Édito - Cuisiniers de France

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Édito - Cuisiniers de France
Chers sociétaires,
chers lecteurs,
chers amis,
Selon les visions de la vénérable Maria de Agreda, la Vierge
Marie avait 14 ans lors de l’Annonciation. Espérons que,
malgré un fâcheux antécédent au siècle dernier, ce chiffre 14
nous permette de bénéficier d’un tel miracle ou, à défaut,
d’un petit coup de pouce de notre économie pour cette
année 2014.
Édito
Nous n’en avons jamais eu autant besoin alors que,
paradoxalement, notre métier bénéficie d’une médiatisation
sans précédent. Starification de quelques-uns est fruit d’un
« chaud business » qui masque aux yeux de beaucoup de
Français la réalité vécue par la majorité d’entre nous.
Est-il utile de le rappeler ? Notre beau métier se fait
essentiellement à l’écart des plateaux de télévision, générant
des emplois, conjuguant esprit d’entreprise et démarche
artisanale – qui pérennise un savoir-faire et sa transmission –,
avec le souci de faire-valoir nos plus beaux produits.
Pas si simple dans ce contexte ! D’autant que les
« taxocologues » de Bercy – toujours versés dans l’étude
scientifique du poison des taxes et de leurs effets indésirables
sur l’entrepreneuriat, alors que le seuil de tolérance est
largement dépassé ! – nous ont offert, en guise d’étrennes, une
TVA passant de 7 à 10%. Ce qui mérite une parenthèse, cette
hausse ayant été incomprise par un commentateur s’étonnant
de notre mécontentement puisque « nous ne payons pas la
TVA ! » Aussi, si vous le croisez, rappelez-lui gentiment que ce
n’est pas le Saint-Esprit qui la paye, mais le client, et insistez
bien sur le fait que cela augmente son addition !
Mais tournons-nous plutôt vers l’avenir, en vous souhaitant une
bonne et heureuse année, santé et pourquoi pas… prospérité !
Pour mieux croire en cette perspective « d’état d’abondance »,
rien de tel que la lecture de votre Revue culinaire, consacrée,
comme toujours, aux talents d’âmes fortes.
Emmanuel Renaut, triple étoilé mais aussi grand entrepreneur
qui ne s’endort pas sur ses lauriers. La belle Rougui Dia au port
de gazelle qui a bondi à travers tous les obstacles pour vivre
sa passion. Christophe Adam, au succès certes « Éclair » mais
fruit d’un long et brillant parcours. Mathieu Pacaud, digne fils
de son père. Philippe Batton, roi du bistro au Japon, tandis
que Dominique Bouchet se voit couronné de deux étoiles à
Tokyo.
Bonne année, santé, bonheur, réussite ! Et haut les cœurs !
Votre bien dévoué,
Christian Millet
1
2
sommaire n°887
janvier - février 2014
EN COUVERTURE
4
Emmanuel Renaut
TENDANCE
22
4
Rougui Dia
PÂTISSIER
34
Christophe Adam
REGARD
48
22
Mathieu Pacaud
HORS DE FRANCE
54
Philippe Batton
58
Dominique Bouchet
CONCOURS
34
60
Prix Antonin-Carême 2013
62
Trophée Jean-Delaveyne
64
VIE DE LA SOCIÉTÈ
66
PROSPER MONTAGNÉ
ŒNOLOGIE
48
68
Millésime 2013
SOMMELERIE
68
Les Corbières
76
LIVRES EXPRESS
54
58
En couverture, Emmanuel Renaut
Sylvain Monjanel © 2013
3
4
EN COUVERTURE
Megève, Flocons de sel
Emmanuel Renaut :
« Une cuisine expressive, hors du temps »
Il aura été le chef le plus présidentiable de l’année écoulée, président du
jury France du Bocuse d’or 2013 remporté - le hasard faisant bien les
choses ! - par Thibaut Ruggieri dont le grand-père était facteur à Megève !
Puis président du Prix Taittinger remporté par Bertrand Millar, manifestation
prestigieuse, mais aussi affaire de cœur pour s’y être brillamment illustré
en 1996 sous les couleurs de l’Angleterre, alors chef du Claridge’s. Après
que Christian Constant lui a transmis la passion de l’excellence, été chef de
Marc Veyrat en passant par Yves Thuriès, Emmanuel Renaut s’est installé
à Megève en son Flocons de Sel pour y atteindre le sommet de son art en
2012, triplement étoilé. Retour sur l’ascension de ce premier de cordée.
E
mmanuel a toujours aimé la montagne et ses
lacs. D’ailleurs, il est né près d’un lac, celui
d’Enghien-les-Bains, le 26 janvier 1968, avant
de partager sa tendre enfance avec son frère aîné
Jean-Christophe, auprès de Jean-Pierre et Bernadette
qui tiennent La Poissonnerie moderne. Dur métier s’il
en fut qui n’empêche pas cette dernière d’être un
excellent cordon-bleu. Talent maternelle qui passe
totalement inaperçu aux yeux et plus encore au
palais d’Emmanuel qui s’ennuie ferme aux agapes
dominicales, pressé d’aller courir les bois. Quand, à
neuf ans, adieu l’Oise et la forêt de Montmorency !
