Séries numériques (résumé de cours)

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Séries numériques (résumé de cours)
Chapitre 4
Séries numériques (résumé de cours)
Algèbre et analyse fondamentales - Paris 7 - O. Bokanowski - Octobre 2015
4.1
Généralités
Soit (un )n≥0 une suite de R ou de C. On définit les sommes partielles par
Sn =
n
X
uk = u0 + u1 + · · · + un ,
k=0
et on s’intéresse à la limite de Sn lorsque n → ∞.
P
Definition. 4.1.1. On dira que la série
un est :
P
• convergente (CV) si limn→∞ Sn existe, et on note alors n≥0 un cette limite,
• divergente (DIV) sinon,
P
• absolument convergente (AC) si n≥0 |un | est convergente.
On dira aussi que la série converge simplement (CS) si elle converge
mais pas absolument.
P
On peut définir de même la notion de convergence de la série n≥p un si un n’est définie qu’à partir
du rang p :
X
un = up + up+1 + up+2 + · · ·
n≥n0
La modification d’un nombre fini de termes de la série ne change pas sa nature (CV,AC,DIV,CS).
Théorème. 4.1.2. (Critère de Cauchy) Pour toute série à valeur dans R ou C,
P
P
( un ) AC ⇒ ( un ) CV
P
Série géométrique : un := c an , avec c 6= 0. La série ( un ) est convergente ssi |a| < 1, et la somme
n+1
c
(somme partielle, pour a 6= 1 : Sn := c 1−a
vaut alors 1−a
1−a ).
Série télescopique : un := an − an+1 . La somme partielle Sn vaut a0 − an+1 . La série converge ssi
lim an existe, et la somme vaut alors a0 − lim an .
P
1
1
Exemple : un = n(n+1)
, pour n ≥ 1, on a un = n1 − n+1
et donc n≥1 un = 1.
Proposition. 4.1.3. (
P
un ) CV ⇒ un → 0.
Démonstration. En remarquant que un = Sn − Sn−1 pour n ≥ 1.
Exemple : pour n ≤ 0,
1
nα
ne tend pas vers 0 (qd n → ∞), donc
1
P
1
n≥1 nα
est divergente.
4.2
Séries à termes positifs
Dans cette section on suppose que un ≥ 0.
P
P
Théorème. 4.2.1. Soit un ≥ 0. Alors
un CV ⇔
un bornée.
Definition. 4.2.2. Pour un , vn suites à valeurs complexes, t.q. vn 6= 0 (a partir d’un certain rang) on
utilisera la notation un ∼ vn , et on dira que un est équivalent à vn quand n → ∞, si
lim
n→∞
un
= 1.
vn
Théorème. 4.2.3. (Comparaison.)
P
POn suppose un ≥ 0 et vn ≥ 0.
• Si 0 ≤ un ≤ vnP
alors P vn CV ⇒
un CV.
• Si un ∼ vn ⇒
un ,
vn de même nature.
Pn
Pn
Exercice.* 4.2.4. . Soit un ≥ 0, vn ≥ 0, telles que vn ∼ un et k=0 uk → +∞. Alors k=0 vk → +∞
et de plus
n
n
X
X
n→∞
vk ∼
uk .
k=0
k=0
Pn
Démonstration. Le fait que k=1 vk → +∞ est une conséquence du précédent théorème. Soit > 0.
Comme un ∼ vn , il existe un rang p t.q. ∀n ≥ p, vn /un ≤ (1 + ) (on suppose que un est non nulle à
partir d’un certain rang). Alors vn ≤ (1 + )un , et
n
X
vk
=
k=0
p−1
X
vk +
k=0
≤
p−1
X
n
X
vk + (1 + )
k=0
≤
p−1
X
vk
(4.1)
k=p
n
X
uk
(4.2)
k=p
(vk − (1 + )uk ) + (1 + )
n
X
uk ,
(4.3)
+ (1 + )
(4.4)
k=0
k=0
et donc
Pn
v
Pnk=0 k
k=0 uk
Pp−1
≤
− (1 +
k=0 (v
Pk n
k=0 uk
)uk )
Pn
Or limn→∞ k=0 uk = ∞, et donc (pour p fixé), ∃N ≥ 0, ∀n ≥ N ,
Ainsi on en déduit que pour tout n ≥ n1 := max(N, p), on a
Pn
v
Pnk=0 k ≤ 1 + 2.
u
k=0 k
Pp−1
(vk −(1+)uk )
k=0P
n
k=0 uk
De la même manière on peut démontrer qu’il existe un n2 t.q. ∀n ≥ n2 ,
Pn
v
Pnk=0 k ≥ 1 − 2.
u
k=0 k
Ce qui démontre que limn→∞
Pn
k=0 vk
Pn
k=0 uk
≤ .
(4.5)
(4.6)
= 1.
Exercice.* 4.2.5.
