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Edith Soonckindt
Auteur, traductrice, éditrice, conseillère
éditoriale
Un éditeur mirobolant
http://soonckindt.com
Author : didou151515
Créées fin 2012 à Bordeaux, les éditions Mirobole vous invitent à pénétrer dans
des mondes inconnus à travers leurs deux collections, « Horizons noirs » pour
la littérature policière,
et « Horizons pourpres » pour la littérature de l’imaginaire. Anticipation russe,
polar polonais, absurde sauce moldave, conte d’épouvante suédois, whodunit
version turque… de
véritables expéditions littéraires en terres étrangères.
Entretien avec Sophie de Lamarlière, co-fondatrice.
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1-Vous semblez vous être placées d’emblée sous le signe du
pluriculturalisme. N’est-ce pas un pari insensé par ces temps éditoriaux
difficiles, quand on sait que cela implique, entre autres frais généraux, un
coût d’achat de droits de traduction, et ensuite les émoluments du
traducteur ?
Insensé, oui, c’est tout à fait le terme ! Il faut être passionné pour se lancer dans
la littérature étrangère aujourd’hui. D’autant que, et heureusement, les
traducteurs sont mieux rémunérés qu’avant. Mais nous avons parié sur la
curiosité des lecteurs, qui ne trouvent pas toujours de littérature intéressante en
France et sont avides de découvrir des terres vierges ou quasi.
2- Etre une petite maison (par la taille, mais grande par l’ambition !) serait-il
un atout garant de liberté éditoriale, entre autres avantages ?
La liberté, c’est d’abord la possibilité d’exister, et de perdurer. Donc il nous faut
arriver à plus de stabilité pour envisager l’avenir de manière plus sereine, ce qui
n’est pas encore tout à fait le cas aujourd’hui, malgré de très bons débuts. Sinon,
oui, bien sûr qu’une petite structure permet plus de liberté : nous ne sommes pas
dix à prendre les décisions, nous ne publions que ce qui nous enthousiasme,
notre diffuseur et les libraires nous garantissent une belle autonomie… Notre toute
première parution a ainsi été un recueil de nouvelles incroyable, Je suis la reine,
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de l’auteur russe Anna Starobinets ; si nous avions été une plus grosse structure,
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avec des impératifs économiques plus contraignants, faire ce choix aurait été
impossible. On fonctionne à la « foi », on prend le temps d’installer des auteurs.
3- Qu’est-ce qui, selon vous et dans les deux domaines qui sont les vôtres,
fait un bon livre ?
Un bon livre, c’est un auteur qui arrive à toucher le lecteur, à susciter une
émotion chez lui. C’est donc d’abord un ton unique. C’est souvent aussi une
analyse percutante de la réalité. C’est enfin la capacité du livre en question à
toucher le lecteur au moment précis de sa parution, ce qui n’est pas forcément
évident. Le chef-d’œuvre inconnu, ce n’est pas notre ambition !
4-Et qu’est-ce qui fait un bon livre traduit, donc une bonne traduction ? Les
mêmes critères ?
Non, pas les mêmes critères puisque le traducteur ne propose pas son univers,
mais celui de l’auteur. Une bonne traduction, c’est une fidélité à l’univers de
l’auteur, à son style, c’est
aussi une audace et une inventivité qu’il faut souligner, ainsi qu’un fol amour de
la langue française ! Nous aimons bien recruter des jeunes traducteurs, pas
forcément très expérimentés, mais chez qui nous décelons du talent et de
l’enthousiasme ; parfois, ils sont plus « chevronnés » et c’est aussi une
expérience très enrichissante. En tout cas, je demande toujours un essai sur
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quelques pages, et je sens tout de suite s’il y a une adéquation entre
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traducteur et l’auteur.
le
5- Pari osé, vous ne semblez d’ailleurs publier que des traductions, ce qui
est assez inhabituel ! Pourquoi ? Vous ne trouvez pas le genre de livres que
vous cherchez auprès de plumes françaises ?
La littérature étrangère, pour moi, c’est un peu le symbole du goût de l’autre,
c’est cela qui m’intéresse. Et je ne le retrouve pas forcément chez les auteurs
français, souvent davantage tournés vers l’introspection, la quête familiale ou
psychologique… Même si j’ai l’impression qu’on arrive à un tournant et que les
auteurs français se détournent de plus en plus de la littérature « nombriliste » pour
faire vraiment embarquer le lecteur. Donc nous n’excluons pas du tout de publier
à terme des auteurs français, la réalité de notre pays est devenue tellement
ubuesque qu’ils devraient trouver matière à inspiration sans trop de peine !
