Mensans n°10 - Mensa France

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Mensans n°10 - Mensa France
Mensans
Numéro 10, printemps 2010, ISSN 1771-8813
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NON
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NO !
NON !
NON !
NON !
Édité et publié par Mensa France, 20 rue Léonard de Vinci, 75116 PARIS.
www.mensa.fr
à propos
azertyuiop^qsdfgh
Mensa France
quelques mots sur l’association
l’adhésion.
les moyens
Mensa France est une
Mensa France tire ses
association à but non lucratif
ressources des cotisations et des
(loi 1901) affiliée à Mensa
séances de tests.
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– passer une série de
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activités sont organisées par des
bénévoles. Le fonctionnement
de l’association est assuré par
tests psychotechniques lors
l’équipe du comité national et ses
d’une séance organisée par
délégué(e)s.
l’association et se situer dans les
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2 % les plus élevés à l’un d’eux et
6 % du montant des cotisations
10% à l’un des deux autres.
enregistrées par Mensa France.
– adhérer sur présentation d’un
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test de QI supérieur ou égal à 132
à elles 20 %. Le solde est utilisé
passé chez un psychologue.
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l’Université d’été et des
Mensans, ISSN 1771-8813.
Édité par Mensa France
Siret : 312 478 894 00032.
NAF 804D
Dépôt légal avril 2010.
Imprimé par France Quercy,
Mercuès, à 1 200 exemplaires.
Mensa France,
association loi 1901,
20 rue Léonard de Vinci
75116 PARIS
Contact : [email protected]
Site web : www.mensa.fr
Directeur de publication :
Alain Séris
Rédacteur en chef :
Françoise Courtaux
Mise en page :
Emmanuel Marc Dubois
Ont également participé à
l’élaboration de ce numéro :
Michèle Boulogne,
Thierry Brunschwig,
André Catillon,
Henri Descargues,
Christine Doucet,
Pierre Equey
Patrick Flodrops,
Ariane Geay,
Andrea Hanke,
Didier Morandi,
Michelle Nahon,
Jacques Quintallet,
Marc Vidal.
conférences.
Les tests
responsabilité
Mensa France organise des
Mensa n’a pas d’opinion. Mensa
séances de test d’admission
France permet à des personnes
dans la plupart des régions.
L’adhésion peut également se
au QI élevé de se rencontrer.
Les textes sont publiés et les
faire sur dossier.
activités sont organisées sous la
Tous les détails peuvent être
responsabilité de leurs auteurs et
obtenus sur simple demande à :
organisateurs respectifs.
[email protected]
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Mensans n° 10
Photo © www.photo-libre.fr
photo p. 32 F. Courtaux
jklmwxcvbn,cvazer
Édito
Sommaire
Lu récemment : « Claude,
ne
pourrait-on
demander
aux membres de proposer
À propos de Mensa
2
des sujets ? ». La Rédaction,
Éditorial
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pas Claude pour deux sous
La recette de la dinde au Whisky
4
et néanmoins moins bête
Non
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Mots croisés
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qu’elle n’y paraît, sait , sans
s’offusquer, traduire par « j’en
Non mais, sans blague
proposerais de bien meilleurs »1.
8
Histoire du mandarin Su Qin
10
scientifiques ? Vous seriez déçu par le résultat : nos
Dire non aux enfants
12
quelques vraies pointures écrivent dans les revues
Déchirure
16
Le Non au traité constitutionnel
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captivant que ce reflet de soi ? Vous avez tout lu sur
Quelques « Non » au fil de la Bible
20
ce sujet et vous en voudriez encore ? Ne serez-vous
La garde meurt
23
donc jamais réconcilié avec l’idée de la banalité de
Expression des émotions...
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votre fonctionnement cognitif ? Il est partagé par bon
Nom de non
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Non, rien de rien...
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La tirade du NON
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Diagordon
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Vous
voudriez
sans
doute
des
articles
dédiées à leurs disciplines, lisez-les donc.
Le Surdoué vous intéresse aussi, car quoi de plus
nombre des 140 millions de surdoués du monde…
pensez-y !
L’autre question est « Où vas-tu chercher tous ces
sujets ? ». Ce n’est qu’une affaire, très égoïste, de
désir frustré : celui de lire ce que je ne trouve pas
ailleurs, ou seulement en miettes.
Ceux qui osent se confronter à la banalité de
ces sujets révèlent leur talent. Et la diversité de
ces travaux, modestes ou plus ambitieux, fait la
spécificité actuelle de la revue.
Le chemin qui m’a amené au « NON ! » est passé
par le Bartleby d’Herman Melville. Ce copiste profère
régulièrement, et sans dire pourquoi, « I would prefer
not to », si difficile à traduire, avec son conditionnel
d’une extrême politesse (je préfèrerais) et sa chute
(ne pas [le faire]) posant un refus inébranlable, qui
ira jusqu’à l’anéantissement. Dans le monde réel,
ne savoir dire que oui est tout aussi dangereux.
Conclusion sans surprise : « In medio stat virtus ».
Françoise Courtaux
1
Comme vous le voyez, le message a été entendu : le
prochain thème vous laisse toute liberté de traiter les
sujets qui vous tiennent à cœur. Envoyez vos articles à
[email protected]
Illustration : portrait de Melville. © D.R.
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azertyuiop^qsdfgh
La recette de la dinde au whisky
Michelle Nahon nous invite à déguster en
bonne compagnie ce grand classique de la
gastronomie humoristique.
·Acheter une dinde d'environ 5 kg et une bouteille
de whisky ; prévoir du sel, du poivre, de l’huile
d’olive et des bardes de lard.
·Barder la dinde, la saler, poivrer et ajouter un filet
d'huile d'olive.
Réchauffer le four thermostat 7 pendant 10 mi­
nutes.
·Se verser un verre de whisky, le boire.
·Mettre la dinde au four dans un plat de cuisson. Se
verser deux verres de whisky et les boire.
·Après une debi-beuure, dituber jusqu'au bour.
Oubrir la borte, reburner, evourner, enfin bref,
mettre la guinde dans l'autre sens.
·S'asseoir sur une butain de chaise et se reverdir 5
ou 6 verres de whisky.
·Buire. Non luire, ou cuire la bringue bandant
4 heures.
·Et hop ! 5 berres de blus.
·R'tirer le four de la dinde.
·Se rebercer une bonne voulée de whisty.
·Rabasser la dinde (l'est tombée bar terre). L'ettuyer
et la voutre sur un plat... sur une assiette.
·Se biter la figure à cause du gras sur le barrelage
de la buisine. Ne pas essayer de se relever.
·Déciver qu'on est bien par derre et binir la mouteille
de misky…
·Blus tard, ramber jusqu'au lit, dorbir ze qui reste de
la nuit.
·Le lendemain matin, prendre un Alka-Seltzer,
manger la dinde froide avec de la mayonnaise
et nettoyer le bordel que vous avez mis dans la
cuisine.
Durée : une bonne journée.
Courrier des lecteurs
Photos Commons Wiki et Françoise Courtaux. Montage EMD
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Mensans n° 10
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Non
Patrick flodrops
— Non, je ne peux pas t’amener au bureau.
— T’as pris quelle ligne pour venir de Moscou ?
— Mais, Isa, la voiture est en panne, je t’en prie
— Niet… !?
chérie… fais un effort…
Elle commence à être lourde cette journée ! Non ?