Pn On suppose que limn→∞ xn = `, avec ` > 0. Montrer, à partir du résultat précédent,
que limn→∞ n1 k=1 xk = `. (Note : en fait le résultat, connu sous le nom de "Théorème de Césaro",
reste vrai même si ` ∈ R).
2
Pn
Démonstration. Il suffit de considérer vn = xn et un = `. Si ` > 0, k=1 ` = n` est divergente. Les séries
étant à termes positifs au moins à partir d’un certain rang (car xn → ` > 0), on peut utiliser le fait que
xn ∼ ` pour conclure à
n
n
X
X
xk ∼
` = n`,
k=1
k=1
d’où le résultat désiré après division par n. (On rappelle que si an ∼ bn , alors pour toute suite cn ,
an cn ∼ bn cn .
P
P
Exercice.* 4.2.6. Soit un ≥ 0, vn ≥ 0, telles que vn ∼ un et ( un ) converge. Montrer que
vk
converge et que les restes des séries sont équivalents :
∞
X
vk
n→∞
∼
k=n
∞
X
uk .
k=n
Démonstration. On pourra procéder comme à l’exercice 4.2.4.
Exercice.* 4.2.7. Montrer que 1 +
1
2
+ ··· +
1 n→∞
∼
n
log(n).
Proposition. 4.2.8. Règle de d’Alembert. On suppose un > 0 et limn→∞
Si ` < 1, la série converge.
Si ` > 1, la série diverge.
Si ` = 1, on ne peut conclure.
un+1
un
= `.
Démonstration. On suppose ` < 1. Soit ρ t.q. ` < ρ < 1. Comme limn→∞ uun+1
= `, on sait que ∃n0 ,
n
2
n−n0
∀n ≥ n0 , uun+1
un0 = Cρn (avec
≤
ρ.
Donc
pour
n
≥
n
:
u
≤
ρu
≤
ρ
u
≤
·
·
·
≤
ρ
0
n
n−1
n−2
n
C = un0 /ρn0 ). Par le critère de comparaison avec une série géométrique convergente, on en déduit la
convergence de la série. Le cas ` > 1 se traite de manière analogue en minorant la suite un par une suite
géométrique à somme divergente.
On verra plus loin des exemples de type un = n1α (série de Riemann), avec une limite ` = 1 mais où
la série peut être convergente (si α > 1) ou divergente (si α ≤ 1).
Exemple : Etudier la série de terme général un := nα e−n , n ≥ 1, P
pour α ∈ R. On montre que
1/e < 1, et on a bien un > 0, donc par la règle de Cauchy la série n≥1 un converge.
On pourra démontrer à titre d’exercice, de maniere analogue le résultat suivant.
un+1
un
→
≤ ` à partir
Proposition. 4.2.9. (Règle de d’Alembert, variante). On suppose un > 0. Si uun+1
n
d’un certain rang, avec ` < 1, la série converge. Si uun+1
≥
`
avec
`
>
1,
à
partir
d’un
certain
rang, la
n
série diverge.
De manière analogue à la règle de d’Alembert, on démontre la proposition suivante :
√
Proposition. 4.2.10. Règle de Cauchy. On suppose un ≥ 0 et limn→∞ n un = `.
Si ` < 1, la série converge.
Si ` > 1, la série diverge.
Si ` = 1, on ne peut conclure.
√
√
Exercice. 4.2.11. Si n un ≤ ` à partir d’un certain rang, avec ` < 1, la série converge ; si n un ≥ ` à
partir d’un certain rang, avec ` > 1, la série diverge.
4.3
Comparaison avec une intégrale
Supposons un = f (n), avec f décroissante. Alors
Z
n+1
Z
n
f (t) ≤ un ≤
n
f (t)dt.
n−1
3
D’où, par exemple :
n+1
Z
f (t) ≤
1
n
X
Z
n
uk ≤ u1 +
f (t)dt.
1
k=1
Théorème. 4.3.1. Si un = f (n) (pour n ≥ a), avec f : [a, ∞[→ R+ , décroissante, alors
Z ∞
X
un CV
⇔
f (t)dt CV
a
n≥1
Corollaire. 4.3.2. X
1
CV ⇔ α > 1.
Séries de Riemann :
nα
n≥1
X
1
Séries de Bertrand :
CV ⇔ (α > 1 ou α = 1 et β > 1).
nα log(n)β
n≥2
A titre d’exemple, on pourra démontrer le résultat suivant :
Proposition. 4.3.3. Soit f : R+ → R+ continue, décroissante, positive. Alors
un =
n
X
k=1
Z
n
f (k) −
f (t)dt
converge quand n → +∞
0
(On pourra vérifier que un est décroissante et minorée).
Application : ∃γ ∈ R,
1+
1
1
+ · · · + = log(n) + γ + o(1),
2
n
n→∞
La constante γ est appelée constante d’Euler.
4.4
Séries alternées
P
On appelle série alternée toute série ( un ) de la forme
un = (−1)n an ,
avec an ≥ 0.
