Chapitre 1 La formation du contrat

Transcription

Chapitre 1 La formation du contrat
Chapitre 1
La formation du contrat
1 Exercice 1
A. Énoncé
Quelles sont les classifications des contrats suivants :
- du contrat de location ?
- du contrat de travail ?
- du contrat de vente d’immeuble en viager ?
- du contrat d’assurance ?
- contrat de location-vente ?
B. Corrigé
Les contrats sont classés en fonction des critères retenus. Les classifications permettent au
juge de qualifier les contrats soumis à son appréciation.
1. Rappel du cours
Reprendre « C. Les principales classifications des contrats » aux pages 14 et 15 de
l’ouvrage.
2. Solution
Pour le contrat de location : il s’agit d’un contrat synallagmatique, à titre onéreux,
commutatif, à exécution successive, consensuel, de gré à gré, nommé.
Pour le contrat de travail : il s’agit d’un contrat synallagmatique, à titre onéreux, commutatif,
à exécution successive, consensuel, nommé. En ce qui concerne la classification « de gré à
gré ou d’adhésion », les deux classifications semblent être admises. En effet, juridiquement,
il s’agit d’un contrat de gré à gré où chacune des parties est libre de négocier les différentes
clauses du contrat. En revanche, dans la pratique, il s’agit plutôt d’un contrat d’adhésion où
les différentes clauses sont imposées par l’employeur.
Pour le contrat de vente d’immeuble en viager : il s’agit d’un contrat synallagmatique, à
titre onéreux, aléatoire (la valeur de l’immeuble dépend de la durée de la vie humaine), à
exécution successive, solennel, de gré à gré, nommé (il s’agit d’un contrat de vente).
Pour le contrat d’assurance : c’est un contrat synallagmatique, à titre onéreux, aléatoire (il
dépend de la réalisation du risque), à exécution successive, consensuel, d’adhésion (il s’agit
d’un contrat prérédigé), nommé (il existe le Code des assurances).
Pour le contrat de location-vente : c’est un contrat synallagmatique, à titre onéreux,
commutatif, à exécution successive, consensuel, de gré à gré, innommé (en effet, il s’agit
d’un contrat complexe qui juxtapose différents contrats nommés : la vente, la location…).
© Éditions Foucher – Expertise comptable 2007
2 Exercice 2 - Cas pratique
A. Énoncé
Résoudre le cas pratique suivant : M. Jean a vendu à Mme Paul un fonds de commerce
« bar-restaurant » par acte passé en octobre 2007. La réalisation, en 2008, d’une déviation
routière réduit l’importance du trafic devant le fonds de Mme Paul.
La construction de cette déviation était un projet ancien, connu de tous. M Jean était au
courant de sa mise en œuvre puisqu’il avait vendu trois ans plus tôt des parcelles
nécessaires aux travaux.
Mme Paul considère que M. Jean a commis une réticence dolosive et réclame la nullité de la
vente.
B. Corrigé
Lors de la transaction effectuée entre M. Jean et Mme Paul une information a été dissimulée
à l’acquéreur, Mme Paul. Les questions qui se posent sont de savoir : si le consentement
donné est exempt de vices et le contrat valable ? Quelles sont les conditions retenues pour
que le dol soit constitué ? Quels sont les conditions et les effets de la nullité du contrat ?
Rappel du cours
Au moment de la formation du contrat, des conditions de fond doivent être respectées. Ces
conditions sont posées à l’article 1108 du Code civil : il s’agit du consentement, de la
capacité, de l’objet et de la cause. Dans le cas pratique qui nous est soumis, la question qui
se pose est de savoir si le consentement est valable.
Le consentement de chaque contractant doit exister et ne pas être vicié. Les vices du
consentement sont : l’erreur, le dol et la violence (article 1109 du Code civil) (se reporter au
cours pages 24 à 26) :
- l’erreur (art. 1110 du Code civil) : un contractant commet une erreur lorsqu’il se trompe ; il
se fait une représentation inexacte de la réalité sans que son cocontractant ait souhaité
l’induire en erreur ;
- la violence (art. 1112 du Code civil) : la violence consiste à obtenir le consentement du
cocontractant par la force ou la menace d’un mal considérable et actuel à l’encontre de la
personne de ce dernier, de son conjoint, de ses descendants ou ascendants, ou encore sur
ses biens ;
- le dol (art. 1116 du Code civil) : il s’agit de l’intention du cocontractant d’induire en erreur.