— Non et non, tu as ronflé toute la nuit, débrouilletoi, je dors.
Enfin, seize heures, un grand moment de bonheur.
Elle qui, la veille a dit tant de fois : « Non, chéri,
J’ai RV chez mon médecin pour les résultats de
non, chéri, non n’arrête pas, non, non, c’est trop
mes dernières analyses. Quand j’arrive, il feuillette
bon… nooooooooon ! » lors de notre câlin mensuel,
attentivement mon dossier. Moi, légèrement inquiet :
le premier vendredi de chaque mois…
— Alors docteur, c’est grave ?
— Oui, très, asseyez-vous…
Bref ! Taxiiiii ! Gare du Nord SVP.
— Non, sorry, je vais jamais gare du Nord, endroit
pourri ! Non jamais.
Enfin on me dit oui ! Mon premier « Oui » du jour.
Je n’entends que ce « Oui ». L’espoir renaît.
Un petit tour au bureau, histoire de me montrer,
— Mais non, vous n’avez pas le droit.
pour apprendre que « Miaou-miaou » (c’est le
— Ah, non, j’ai pas le droit ? et qu’allez-vous faire ?
surnom de notre représentant à Shanghaï parce
Rien. Il est vraiment trop costaud.
— Madame, savez-vous où se trouve de bus le plus
proche ?
— No, sir, je suis irlandaise, connais rien ici. Sorry !
qu’il répond toujours « Miaou ! » – Non en chinois – :
« Elle pèse combien ta valise ? » « Miaouououou ! »),
ne viendra pas au prochain séminaire.
Vers sept heures, je ne me résigne pas à rentrer
chez moi, je vais prendre un verre de réconfort. Une
Le patron, déchaîné à mon arrivée, dégaine à la
jeune fille jolie et triste est là, seule. J’ose :
mitraillette :
— Puis-je vous offrir un verre mademoiselle ?
— Non, non, non, ce n’est pas possible, je rêve,
— Non, merci Monsieur, mon fiancé arrive...
2 heures de retard et tu oublies le dossier Nein-nein !
C’est trop, je rentre, vite.
Nein-nein, c’est le surnom de notre agent à
Hambourg. Il n’est venu que pour ça… Pourquoi
Dans mon lit à minuit, Isa ronfle, pour essayer de
« Nein-nein » ? Car ce personnage rubicond
m’endormir, je compte : 152 non et 1 oui dans cette
qui nous représente en Allemagne dit toujours
seule journée banale. Je dois déprimer. Je fais des
« Nein ! » quelle que soit la question ! Quelle heure
cauchemars où tournent des « Non, no, Niet, nein,
est-il : « Nein ! » Quel abruti…
miaou »...
Bref ! Ça ne va pas nous couper l’appétit.
Je n’en peux plus...
— Denise, pour moi ce sera un plat du jour, SVP.
— Non, terminé, je viens de vendre le dernier…
Alors, mes chers amis de la rédaction : non,
— Ah, bon, paupiettes alors…
noooooon, malgré ma sympathie pour vous, je
Quelle journée ! et on n’en a fait que la moitié.
— Allez, je vous offre le café pour me faire pardonner.
n’écrirai rien sur ce mot ridicule, sans intérêt,
agressif, antisocial, méchant !
— Non, nein, on a pas le temps.
On revient au bureau :
— Chloé, vous avez reçu le devis de « Niet-niet ».
C’est le surnom de notre agent à Moscou. Il dit
Mais oui bien sûr, vous pouvez compter sur moi
pour un prochain numéro sur le thème du oui…
cette admirable et gentille locution !
Patrick Flodrops
toujours « Niet » quelque soit la question :
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Mots croisés
michèle boulogne
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Mensans n° 10
 
 
 
 
 
 
 
HORIZONTALEMENT
H 1 : Mené par la partie adverse
H 2 : A voir dès que l’entend plus un petit « non »
- Grand russe qui se jette dans l’Arctique
- Opposé à soma chez l’être vivant
H 3 : Ses jeux ont suivi la mort de son lion
- En refusant toute cacophonie
H 4 : Acceptable si elle est passagère et ne mène
pas au renoncement
- Démonstratif
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- Voyelles
- Agréable au marin, désagréable à l’enfant
H 5 : Un début de rondeur - Organe de résistance
au Proche-Orient - Non significatif - Ne ferai pas
la sourde oreille - Deux points H 6 : Fabrique des
fonctionnaires - Manifesterais mon désaccord
- éliminés
H 7 : Peut atteindre ceux qui n’ont pas su dire non
- Jeune lourde - Personnel - Rehausseur
jklmwxcvbn,cvazer
H 17 : Un peu d’hédonisme - Non écrit - Espace
créé en 1994 - Ou Brno
H 18 : Peut faire oublier le quotidien - Ovation ou
exil - Négation - Noir, blanc et deux fois rouge
H 19 : Ne bougera pas, même s’il n’est pas
d’accord.
H 8 : Empêche l’acquiescement - Dit « non » pour
« oui »
H 9 : Ne dit pas non, surtout s’il est massif - Difficile
de dire non à quelqu’un qui le lance - Participons
au déni de propriété - Dit non à la morosité
H 10 : Non acquises - Non rampante - N’a pas su
dire non à la tentation
H 11 : Agis - Élimine - Personnel - Cette roue-là ne
doit pas tourner rond
H 12 : Préposition - Enthousiasmes communicatifs
- S’accordent aux hautbois pour résonner
H 13 : Élimine - Doivent informer et orienter les
jeunes - Ferme la porte - Ne peut être nul pour un
bon classement
H 14 : Mieux vaut qu’il soit à blanc - Initiales
malheureuses pour une assurance heureuse mais
malmenée - Négation - Qu’on lui dise oui ou non,
il met du temps à intégrer - Possessif
H 15 : Ce bavard ne se limite jamais à un « oui » ou
à un « non » - Lettre grecque - Note
H 16 : Façon de gérer propre à exaspérer les
partisans du « non » à l’Europe (et les autres
aussi !)
VERTICALEMENT
V 1 : Rassemble ceux qui disent non à ceux qui
avaient dit non
V 2 : Éliminerons - N’a pas dit non à D.H. Lawrence
ni à H. Miller - Petit if - Refus anglais
V 3 : Espoirs de récompense, soumis au couperet
du « non » final - Saillie osseuse
V 4 : Beaucoup - Ciel - Reçu - Mot doux pour celui
qui n’a pas dit non
V 5 : Quand elle argumente, elle ne se limite pas
à un « oui » ou à un « non » - De Bogota ou de
Quito
V 6 : Voyelles - La majorité lui a dit oui - Manche
ou nappe - On ne pouvait dire non à ce travail
- Trouvées dans la quiétude
V 7 : N’étaient pas attendus - Font la soudure ou le
triomphe - Dites non si l’on veut vous en couvrir
V 8 : Pluriel qui devient singulier s’il est royal
- Acceptai de restituer - Aveugler
V 9 : Appliquée à qui a transgressé les règles
- Brillait en Égypte
V 10 : Pour ne dire ni oui ni non - Matière vivante
et ici remontante - On y trouverait la vérité
- Bohémienne qui servit un temps de frontière
V 11 : Au Sud, disait le contraire de « non »
- Acceptasse - Pression - 4 saisons
V 12 : Vieux moyen de reproduction - Ne dit que le
positif - Expriment leur profond désaccord
V 13 : Ceint sans cran - Chez Abraham - Au Nigéria
- Méchante sauf quand elle est dans un sac
V 14 : Part d’une locution adverbiale qui ne saurait
concerner la V-5-1 - Symbole de renoncement
aux plaisirs matériels (ou à la jeunesse !) - Où l’on
peut s’engager ou se désengager très rapidement
V 15 : Il serait raisonnable de dire non à ces
ardentes américaines - Refusa - Préposition
V 16 : Support - Sa tête se mange en sauce
- Personnel - Levant - Appréciation de correcteur
content
V 17 : Plantation - Évite l’énumération - Regardai
V 18 : Imite n’importe comment - Taillent et coupent
dans du solide
V 19 : Guides pour le transport - Transportera
- Relie
V 20 : Un « non » est le symbole de son échec
- Dit non à ce qu’il a aimé.