6-Comment choisissez-vous les livres en question ? Un prix, une histoire,
des critiques ? Vous avez des « scouts » littéraires, ou bien tout se décide à
la Foire de Francfort ?
Ni l’un ni l’autre, heureusement ! Pas de scouts pour l’instant, nous faisons
sans, avec du temps et beaucoup de curiosité. Je discute avec des lecteurs dans
tel et tel pays, pour savoir ce qu’il y a d’intéressant en librairie chez eux ; nous
avons des rapports privilégiés avec des agents littéraires assez talentueux, ou
directement avec des maisons d’édition étrangères. Nous naviguons pas mal sur
Internet aussi, à la recherche de la perle rare. En général, c’est plutôt une
démarche personnelle, c’est rare qu’un livre nous soit proposé sur un plateau
d’argent…
7-J’ai particulièrement aimé ce livre publié chez vous, L’Autre Ville de
Michal Ajvaz, un récit fantastico-merveilleux d’un auteur tchèque dont
j’ignorais tout jusque là. Comment s’est-il frayé un chemin jusqu’à vous ?
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Ajvaz est vraiment l’histoire d’un coup de cœur. Nous le devons à une formidable
agente littéraire en République tchèque, qui a su me faire partager son
enthousiasme. Une traduction anglaise était disponible, j’ai donc pu me plonger
dans ce texte, ensuite j’en ai parlé autour de nous, à des traducteurs, et malgré le
défi que représentait un tel roman j’ai tenu bon…
8-Dans tous vos choix, vous fonctionnez au coup de coeur ou c’est plus
cérébral, analytique que cela ?
Il y a toujours un peu des deux : un coup de cœur dont nous savons qu’a priori il
se vendra très peu, nous en publions et nous l’assumons, mais nous tâchons tout
de même de choisir des titres que nous saurons défendre, et donc vendre, ne
serait-ce que par respect pour l’auteur qui mérite toujours le meilleur !
9-Un livre étranger doit-il contenir certains ingrédients pour séduire un
public francophone, ou bien tout livre étranger est forcément intéressant
parce qu’étranger ?
Je crois que les lecteurs français sont exigeants avec la littérature étrangère,
parce qu’ils en ont toujours eu de la très bonne chez eux. Donc lire de la
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littérature étrangère parce qu’elle est étrangère, je ne pense pas que cela les
intéresse, et je suis comme eux. Ils choisissent un livre parce qu’il leur apporte
une vision originale, différente, avec de la satire, ou de l’humour… Au-delà des
singularités de tel pays, de telle culture, les bons auteurs sont ceux qui ont une
stature universelle. Un peu comme le dit Térence : « Rien de ce qui est humain ne
m’est étranger. ». Peu importe qu’on soit marseillais, moldave ou mongol, ce qui
compte c’est ce qu’on à dire.
10-Diriez-vous que la littérature étrangère, forcément plus exotique, est par
ailleurs narrativement plus riche que la française ?
C’est clairement mon impression, mais bien sûr ce sont des généralités, et c’est
bien moins vrai maintenant. Peut-être le succès de la littérature étrangère a-t-il fait
comprendre aux auteurs français que les lecteurs attendaient de vraies histoires,
de vrais personnages ?
11-Pouvez-vous nous recommander 3 livres de votre catalogue pour un
lecteur qui voudrait découvrir Mirobole ?
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Ce ne sont plus des questions, c’est de la torture… ! Mais à la réflexion, les trois
titres « mirobolants » à lire toutes affaires cessantes seraient : L’Autre Ville, de
Michal Ajvaz, une fabuleuse plongée onirique, un roman plus étrange
qu’étranger ; Les Impliqués (ou Un Fond de vérité), de Zygmunt Miloszewski, un
polar polonais intelligent et passionnant ; et, enfin, les incroyables polars turcs
d’Alper Canigüz, au choix L’Assassinat d’Hicabi bey ou Une fleur en enfer, à la
fois très noirs et très loufoques, un bonheur de lecture.
12- Vos projets, vos envies jusque fin 2015 (et au-delà si vous en avez) ?
Je voudrais conquérir davantage de libraires, ce sont vraiment des passeurs
essentiels pour nous et j’aimerais prendre davantage de temps pour les
rencontrer car nos discussions sont toujours passionnantes et ils exercent un
métier très exigeant. Et puis découvrir et faire découvrir de nouveaux territoires,
en ce moment je m’intéresse beaucoup à la Grèce, au Portugal, à l’Asie... Et
puis, étoffer l’équipe serait un vrai pas en avant. Nous y travaillons !
à paraître :
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