La famille s’installe dans la ferme maternelle de
Coucy-les-Eppes dans l’Aisne et y ouvre un gîte. Ce
qui n’incite toujours pas Emmanuel à prêter mainforte en cuisine :
« Mes souvenirs les plus marquants se référant
à la nourriture étaient nos étapes obligées au
Greuze**, chez Jean Ducloux, à Tournus, lorsque
nous allions aux sports d’hiver aux Houches. »
Station chamoniarde où il conquiert une, deux, puis
trois étoiles… passion des planches qu’il partage
bientôt avec celle de la moto trial. En revanche,
au lycée, il n’est pas sur la bonne pente ! Ce
qui l’incite à emboîter le pas de son frère qui se
destine à la sommellerie. Les deux feront la paire.
Du « boire » au « manger », il n’y a d’ailleurs qu’un
pas qu’Emmanuel franchit allégrement en passant
la porte du CFA de Laon. Là même où les coups de
pied aux fesses de l’excellent professeur Desmoulins
4 ans et déjà un beau pull-over de montagne !
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lui garantiront d’obtenir son CAP cuisine. Tandis qu’il
entre en apprentissage au Fimotel, chaîne d’hôtel
de gamme moyenne où le travail honnête du chef
préférant le couteau à l’ouvre-boîte ne passionne
pas pour autant son apprenti.
Christian Constant
De fait, la seule chose qui l’intéresse, c’est
d’économiser pour s‘acheter une moto de trial dernier
modèle s’illustrant bientôt dans les compétitions
parmi les dix meilleurs coureurs de sa région.
Gloire méritée, fruit de ses heures de coupure
exclusivement consacrées à l’entraînement. Lorsque,
CAP en poche, amoureux des cimes, il s’acquitte de
son service militaire, incorporé à Chambéry au 13e
bataillon des chasseurs alpins. Libéré, que faire si
ce n’est de nouveau suivre le conseil avisé de son
frère, alors sommelier chez Jamin***, qui l’incite à
le rejoindre à Paris pour apprendre son métier de
cuisinier dans de plus hautes sphères. C’est ainsi
qu’il entre commis à l’hôtel Lotti. Mais toujours pas
de feu sacré ! Quand, chemin faisant, il entre à
l’hôtel Crillon et demande, au culot, s’il n’y aurait
pas un poste pour lui. Ce qui va bouleverser sa
vie ! Car c’est ainsi qu’il remplace au pied levé un
commis dans la brigade de Christian Constant aux
Ambassadeurs** alors entouré d’Yves Camdeborde,
Éric Fréchon et Thierry Faucher, Jean-François
Rouquette et, en pâtisserie, Christophe Felder, Gilles
Marchal, Laurent Jeannin… Le voilà sur la route de
la félicité, désormais convaincu d’avoir trouvé sa
vocation :
« Maintenant que j’avais découvert ce qu’était
la grande cuisine, j’étais hyper motivé. Prêt à
apprendre, tout en sachant que cela passerait par
beaucoup de contraintes. »
Un jeune commis très prometteur.
Marc Veyrat
Mais la vie parisienne le lasse, préférant l’air pur
des montagnes. C’est ainsi qu’il se présente chez
Marc Veyrat, doublement étoilé dans son Auberge
de l’Éridan. Entré commis, il gravit doucement mais
sûrement les échelons jusqu’à devenir troisième
second. Trois ans se sont écoulés quand Emmanuel
ressent de nouveau le besoin impératif de changer
d’air et qu’il intègre la brigade de Gérard Praud au
Grand Écuyer à Cordes-sur-Ciel :
« J’avais trois références : Marc Veyrat, Joël
Robuchon et Yves Thuriés. Ces derniers tous deux
compagnons et Meilleurs Ouvriers de France,
c’est lors de mon passage au Grand Écuyer que,
parrainé par Gérard Praud, je suis entré dans le
compagnonnage. »
Nous sommes en 1993 quand Marc Veyrat est en
passe de transférer son Auberge de l’Éridan de
plain-pied sur les rives du lac d’Annecy, nouvelle
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Avec son ami de toujours, Edouard Loubet.
EN COUVERTURE
Kyoto, au temple d’or avec Régis Marcon, M. Paul,
Marc Veyrat et Emmanuel et son béret.
enseigne à laquelle il confère un confort et un lustre
qui affichent sa détermination de décrocher sa
troisième étoile. L’homme ayant plus d’un tour dans
son chapeau, il propose alors à Emmanuel la place
de chef assorti d’un contrat moral à la clé : rester à
ses côtés tant qu’ils n’auront pas obtenu les lauriers
suprêmes.
Ce vœu réalisé en 1995, Emanuel quitte Marc
Veyrat l’année suivante.
« J’ai passé sept ans à l’Auberge de l’Éridan,
profitant au maximum de cette très belle région
à la moindre période d’accalmie. J’ai découvert
chez Marc Veyrat une
cuisine
personnelle,
celle
d’un
homme
génial, inclassable. La
cuisine doit ressembler
à celui qui la fait. Voilà
ce que j’ai encore
appris auprès de ce grand chef : ne pas avoir
peur de mettre une part de soi dans chaque
assiette. Et cela, au travers d’une cuisine simple,
juste et goûteuse, faite à partir des plus beaux
produits de proximité. Par ailleurs, je n’oublie
pas non plus que mon passage à l’Éridan m’aura
considérablement médiatisé. »
Chef du Claridge’s
Toujours avec Marc Veyrat au marché de Tsukiji.