Solution p. 24
Photo © www.photo-libre.fr
Mensans n° 10
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azertyuiop^qsdfgh
Non mais, sans blague...
André catillon
Sacré nom de NON, Mensa lors...Ce jour-là j’étais
Le oui, charmant et engeôleur2, nous rassure et
en train de lire le Ménon en attendant le méchoui et
nous comble de bonheur sans prendre trop de risques
les huit mets qui l’accompagnent d’ordinaire quand
et lui, non content de parader, nous invite à toujours
1
mon amie Manon me tendant le Mensans 9, lança
« positiver » selon l’injonction d’une entreprise de la
d’un air menaçant : « cette fois-ci, c’est NON ». Bon
grande distribution. Pousser un chariot entre deux
alors c’est oui d’abord, prenons-le au mot : pourquoi
rayons d’un supermarché constitue en effet un bel
non ? Avec ces deux-là toujours prêts à se faire la
idéal de vie et un réel progrès dans l’histoire du
guerre pour un oui pour un non... oui mais il faut bien
genre humain mais va-t-on pour autant négativer à
se rendre à l’évidence, le NON est beaucoup plus
tout va ? Ça va pas non !
négatif que le oui. NON est un adverbe qui a été
Car souvent le NON choque et déçoit : en 66, avec
naturalisé français dès les origines de notre langue
sa poupée qui fait NON le chanteur Michel Polnareff
et qui, depuis, se livre à une lutte sans merci avec le
est prêt à donner sa vie pour qu’elle dise « oui »
oui dans l’espoir d’avoir le dernier mot. Qu’en est-il
tandis que Serge Gainsbourg nous bricole, en 67,
exactement ? Fouinons un peu.
un très ambigü et très subtil « Je t’aime moi NON
NON est vraiment très léger et très direct comme
plus » auquel fait écho, en 69, le « mais NON, mais
son collègue le oui ; mais le oui est plus gai et
NON... » du philosophe Henri Salvador. Éblouissant
tellement plus joli. Le oui s’inscrit naturellement dans
NON de ces fous chantants !
le sourire et vous tend les lèvres tandis que le non,
Bien sûr l’oui nous charme l’oreille et l’ouïe préfère
lui, bougon et renfrogné, se tient toujours prêt à
faire la sourde oreille au NON. Mais en réalité le
montrer les dents. Comme dit Ravel, c’est un beau 0
oui, avec toutes ses affirmations dégoulinantes
(zéro) rempli de N. Honteux et confus, il cache
d’obséquiosité visqueuse, me dégoûte. Pensez à
sa mauvaise volonté et rumine son ressentiment
tous ces béni-oui-oui en manque de cirage prompts
enfoui au fin fond du larynx. À l’instar de tous les
à se précipiter dans l’acquiescence gluante et
« monsieur niet », il nous brise les castagnettes et
malsaine. C’est cela, oui.
évite toujours de passer par la place de la Concorde,
préfèrant bouder dans son coin.
Alors non merci ! Ça suffit, faut savoir dire stop, il
est grand temps de réhabiliter le NON. Ratatinons
NON est un râleur professionnel qui ne daigne
le oui et au NON donnons un plus grand renom.
pas dénier le refus. Parfois même, il sent le gros
Cependant, s’il faut oser dire NON, ce n’est pas
mot quand la colère pousse à déclarer : « alors !
comme la môme Piaf qui accepte sa soumission3 en
c’est oui ou m... ». Enfin, il doit toujours se justifier
meuglant : « I’m fout des coups mais je l’aimeuh ! »
comme s’il avait commis une faute inexpiable et ce
et d’en rajouter une couche, en 56 de large, avec
NON si sombre et si sinistre nous fait peur à tel point
« NON je ne regrette rien ! » de quoi émouvoir
qu’on lui préfère le timide « oui mais ». Bref, qu’on le
Simone de Beauvoir4, n’est-il pas ?
prenne dans un sens ou dans l’autre, avec ses trois
Donc, non pas un NON servile comme le oui,
petites lettres, le non est toujours égal à l’ oui même,
trop passif et ennuyeux, peut l’être, mais un NON
et pour vous le dire tout net, c’est un (cha)mot qui au
plus offensif et engagé, expression de la liberté. Il
palindrome adhère.
y aurait des non-sens, le sens étant naturellement
2
Ndlr : autrement dit captivant ?
Avec, par exemple, cette touchante parole féministe en
diable, tirée de Mon homme « la femm’ à vrai dir’ n’est faite
que pour souffrir par les hommes »
4 Auteur de Le deuxième sexe comme si le premier ne
suffisait pas assez à compliquer la vie comme ça...
3
1
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Le Ménon est un des dialogues de Platon, plus lointain
mais beaucoup plus accessible que Madame de
Maintenon ou la Princesse de Clèves, si j’ose dire...
Mensans n° 10
jklmwxcvbn,cvazer
bon, et jamais de oui-sens, tout cela me semble bien
absurde. Heureusement reste la jouissance de dire
non. Celle qui nous permet d’être en paix avec notre
conscience, de goûter le plaisir absolu de dire NON
et de ne plus se rendre esclave au point de ne pas
savoir dire NON.
Souvenez-vous, on en avait déjà vraiment marre
de dire oui à tout et à rien : « Ouh ! qu’il est mignon et
une cuillerée pour papa et une cuillerée pour maman,
ouh ! qu’il est content ! »... « NON ! z’en veux pas
d’ta soupe, na ! » suivi plus tard du célèbre « NON,
non, non, j’irai pas chez ma tante »... « Ouh ! qu’il
est grognon ». Tante est si bien que de la plus tendre
des gazettes à deux balles, car on aurait alors
enfance à l’âge adulte le NON a toujours été une
« deux NON pour un oui ».
bonne occasion de s’affirmer et le cancre de Prévert
Dans le même ordre d’idées à la con, on pourrait,
qui dit NON avec la tête, dessine sur le tableau noir
par exemple, en matière de référendums (ou
du malheur le visage du bonheur.
referen-da pour les puristes ?) proposer ce genre
Oublions que parfois le NON blesse et redonnons
de question « Refusez-vous de voir modifier l’ancien
lui toute sa noblesse. Ratatinons le oui et au NON
texte constitutionnel tout jauni pour y substituer
donnons un plus grand renom. Comment faire ?
l’innovant projet de développement durable tout
Créer un comité de défense du NON ? La réponse
rajeuni instituant la présidence à vie ? »... « NON,
est évidente : oui et non, enfin peut-être ça dépend.
bien sûr », car, c’est bien connu, les peuples sont
On pourrait s’inspirer d’un grand classique maître
bornés, ne comprennent rien à rien et souvent se
ès-litote qui fait déclarer simplement à son héroïne
trompent de réponse, refusant même parfois de
stupéfaite5 : « Va, je ne te hais point » voilà le négatif
respecter les sondages ou, pire encore, les conseils
réhabilité et, avec tous ces ouï-dire qui nourrissent
avisés des agences de notation.
les non-dits, on peut enfin montrer fièrement sa
photo.
