Le sort du délai de rétractation en cas d`acquisition par

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Le sort du délai de rétractation en cas d`acquisition par
JURISPRUDENCE COMMENTÉE IMMOBILIER
1380
VENTE D’IMMEUBLE
1380
Le sort du délai de rétractation en cas
d’acquisition par une SCI
Une SCI de gestion qui achète un immeuble à usage d’habitation conformément à son objet
social qui est l’acquisition et la gestion par location ou autrement de tous immeubles n’est pas
un acquéreur non professionnel et ne bénéficie pas du délai de rétractation de l’article L. 271-1
du CCH.
JEAN-PIERRE GARÇON,
docteur en droit,
juriste au Cridon Ouest
Cass. 3e civ., 24 oct. 2012, n° 11-18.774 :
JurisData n° 2012-024056 ; JCP N 2012,
n° 46, act. 980
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B
ien qu’elle ne résolve pas d’un trait
de plume les questions posées par la
portée de l’article L. 271-1 du Code
de la construction et de l’habitation (CCH)
en cas d’acquisition d’un logement par une
personne morale, cette décision de rejet de
la Cour de cassation (D. 2012, p. 2597, obs.
St. Colmant) permet de mieux délimiter le
champ d’application de ce texte pour généralement (mais peut-être pas systématiquement) écarter la purge du délai de rétractation lorsque l’acquéreur est une société
d’investissement.
La propriétaire d’une importante villa de Villefranche-sur-Mer avait signé une promesse
synallagmatique de vente pour 390 millions
d’euros avec une personne physique agissant
pour le compte d’une société en formation.
L’acte notarié stipulait que les dispositions
de l’article L. 271-1 du CCH étaient inapplicables, l’acquéreur étant une personne morale. Le fondateur avait finalement refusé de
signer l’acte authentique définitif et réclamé
la restitution de l’indemnité d’immobilisation en excipant du défaut de purge du délai
de rétractation prévu par ce texte et de la nullité corrélative de son engagement. Il faisait
valoir en effet le défaut de qualité professionnelle de l’acquéreur.
Par un arrêt du 15 avril 2011, la cour d’appel d’Aix avait écarté le bénéfice du délai de
rétractation (JCP N 2011, n° 28, 1215, avec
nos obs.). Les juges du fond avaient pris acte
de ce que le législateur n’a pas précisé la
notion d’« acquéreur non professionnel » et
l’avaient interprétée en fonction de sa finalité qui est de protéger certaines personnes.
Transposant la solution admise en matière
de crédit immobilier (Cass. 1re civ., 10 févr.
1993 : JCP N 1993, II, p. 233, note A. Gourio.
- Cass. 1re civ., 11 oct. 1994 : Dr. et patrimoine
mars 1995, p. 65, obs. C. Saint-Alary-Houin,
excluant la loi Scrivener. - Cass. 1re civ., 26 mai
1993 : JCP N 1994, II, p. 26, note G. Raymond,
rendu à propos des clauses abusives), la cour
avait retenu que l’activité professionnelle
incluait le fait de procurer la propriété ou
la jouissance d’un immeuble sous quelque
forme que ce soit, en relevant au passage
que les intervenants étaient tous rompus aux
affaires. Les fondateurs étaient en effet une
société commerciale luxembourgeoise et une
société de droit chypriote.
LA SEMAINE JURIDIQUE - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 48 - 30 NOVEMBRE 2012
Le pourvoi formé contre cet arrêt est rejeté
sur le fondement de « l’objet social de la
société (qui) était l’acquisition, l’administration et la gestion par location ou autrement
de tous immeubles et biens immobiliers
meublés et aménagés ». La Cour de cassation
prend le soin de relever « que l’acte avait un
rapport direct avec cet objet social » pour
approuver les juges du fond d’avoir dénié la
qualité d’acquéreur non professionnel à la
société acquéreur.
La circonstance que l’avant-contrat ait été
signé par un fondateur agissant pour le
compte de la société civile en formation
est implicitement une circonstance indifférente. De même, est a priori indifférente la
stipulation qu’il s’agit de biens meublés ou
aménagés.
Comme l’a observé Bertrand Gelot (Defrénois flash 2012, n° 45, p. 3. - Rappr. St. Colmant, préc.), la motivation de l’arrêt laisse
entendre a contrario que la solution ne serait
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