Solution
Le dol peut être constitué par une manœuvre frauduleuse active ou passive. La « réticence
dolosive » est une manœuvre passive se manifestant par le silence gardé sur un élément
essentiel pour la décision de contracter, émanant d’un contractant, afin de tromper le
cocontractant pour l’amener à contracter. Le dol doit être déterminant du consentement.
En l’espèce, si Mme Paul avait été informée des travaux et du risque de perte de clientèle,
elle n’aurait pas contracté ou à un autre prix. La clientèle représentant la fréquentation du
fonds de commerce est un élément déterminant du contrat.
Le dol est donc constitué :
- l’élément intentionnel : M. Jean a volontairement induit en erreur Mme Paul ;
- l’élément matériel : la réticence dolosive constitue la manœuvre destinée à amener le
cocontractant à s’engager.
Mme Paul doit pouvoir obtenir la nullité du contrat. Il s’agit d’une nullité relative puisqu’il s’agit
de la sauvegarde d’un intérêt privé. Elle ne peut être invoquée que par la personne que la loi
entend protéger (dans notre cas, Mme Paul, victime du vice du consentement) ou son
© Éditions Foucher – Expertise comptable 2007
représentant légal ou ses ayants cause universels. Le titulaire de l’action en nullité relative
peut renoncer à cette action ; dans ce cas, il confirme l’acte.
L’action en nullité relative se prescrit par cinq ans. Le contrat sera anéanti rétroactivement
(les effets sont les mêmes que pour la nullité absolue) ; il est considéré comme n’ayant
jamais existé.
Mme Paul peut demander la nullité de l’acte, le contrat de vente de fonds de commerce sera
rétroactivement annulé. Autre solution : elle peut également obtenir la confirmation de l’acte
éventuellement avec une révision du prix.
3 Exercice 3 - Analyse d’arrêt
A. Énoncé
Audience publique du 3 avril 2002
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l’article 1112 du Code civil ;
Attendu que Mme K… était collaboratrice, puis rédactrice salariée de la société LarousseBordas depuis 1972 ; que selon une convention à titre onéreux en date du 21 juin 1984, elle
a reconnu la propriété de son employeur sur tous les droits d'exploitation d'un dictionnaire
intitulé Mini débutants à la mise au point duquel elle avait fourni dans le cadre de son contrat
de travail une activité supplémentaire ; que, devenue « directeur éditorial langue française »
au terme de sa carrière poursuivie dans l'entreprise, elle en a été licenciée en 1996 ; que, en
1997, elle a assigné la société Larousse-Bordas en nullité de la cession sus-évoquée pour
violence ayant alors vicié son consentement, interdiction de poursuite de l'exploitation de
l'ouvrage et recherche par expert des rémunérations dont elle avait été privée ;
Attendu que, pour accueillir ces demandes, l'arrêt retient qu'en 1984, son statut salarial
plaçait Mme K… en situation de dépendance économique par rapport à la société Éditions
Larousse, la contraignant d'accepter la convention sans pouvoir en réfuter ceux des termes
qu'elle estimait contraires tant à ses intérêts personnels qu'aux dispositions protectrices des
droits d'auteur ; que leur refus par elle aurait nécessairement fragilisé sa situation, eu égard
au risque réel et sérieux de licenciement inhérent à l'époque au contexte social de
l'entreprise, une coupure de presse d'août 1984 révélant d'ailleurs la perspective d'une
compression de personnel en son sein, même si son employeur ne lui avait jamais adressé
de menaces précises à cet égard ; que de plus l'obligation de loyauté envers celui-ci ne lui
permettait pas, sans risque pour son emploi, de proposer son manuscrit à un éditeur
concurrent ; que cette crainte de perdre son travail, influençant son consentement, ne l'avait
pas laissée discuter les conditions de cession de ses droits d'auteur comme elle aurait pu le
faire si elle n'avait pas été en rapport de subordination avec son cocontractant, ce lien
n'ayant cessé qu'avec son licenciement ultérieur ;
Attendu, cependant, que seule l’exploitation abusive d’une situation de dépendance
économique, faite pour tirer profit de la crainte d’un mal menaçant directement les intérêts
légitimes de la personne, peut vicier de violence son consentement ; qu'en se déterminant
comme elle l'a fait, sans constater, que lors de la cession, Mme K… était elle-même
menacée par le plan de licenciement et que l'employeur avait exploité auprès d'elle cette
circonstance pour la convaincre, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la seconde branche du premier moyen,
ni sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 janvier 2000, entre les
parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans
l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour
d'appel de Versailles.