Cela ferait plaisir à tout le monde de voir comment
s’épanouit le NON : à celles et ceux qui veulent
Voici une piste de recherche à la suite du grand
classique :
revaloriser le NON et à celles et ceux qui veulent
à tout prix nous faire dire oui au point de nous
Par exemple, à la mairie de Thonon-les-bains,
reposer indéfiniment la même question-clef qui n’en
le maire : « Monsieur Charles-Henri Bambelle de
est pas une mais qui verrouille toujours un peu plus
Lamotte-Picquet refusez-vous de prendre pour
l’exercice des libertés démocratiques.
épouse Mademoiselle Ninon Djàoui ? » réponse :
« NON bien sûr ». « Et vous, Djàoui Ninon, dites-
Nous serions restés condamnés au oui sans
vous oui à ce refus de ne point vous prendre
trouver les moyens d’être réjouis du NON ? Ah ça
pour épouse proféré sans hésitation avec un bel
non ! Étonnant NON, nous y tenons car avec ce
enthousiasme par Charles-Henri ou bien préférez-
NON-là, le positif est de retour... Et si le oui est
vous dire NON à ce non en forme de oui ? »
bien joli, voyez ce NON comme il est mignon. Finie
réponse : « NON bien sûr ». Ce serait beaucoup
l’injuste discrimination entre le oui et le NON, les
plus clair et nous éviterait un titre du genre « deux
voici réconciliés. In-ouï, NON ?
oui pour un nom » qui sévit à la rubrique mariages
5
André Catillon
Corneille avec sa Chimène, pétrifiée à l’idée de déclarer
son amour au Cid, littéralement tueur de son propre
père... mon dieu quelle histoire !
Photo © Simpsons wedding cake topper shop
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azertyuiop^qsdfgh
Histoire du Mandarin Su Qin
Pierre Equey
Connaissez-vous, chers amis, l’histoire de Su Qin,
frumentaire tendue et les continuelles menaces
un mandarin du temps des Royaumes Combattants ?
de guerre, faisaient que personne n’aurait pu se
permettre d’entretenir des bouches inutiles.
-o-oOo-o-
Vint alors un soir, vint alors un matin : après un
Le jeune Su Qin était le désespoir de sa famille :
houleux conseil de famille, les siens le munirent
inhabile, il ne savait pas tisser les paniers d’osier ;
de deux jours de provisions et le mirent à la porte.
il peinait à conduire les bœufs dans les champs ;
Ensuite le pauvre Su Qin voyagea… voyagea… il
l’idée de préparer les animaux de bouche lui faisait
ne perdit toutefois jamais une occasion de lire et de
horreur.
s’instruire.
-o-oOo-oArrivé à l’âge des examens, il avait tellement appris
qu’il se crut en mesure de passer en candidat libre
les examens mandarinaux. Mais il échoua ; et faute
d’argent, il reprit sa vie, faite de lecture, d’errance et
de désespérance.
Un jour qu’il errait près de son village natal, le poids
de son estomac creux l’entraîna vers sa famille pour
La seule activité pour laquelle Su Qin montrait
quelques tendances et appétences était la lecture.
Celui-ci se plaisait à déchiffrer tous les textes qui
lui tombaient sous la main. Mais, se demandait sa
famille: «A quoi pouvait bien servir l’art philologique
à une personne destinée à cultiver les champs sa vie
durant, tel que l’était Su Qin?»
Marié très jeune, comme c’était alors la coutume,
Su Qin ne réussissait pas non plus à donner une
descendance à sa famille.
Les temps étaient alors très durs en ce royaume de
Wu, dans cette Chine d’avant la Chine. La situation
Illustrations © Chinalane
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Mensans n° 10
jklmwxcvbn,cvazer
quémander un bol de riz. Mais personne ne fit mine
de le reconnaître.
Ensuite, Su Qin commença une très brillante
ascension sociale. Il devint conseiller du roi de Wu et
Toutes les portes se fermèrent devant le mendiant
confident des plus hauts personnages de son temps.
Son entregent lui permit même de fédérer, au
Su Qin.
moins pendant quelque temps, tous les royaumes du
Milieu du monde contre les manigances de celui qui
allait devenir le Premier Empereur, Qin Shi Huangdi.
Un jour, Su Qin fut chargé par le roi de Wu de
transmettre un important message au régent de
Zhao. La route que devait emprunter Su Qin passait
par son village natal.
Toutes les portes s’ouvrirent alors pour accueillir le
mandarin Su Qin...
-o-oOo-oJolie histoire. Non? En fait Sun Qin, c’est
le type-même de l’homme qui a su dire non
à son destin. La pente naturelle de son existence
eût dû le conduire soit à être l’un des 100 millions
de paysans que comptait alors la Chine, soit à
être l’un des 100 milliers de vagabonds-lettrés qui
parcouraient les routes de ce pays.
Mais, au lieu de cela, parti de rien, il devint (au
moins pendant quelque temps) l’une des trois ou
quatre personnes les plus influentes de notre planète.
Pierre Equey
Le pauvre Su Qin reprit alors ses vagabondages,
jusqu’au jour où le destin lui fit rencontrer le lettré Gui
Guzi (auteur notamment du «Benjing
Yinfu Qisu», un important ouvrage de
stratégie miliaire concurrent de celui
de Sun Zu).
Ebaudi par les dons du jeune
homme, Gui Guzi le prit sous sa
protection. Gui Guzi enseigna alors
à son élève le confucianisme, la
divination, l’astrologie et tous les arts
nécessaires au métier de mandarin,
jusqu’à ce que Su Qin soit à nouveau
en mesure de passer les examens ; et
cette fois-ci, il les réussit !
… Su Qin venait de changer de
classe sociale.
-o-oOo-oIllustrations © Chinalane
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Dire non aux enfants
Didier morandi
Introduction
Par conséquent, vu que je parle d’expérience, je
Lorsque j’ai commencé à réfléchir à la rédaction du
texte ci-dessous, j’ai eu envie de l’intituler « Dire non
vais donc donner mon avis. Restera au Comité de
censure – et au lecteur – de valider mon ouvrage.