Toutes les portes lui étant ouvertes, on lui propose alors
de diriger les cuisines du Plein Ciel à Osaka. Mais
le projet fait long feu. Adieu le Japon pour Londres,
chef du Claridge’s. Objectif : dépoussiérer la carte
confinée dans les grands classiques au profit d’une
cuisine contemporaine et de signature, telle que la
sienne. Ce à quoi s’affaire avec brio Emmanuel, à
la tête d’une brigade de trente cuisiniers. Ce qui
lui vaut d’être très vite remarqué par la presse avec
d’autant plus d’égards que Londres est une ville
7
Au Flocon Village avec Thibault Gelebert.
ouverte à toutes les tendances. Anticonformisme
« very british » qui ne fait cependant pas l’unanimité
dans cette enseigne huppée où la famille royale a
son rond de serviette :
« De ce fait, j’étais le témoin de l’éternelle bataille
des anciens et des modernes. Si 60 % de la
clientèle appréciait mon style prônant saison,
herbes et bouillon, les 40 % restants, comptant les
clients les plus fidèles du restaurant, ne juraient
que par les grands classiques respectés à la lettre.
De telle sorte que mon Escoffier ne me quittait
plus en cuisine, au cas où l’on me demanderait en
plein service un homard Thermidor ! Sacrée leçon
de modestie ! »
À l’évidence, cette alternative ne le séduit pas
du tout. En revanche, il est séduit par Kristine,
ravissante Allemande en
poste au Food & Beverage
du Claridge’s qu’il épousera
le 6 novembre 1999 et qui
lui donnera Mathilde (13
ans), Johanna (11 ans) et
Clément (9 ans). Mais aucun
ne verra le jour en Angleterre. Et pour cause ! Après
avoir brillamment remporté le Prix Taittinger 1996,
sous pavillon anglais (et le 3e à l’international), et
malgré d’intéressantes propositions à Londres, il
retraverse le Channel, bien décidé à entrer dans
ses murs.
Les Flocons de sel
Quand son amie Catherine Novarro – Novarro
Décoration – lui déniche une pizzeria au cœur
de Megève, aménagée dans un ancien corps de
ferme du XIXe, avec poêle à bois trônant au beau
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Le trial, passion de la première heure.
EN COUVERTURE
Le bonheur en famille avec Kristine son épouse et leurs trois enfants : Mathilde, Johanna et Clément.
milieu de la salle, à l’enseigne du Manoir SaintFrançois. Il s’y précipite sur-le-champ, ne résistant
pas à l’appel des cimes. Vite fait, bien fait, affaire
conclue ! En possession des clés le 15 décembre
1998, Emmanuel ouvre une semaine plus tard.
Entre-temps, Édouard Loubet et son équipe sont
passés par là, venus lui
prêter main-forte pour
repeindre le restaurant
« histoire de faire un coup
de propre ! ».
Six mois plus tard, à la
fonte des neiges, il achète les murs, rassuré par
ce départ sur les chapeaux de roue. Un exploit
réalisé à quatre (deux en cuisine, deux en salle)
avec pour tout matériel quatre brûleurs et un four.
Qu’importe le « flocon », pourvu qu’on ait l’ivresse !
En l’occurrence celle de séduire avec une « bonne
cuisine au travers d’une carte courte ». Et cela
en « désherbant » soigneusement ses assiettes, se
sachant attendu comme le loup au coin du bois.
Mais pas question d’évoquer le mot « gastro » pour
expliquer son succès :
« Le terme est trop galvaudé pour signifier quoi
que ce soit ! Mieux vaut se contenter de faire une
bonne cuisine dans une démarche reposant sur
son libre arbitre. C’est ce qui amène du monde.
Quant au client qui se régale, il se fiche bien de
savoir si c’est du gastro ou pas !”
MOF 2004
Affluence de clientèle, mais aussi de journalistes,
tandis que l’équipe s’étoffe peu à peu et que la
première étoile pointe. 2001. Emmanuelle obtient
son premier macaron qu’il dédie à ses fournisseurs,
Typique de la Haute-Savoie :
des mazots Relais & Châteaux
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Face à face : Emmanuel et sa seconde, Nadine Vincent.
à commencer par Éric Jacquier, pêcheur du lac
Léman ; Burnet père et fils pour les légumes ; JeanMarc Montegottero pour les huiles…
« Avant tout, je puise mon inspiration dans les
produits ! Lorsque je mets en place une carte,
je note d’abord ceux que je veux
travailler. C’est le produit qui confère
le goût et la cuisson qui l’exalte. »
Ce qui inspire encore Emmanuel,
maintenant qu’il a trouvé la paix des
cimes, c’est le col tricolore, MOF 2004 :
« Un grand moment. Je dois beaucoup
à Guy Krenzer, chef exécutif de Lenôtre qui m’a
coaché par téléphone ! En cette année 2014, il
y a un rendez-vous vous que je ne manquerai
pour rien au monde : la grande fête que nous
organisons chez M. Paul entre MOF pour célébrer
dignement ce dixième anniversaire. »
Quand en 2008, une deuxième étoile se pose sur
son toit, un an après la publication de La Montagne
et le Cuisinier aux éditions Aubanel, suivie d’autres
nombreux ouvrages dont le dernier, Nature d’un
chef publié chez Flammarion.
La route des trois étoiles est donc ouverte. En
attendant, Emmanuel est en passe de finaliser un
projet qui lui tient à cœur depuis qu’il s’est installé
à Megève : posséder quelques chambres. Il trouve
alors la perle rare : le terrain de 1 500 m2 d’une
ferme qui a brûlé sur la commune de Megève au
lieu-dit Le Leutaz.
