La fiscalité de la désignation bénéficiaire

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La fiscalité de la désignation bénéficiaire
ACTUASSURANCE – LA REVUE NUMERIQUE EN DROIT DES ASSURANCES
Publication n° 33 NOV - DEC 2013
La fiscalité de la désignation bénéficiaire démembrée
Jean-Jacques Branche
Chargé d’Enseignement à l’Université Jean Moulin Lyon 3
Chargé d’Enseignement auprès de l’Ecole Polytechnique d’Assurances
Auteur de « L’approche patrimoniale de l’assurance-vie ». IS-Editions
Une clause bénéficiaire prévoyant le démembrement du capital décès peut avoir de multiples
facettes selon l’objectif du souscripteur :
1. entre le conjoint pour l’usufruit et les enfants pour la nue propriété : (le conjoint sera ainsi
protégé sans porter préjudice aux enfants),
2. entre les enfants en usufruit et les petits-enfants nu propriétaires : (une transmission sera
ainsi organisée sur deux générations),
3. entre un enfant incapable usufruitier et ses frères et sœurs pour la nue propriété
4. entre le second conjoint ou le concubin désigné usufruitier et les enfants d’un premier
mariage nu-propriétaires etc …
Mais encore faut–il dans toutes ces hypothèses, s’entourer de toutes les précautions
nécessaires par qu’une clause soit correctement écrite et conforme au but recherché.
Les avantages tirés du démembrement de la clause bénéficiaire sont principalement de deux
ordres : la protection du niveau de vie de la personne désignée comme usufruitier qui peut
utiliser le capital décès pour se procurer des revenus complémentaires et la transmission aux
bénéficiaires nu-propriétaires en franchise de droit au décès de l’usufruitier (article 1133 du
CGI). En effet, ceux-ci deviennent créanciers de l’usufruitier dans le cadre d’un quasi-usufruit
et récupèreront le montant du capital au décès de ce dernier, ou plein propriétaire du bien
démembré s’il avait été prévu un remploi.
Regardons de plus près ce qui se passe lors du dénouement du contrat par décès à propos
de l’exécution d’une clause bénéficiaire démembrée sans obligation de remploi ou clauses
particulières.
Pour les contrats libellés en unités de compte ce versement s’effectue, à la demande des
bénéficiaires, soit en espèces, soit par la remise des titres servant de références à la valeur
du contrat (article L 131-1 du Code des assurances).
C’est au bénéficiaire de faire connaître son choix à l’assureur qui ne peut s’y opposer (même
si cette possibilité n’est pas prévue aux conditions générales). En effet, nous pensons que le
souscripteur ne peut conventionnellement imposer au bénéficiaire la modalité du
versement : espèces ou titres. Cette option faisant partie des dispositions d’ordre public du
code des assurances est à l’initiative des seuls bénéficiaires.
Dans l’hypothèse où la clause bénéficiaire est démembrée, l’assureur est en présence de
deux catégories de bénéficiaires (usufruitier et nu propriétaires). La décision de l’option
numéraire ou remise de titres ne sera pas sans incidence sur la qualification du
démembrement.
En effet, si ce sont des espèces qui sont versées, il s’agira alors d’un quasi usufruit
conformément à l’article 587 du code civil.
Lors du décès de l’assuré, l’usufruitier reçoit une somme d’argent dont il pourra disposer
librement à seule charge pour lui de restituer en fin d’usufruit, c’est à dire à son décès
lorsque l’usufruit est viager, un capital équivalent au nu propriétaire (principe du
nominalisme monétaire). Ainsi, ce dernier se retrouvera titulaire d’une créance exigible au
décès de l’usufruitier.
