TRANSACTIONS IMMOBILIERES Acquéreurs successifs d`un même

Transcription

TRANSACTIONS IMMOBILIERES Acquéreurs successifs d`un même
e-Bulletin Droit immobilier, n° 9, avril 2011
TRANSACTIONS IMMOBILIERES
Acquéreurs successifs d'un même bien, mauvaise foi et
publicité foncière
Même de mauvaise foi, l'acquéreur d'un immeuble qui publie la vente en premier
semble bien l'emporter sur l'acquéreur initial.
Deux arrêts rendus récemment par la Cour de cassation (Cass. 3e civ., 15 déc. 2010, n°0915.891, n°1483 D, Adam c/ Martineau et a. ; Cass. 3e civ., 12 janv. 2011, n°10-10.667, n°31 P
+ B, Espinasse c/ Kandel et a.) semblent confirmer la tendance selon laquelle la priorité est
donnée à l'acquéreur qui a publié l'acte de vente en premier, indépendamment de la date de
signature de chaque acte.
Dans ces deux affaires, l'inopposabilité des droits du premier acquéreur qui s'est abstenu de
procéder aux formalités de publication à temps ou de les mener à terme a été retenue, et ce,
malgré la mauvaise foi plus ou moins flagrante (selon l'espèce) du second acquéreur.
*******
A l'impossible, nul n'est tenu
La défaillance de la condition suspensive relative à l'obtention d'un permis de construire
stipulée dans une promesse de vente ne peut être imputée à l'acquéreur, même s'il s'est
abstenu de déposer une demande de permis, dès lors que sa démarche était vouée à
l'échec.
En principe, une condition suspensive doit être réputée réalisée chaque fois que son
bénéficiaire en a lui-même empêché l'accomplissement (C. civ. Art. 1178). La Cour de
cassation (Cass. 3e civ., 15 déc. 2010, n° 10-10.473, n° 1486 P + B, Delannoy c/ Huyghe)
relève cependant que la défaillance de la condition suspensive ne peut être imputée à
l'acquéreur qui n'avait pas déposé de demande de permis de construire, conformément aux
stipulations de la promesse de vente. Les règles d'urbanisme applicables ne permettant pas,
dès l'origine, la réalisation du projet, la demande de permis était vouée à l'échec et son dépôt
s'avérait inutile. L'acquéreur pouvait donc prétendre à la restitution de son dépôt de garantie.
Bien que la Cour ne vise aucun texte particulier à l'appui de sa décision, cette situation peut
être rapprochée de la notion juridique de condition impossible (C. civ. Art. 1172), laquelle est
nulle et rend nulle la convention qui en dépend. Pour être ainsi qualifiée et sanctionnée, la
condition ne doit avoir aucune chance de se réaliser, dès l'origine.
*******
BAUX COMMERCIAUX
Droit de repentir
L'exercice du droit de repentir peut être annulé, dès lors que le comportement du
bailleur est considéré comme fautif.
Dans une décision du 10 mars 2010, la Cour de cassation (Cass. 3e civ., 10 mars 2010, n° 0910.793) annule l'exercice par le bailleur de son droit de repentir, en retenant son
comportement fautif au regard de l'article 1134 du Code civil.
En l'espèce, le locataire, qui s'était vu refuser le renouvellement du bail, avait matérialisé sa
volonté de quitter les lieux par des actes positifs et se trouvait engagé dans un processus
irréversible de départ. Le bailleur, informé de cette situation, avait exercé son droit de repentir
avant le départ du locataire.
La Cour d'appel, suivie par la Cour de cassation, a retenu que les circonstances traduisaient la
volonté manifeste du bailleur de mettre en difficulté son locataire et que le but poursuivi était
de faire échec à tout risque de paiement d'une indemnité d'éviction.
******
Sous-location partielle et droit au renouvellement
En l'absence de stipulation contractuelle, la vérification matérielle de la divisibilité est
admise pour retenir le droit au renouvellement du sous-locataire.
Une affaire récente donne l'occasion à la Cour de cassation (Cass. 3e civ., 19 janv. 2011, n°
09-72.040 10-10.059) de rappeler la règle selon laquelle à l'expiration du bail, le bailleur est
tenu au renouvellement si les locaux loués à titre principal forment un tout divisible
"matériellement ou dans la commune intention des parties" avec la partie sous-louée des
locaux.
Dans cet arrêt, la Cour de cassation a reproché aux juges du second degré de s'être fondés sur
les seules stipulations du bail, qui ne précisaient pas que les locaux loués formaient un tout
indivisible, sans rechercher si ces locaux étaient ou non matériellement divisibles.
*******
CONSTRUCTION
Accessibilité aux personnes handicapées et responsabilité
des constructeurs
Les constructeurs n'engagent leur responsabilité décennale pour non-conformité de
l'ouvrage aux règles d'accessibilité que si les normes en question étaient en vigueur au
moment de la conception et de la réalisation des travaux.
Une affaire récente donne au Conseil d'Etat l'occasion de se prononcer sur la responsabilité
des constructeurs en cas de non-respect de la réglementation en matière d'accessibilité aux
personnes handicapées. Le défaut de respect des normes d'accessibilité pouvant entraîner une
impropriété à destination, l'arrêt rendu par le Conseil d'Etat (CE, 19 janv. 2011, n°322638,
Commune de Geugnon) précise les conditions d'engagement de la responsabilité des
constructeurs lorsque la réglementation sur l'accessibilité évolue.
Le Conseil d'Etat considère que si de nouvelles normes interviennent après l'achèvement de la
construction, les constructeurs ne peuvent voir leur responsabilité décennale engagée au titre
d'une impropriété à destination, et ce même si les travaux n'ont pas encore été réceptionnés
par le maître de l'ouvrage. Les constructeurs ne sont donc tenus qu'au respect de la seule
réglementation en vigueur au moment de leur intervention.