10
3 étoiles des neiges
Un terrain uniquement voué à l’hôtellerie et au
tourisme dont la surface est bientôt quadruplée,
ce qui permet la construction de trois bâtiments :
dans le premier, un restaurant de 35
couverts, des salons, un bar et deux
chambres ; dans le deuxième, trois
chambres, et dans le dernier, le spa,
une suite et deux mazots (petits chalets).
La nouvelle enseigne ouvre ses portes
en décembre 2008, tandis que devenu
bistro, l’ex-enseigne est rebaptisée Flocons Village
– quatre en cuisine dirigée par Thibault Gelebert,
idem en salle, dirigée par Sarah Fresco – :
45 places pour une moyenne de cent couverts par
jour et un ticket moyen de 40 € autour d’un menu
carte à 31 €.
Aux Flocons de sel***, quarante employés, dont
dix-neuf en cuisine. Dans sa garde rapprochée,
sa seconde, Nadine Vincent, Nicolas Turin (chef
pâtissier, ex-Lameloise) et Pieter Riedjk (sous-chef).
En salle, Nael Choucha (maître d’hôtel), Ludovic
Namur (chef sommelier), Olivier Gazagnes (second
sommelier). La responsable du spa est Émilie Garcia.
La moyenne de 50 couverts par jour s’accompagne
d’un ticket moyen de 200 € avec des menus à 90 €
et 180 €.
EN COUVERTURE
Dans la cave avec Ludovic Namur
et Olivier Gazagnes.
Du spa ...
... à la belle salle à manger.
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Emmanuel et sa garde rapprochée : sa seconde Nadine Vincent, Nicolas Turin (chef pâtissier)
et Pieter Riedjk son (sous-chef).
Artisan d’abord, artisan ensuite !
Superbe réussite, tandis qu’il revendique son statut
d’artisan : « La cuisine est un métier d’artisan.
Avant de travailler avec des techniques, on
travaille avec ses mains. Ce qu’il ne faut jamais
arrêter de faire pour ne pas perdre le contact
charnel de ce que l’on prépare. J’éprouve le
besoin de déshabiller un poisson plutôt que
de le voir arriver en filets ! Je suis également
de ceux qui estiment qu’il faut être présent par
égard pour le client, puisque le chef est l’épine
dorsale, le pilier de l‘enseigne. En cinq ans, je
suis d’ailleurs très fier de n’avoir manqué qu’un
service pour raison familiale. Enfin, je privilégie
le suivi le plus étroit avec mes fournisseurs. Pour
le reste, je n’éprouve aucun plaisir à jouer aux
billes dans mes assiettes, tout en étant passionné
par la technique, mais uniquement lorsqu’elle est
naturelle, donc discrète. »
Comme celle apprise auprès des Inuits, lors d’un
passage dans l’île d’Hokkaido où on lui servit en
guise d’apéritif une eau de bois. Rien à voir avec
la gueule de bois, mais avec sa philosophie,
sûrement ! Puisqu’à partir de ce procédé, il a réalisé
plusieurs eaux de bois pour apprécier toutes leurs
nuances et maîtriser l’art de les accommoder tant en
sucré qu’en salé.
Gérard Gilbert
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Les recettes
d’Emmanuel
Renaut
UN MÉTIER,
UNE PASSION
Spaghettis de salsifis,
lard d’Arnad et truffe blanche d’Alba
Recette pour 6 personnes
1 kg de salsifis
100 g de lard d’Arnad
40 g de truffe blanche d’Alba en dés
30 g de parmesan râpé
20 g d’huile fumée (obtenue avec un fumoir)
Épluchez et taillez les salsifis en fines lanières comme des spaghettis. Congelez le morceau de lard. Faites cuire les spaghettis de
salsifis à la vapeur pendant quelques minutes pour les avoir « al dente ».
Râpez une partie du lard congelé sur les spaghettis de salsifis, mélangez-les à la truffe en dés, ajoutez le parmesan râpé. Liez le
tout avec l’huile fumée.
Présentation
Dressez les spaghettis de salsifis tièdes dans une assiette creuse avec une assiette de lard d’Arnad à côté.
Vin
Champagne Krug Grande Cuvée ou Rossi-Bass Langhe, Gaja, 2009.
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Les recettes d’Alain Dutournier
Truffe et noisette,
jaune de poule cuit au sel et séché
« Pour pallier le manque de fleurs dans les prés et les jardins en période d’hiver,
j’ai recréé un jardin d’hiver. »
Recette pour 6 personnes
6 jaunes d’œufs
200 g de purée de légumes
200 g de sel
40 g de noisettes entières avec la peau
60 g de truffe
1 feuille de brick
La veille : mélangez la purée de légumes et le sel, déposez-y délicatement les
jaunes, laissez-les cuire dans la saumure pendant 8 à 10 heures. Retirez les œufs à
l’aide d’une cuillère, rincez-les sous l’eau et mettez-les à sécher pendant 3 heures.
Torréfiez les noisettes au four à 190 °C pendant 3 min et râpez-les finement.
Taillez des lamelles de truffe, découpez des fleurs et des disques à l’aide d’un
emporte-pièce, hachez les parures.
Taillez également des fleurs dans la feuille de brick, râpez les jaunes séchés.
Dressage
Comme dans un jardin, disposez les différentes poudres (truffe,
noisette, jaune séché) à poids identiques dans le fond
d’une assiette avec les fleurs et les disques de
truffe ainsi que les fleurs de la feuille de brick.