Toutefois qu’est-ce qu’un quasi-usufruit si les bénéficiaires en nue-propriété peuvent
demander à l’usufruitier de fournir caution (article 601 du code civil). Si l’usufruitier ne
trouve pas de caution, les sommes comprises dans l’usufruit sont placées (Article 602 du
code civil). Ces dispositions n’étant pas d’ordre public l’usufruitier peut en être dispensé par
le souscripteur dans la clause bénéficiaire si ce dernier souhaite donner le maximum de
liberté à l’usufruitier
Dans l’hypothèse d’un versement en titres, il s’agit alors d’un usufruit portant sur un
portefeuille de valeurs mobilières. L’assureur transfèrera les titres sur un compte titre
« démembré » ouvert conjointement par l’usufruitier et le nu-propriétaire. Les titres n’étant
pas consomptibles au premier usage, cet usufruit de valeurs mobilières n’est pas un quasiusufruitier. L’usufruitier dispose néanmoins de pouvoirs étendus. Selon la jurisprudence (C.
Cass. 1e civ. 12.11.98 arrêt Baylet), le portefeuille de valeurs mobilières constitue une
universalité de biens, ce qui conduit l’usufruitier en cas de démembrement à pouvoir
disposer des titres, sous réserve de les remplacer par d’autres valeurs mobilières. A la
différence du quasi-usufruitier, l’usufruitier de portefeuille titres ne peut ni consommer le
produit de la cession, ni le réinvestir en dehors du portefeuille titre. De plus, l’usufruitier a
l’obligation de conserver la substance du bien sur lequel porte son usufruit, le nupropriétaire peut donc contester les choix de réinvestissement opérés par l’usufruitier. La
rédaction d’une convention entre usufruitier et nu-propriétaire nous paraît indispensable
pour déterminer le profil de gestion que l’usufruitier devra respecter, fixer éventuellement
un seuil au-delà duquel le nu-propriétaire devra donner un accord, préciser les modalités
d’information du nu-propriétaire, prévoir qu’en cas de cession des titres déclenchant un
impôt sur la plus value , le prix de cession sera réparti entre nu-propriétaire et usufruitier ou
l’usufruitier seul s’acquittera de cet impôt.
Le choix de « l’option titres ou espèces » est donc loin d’avoir une faible incidence.
Actuellement le versement du capital est très largement effectué en espèces. Nous pensons
que l’option paiement par remise de titres devrait être réalisée à la demande conjointe des
bénéficiaires en leur préconisant de rédiger une convention déterminant leurs droits et
obligations respectifs.
Cette rédaction particulière de clause bénéficiaire peut être effectuée avec son conseiller puis
rédigée en la forme testamentaire en confiant au notaire en charge de la succession le soin du
suivi de l’emploi du capital (lorsqu’il est prévu). Cet acte notarié permettra également de
sécuriser l’opération et de lui donner date certaine.
Enfin, il serait également plus prudent, en application de l’article 600 du code civil, qu’il soit
prévu de procéder, au moment du règlement du capital décès, à un inventaire notarié afin que
l’usufruitier puisse entrer en jouissance des biens soumis à usufruit et conférer un titre
exécutoire au nu-propriétaire.
Au vu des dispositions de l’article 751 du code général des impôts, il est recommandé de
constater, dans un acte sous seing privé enregistré ou dans un acte notarié, dans les trois qui
suivront le versements des capitaux, la nature des droits qui leur reviennent en raison du
dénouement du contrat et des conditions prévues dans la désignation.
La présomption de propriété établie par l’article 751 du CGI est une présomption simple qui
peut efficacement être combattue par la démonstration de la sincérité de l’opération
emportant démembrement de propriété et notamment de la sincérité des donations
survenues moins de trois mois avant le décès.
La Cour de cassation dans un arrêt du 17 janvier 2012 n° 10-27185 rappelle ces principes
dans le cas d’un démembrement de propriété consécutif à une donation et apporte une
illustration de l’offre de preuve de la sincérité de la donation.
Cet acte aura un double intérêt : porter mémoire de la créance de restitution qui profite aux
nus-propriétaires et la rendre opposable à l’administration fiscale. En effet, fiscalement, sont
présumés faire partie de la succession de l’usufruitier, tous les biens appartenant pour
l’usufruit au défunt et pour la nue propriété à ses héritiers, à moins qu’il y ait eu donation
régulière et que cette donation ait été constatée plus de trois mois avant le décès de
l’usufruitier.