à ses enfants », puis j’ai pensé qu’il arrivait tous les
jours que des adultes doivent dire non à un enfant
1° Pourquoi dire non ?
qui n’est pas forcément le leur. J’ai donc choisi
On peut devoir dire non tout d’abord lorsque
comme titre : « Dire non aux enfants ».
l’on a été sollicité directement par l’enfant, mais
Il y a de nombreux livres spécialisés sur l’éducation
aussi quand on a eu l’attention attirée par une
des enfants qui traitent de cette affaire. Depuis
circonstance, un danger, par exemple. Il y a donc
Françoise Dolto jusqu’à Thomas Gordon en passant
plusieurs occasions de dire non, et plusieurs
par l’incontournable Fitzhugh Dodson et son best-
raisons.
seller « tout se joue avant six ans ». J’aurais pu
Exemple : je vois un petit bout de chou s’approcher
décider de rédiger une synthèse vu que je suis
de la table de la cuisine où se trouve un truc qui
parent et que j’ai tous les bouquins possibles et
chauffe avec un récipient par dessus plein d’un
imaginables sur la question, n’ayant pas les mêmes
liquide probablement bouillant, avec un fil électrique
idées que ma chère et tendre épouse. Vous pourriez
qui pend. Si le bambin s’approche trop près du
me dire que nous aurions pu nous en rendre compte
cordon, l’œil allumé de convoitise, avant de pouvoir
avant de nous marier, mais je vous répondrai que
intervenir je crierai NON afin d’attirer son attention et
nous nous éloignons du sujet.
donc de gagner quelques précieuses secondes pour
le détourner du danger. En revanche, ma fille qui
vient me demander à 12 ans si elle peut aller à une
«boum» demain soir chez une copine « et elle ne
rentrera pas tard c’est promis Papa », je lui dis non
car ma décision reflète ma vision de l’éducation. Il n’y
a pas péril en la demeure. Donc voici spontanément
et rapidement identifiées deux premières causes :
a) éviter un danger immédiat,
b) manifester un choix éducatif.
Ensuite. Le fiston de 17 ans qui fait de la conduite
accompagnée vient dans mon bureau et me
De quoi parlons-nous ici ? De la nécessité objective,
demande s’il peut m’emprunter notre voiture (qu’il
indiscutable et indiscutée (par les adultes) de dire
commence à bien connaître) pour aller chercher
quelquefois non aux enfants. Je ne vais pas faire un
un copain à la gare. Le non résultant a une cause
cours magistral, et ce pour plusieurs raisons : tout
légale. Sans son Papa, point de conduite puisque
d’abord je ne suis pas enseignant, donc je ne pense
non accompagnée. Il peut le faire, il sait le faire,
pas être compétent pour faire un cours, ensuite les
mais il n’a pas le droit de le faire. C’est donc non.
cours magistraux c’est barbant et enfin parce que
La cause est d’ordre réglementaire. Nous écrirons :
cela prendrait beaucoup plus de temps pour le
cause c) respecter un règlement.
rédiger que de pondre un texte ex abundantia cordis
(« on » m’a spécifié de ne pas faire d’humour, donc
Après, vient dans le désordre le non de contexte.
je n’ajouterai pas entre parenthèses : « comme on
Un enfant n’a pas forcément une perception
dit en grec »).
psychologique du contexte. Supposons qu’une
photos © Courtaux
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de nos voisines vienne de perdre son mari, elle
« oh oui s’il te plaît Papa », mais Maman attend à
se retrouve seule. Or, chez elle, il y a un atelier
la voiture. Le non n’est pas une interdiction, mais la
fantastique où son mari justement aimait recevoir
manifestation d’une impossibilité circonstancielle. Si
le fils du voisin. Si le fils en question vient voir son
nous allons dans ce magasin, Maman va attendre.
Papa le lendemain de l’enterrement pour demander
Donc c’est non.
l’autorisation d’aller emprunter un outil à la voisine,
Cause f) s’adapter aux événements.
le Papa lui dira probablement non et lui expliquera
que c’est peut-être un peu tôt pour cela. Un non
Vient maintenant le non informatif : Ai-je fini de
contextuel, car un oui serait inapproprié.
tondre le gazon ? Non. La cause est très différente.
Cause d) s’adapter à un contexte psychologique.
Elle consiste en la transmission d’une information
objective avérée. Il reste 10 m2 à tondre, donc je n’ai
Puis en cherchant bien on peut trouver une cause
pas fini, donc je dis que je n’ai pas fini. La réponse à
que je qualifierai de technique, qui se rapproche de
la question « as-tu fini de tondre le gazon » est non.
la précédente mais n’a pas le même « ressort »,
Cause g) information objective.
donc ne nécessitera pas la même démarche de
justification, puisque l’on verra bien évidemment
En parallèle, sa sœur jumelle est la cause
qu’après avoir identifié les raisons du non, il faudra
subjective. Je suis en train de peindre dans mon
considérer s’il faut les justifier, et comment. Le
atelier. « Chéri, as-tu fini ce tableau ? Nous passons
petit garçon de huit ans qui veut aider son Papa
à table ». Indépendamment du fait qu’il n’y a pas
à bricoler et qui demande s’il peut prendre le
de lien très évident entre les deux événements, la
marteau pour « enfoncer une vis » essuiera un
réponse peut être non car le tableau n’est pas fini.
non technique. Le marteau n’est pas fait pour la
Mais ce non est subjectif. Personne d’autre que moi
vis, comme le tournevis n’est pas fait pour le clou.
ne peut dire quand le tableau sera fini.
Non contextuel fondé sur la technique, et non plus
Cause h) information subjective. On verra plus loin
sur un contexte psychologique. Deux non, deux
que c’est probablement la plus difficile à justifier,
manières de l’expliquer. Si nécessaire. Donc,
s’il le faut...
cause e) s’adapter à un contexte technique.
Pour
Pour compléter les non de contexte, il faut bien
conclure
provisoirement,
j’ajoute
la
manifestation d’un choix personnel : « Papa, veux‑tu
sûr, enfin je pense, ajouter le non circonstanciel.
du ketchup avec ton MacDo ? », « Non, merci ».
Exemple : on est en retard, on passe devant un
Cause i) le choix.
magasin de vêtements, votre fille vous demande si
vous pouvez y faire une rapide visite tous les deux
Je pense qu’en continuant à chercher, on peut
en trouver d’autres, mais cela pourrait devenir
fastidieux. Voyons maintenant plutôt si l’on peut les
regrouper, puis l’opportunité de les justifier, et enfin
comment les justifier. Je terminerai par quelques
considérations en cas de conflit.
2° Classification des causes de non
Petit tableau synthétique des causes de non vues
précédemment :
a) éviter un danger
b) choix éducatif
c) respect d’un règlement
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azertyuiop^qsdfgh
d) contexte psychologique
e) contexte technique
f) contexte événementiel
g) information objective
h) information subjective
i) manifestation d’un choix
On voit assez rapidement avec ce tableau que
certains regroupement peuvent se faire facilement.
Un danger est un contexte événementiel, on peut
donc regrouper a) et f).
Sa propre vision de l’éducation est une sorte de
règlement. On peut donc aussi regrouper b) et c).
Les causes d) et e) sont des causes de contexte,
on peut les mettre avec le groupe a)-f).
Enfin, g), h) et i) sont des informations, laissons-les
ensemble.
On a vu vite fait qu’à partir des éléments ci-dessus
nécessité intellectuelle, c’est l’âge de l’enfant. Où
développés, nous aurions trois groupes de causes
réside la différence ? La différence est qu’avant
de non :
10 ans, l’enfant acceptera une explication sans
Le groupe A : non de contexte,
vouloir systématiquement la discuter. Papa et Maman
Le groupe B : non de conformité à une règle,
sont Papa et Maman. Ils ont forcément raison.