© Éditions Foucher – Expertise comptable 2007
source : www.lexinter.net
1. Quels sont les faits de l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 3 avril 2002 ?
2. Quel est le problème juridique ?
3. Sur quel fondement juridique est rendue la solution ?
4. Commentez l’originalité de cet aspect du vice de violence.
B. Corrigé
1. Les faits
Dame K., salariée, avait cédé à son employeur, éditeur, ses droits d’auteur sur un ouvrage.
Des années plus tard - après son licenciement -, elle prétend avoir pris sa décision, à
l’époque de la cession litigieuse, par la crainte de perdre son travail (la perspective d’une
restructuration de l’entreprise et les licenciements consécutifs).
2. Le problème juridique
L’exploitation abusive d’une situation de dépendance économique peut-elle permettre
l’annulation de la cession pour violence ?
3. Fondement de la solution
Ce sont les articles 1111 et suivants du Code civil qui sont invoqués. L’accent est mis sur
l’influence de la crainte créée sur la volonté de celui qui en a été la victime. Il s’agit pour celui
qui a contracté l’obligation de la « crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal
considérable et présent » (art. 1112 du Code civil). Peu importe que cette violence ait été
exercée « par un autre que celui au profit duquel la convention a été faite » (art. 1111 du
Code civil). La finalité de la violence exercée est l’extorsion du consentement. En principe, la
violence doit avoir été d’origine humaine.
4. Originalité de la solution
La crainte invoquée par Mme K. est diffuse et anonyme. La notion de violence a évolué au
gré des décisions rendues. Une violence-vice du consentement peut résulter de
circonstances, mais encore faut-il que le demandeur en nullité puisse craindre directement
pour sa personne ou ses biens. Une simple éventualité (comme dans notre cas, un plan
social) fragilise la sécurité juridique.
C’est pour cette raison qu’en l’espèce, la Cour de cassation casse l’arrêt rendu : la cour
d’appel n’a pas constaté que « lors de la cession, Mme K. était elle-même menacée par le
plan de licenciement et que l'employeur avait exploité auprès d'elle cette circonstance pour la
convaincre ».
L’arrêt rendu a pour mérite de consacrer une forme moderne de « violence », la contrainte
économique, voire l’exploitation abusive d’une situation de dépendance économique.
4 Exercice 4 - QCM
A. Énoncé
1. Un contrat, c’est :
a - un acte juridique
b - un fait juridique
c - une convention
d - un acte unilatéral de volonté
© Éditions Foucher – Expertise comptable 2007
2. L’autonomie de la volonté implique :
a - la liberté de contracter ou de ne pas contracter
b - la liberté de choisir son cocontractant
c - la liberté de déterminer le contenu de son contrat
d - l’absence de liberté
3. La vente d’un bien mobilier est un contrat :
a - unilatéral
b - synallagmatique
c - à exécution successive
d - aléatoire
e - à titre onéreux
4. Quelles sont les erreurs retenues comme vices du consentement ?
a - l’erreur indifférente
b - le dol
c - l’erreur sur les qualités substantielles
d - l’erreur sur la personne
5. Les quatre conditions de validité d’un contrat sont, d’après l’article 1108 du Code civil :
a - le lien de subordination
b - le consentement
c - la capacité
d - l’affectio societatis
e - l’objet
f - la cause
6. La nullité absolue :
a - se prescrit par cinq ans
b - peut être invoquée par toute personne ayant un intérêt à agir
c - peut être invoquée uniquement par le procureur de la République
d - peut faire l’objet d’une renonciation à l’action en justice
e - protège l’intérêt de tous
7. La nullité relative :
a - ne peut être invoquée que par la personne que la loi entend protéger
b - se prescrit par cinq ans
c - est susceptible de confirmation
d - est rétroactive
B. Corrigé
1 : a, c ; 2 : sauf exceptions a, b, c ; 3 : b, d ; 4 : c, d ; 5 : b, c, e, f ; 6 : b, e ; 7 : a, b, c, d.
© Éditions Foucher – Expertise comptable 2007