Le démembrement du capital décès est donc une belle illustration du principe selon lequel la
désignation bénéficiaire peut être un outil judicieux de transmission. Reste que les impacts
fiscaux liées aux conditions d’application de l’article 990 I du C.G.I. imposent une étude
particulière avant la mise en place d’une telle clause.
La fiscalité de la désignation bénéficiaire démembrée dans le cadre de l’article 757B du
CGI
L’article 757 B du CGI renvoyant aux droits de mutations par décès pour le calcul de la
taxation, le barème de l’article 669 du CGI s’impose pour le calcul des droits des bénéficiaires
sur les primes versées.
Exemple :
M. Zed verse 200 500 € sur un contrat d’assurance vie après ses 70 ans. Il est marié sous le
régime de la Communauté Universelle avec clause d’attribution intégrale et dispense de
récompense.
Il désigne son épouse bénéficiaire en usufruit et ses deux neveux pour la nue-propriété. Les
capitaux dus au décès s’élèvent à 300 500 €. Madame a 65 ans au jour du décès.
Quels seront les droits à payer ?
Par Madame :
Valeur de l’usufruit : 4/10ème
Assiette imposable : 4/10 x 200 500 = 80 200 €.
Le conjoint n’a pas de droits à payer et ne consomme pas sa part d’abattement de 30 500€ (loi
Tepa, instruction fiscale 7G-7-07 du 3/12/07).
Droits à payer : 0 €
Par les neveux :
Valeur de la nue-propriété : 6/10ème
Assiette imposable : (6/10 x 200 500) / 2 = 60 150 €
Chaque neveu peut impacter sa part d’abattement :
30 500 / 2 = 15 250 €
Abattement de 7 967 €
Droits à payer : (60 150- 15 250 – 7967) * 55% = 20 313 € par neveu.
Le cas particulier d’une stipulation d’usufruit successif dans le cadre de l’article 757B
du CGI.
Monsieur âgé de 72 ans a deux enfants dont l’un est handicapé. Il est marié sous le régime
de la Communauté Universelle. Il a souscrit un contrat d’assurance vie pour un montant de
300.000€.
Les bénéficiaires sont :
- le conjoint survivant âgé de 73 ans puis son fils handicapé de 39 ans dans le cadre d un
usufruit successif
- la fille valide de 42 ans pour la nue-propriété
Monsieur décède quelques temps après. La valeur de rachat du contrat au jour du décès n’est
pas inférieure aux primes versées.
Six ans plus tard le conjoint usufruitier décède.
Il n ’y pas eu de donation effectuée au profit des enfants ces dix dernières années.
Quels seront, s’ils existent, les droits à payer pour chacun des bénéficiaires ?
Notons tout d’abord qu’il sera fait application de l’article 757 B du C.G.I. pour le calcul des
droits de mutations dus par les bénéficiaires.
Pour la détermination de la valeur fiscale des droits des bénéficiaires il convient de faire
application:
- d’une part de l’article 676 du C.G.I relatif aux mutations affectées d ’une condition
suspensive
- d’autre part de l’article 669 du C.G.I. pour la détermination de la valeur des droits
démembrés.
La position de l’administration fiscale (BOI-ENR-DG-70-40-20120912) :
L'usufruit peut être constitué au profit de plusieurs personnes, appelées à en jouir
successivement,
Chacun des héritiers tenant son droit du constituant et non du précédent propriétaire. Au décès
du constituant, les droits de mutation par décès sont dus par le premier usufruitier et par le nupropriétaire, la valeur de l'usufruit et de la nue-propriété étant déterminée, conformément à
l'article 669 du CGI d'après l'âge du premier usufruitier.
Au décès de celui-ci, le second titulaire de l'usufruit doit acquitter, dans les six mois de ce
décès, les droits de mutation par décès exigibles d'après son degré de parenté avec le testateur.