Entre 10 et 13 ans, l’argumentation n’est pas encore
Le groupe C : non informatif.
Je suis sûr que les pédopsychiatres, les éducateurs
intellectuelle, mais plutôt fondée sur l’appartenance
spécialisés et tous les autres gens compétents sur le
à un groupe : « Tous mes copains ont un iPhone,
sujet ont déjà vu qu’il en manque, bien évidemment.
pourquoi tu ne veux pas que j’aie un iPhone ? »
Mais j’avais dit que je ne ferai pas un cours, juste un
La justification n’en sera que plus facile. Après,
exposé fondé sur mon expérience.
c’est l’âge difficile. Vraiment difficile. Les auteurs
compétents disent tous qu’il faut savoir dire non et
Voyons maintenant l’opportunité de justifier notre
expliquer pourquoi, même si l’adolescent semble ne
pas comprendre, ou ne pas vouloir comprendre. En
décision du non.
lui donnant nos raisons, nous peuplons son esprit,
3° Opportunité de justifier le non
nous formons sa conscience ; cela ressortira un jour
Sans trop rentrer dans le détail, je dirais qu’il faut
car il aura enregistré une référence, même s’il ne
accepter a priori de répondre au « pourquoi ? »
veut pas l’accepter comme telle.
quitte à donner une réponse telle que « c’est mon
Je pense avoir ainsi montré qu’à mon (humble) avis
choix, j’ai l’autorité et l’expérience, je te demande de
il faut toujours justifier le non. Ainsi, nous éduquons,
bien vouloir les respecter ». Mais à mon avis c’est
nous enrichissons, nous transmettons à l’enfant
la plus mauvaise réponse, car elle ne nourrit pas
le bien, le vrai (à condition d’en être convaincus,
l’intelligence de l’enfant.
évidemment), nous lui donnons des références pour
On lui préfèrera donc une réponse de type
réfléchir plus tard.
explicatif, qui peut commencer par « tu es encore
jeune pour comprendre » mais avec les adolescents,
4° Méthode de justification
l’expérience montre que ce type de réponse passe
J’ai été élevé dans les années 50. La méthode de
très mal ! On voit donc ici qu’il y a un second élément
justification à l’époque était simpliste, pour ne pas
pour décider de justifier ou non, outre celui de la
utiliser un autre qualificatif : « c’est non parce que
photos © www.photo-libre.fr
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jklmwxcvbn,cvazer
5° Et en cas de conflit ?
Il me semble que le conflit réel est celui qui
surviendra avec l’adolescent, car il ou elle ne veut
pas être convaincu. Les arguments du type « je
sais mieux que toi ce qui est bon pour toi » sont
nuls (même si la phrase est juste) car on oppose
une autorité dictatoriale qui n’enrichit pas l’enfant.
Les spécialistes proposent à peu près tous la même
approche : on discute, on argumente, et quand on
arrive à l’impasse (il n’y a pas pire sourd que celui
qui ne veut pas entendre, dit le dicton), on impose
fermement sa décision.
Un prêtre de mes amis m’a dit un jour que l’autorité
avait trois auditeurs : le cœur, l’intelligence et la
volonté. Le cœur, c’est le destinataire de la célèbre
phrase : « veux-tu faire cela pour me faire plaisir ? »
c’est comme ça, et si tu insistes t’as une claque ».
ou « cela ferait tant plaisir à ta Maman ». Certains
Peu efficace, à mon avis. Plus tard, dans l’armée, la
appellent cela le chantage aux sentiments. Je crois
méthode était similaire : « Chercher à comprendre,
que celui qui a inventé cette expression ne connait
c’est commencer à désobéir ». L’une des phrases
pas grand chose aux sentiments ni à l’amour...
les plus idiotes que j’aie jamais entendues de toute
ma vie.
Deuxième auditeur, l’intelligence : « Je vais t’expli­
quer pourquoi je suis obligé de te répondre non. »
Je pense avoir montré précédemment que
Et enfin, la volonté : « Je t’ai demandé genti­
la justification doit être éducative. Elle est
ment d’accepter mon choix, je te l’ai expliqué
donc a priori indépendante de l’âge ou des
soigneusement, nous avons discuté tous les deux,
circonstances. Si nous décidons de dire non,
maintenant cela suffit, ta mauvaise volonté pour
nous avons « nos raisons ». Hé bien, exposons-
comprendre me semble manifeste, donc c’est non
les. Bien sûr, une décision difficilement justifiable
et puis voilà. » À déconseiller. Si l’on peut « passer
sera « pléonasmiquement » difficile à expliquer.
en douceur » au lieu de passer en force, on transmet
Exemple : Papa et Maman ont prévu de faire un
plus de connaissance, il me semble.
câlin ce soir, faire un jeu de société ensemble avec
les enfants est difficilement compatible et la raison
Conclusion
n’est pas évidente à exposer. On se contentera
Je crois que dire non à un enfant, c’est l’occasion
d’une pirouette : Maman est fatiguée, moi aussi,
rêvée de lui transmettre un savoir. Plus l’enfant
nous souhaitons nous coucher tôt ce soir, faisons-
sera conscient et convaincu de cela, mieux il ou
le demain, ok ? »
elle recevra le non et les explications qui lui seront
Il n’y a donc à mon avis pas de méthode,
adjointes.
seule la vérité quand elle est bonne à dire, est
Cela dit, on peut faire des exceptions, pour la plus
une bonne explication. Mais il faut choisir nos
grande surprise et la plus grande joie de l’enfant :
mots, et se mettre à la portée de l’auditoire. On
« Oh merci Papa. Moi qui étais sûr(e) que tu dirais
explique. S’il faut argumenter, on argumente et
non ». L’éducation n’est pas un carcan, elle est un
tout le monde est content. Évidemment c’est là
rail au bord de la route pour faire connaître ce qui est
que les lectures passées seront utiles, pour aider
bien et éviter ce qui est moins bien.
l’argumentation.
Expliquons-le.
Didier Morandi
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Déchirure
christine Doucet
Non.
entrailles. Son flux lancinant m’enlace et m’embrasse
Si Dieu me donnait encore le choix, referais-
dans sa douloureuse étreinte, puissantes vagues de
je la même chose ? Je pense que non. Vous qui
remords et de regrets mêlés qui m’étreignent dans
êtes des hommes comme moi, des êtres faits de
leurs linceuls de givre.
chair, de sang et de passion, pourrez-vous jamais
Détestez-moi ! Oui, haïssez-moi tout votre saoul !
comprendre mon geste ? Tant d’années se sont
Il est facile pour vous de me dénigrer aujourd’hui.
enfuies et quelquefois, mes pensées s’abîment dans
Vous, qui n’êtes responsable de rien ni de personne.
les flots glacés et brumeux de ma mémoire.