Vin
Xérès.
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Les recettes d’Emmanuel Renaut
Gnocchis à la betterave
1,5 kg de betteraves rouges crues
250 g de pommes de terre
50 g de farine
1/4 d’oeuf battu
Qs sel de Maldon, poivre, parmesan
100 g de beurre (50 + 50)
150 g de bouillon de légumes
Gnocchis à la betterave
Centrifugez les betteraves crues,
réservez 100 g de jus pour la sauce.
Épluchez les pommes de terre, les
tailler en gros morceaux puis les cuire
avec du jus de betterave à hauteur.
Les égoutter puis les tamiser. Mélangez à la spatule la pulpe de pommes de terre, la farine et l’œuf, assaisonnez.
Cuisson
Façonnez les gnocchis en rouleaux
puis taillez des tronçons. Les pocher
dans une eau bouillante salée frémissante, lorsqu’ils remontent à la surface, les égoutter.
Glacez les gnocchis avec du jus de
betterave, 50 g de bouillon de légumes et 50 g de beurre, salez.
Ingrédients
Queues de persil
Préparation :
Epluchez, lavez les carottes et les
émincez très finement. Les mettre
dans une casserole avec les queues
de persil. Mouillez avec 2 litres d’eau,
mettre un couvercle et porter à ébullition. Laissez cuire pendant 20 minutes
Puis hors du feu, laissez infuser 1
heure. Enfin, passez au chinois
Dressage
Mettez les gnocchis glacer dans
l’assiette et ajouter des rondelles de
beaufort et betterave rouge et juste
avant de déguster verser un peu de
bouillon de raifort sur les gnocchis
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Bois et noisettes
Recette pour 6 personnes
350 g de crème montée (crème liquide à fouetter)
160 g d’eau
150 g de sucre
8 g de gélatine
100 g de jaunes d’œufs
60 g de pâte de noisettes du Piémont
3 noisettes
5 cl de jus de bois (voir explications pour les jus page )
5 cl de jus de noisettes
Préparation la veille.
Montez la crème et les jaunes au fouet, amenez un sirop à
ébullition (eau + sucre), versez sur les jaunes. Laissez refroidir le sabayon. Versez la gélatine fondue sur le sabayon froid,
mélangez à la maryse. Mélangez la crème montée avec la
pâte de noisettes et assemblez cette crème avec le sabayon.
Moulez dans un cadre inox de 40 x 60 cm (625 g/cadre). Passez en cellule de congélation.
Jus bois et noisettes
Pour le flocage
200 g de chocolat blanc
100 g de beurre cacao
1 cuillère à soupe de colorant noir
Faites fondre les ingrédients et mettez le mélange dans le
pistolet à chocolat.
Finition
Sortez le cadre du congélateur, détaillez-le en carrés de 18 x
18 cm, floquez-les avec le pistolet à chocolat, puis remettezles au congélateur. Retournez les carrés.
Disposez 3 cercles en plastique (5, 4, 3 cm) sur les carrés,
floquez-les puis réservez-les au congélateur.
Présentation
Disposez les carrés sur les assiettes, déposez des gouttes de
jus de bois et noisettes. Râpez de la noisette.
Vin
Cuvée Ambre, Domaine des Ardoisières, 2005.
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Les recettes d’Emmanuel Renaut
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Lotte du lac et brochet en biscuit
Bouillon de mousseron,
oignon et achillée
Recette pour 6 personnes
Farce
400 g de lotte
400 g de brochet
5 œufs
30 g de sel
30 g de sucre
5 œufs
800 g de crème
120 g de beurre
80 g de jus de carcasse d’écrevisses (bisque)
1 kg d’oignons
50 g de beurre
1 l de bouillon de légumes
200 g de beurre
10 g de sucre
1 botte d’achillée
4 fines tranches de pain (2 mm d’épaisseur)
50 g de beurre clarifié
5 oignons
½ litre de bouillon de légumes
Sel
10 g de sucre
200 g de mousseron
50 g de beignets de farine et farine de riz noir (décors et croustillant)
Jus d’oignon
Épluchez et émincez les oignons, faites-les suer doucement dans une cocotte en
fonte avec 50 g de beurre, caramélisez-les avec les 10 g de sucre, ajoutez le bouillon de légumes. Faites cuire à frémissement pendant 2 h, passez au chinois. Faites
réduire de moitié et montez au beurre. Rectifiez l’assaisonnement et réservez au
chaud.
Réservez les mousserons les plus jolis pour les poser au dernier moment et faites
un jus avec les autres et les pieds (suez doucement au beurre et ajoutez un pochon
de bouillon de légumes).
Faites cuire à couvert, un papier film sur la casserole, sur le coin du fourneau.
Avant de servir mettez à infuser l’achillée dans la sauce et ajoutez le jus de mousseron, passez au chinois et rectifiez.
La sauce doit être légère et capiteuse, la douceur de l’oignon, le goût de mousserons et le parfum l’achillée en fin de bouche.
Biscuit
Dans un cutter, mixez la chair de lotte et celle du brochet avec le sel et le sucre.
Ajoutez les œufs, la crème, le beurre chaud et le jus de carcasse. Mixez 2 min le
mélange et passez-le au tamis fin. Mettez-le dans un cadre et faites le cuire à la
vapeur 15 min à 80 °C. Laissez le refroidir et taillez-le en rectangle.