L'impôt est établi sur la valeur fiscale de l'usufruit déterminée d'après la valeur des biens et en
fonction de l'âge du nouveau bénéficiaire au jour du décès du premier usufruitier ; il est
liquidé au tarif et compte tenu des abattements applicables à cette date.
Conformément aux dispositions de l'article 1965 B du CGI, lorsque ce second usufruit s'ouvre
au profit d'un bénéficiaire plus jeune que le premier, le nu-propriétaire a droit à la restitution
d'une somme égale à ce qu'il aurait payé en moins si le droit acquitté par lui avait été calculé
d'après l'âge du nouvel usufruitier au jour du décès du testateur qui a constitué des usufruits
successifs.
Remarque : Lorsque le second usufruitier est plus âgé que le premier, il n'y a pas lieu de
réclamer un supplément de droit au nu-propriétaire
Le même droit est ouvert également au nu-propriétaire en cas d'accroissement d'un usufruit
conjoint au profit d'un usufruitier plus jeune que son colégataire prédécédé.
Remarque : Le legs d'usufruit conjoint avec clause d'accroissement au profit du survivant des
colégataires confère à ceux-ci un droit actuel qui rend l'impôt immédiatement exigible sur la
totalité de l'usufruit en tenant compte de l'âge de chacun des usufruitiers. Au moment de
l'accroissement, le bénéficiaire doit acquitter un supplément de droit si, au décès du testateur,
il était plus jeune que l'usufruitier décédé ou s'il était parent du testateur à un degré plus
éloigné.
Calcul des droits :
Lors du dénouement du contrat les droits seront calculés sur les bases suivantes :
- Pour l’usufruit :
300 000€ * 3/10 = 90 000 €
- Pour la nue-propriété :
300 000 € * 7/10 - 30 500 € = 179 500 €
Si l’usufruitier décède 6 ans plus tard, il faut recalculer les bases des droits :
- Pour l’usufruit au profit du fils (45ans) :
300 000 € * 5/10 - 30 500 € *5/10 = 134 750 €
L'administration considère que l'usufruitier successif recueille ce droit à titre gratuit du
testateur et le taxe en conséquence.
- Pour la nue-propriété :
300 000 € * 5/10 - 30 500 € * 5/10 = 134 750 €
Le nu-propriétaire aura droit à restitution du montant des droits payés sur la base de:
179 500 € - 134 750 € = 44 750 €
La fiscalité de la désignation bénéficiaire démembrée dans le cadre de l’article 990 I du
CGI
L’article 11 de la première loi de finances rectificative pour 2011 (n° 2011-900 du 29 juillet
2011) a modifié le I de l'article 990 I du code général des impôts.
Il y est ajouté l’alinéa ainsi rédigé :
« En cas de démembrement de la clause bénéficiaire, le nu-propriétaire et l'usufruitier sont
considérés, pour l'application du présent article, comme bénéficiaires au prorata de la part leur
revenant dans les sommes, rentes ou valeurs versées par l'organisme d'assurance, déterminée
selon le barème prévu à l'article 669.
L'abattement prévu au premier alinéa du présent article est réparti entre les personnes
concernées dans les mêmes proportions.»
La mesure concerne les clauses bénéficiaires démembrées pour les contrats soumis à l'article
990 I du CGI.
Jusqu’à cette date, la doctrine fiscale disposait que seul le bénéficiaire en usufruit (le plus
souvent le conjoint de l’assuré) était redevable du prélèvement et bénéficiait de l’abattement.
Compte tenu de l’exonération du conjoint/partenaire PACS du prélèvement de 20% depuis la
loi TEPA de 2007, une clause désignant « mon conjoint pour l’usufruit, mes enfants pour la
nue-propriété » revenait à exonérer totalement le capital décès. (Réponses ministérielles
Perruchot et Chatel)
La modification introduite par la LFR de 2011 modifie à la fois la règle de taxation et celle
d’imputation de l’abattement.