Théorème. 4.4.1.
P Séries alternées.
On suppose que
un est une série alternée :
un = (−1)n an ,
∀n ≥ 0,
avec
an ≥ 0, an & et lim an = 0.
Pn
On note
k≥0 uk la somme de la série (si elle existe), Sn =
k=0 uk (sommes partielles) et
P S =
Rn = k≥n uk (le reste de la série).
(i) La série de terme général un converge (donc S et Rn sont bien définis).
(ii) S2n décroissante, S2n+1 croissante, et
P
S2n+1 ≤ S ≤ S2n ,
∀n.
(iii) Rn est de même signe que (−1)n , et
Rn = an − an+1 + an+2 − · · · ≤ an ,
4
∀n.
Attention
P une série peut etre alternée à partir d’un certain (ou définie à partir d’un certain rang). Par
exmple n≥1 (−1)n+1 an = a1 − a2 + a3 − a4 + · · · (avec an ≥ 0, an décroissante vers 0). Le résultat de
convergence s’applique encore (puisque cela revient à modifier qu’un nombre fini de termes par rapport
à une série alternée à partir du rang n = 0, par exemple). Aussi |Rn | ≤ an , mais les autres inégalités
peuvent etre décalées.
X (−1)n X (−1)n
avec α > 0, ...
,
Exemple :
n+1
nα
n≥0
4.5
n≥1
Convolution de séries
P
P
Definition.
4.5.1.
Soit
an et
bn deux séries à terme général an , bnP
∈ C. On appelle série convolée
P
P
n
de
an par
bn (ou "série produit"), la série de terme général cn = k=0 ak bn−k . (On note parfois
c = a ∗ b).
P
P
P
P
P
P
Théorème.
4.5.2.
bn CV alors P cn CV et
P
P (i) Si an , bn ≥ 0,P an et
P cn =
P( an )( bn ).
(ii) Si
an et
bn sont AC alors
cn est aussi AC, avec
|cn | ≤ ( |an |)( |bn |), et on a encore
l’égalité
X
X
X
cn = (
an )(
bn ).
Théorème. 4.5.3. La fonction exponentielle complexe ez . Pour tout z dans C, on pose
ez =
X zn
.
n!
n≥0
1)
2)
3)
4)
La série est AC pour tout z ∈ C.
Pour tout y, z ∈ C : ey+z = ey ez
Pour tout z ∈ C : |ez | ≤ e|z|
Pour tout x, y réels : |eiy | = 1, et |ex+iy | = ex > 0.
On peut alors définir cos(x) = Re(eix ) et sin(x) = Im(eix ) et retrouver les formules de trigonométrie
classiques. Le nombre π peut être défini comme le plus petit réel > 0 t.q. cos(π/2) = 0.
4.6
Complément* : transformation d’Abel
Il s’agit typiquement de la transformation suivante, pour p < q :
q
X
q
X
an (bn+1 − bn ) =
n=p
bn (an−1 − an ) + aq bq+1 − ap bp .
n=p+1
C’est un analogue discret de l’intégration par parties :
Z
b
0
Z
u(x)v (x)dx = −
a
b
u0 (x)v(b) + u(b)v(b) − u(a)v(a)
a
P
Pn
Théorème. 4.6.1. (Règle d’Abel P
pour
an un .) On suppose An =
i=0 ai bornée, un → 0 et
P
|u
−
u
|
convergente.
Alors
a
u
converge.
n+1
n
n
n
n≥0
P
Corollaire. 4.6.2. Si An bornée, un réelle, positive, décroissante vers 0, alors
an un converge.
P
niθ
Exercice. 4.6.3. Montrer que n≥1 enα est AC pour tout α > 1, et CV pour tout α ∈]0, 1] et θ 6= 0[2π]
(pour α ∈]0, 1] on pourra utiliser la règle d’Abel).
5
4.7
Compléments* : moyenne de Césaro, comparaison des critères.
1
n
Pn
xi → `.
√
Exercice. Montrer que si un > 0 et lim uun+1
= `, alors lim n un = `. En particulier, la règle de Cauchy
n
implique la règle de d’Alembert (puisqu’elle nécessite une hypothèse plus faible).
Exercice (moyenne de Césaro). Si xn → `, alors
4.8
i=1
Compléments* : sommes de Riemann
Théorème. 4.8.1 (Sommes de Riemann). Soit f continue par morceau : [a, b] → R ou C. Pour n ≥ 1
on définit ai = a + i b−a
n et (xi ) tels que xi ∈ [ai , ai+1 ]. Alors
un =
Z b
b−a
n→∞
f (x0 ) + · · · + f (xn−1 ) −→
f (t)dt
n
a
On pourra démontrer en exercice le résultat dans le cas où f est Lipschitzienne : |f (x)−f (y)| ≤ L|x−y|
Rb
pour tout x, y. Dans ce cas, |un − a f (t)dt| ≤ 12 L(b − a)2 /n.
6