Vous, qui n’avez aucune idée de ce que représente
Aux petites heures engourdies de la nuit, j’entends
encore les pleurs et les hurlements terrifiés. Les
une vie entière d’efforts et d’investissements. Vous,
qui n’êtes pas né pour devenir le meilleur !
années ont coulé sur moi pourtant, ces larmes
Oui, tel était mon but ! Je n’étais pas sur cette
d’enfants et ces cris pétrifiés m’assaillent dans
terre pour vivre chichement au milieu d’une foule
mes cauchemars les plus profonds. Non, je n’ai
anonyme mais j’étais là pour gagner. Le premier,
pas oublié ces instants de tourmente, ces minutes
le plus fort, le plus rapide, le plus puissant ! Voilà
atroces que j’ai vécues et qui me font chavirer vers
ce pour quoi je me suis toujours battu. Voilà ce
les tempêtes du désespoir.
qu’aurait dû être ma vie sans ce désastre. Après,
Vous qui pointez déjà sur moi un doigt accusateur,
les gens m’ont haï. Au lieu de voir en moi un homme
qu’auriez-vous fait à ma place ? Ils sont morts par
victime de sa vanité, ils n’ont su que m’insulter et
ma faute. Ils étaient pleins de vie et d’ardeur, le cœur
me jeter la première pierre. Ils n’ont pas éprouvé les
gonflé d’espoir, mais le tourbillon de mon orgueil
motivations profondes qui me poussaient toujours
les a inexorablement entraînés vers leurs fatales
vers l’avant. Ils n’ont pas ressenti cet incontrôlable
destinées. Tous morts à cause de moi !
besoin d’être au-dessus des autres et de dominer le
Assassin !, me jetterez-vous à la face, et vous
monde. Le pouvoir et la gloire étaient à ma portée,
aurez peut-être raison. Cependant, ne me méprisez
presque lovés dans le creux de ma main, mais je
pas ! Pensez d’abord à la situation qui était la
n’ai pas écouté les conseils que l’on me donnait,
mienne, jaugez mes
possibilités
et
mes
choix, critiquez mes
envies, mes passions,
mes
pulsions
et
mes déraisons mais
par
pitié,
ne
me
condamnez pas !
Lorsque
la
nuit
d’outre-tombe s’abat
sur
moi,
parfois
je
à
pense
eux.
La
houle troublante de
mes souvenirs se lève
alors en un souffle
glacial et m’engloutit
dans
ses
noires
© www.photo-libre.fr
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j’ai écarté tous les dangers d’une main frivole.
Alors, peut-être vais-je profiter de votre bon vouloir
Pourtant, qui aurait pu deviner que ma belle œuvre
quelques instants encore. Je sais d’ores et déjà que
s’achèverait ainsi ? Qui aurait pu savoir que des
je peux compter sur votre extraordinaire impartialité
années de travail glisseraient brutalement vers les
avant de vous révéler mon identité. Grâce à vous,
calomnies, la rage et la haine virulente de la foule ?
parce que vous tenez entre vos mains le flambeau
Vous, peut-être ?
de la justice et du bon droit, je n’ai plus honte de
Pardonnez-moi, mon Dieu ! Pardonnez cet
mes actes et je n’ai plus peur de votre regard.
homme fier, orgueilleux et sans scrupules que je
Sur cette feuille vierge, je me suis mis à nu. Je
suis ! La fin approche à présent pourtant même à
vous ai livré mon cœur et mon esprit sans retenue
l’instant du repentir, je ne peux renier ma conduite.
aucune, sans pudeur. Fini, les faux-semblants et les
Abject, horrible, fou à lier, tels sont les mots qui me
trahisons glacées. Terminé, les vérités non dites et
poursuivront par-delà le tombeau.
les mensonges voilés.
Les gens n’ont pas compris mon geste, vous non
Maintenant, mon salut repose entre vos mains.
plus d’ailleurs, et la raison de cette incompréhension
Cédez à la colère ! Criez votre infamie ! Argumentez !
s’impose enfin à mon esprit. Chacun d’entre nous
Reniez ! Hurlez ! Condamnez-moi ! Et souffrez aussi
sait, en son for intérieur, qu’il est différent des autres,
que je vous dise qui je suis ! Moi, homme faible et de
qu’il ne réagit pas comme les autres, qu’il est meilleur
peu de foi, partagé entre ses qualités et ses défauts,
que les autres ! Nous le savons tous pourtant, nous
écartelé par ses raisons et ses pulsions !
le masquons habilement sous d’épaisses couches
Mon nom est Bruce Ismay. J’étais le maître absolu
de politesse, de savoir-vivre ou d’indifférence. Moi,
à bord du Titanic et mon âme imbue sombra corps et
j’ai révélé ma vraie nature ! Je l’ai étalée au grand
biens en cette nuit givrée du 15 avril 1912.
jour, dans toute sa splendeur, comme un arc-en-
Christine Doucet
ciel incandescent irradie l’horizon de ses teintes
pourpres et brûlantes.
Tandis que vous... !
Vous, qui êtes droits, honnêtes et justes ; Vous, qui
ne ressentez qu’amour, tendresse et compassion
pour vos compatriotes ; Vous, qui représentez
l’intégrité, le courage et la pureté dans chacune de
vos actions ; Vous, qui n’avez jamais connu la flatterie,
la fourberie ou la bassesse ; Vous, qui ne connaissez
ni la vénalité, ni l’envie, ni la jalousie ; Vous, enfin, qui
n’avez jamais cédé à la tentation égoïste...
Oui, c’est bien de vous dont je parle. De vous, êtres
humains qui lisez mon histoire aujourd’hui, une once
de pitié au fond de vos yeux supérieurs, un semblant
de pardon sur votre sourire accusateur et une lourde
chape de soulagement qui danse dans votre esprit :
« Moi, je n’aurais jamais fait ça ! »
Mais qui est donc ce MOI qui vous brûle les lèvres ?
À quoi ressemble ce formidable EGO qui élève vos
âmes et m’enlise dans mon infortune ? Non, vous
n’auriez jamais fait cela ! Parce que vous êtes bons,
aimants et compréhensifs et que je suis influençable,
impitoyable et esclave de la démesure de ma vanité.
Bruce Ismay vers 1912
photo © Wikimedia commons
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Comment le « non » au traité constitutionnel...
Emmanuel Marc Dubois
Comment le « Non » au traité constitutionnel a
Les dirigeants du PS ont cru pertinent de
semé la zizanie au PS.
résoudre ce problème par la voie démocratique.
Non, je ne vais pas essayer de convaincre qui
En organisant un vote interne, ils ont demandé aux
que ce soit qu’il aurait fallu voter Oui ou Non lors
militants de donner leur avis… tout aussi binaire que
du référendum de 2004 sur le traité constitutionnel
le référendum à venir. Le résultat a donné 60 % pour
– je me suis personnellement abstenu en déposant
le Oui et 40 % pour le non. Les pro-oui ont considéré
une enveloppe vide – mais simplement tenter
avoir « gagné » et ont voulu imposer le choix de la
d’expliquer comment le PS – mais pas seulement –
majorité des militants. Mais 40 % de Non, lorsqu’on
s’est fourvoyé en voulant prendre position sur le
a une approche un brin scientifique, c’est loin d’être
référendum pour un traité constitutionnel.
Il ne s’agira pas d’une vision de l’intérieur de ce qui
une petite minorité ! Heureusement qu’en science,
on n’utilise pas de méthode « majoritaire » pour
a conduit ce parti à se diviser en deux – à l’époque,
déterminer si un lien de cause à effet est avéré !
je ne militais pas – mais d’une simple approche
On parle tout au plus de corrélation. Et dans la
logique de ce qui était un problème insoluble.
vie quotidienne, ce serait tout aussi désastreux.