*******
Rôle et présence du maître d'œuvre lors de la réception de
l'ouvrage
Le maître d'œuvre manque à son devoir de conseil en omettant d'attirer l'attention du
maître d'ouvrage sur des désordres invisibles au jour de la réception, mais dont il a eu
connaissance au cours du chantier.
Dans une décision récente, le Conseil d'Etat (CE, 28 janv. 2011, n° 330693, Sté Cabinet
d'études Marc Merlin et a.) rappelle que le maître d'œuvre engage sa responsabilité à l'égard
du maître de l'ouvrage s'il décèle un vice pendant les opérations de construction sans pour
autant inviter celui-ci à refuser la réception ou à l'assortir de réserves. Le caractère apparent
du désordre n'est donc pas circonscrit au jour de l'opération de réception ; il recouvre
l'ensemble des dommages que le maître d'œuvre est tenu de déceler en tant que professionnel
tout au long de l'opération de construction, et qu'il doit signaler au maître de l'ouvrage avant
que celui-ci ne réceptionne l'ouvrage.
A noter également que la présence de l'entrepreneur lors de la réception suffit à rendre cette
dernière contradictoire (Cass. 3e civ., 12 janv. 2011, n° 09-70.262, n° 40 FS-P+B).
******
URBANISME
Annulation partielle d'un permis de construire
Un permis de construire peut faire l'objet d'une annulation partielle pour
méconnaissance des obligations imposées en matière d'aires de stationnement par le
document d'urbanisme applicable.
Dans une décision récente, le Conseil d'Etat (CE, 23 fév. 2011, SNC Hôtel de la Bretonnerie,
n°325179) a considéré que l'illégalité tenant à la méconnaissance du "Plan de sauvegarde et
de mise en valeur du Marais" pouvait être corrigée et qu'elle était susceptible de conduire à
une annulation seulement partielle du permis de construire en application de l'article L. 600-5
du Code de l'urbanisme.
Sur le fondement de cet article, une autorisation de construire peut faire l'objet d'une
annulation partielle, dès lors que l'illégalité de la décision n'affecte pas un élément essentiel
du projet et qu'elle est susceptible d'être régularisée.
Cette régularisation, par la voie d'un permis de construire modificatif, ne peut avoir lieu qu'à
la demande du bénéficiaire de l'autorisation (C. urb., Art. L. 600-5, al. 2).
*******
Urbanisme commercial et compétence du juge
Le tribunal administratif compétent pour connaître d'un litige en matière
d'aménagement commercial est celui du lieu d'implantation du projet.
Depuis l'entrée en vigueur du nouvel article R. 311-1 du Code de justice administrative le 1er
avril 2010, le tribunal administratif de Paris semblait seul compétent compte tenu de
l'obligation d'exercer, préalablement à tout recours contentieux, un recours devant la
Commission Nationale d'Aménagement Commercial, dont le siège est à Paris.
En se fondant sur les dispositions de l'article R. 312-10 du Code de justice administrative, le
Conseil d'Etat (CE, 4 nov. 2010, n° 343904) a considéré que le tribunal administratif
compétent pour connaître d'un litige en matière d'aménagement commercial est celui du lieu
d'implantation du projet.
Cette décision permet non seulement de préciser la règle de compétence du juge, mais aussi
de soulager le tribunal administratif de Paris, menacé d'engorgement par le très important
contentieux de l'aménagement commercial.
*******
FISCALITE
Publication de l'instruction sur la TVA immobilière
L'administration a publié l'instruction présentant les nouvelles règles applicables en
matière de TVA immobilière.
L'instruction du 29 décembre 2010 (BOI 3 A-9-10) présente les nouvelles règles applicables
en matière de TVA immobilière à certaines opérations portant sur des immeubles, telles
qu'elles ont été redéfinies par la loi de finances rectificative pour 2010, entrée en vigueur le 11
mars 2010.
L'instruction du 29 décembre 2010 présente l'ensemble du dispositif en matière de TVA
concernant les livraisons de biens (cessions de terrains à bâtir, cessions d'immeubles, etc.) et
autres opérations soumises à la TVA (livraisons à soi-même d'immeubles et de travaux, baux
à construction, échanges, dations en paiement, etc.).
******
Participation
stationnement
pour
non-réalisation
d'aires
de
Le plafond de la participation pour non-réalisation d'aires de stationnement a été
revalorisé, pour la période du 1er novembre 2010 au 31 octobre 2011, avant de
disparaître prochainement.
Pour la période du 1er novembre 2010 au 31 octobre 2011, le plafond de la participation pour
non-réalisation d'aires de stationnement a été revalorisé en fonction du dernier indice connu
du coût de la construction. Le plafond de cette participation varie selon que la commune a pris
une délibération sur le sujet après le 16 décembre 2000 (plafond porté à 16.415,10 €), ou non
(plafond porté à 13.651,96 euros).
Cette revalorisation intervient dans un contexte de disparition programmée de cette
participation pour non-réalisation d'aires de stationnement. En effet, dans un souci de
simplification, l'article 28 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances
rectificative pour 2010 a réformé le régime des taxes et participations d'urbanisme exigibles
lors de la délivrance d'autorisations de construire ou d'aménager, en créant une nouvelle taxe
d'aménagement. Celle-ci se présente comme une taxe de synthèse, dont l'objet est tant le
financement de l'aménagement urbain que celui de la protection des espaces naturels
sensibles.
Cette réforme entrera en vigueur le 1er mars 2012 pour les autorisations de construire et
d'aménager délivrées à compter de cette date.
*
*
*