Taillez les fines tranches de pain de la même taille. Posez la farce sur le pain et
colorez au beurre clarifié. Réservez au chaud.
Servez le biscuit de lotte avec le jus, les beignets et quelques mousserons juste
blanchis.
Vin
Roussette de Savoie, Michel Grisard, 2007.
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Les recettes d’Emmanuel Renaut
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Le magazine
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TENDANCE
Paris, Le Vraymonde
Rougui Dia :
« Inviter au voyage »
Sa démarche féline comme sa silhouette élancée et gracile désigne une sprinteuse,
tandis que son parcours nous oblige à mettre en doute la première impression.
Ne s’agirait-il pas plutôt d’une coureuse de fond, tant il lui aura fallu d’endurance
pour se frayer un chemin dans l’univers de la gastronomie ? De Neuilly-Plaisance
au Vraymonde, restaurant du Buddha-Bar Hôtel Paris*****, en passant par l’école
hôtelière de Villepinte et Pétrossian, portrait de Rougui Dia qui signe une cuisine
toute personnelle et bien française, sous influence des cinq continents, dont bien sûr
l’Afrique, terre de ses ancêtres.
R
ougui est née le 27 février 1976, à Paris,
avant de grandir à Neuilly-Plaisance dans le
93 entourée de ses deux frères et quatre sœurs,
avec lesquels elle n’aura guère partagé la passion
des fourneaux. Et cela, bien qu’Aïssata, sa mère, ait
des talents de cordon-bleu et que ses sœurs aînées
– dont Aminata qui a ouvert sa propre affaire de
traiteur, Ami Cuisine, à Denver dans le Colorado –
lui aient prêté main-forte avec enthousiasme.
Il faut dire que Rougui était la chouchoute de la
famille. Un titre aux nombreux passe-droits, dont
celui d’échapper aux tâches ménagères pour mieux
se consacrer à la lecture des aventures d’Émilie
et d’Arthur le hérisson. Privilège qui lui permettait
encore de se gaver de bonbons que lui offrait sans
discernement son père, tandis que sa mère s’échinait
à la détourner de ces tombereaux de sucreries en
exigeant qu’elle goûte à toutes ses sauces sur un
bout de pain.
Non, vraiment ! Même si, adolescente, elle
parvenait à honorablement trousser ce petit ragoût
d’épinards qu’est le latieri et rha, elle n’affichait pas
de dispositions particulières pour cette discipline.
Ce qui explique que pour elle, le pire des pensums
était la pluche, toujours imposante chez les Dia, qui
ne consommaient que des produits frais. Mis à part
les petits pois – toujours en boîte – qu’elle détestait
autant que ses études !
Une jolie petite fille de Neuilly-Plaisance.
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Toujours sur la brèche, avec le directeur du restaurant, Hugo Cassaro...
Révélation
Quant à porter un jour une veste de cuisinier, ça ne
lui effleurait pas vraiment l’esprit. En revanche, en
créer, ça oui ! Serait-ce alors les piquants d’Arthur le
hérisson qui lui auraient ouvert les voies des travaux
d’aiguille ?
« Je rêvais de devenir couturière. Tellement
passionnée par cette perspective, je regardais
tous les défilés de mode à la télévision. »
Mais l’avenir n’est pas toujours cousu de fil blanc.
Pour preuve ? Dans le centre d’orientation où
elle s’était rendue, déterminée à abandonner les
bancs du lycée Jean-Moulin pour la couture, son
conseiller l’incita à y réfléchir à deux fois au cas
où elle n’aurait pas le feu sacré, car aucune école
n’étant à proximité, il lui faudrait se rendre à Paris…
Tandis qu’envisager la cuisine ou la pâtisserie serait
beaucoup plus simple et raisonnable compte tenu
des débouchés offerts.
C’est ainsi qu’elle intégra le lycée hôtelier de
Neuilly-sur-Marne. Mais par quel miracle ? Entretemps, Rougui, partie faire de la randonnée
à Chamonix avec un groupe de jeunes de sa
commune, choisissait de s’occuper de la popote,
dans le centre de vacances où elle était hébergée :
« Après quinze jours passés à réaliser tant bien
que mal gratins savoyards, fondues et tartes
aux myrtilles, j’avais une tout autre perception
de la cuisine, venant de découvrir les notions de
partage et d’équipe dont elle était porteuse. Alors
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que jusqu’à présent, je n’avais retenu qu’une
image très réductrice de cette discipline : celle
d’une mère toujours clouée devant ses fourneaux,
tandis que mes sœurs épluchaient en cadence… »
Leçon d’optimisme
La voilà donc en préapprentissage auprès de Robert
Sidaner dans sa boulangerie éponyme de NeuillyPlaisance pour y rouler truffes et croissants pendant
six mois. Mais malgré le désir de bien faire dont
elle témoignait au quotidien, l’homme de l’art n’était
pas convaincu du bien-fondé de son choix : femme
dans ce métier et de couleur en plus ! Voilà qui
constitue un sérieux handicap !
C’est ce que Rougui raconte dans La femme est un
chef ! paru aux éditions Jean-Claude Gawsenvitch
en 2006. Livre dans lequel on découvre ses racines
sénégalaises, le village de ses ancêtres N’Ganno,
les origines peules de sa mère, toucouleur de son
père et leur arrivée en France dans les années 1960
pour une vie meilleure. Autobiographie qui, audelà de ses vérités, se veut une formidable leçon
d’optimisme démontrant qu’avec la foi, on peut
abattre des montagnes.
