Actualité juridique - Norton Rose Fulbright

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Actualité juridique - Norton Rose Fulbright
Actualité juridique
Seule la divulgation complète d’un handicap déclenche l’obligation
d’accommodement
Janvier 2014
Droit de l’emploi et du travail
Une récente décision de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta a confirmé qu’un employé avait l’obligation de
prouver que son employeur était au courant (ou aurait dû être au courant) de son handicap pour invoquer un traitement
discriminatoire. Autre point favorable pour les employeurs, la décision insiste également sur le fait qu’un employé qui
demande des mesures d’accommodement a l’obligation de fournir des preuves suffisantes à l’égard de son handicap
pour permettre la mise en place de ces mesures.
Les faits
Le plaignant a été embauché par Telus Communications Inc. (Telus) comme agent dans un centre d’appels. Avant la
fin de sa période probatoire, Telus a déterminé que le plaignant ne répondait pas aux exigences du poste pour lequel il
avait été embauché et a mis fin à son emploi. Un grief a été déposé par la suite. Le grief alléguait qu’il avait été mis fin
à l’emploi du plaignant en raison de son handicap, que sa cessation d’emploi était discriminatoire et que Telus avait
l’obligation d’accommoder le plaignant, et ce, jusqu’au point d’en subir une contrainte excessive.
La décision de l’arbitre
L’arbitre a conclu que l’obligation d’accommodement de Telus n’avait pas été déclenchée. Pour ce seul motif, l’arbitre
a décidé que le grief devait être rejeté.
Fait à noter, l’arbitre a conclu que le plaignant avait fait part de son handicap à deux reprises. La première fois, lorsqu’il
a coché la case « oui » en réponse à la question « avez-vous un handicap? » au cours du processus de demande
d’emploi et la deuxième fois, environ une semaine avant qu’il ne soit mis fin à son emploi, lorsqu’il a mentionné qu’il
souffrait du syndrome d’Asperger. Avant ce moment, le plaignant avait suivi de nombreuses séances
d’accompagnement professionnel avec son employeur durant lesquelles il n’avait jamais mentionné son handicap ni
fait part des répercussions alléguées que celui-ci pourrait avoir sur son rendement.
L’arbitre a également conclu que le handicap du plaignant avait été un facteur ayant contribué à son incapacité à
satisfaire aux exigences de rendement qui étaient attendues de sa part, ce qui a finalement entraîné la perte de son
emploi.
Malgré ce qui précède, Telus n’était pas tenue de poser des questions au sujet d’éventuelles mesures
d’accommodement parce qu’elle en savait trop peu sur le handicap du plaignant. La réponse de ce dernier à la
question « Avez-vous un handicap? » ne comportait aucun détail qui obligeait Telus à s’informer sur son handicap et
les mesures d’accommodement qui pouvaient s’imposer. La divulgation par le plaignant de son handicap la semaine
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précédant la cessation de son emploi a été faite trop tard et n’avait pas été présentée de façon suffisamment détaillée
pour qu’il remplisse son obligation de fournir les renseignements requis par Telus pour que celle-ci décide si des
mesures d’accommodement s’imposaient ou non.
De plus, en se fondant sur une preuve d’expert, l’arbitre en est venue à la conclusion qu’aucune mesure
d’accommodement n’aurait pu être prise à l’égard du poste du plaignant lui permettant d’accomplir les tâches qui lui
incombaient.
L’arbitre a jugé que même si l’obligation d’accommodement avait été déclenchée, le licenciement du plaignant n’aurait
pas été discriminatoire. L’arbitre, tenant compte du fait que le plaignant était en période de probation, a conclu qu’il
n’existait aucune obligation de lui trouver un autre poste à l’extérieur du centre d’appels. Compte tenu du fait que le
poste du plaignant au centre d’appels ne pouvait faire l’objet de mesures d’accommodement et du fait qu’il n’existait
aucune obligation de lui trouver un autre poste à l’extérieur du centre d’appels, l’arbitre a jugé que Telus n’avait
commis aucun acte de discrimination envers le plaignant.
La révision judiciaire
La Cour du Banc de la Reine de l’Alberta a confirmé la décision de l’arbitre.
La cour a jugé que l’arbitre avait eu raison de conclure que l’employeur n’avait pas connaissance du handicap du
plaignant selon les faits en preuve. La cour a également jugé qu’il avait été raisonnable de la part de l’arbitre de
conclure que le fait de cocher une case sur une demande d’emploi et de soulever l’existence d’un handicap alors qu’il
était évident que le plaignant allait perdre son emploi ne constituait pas une divulgation satisfaisante du handicap pour
obliger l’employeur à envisager des accommodements.
La cour a affirmé qu’un syndicat n’avait pas à prouver (ni à réfuter) que des mesures d’accommodement causant une
contrainte excessive avaient été prises ou non. Cette obligation incombe depuis longtemps aux employeurs qui
affirment que des mesures d’accommodement ont été offertes et/ou écartées en raison de considérations liées à la
contrainte excessive. Toutefois, pour que l’obligation d’accommodement soit déclenchée, encore faut-il que
l’employeur soit au courant du handicap en premier lieu.
La cour a apporté des précisions concernant la conclusion formulée par l’arbitre selon laquelle Telus n’était pas tenue
de trouver un autre poste pour le plaignant parce que ce dernier était en période probatoire. Premièrement, comme
elle l’a indiqué, l’arbitre a traité de cette question à titre subsidiaire, après avoir conclu que Telus n’était pas au courant
du handicap et qu’elle n’avait, par conséquent, aucune obligation d’accommodement, ce qui réduisait les
répercussions de sa conclusion. Deuxièment, la cour a précisé que la preuve démontrait qu’aucune mesure
d’accommodement n’aurait pu être prise pour le poste pour lequel le plaignant avait été embauché. Sur ce fondement
et compte tenu du fait qu’il s’agissait d’un employé en période probatoire, la cour a confirmé la décision de l’arbitre
selon laquelle le licenciement du plaignant n’était pas discriminatoire.
Conclusion
Cette décision confirme qu’un employeur ne peut être assujetti à une obligation d’accommodement s’il n’est pas au
courant qu’un employé a une caractéristique ou une condition qui nécessite des mesures d’accommodement. Dans de
telles circonstances, le plaignant a le fardeau de prouver que l’employeur était au courant ou aurait dû être au courant
des circonstances qui ont entraîné la plainte pour discrimination.
L’affaire rappelle également l’importance de documenter les séances d’accompagnement professionnel et les
rencontres de gestion du rendement, y compris les explications données par un employé concernant son incapacité à
satisfaire aux exigences de rendement. Dans la décision Telus, le plaignant n’a donné aucune raison liée à son
handicap pour expliquer ses problèmes de rendement jusqu’à la toute fin de sa période probatoire, moment où il était
sur le point de perdre son emploi. Un tel comportement dans des affaires semblables pourrait donner lieu à la même
décision confirmant que l’existence d’un handicap a été soulevée « trop tard » pour permettre à un employeur de
s’informer sur d’éventuelles mesures d’accommodement pour le poste. Cependant, pour se fonder sur une telle
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preuve, les employeurs feraient mieux d’avoir documenté le contenu des discussions sur le rendement et être prêts à
révéler le contenu de ces discussions au cours d’une procédure judiciaire.
Lisa Fraites
Madeleine L.S. Loewenberg
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