Le texte relatif à la taxation des capitaux décès démembré ( Instruction du 7 mars 2012 7G-212) indique que l’assiette de taxation 20% ou 25% des droits revenant à l’usufruitier et au nu
propriétaire est définie par référence au barème de l’article 669 du CGI qui valorise les droits
en US/NP pour la liquidation des droits d’enregistrement (par exemple entre 61 ans révolus et
71 ans l’usufruit et valorisé à 40% de la pleine propriété et la nue propriété à 60 %).
Le texte relatif à l’abattement de 152 500 euros a soulevé certaines interprétations
divergentes. Le texte dispose que l’abattement est réparti entre le nu-propriétaire et
l’usufruitier également par référence à l’article 669 du CGI. En présence d’un seul
bénéficiaire en usufruit non exonéré du prélèvement et d’un seul nu-propriétaire, l’application
ne soulève de difficulté.
Il résulte de l’instruction fiscale l’instruction fiscale 7-G-2-12 du 20 mars 2012
« qu’il convient d’appliquer autant d’abattements qu’il y a de couples « usufruitier/nupropriétaire ».
En présence d’une pluralité de nus-propriétaires, chaque nu-propriétaire partage un
abattement avec l’usufruitier en fonction des droits revenant à chacun en application du
barème prévu à l’article 669 précité. Dans cette situation, l’usufruitier ne peut toutefois
bénéficier au total que d’un abattement maximum de 152 500 € sur l’ensemble des capitaux
décès reçus à raison de contrats d’assurance-vie du chef du décès d’un même assuré.
Lorsque l’un des bénéficiaires mentionnés au contrat est exonéré (par exemple, conjoint
survivant ou partenaire lié au défunt par un PACS), la fraction d’abattement non utilisée par le
bénéficiaire exonéré ne bénéficie pas aux autres bénéficiaires désignés au contrat
Par ailleurs, il est précisé que si l’usufruitier ou le nu-propriétaire sont également bénéficiaires
d’autres contrats d’assurance-vie souscrits par le même assuré, ils ne pourront bénéficier
chacun que d’un abattement maximum de 152 500 € sur l’ensemble des capitaux décès,
incluant leur quote-part de l’abattement réparti selon le barème de l’article 669. »
Par exemple pour un capital décès de 152 500 €, une clause « ma sœur pour l’usufruit et son
fils pour la NP » avec à la date du décès un usufruitier âgé de 62 ans, la répartition serait la
suivante:
-Abattement de 152 500 € à répartir pour 40% soit 61 000€ pour l’usufruitier et 60% soit
91 500€ euros pour le nu-propriétaire ;
- L’assiette des droits, 40% pour l’usufruitier et 60% pour le nu-propriétaire, est identique à
l’abattement d’où pas de droits.
Prenons un autre exemple :
Mr X âgé de 62 ans souscrit un contrat de 800 000€
Bénéficiaires : pour l’usufruit son conjoint et pour la nue-propriété ses deux enfants par parts
égales.
Au jour du décès de Mr X la valeur de rachat du contrat est de
1 000 000€ et Mme X usufruitière est âgée de 72 ans.
Quelle sera la taxation au titre de l’assurance vie ?
Répartition de l’assiette du prélèvement (Art. 669 du CGI)
Usufruit : 300 000 € (1 000 000€ * 30%)
Nue propriété enfant 1 : 350 000€ [(1 000 000/2)*70%]
Nue propriété enfant 2 : 350 000€ [(1 000 000/2)*70%]
Abattement (Art. 669 du CGI)
Usufruit : (152 500€ * 30%) * 2 = 91 500€
Nue propriété enfant 1 : 152 000€ * 70% = 106 750€
Nue propriété enfant 2 : 152 000€ * 70% = 106 750€$
Droits dus :
Conjoint usufruitière : néant car Loi TEPA
Enfant 1 : (350 000€ - 106 750 €) * 20% = 48 650€
Enfant 2 : (350 000€ - 106 750 €) * 20% = 48 650€
Conclusion : dans ce cas de figure il a été impossible pour les enfants d’appliquer la totalité
de leur abattement individuel.