Pour l’heure, Rougui a apprécié cette première
expérience « boulangère », restant néanmoins
très attirée par la cuisine. Forte de ce doute et
grâce à un cousin du sérail, elle entra en stage au
Drugstore Matignon des Champs-Élysées, très vite
devenue experte en billes de melon qu’elle tournait
TENDANCE
... ou en cuisine avec sa garde rapprochée.
avec la même dextérité qu’elle pelait les asperges.
Entre deux, se rappelle-t-elle, elle notait toutes les
expressions dont elle ignorait la signification,
comme « singer » qui, pour tout néophyte, implique
l’imitation plutôt que la farine. Méticulosité qui ne
lui permettra toutefois pas d’évoluer
dans cette enseigne, jugée trop lente
par le chef avant qu’il ne revienne
sur son jugement, mais trop tard !
Thierry Morisset
En quête d’un apprentissage, Rougui est finalement
parvenue à intégrer le Panama. Trois en cuisine dans
cette affaire familiale qui n’affichait pas moins de
120 couverts par jour : le chef, une aide-cuisinière
et Rougui affectée aux entrées, aux desserts et à
la plonge. Tout juste ce qu’il fallait pour s’initier à
la gestion du stress. Et qu’on ne lui reproche plus
jamais d’être lente ! Las, l’année écoulée, le bilan
est déposé. Le chef a alors tout fait pour recaser
Rougui. Mais son handicap pèse de tout son poids
et, de guerre lasse, elle s’est donné un autre objectif :
intégrer l’armée. Elle s’y sentirait d’autant plus à
l’aise que, grande sportive pratiquant notamment
le basket et la musculation, elle ne craindrait pas
le parcours du combattant. Cependant, avant le
parcours, les démarches l’ont stoppée net dans
son élan : pour entrer à l’Armée, il faut au moins
avoir un BEP ! La voilà retournée en cuisine pour
obtenir son diplôme. Ainsi, une fois en poche, elle
pourra toujours s’enrôler dans l’Armée où rester aux
fourneaux le cas échéant. En attendant, elle est à
l’école hôtelière de Villepinte et en stage dans la
chaîne Batifol du très entreprenant Gérard Joulie.
Époque où elle a rencontré Thierry Morisset et Marc
Bodu (Astrolabe Formation) qui lui
conseillent vivement de travailler
au plus vite en salle. Remise en
cause qui lui a réclamé une grande
abnégation :
« En proie à des complexes comme
peuvent en avoir les femmes, je m’étais juré de ne
jamais porter de jupes ! »
Ayant fait contre mauvaise fortune bon cœur, elle s’y
est résigné et a obtenu son CAP salle à 18 ans. Puis
à 20 ans, elle a décroché son CAP cuisine et un an
plus tard son BEP, suivi d’un bac pro en 1997.
Sébastien Faré
Entre-temps, elle a fait ses classes en salle à La
Bourgogne, rue de Bourgogne (75 007), auprès de
Thierry Morisset. Un bistro tendance que l’on qualifierait
aujourd’hui de bistronomique. Puis Chez Jean, rue
Lamartine (75 009) enseigne où Sébastien Faré l’incite
peu à peu à quitter la salle pour la cuisine. En attendant,
elle a joué les femmes orchestre. Quatre-vingt-dix
couverts le samedi soir pour trois personnes en salle,
dont Rougui :
« La plupart du temps, je commençais le service, je
prenais la plonge et je terminais à la pâtisserie ! Venue
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Rougui et sa garde rapprochée parmi laquelle Guy Darcel (chef pâtissier), Marco et Charley (seconds juniors), Arnaud Torchin (chef de partie) et Maxime Corcessin (commis).
pour un stage de six mois, j’ai quintuplé la mise ! »
Diplômée d’un BTS, elle a suivi son mentor Sébastien
Faré aux Persiennes, où elle a rencontré Philippe
Conticini alors consultant, qui ne mâche pas ses
mots : « Tu dois savoir que ce sera plus long et
plus dur pour toi que pour quelqu’un d’autre ! »
Ce qu’elle n’ignore plus depuis longtemps et qui
l’incite à mettre les bouchées doubles. Entrée au
poste de commis, elle est nommée deux mois plus
tard seconde du chef dans cet établissement du
Triangle d’Or où l’on sert une cuisine ensoleillée et
des desserts de haute volée signés Guy Darcel. Dixhuit mois plus tard, Rougui a quitté Les Persiennes
pour Pétrossian-Le 144, restaurant étoilé situé audessus de la mythique et éponyme boutique d’Armel
Pétrossian. Là elle a occupé le poste de chef de
partie auprès de Philippe Conticini alors chef des
cuisines. Quand ce dernier – rappelons-le, grand
précurseur des verrines ! – quitta l’enseigne pour
Lepelletier, remplacé par Sébastien Faré.
Pétrossian
Auprès du chef, elle a tourné à tous les postes avant
d’être nommée seconde au lendemain du départ de
Philippe Foucault. Poste qu’elle a occupé jusqu’au
départ de Sébastien Faré pour Elle & Vire :
« Nous étions en 2005. Depuis quelque
temps, j’envisageais mon départ quand Armen
Pétrossian m’a proposé de me nommer chef. Et il
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Chef de chez Pétrossian, auprès de M. Armen
Pétrossian.
