sans précipitation) ;
être courtois (même en cas d’harcèlement).
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4. La temporalité de la crise : des communications de nature différente
La notion de temporalité de la crise est une notion très opérationnelle car elle appelle un type
de discours adapté à la période dans laquelle se situe l’établissement concerné. Les
premiers moments de la crise font appel en priorité au registre de l’émotion puis le
discours se fait de plus en plus rationnel.
Sans qu’il existe de règles établies en la matière, on peut distinguer des temps de discours
différents dans le déroulé d’une crise, par exemple :
H+1 : Le temps du récit : que s’est-il passé ? Qui est victime ? (Les données sont
souvent confuses) ;
H+4 : Le temps des 1
faire ? Où en est-on ?
res
explications : pourquoi ? À cause de qui ? Que comptez-vous
J+1 à J+3 : Le temps de l’enquête : qui est responsable ? Que comptez-vous faire pour
indemniser les victimes ? (C’est aussi le temps de la réparation) ;
J+3 à J+7 : Le temps du débat. Cette affaire appelle un débat plus large autour des
responsabilités des établissements scolaires.
5. L’importance majeure de la communication interne
100 personnels = 100 régulateurs potentiels de crise.
La crise concerne directement vos personnels. La crise n’est pas neutre en interne, elle
impacte fortement les personnels qui sont sur-consommateurs d’information. Chaque
personnel est un média potentiel. Les agents ne suivent pas toujours et la crise peut accroître
les dysfonctionnements managériaux.
Que faire en interne ?
Informer les collaborateurs (équipe de direction) très vite (par téléphone) : donner la
posture ;
informer tous les personnels sur l’état actuel de la situation et alimenter au fur et à
mesure (mini réunion, mail, téléphone).
6. L’importance du message
Penser d’abord aux personnes lésées : proximité, empathie, compassion ;
dire ce que l’on sait "en l’état actuel de nos informations" ;
communiquer sur une attitude : ouverture, disponibilité, compréhension "je vous ai
compris" (contre-exemple de l’accident du DRAC : "ces personnes ne devaient pas être
là") ;
jouer la carte du partenariat : dire avec qui l’on agit (exemple de la tempête : "avec les
retraités, l’armée, les compagnies électriques étrangères, ...") ;
se positionner sur une dynamique de mobilisation : toute notre énergie est mobilisée.
Donner des preuves ;
re
être offensif : "s’il le faut, nous raserons tout" (1 déclaration de Pierre GRAF, président
d’ADP au lendemain de l’effondrement du terminal 2 E de Roissy le 24 mai 2004) ;
penser d’abord à ce que les gens veulent entendre avant de penser à ce que l’on veut
dire. "Puis-je d’abord vous dire à quel point nous nous sentons particulièrement
concernés par ce qui vient de se dérouler".
7. L’importance des mots
Bannir les sigles et abréviations : le CHMP, le RLS. les ZEP,.. ;
bannir le jargon : "les corps migrants" dans les circuits de refroidissement des centrales
nucléaires ; France Telecom à propos de ses clients : "on les bascule au nominal" ; la
CNAM : "on liquide les derniers allocataires" ;
évitez les termes négatifs : "pas d’inquiétude" (on retient le mot inquiétude).
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8. Quelques erreurs à éviter :
Attendre trop longtemps avant de communiquer :
- d’autres acteurs occuperont le terrain ;
- des rumeurs peuvent émerger ;
- le silence est toujours suspect en période de crise ;
-
communiquer trop tôt sur la base de faits non fiables :
la moindre information erronée sera durement retenue contre nous ;
afficher des objectifs contradictoires :
- les messages émis ne sont pas cohérents entre eux ;
- les porte-paroles ne disent pas exactement la même chose ;
-
choisir un mauvais porte-parole :
son autorité doit être suffisante ;
nécessité du média training ;
-
chercher à rassurer à tout prix :
informer, expliquer ;
-
avoir un message trop technique ou juridique là où l’on attend de la compassion :
penser d’abord aux victimes de la coupure ou tarification erronée ;
la crise, c’est l’irruption de l’opinion dans l’entreprise ;
trop en dire :
- savoir doser son message. Hiérarchiser l’information prioritaire ;
-
ne pas en dire assez :
moins nous nous exprimons, plus les publics seront méfiants ;
plus nous parlons, plus vite ils perdront leur intérêt ;
ne pas assumer :
- renvoyer sur un autre service ("voyez avec le délégué régional") ;
- être langue de bois ("la situation est sous contrôle") ;
- minimiser : "responsable mais pas coupable" ;
-
oublier la posture :
la perception de la crise est plus importante que la crise : nécessité de montrer une
attitude d’ouverture, de transparence. Attention à l’image d’arrogance ;
penser que l’on peut garder une information secrète longtemps.
Pour aller plus loin :
e
LIBAERT, Thierry. La communication de crise, Dunod, Topos, 2001 ; 2 édition 2005 ;
nouvelle édition 2010
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