On voit bien dans ce cas l’incohérence entre la règle de base de l’article 990I (abattement
individuel de 152 000€) et les conséquences du 2ème alinéa de la modification apporté par la
LFR pour 2011 qui empêchent le bénéficiaire d’utiliser la totalité de cet abattement.
Nous proposons si le contexte patrimonial et les objectifs du client s’y prêtent, une
formulation de la désignation bénéficiaire adaptée de la façon suivante :
« Si mon conjoint est en vie au jour de mon décès, et si l’un au moins de mes enfants est
vivant ou représenté :
Au profit de chacun de mes enfants, vivant ou représenté, une somme en pleine propriété
égale à :
•45.750 € (si mon conjoint a entre 71 et 80 ans au jour de mon décès),
•30.500 € (si mon conjoint a entre 81 et 90 ans au jour de mon décès
•15.250 € (si mon conjoint a plus de 91 ans au jour de mon décès)
Et la nue-propriété des capitaux restant dans la limite de 152 500€. (ou sans limite selon
l’objectif du souscripteur)
Au profit de mon conjoint : l’usufruit des sommes versées en nue-propriété au profit de mes
enfants et, s’il reste des capitaux disponibles, la pleine propriété de ceux-ci. Mon conjoint
disposera sur les sommes démembrées d’un quasi-usufruit (à compléter bien entendu). »
Au jour du décès, l'usufruitier est âgé de soixante-deux ans et la valeur de rachat est de 400
000€.
Répartition des droits des bénéficiaires :
Compte tenu de l’âge de l’usufruitier l’abattement maximum pour l’enfant est de :
60%*152 500€ soit 91 500€.
Il reste donc 152 500€ - 91 500€ soit 61 000€ disponible en pleine propriété pour l’enfant.
La ventilation des capitaux décès sera donc :
En démembrement enfant et conjoint : 152 500 €
En pleine propriété pour l’enfant : 61 000€
En pleine propriété pour le conjoint : 186 500€
Selon l’âge de l’usufruitier au décès de l’assuré les parts reçues en pleine propriété changeront
pour atteindre au minimum 15 250€ (cas d’usufruitier de 91 ans révolus).
Le cas particulier d’une clause bénéficiaire avec stipulation d’usufruit successif dans le
cadre de l’article 990I du CGI (proposition de traitement fiscal)
L'instruction fiscale 7-G-2-12 du 20 mars 2012 ne traite pas expressément de cet aspect mais
uniquement du démembrement entre un usufruitier et un ou plusieurs nu-propriétaires. Par
ailleurs, les obligations déclaratives des assureurs (CGI, art. 990 I) sont précisées à l'article
806-IV du Code général des impôts; Dès lors que la compagnie s'est libérée de ses obligations
et que les bénéficiaires ont reçu les capitaux nets de prélèvement fiscal, il semble que lors du
décès du premier usufruitier si l'usufruitier successif est en vie, le droit d'usufruit passera au
second sans qu'aucune fiscalité puisse s'appliquer à ce jour faute de texte référent.
Cela n'est certes pas à l'avantage du nu-propriétaire puisque la nue-propriété aura été
surévaluée au jour du paiement des capitaux (usufruitier successif en principe plus jeune que
le premier désigné) mais en général ce type de clause est réservé à un cas bien particulier :
l'existence d'un enfant handicapé et d'un ou plusieurs enfants valides dans une famille.
Le souscripteur jouit donc d’une grande liberté dans la rédaction de la clause bénéficiaire. Il
ne peut cependant exposer les bénéficiaires à des conséquences fiscales ou civiles qu’il
n’aurait pas prévues ou même imaginer par une clause contraire aux principes posés par le
code des assurances et au fondement de la stipulation pour autrui. Il est donc essentiel que le
souscripteur soit assisté par son conseiller dans la rédaction de la clause bénéficiaire afin de
veiller à ce que celle-ci soit conforme à sa volonté.