TENDANCE
Comme la cuisine de Rougui, un décor qui invite au voyage.
lui aura fallu beaucoup de persuasion pour que
j’accepte. Non seulement parce que je ne m’étais
pas mentalement préparée à assumer ce poste,
mais encore parce que je souhaitais prendre du
recul. À ma prise de fonction, je n’ai pas voulu
renommer la carte de M. Faré, mais seulement
la personnaliser discrètement, avant d’imposer
mon style. Pour ce faire, j’avais Armen Pétrossian
comme conseiller averti. Je qualifierai volontiers
ma cuisine aux saveurs pointues “d’invitation au
voyage”. En cela qu’elle demeure française, tout
en invitant à la découverte des autres saveurs du
monde avec sagesse. Comme un voyage. On en
rapporte des impressions, mais on revient toujours
à son point de départ. »
À ses côtés, Rougui comptait alors parmi sa garde
rapprochée Matthieu Hamon (aujourd’hui à Sydney),
Lucie Glowacki (L’Amuse-Bouche à la Bourboule).
2012. Sept ans se sont écoulés. Rougui souhaitait
maintenant créer une brigade dans un hôtel. Ce qu’a
retenu Sébastien Faré qui la met alors en contact
avec l’homme providentiel : Eric Rousselière, chef
exécutif du groupe Buddha Bar depuis 2000.
Le Vraymonde
Un an plus tard, en juin 2013, le Vraymonde et son
lounge-bar ouvrent leurs portes. Aux commandes,
Rougui Dia entourée de sa brigade, parmi laquelle
ses seconds juniors Marco et Charley, Arnaud
Torchin (chef de partie), Maxime Corcessin
(commis), Guy Darcel (chef pâtissier) et à ses côtés
Violette Kosmala (demi-chef de partie) et Florian
(commis).
Au total 21 personnes en cuisine pour une moyenne
quotidienne de 60 couverts au Vraymonde qui
compte 85 places avec une « cour-jardin » aux beaux
jours d’une capacité de 60 couverts. Ticket moyen
80 € au dîner, 50 € au déjeuner. Menu déjeuner à
29 € (entrée et plat ou plat et dessert), menu dîner
à 68 €, avec une fois par mois, un menu à thème
au prix variable selon le produit choisi. Quant au
Qu4tre bar, il dispose de 40 couverts avec une
carte snacking pour un ticket moyen de 25 €.
L’avenir ? Marraine du centre de l’EPIDE de
Bobigny, chargée de piloter le dispositif « Défense,
2e chance », Rougui consacre beaucoup de son
temps à la formation des jeunes, portant la bonne
parole dans les écoles (notamment celles d’Anthony
et de Villepinte). Et dans un horizon plus lointain,
elle souhaite concrétiser le rêve de créer sa propre
affaire. Mais pour l’heure, elle s’épanouit dans cette
pépite du groupe George V, dirigée de main de
maître par Loïc Le Berre que Rougui définit comme
« un directeur qui donne vraiment la pêche ». En
ce qui la concerne, elle en aura toujours fait preuve.
Gérard Gilbert
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Les recettes de Rougui Dia
Risotto de riz venere, gambas et cromesquis
Risotto
250 g de riz venere
1 oignon
30 cl de vin blanc
35 cl de fond de volaille
50 g de parmesan
50 g de beurre
Faites suer l’oignon, émincez-le, nacrez le riz, assaisonnez
et mouillez au vin blanc, puis faites cuire à sec. Mouillez de
nouveau au fond, liez au parmesan et au beurre.
Cromesquis de champignon
250 g de champignons de Paris
60 cl de lait
1/2 botte de cresson
Sel/poivre
Chapelure
Faites tomber les champignons émincés et réduits à sec,
mouillez-les au lait, assaisonnez, ajoutez le cresson juste
avant de mixer. Laissez refroidir. Moulez la préparation en
demi-sphère et panez-la (blanc d’œuf, chapelure).
Finition
Poêlez les gambas, assaisonnez de haut goût, dressez.
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Enodis aime les Chefs
“
Avec Enodis
et Convotherm,
en pole position !
AFR 10/2013
Document non contractuel
Philippe Joannès,
Fairmont Monte Carlo – MOF 2000
Pour tout renseignement sur nos produits,
merci de contacter notre Service commercial
au 01 69 02 25 10
ou de visiter notre site web : www.enodis.fr
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Tarte fine
au caviar d’aubergine
et légumes anciens
Pâte sablée
30 g de sucre glace
70 g de poudre d’amandes
225 g de farine
2 g de sésame
7 g de fleur de sel
2 jaunes d’œufs
200 g de beurre
Confectionnez la pâte sablée traditionnellement
puis faites une abaisse fine et régulière, taillez à
l’emporte-pièce, laissez reposer puis faites cuire à
180 °C pendant 10 à 15 min.
Caviar d’aubergine
1 aubergine
2 cl d’huile d’olive
2 pincées d’herbes de Provence
PM sel/poivre
10 g de miel
2 g d’épices
Taillez en deux l’aubergine, plaquez-la en
saupoudrant d’herbes de Provence, ajoutez un
filet d’huile d’olive, faites cuire à four très chaud
pendant 2 h. Ensuite, mixez la chair d’aubergine,
desséchez-la, ajoutez le miel et le curry en
poudre ; assaisonnez de haut goût.
Légumes
100 g de panais
100 g de chou violet
100 g de topinambour
Jus de citron
Taillez les légumes puis faites les cuire. En fin
de cuisson, ajoutez un zeste de jus de citron, assaisonnez.
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