Si je m’attarde sur le PS, c’est parce que ma
Imaginez : si à un carrefour, les véhicules tournent
sensibilité politique personnelle m’a fait m’intéresser
majoritairement à droite, à quoi bon conserver la
plus particulièrement aux positions des leaders de
possibilité d’aller à gauche ?
ce groupe ; mais, dans les faits, tous les grands
Si les dirigeants du PS de l’époque avaient su
partis ont subi les même difficultés. Cette ratification
faire preuve d’intelligence, avec un résultat aussi
européenne a d’ailleurs connu d’autres couacs avec
serré (une bascule de 10% des militants aurait
notamment le refus irlandais du traité de Lisbonne
remis la balance à l’équilibre ; à rapprocher des
quatre ans plus tard.
40% de Non), ils auraient dû faire le choix de laisser
La question – mal – posée était la suivante :
les militants libres de leur vote. En voulant imposer
Étes-vous pour le Traité établissant
le Oui, ils se sont mis à dos 40 % de la « base ».
une Constitution pour l’Europe,
Je ne m’étends pas sur la posture arriviste de
signé à Rome le 29 octobre 2004 ?
certains, consistant à prendre position pour le Non
Ceux qui s’en souviennent ont à l’esprit que le
afin de « gauchiser » leur image ; on voit de tout
« clan du non » regroupait des personnalités de tous
en politique. Mais il était évident qu’avec un tel
bords pour des raisons très différentes.
support, de nombreuses voix dissonantes allaient
Le sens même de la question posée plaçait
se faire entendre.
l’électeur dans l’impasse. Répondre par l’affirmative
La solution pour éviter un tel carnage (6 ans plus
pouvait être considéré comme une approbation totale
tard, on entend encore des militants se reprocher
du traité. Répondre par la négative plaçait en porte-
mutuellement d’avoir pris parti pour telle ou telle
à-faux toute personne souhaitant une construction
option) ne se trouvait pas tant au PS qu’au niveau
européenne mais refusant de donner un blanc-seing
des instances européennes. Un référendum ne
aux politiciens. L’approche opposée est tout aussi
propose que deux solutions : oui ou non. De fait, la
valable. Voter non pouvait être assimilé à un rejet
question ne doit porter que sur une option simple.
complet du traité et voter oui pouvait représenter un
Approuver un traité n’est pas un choix binaire. On
abandon de toute possibilité d’amélioration.
peut en contester tout ou partie, à l’instar de la
Cet exemple illustre parfaitement la réduction
directive Bolkestein qui – bien qu’extérieure au
intellectuelle que représente une approche binaire
traité – a cristallisé nombre de mécontents. Si la
d’un problème complexe.
question avait été « Approuvez-vous la mise en
18
Mensans n° 10
jklmwxcvbn,cvazer
Un
traité
constitutionnel
ne peut faire l’unanimité.
Celui-là
était
un
compromis négocié par les
représentants des différents
pays
Un
constituant
compromis,
l’Europe.
c’est
le
contraire d’un choix binaire ;
c’est la recherche d’un juste
milieu entre tout et rien ;
mais c’est aussi une option
dans laquelle personne ne
se
reconnaît
totalement,
puisque construite sur des
concessions.
Bien qu’ayant un « lourd »
passé d’informaticien, mes
études scientifiques m’ont
appris à fuir la logique binaire, en ramenant les
solutions d’un problème, non pas à 0 et 1, mais à un
ensemble de valeurs situées entre 0 et 1. Dans le
cas qui nous intéresse, la position du PS n’aurait
pas dû être « si des militants appellent à voter
non, on les menace d’exclusion parce que le vote
a été en majorité pour le oui » mais « la majorité
des militants PS s’est prononcée pour le Oui ; les
instances nationales s’appuient sur ce choix pour
suggérer aux électeurs d’en faire autant ». Ç’eût
été plus respectueux du peuple. Mais en fait,
la plus grosse erreur du PS, du gouvernement
français et des instances européennes, est d’avoir
voulu expédier ce choix via un référendum au lieu
d’organiser des débats pour mesurer les éventuelles
place d’une constitution européenne », avant même
failles du traité.
l’écriture du traité, le choix de chaque électeur aurait
Depuis, on a pu constater quelques initiatives plus
été beaucoup plus simple. Pas question de se
ou moins heureuses (plutôt moins que plus), à l’instar
prononcer sur un texte donc impossibilité de critiquer
des débats participatifs lors de la présidentielle,
tel ou tel alinéa…
du Grenelle de l’environnement ou du débat
Vous me direz que je suis un mauvais démocrate.
sur l’identité nationale. Le piètre résultat de ces
Dans les faits, je crois que la démocratie absolue
tentatives de concertation ne doit pas décourager
ne permet pas tout. Par contre une démocratie
face aux pratiques « binaires » qui subsistent encore
représentative, où les élus sont les référents du
trop souvent en politique.
peuple, permet de construire et gérer un espace
Emmanuel Marc Dubois
de vie commun. Mais cela ne doit pas couper ces
représentants de ceux qui les ont élus.
Illustration EMD
Mensans n° 10
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azertyuiop^qsdfgh
Quelques « non » au fil de la Bible
Didier Morandi
Lorsque l’on m’a proposé d’écrire un texte sur le
point, sinon vous mourrez. Alors le serpent dit à la
non dans la Bible, j’avoue avoir tout d’abord regretté
femme : Non, vous ne mourrez point.» (Genèse,
que ce ne fut pas le Nom avec un m à la fin, car
3, 2-4).
j’avais plus de données sur ce sujet qui me venaient
à l’esprit. Mais non, c’est bien le Non. Après réflexion
j’ai tout de même accepté car j’ai pensé ensuite à la
célèbre anecdote désopilante (c’est rare) de la visite
de Dieu - accompagné de deux anges - à Abraham
«L’Éternel dit à Caïn : Sais-tu où est ton frère
Abel ? Celui-ci répondit : Non, je ne sais pas ;
suis-je le gardien de mon frère ? » (Genèse, 4, 9).
Le premier cas est très différent du second.
Dans le premier texte, le non est l’expression d’un
et Sarah. Voici le texte :
« Ils dirent à Abraham : Où est Sarah, ta
femme ? Il répondit : Elle est là dans la tente.
Dieu dit : Certainement je reviendrai chez toi l’an
prochain, et voici que Sarah ta femme aura un
fils. Et Sarah entendit cela dans la tente, derrière
lui. Or Abraham et Sarah étaient des vieillards,
fort avancés dans la vie ; Sara n’avait plus l’âge
d’enfanter. Sarah rit intérieurement en se disant
: Vieille comme je suis, puis-je encore avoir du
plaisir ? Et mon seigneur est vieux. Dieu dit
alors à Abraham : Pourquoi donc Sarah a-t-elle
ri en se disant : Est-ce que vraiment j’enfanterai,
mensonge. Il sert à masquer la vérité. Il sert aussi
à tromper l’interlocuteur. C’est un non proactif,
contrairement au non de Sarah qui est le même que
le non de Caïn. Un non défensif. Caïn a tué son frère
et n’ose pas l’avouer. Il pense donc qu’il doit cacher
sa connaissance de la situation de son frère qu’il
a enterré discrètement : «L’œil était dans la tombe
et regardait Caïn» (La Conscience, Victor-Hugo).
Profitons de cette circonstance pour préciser que
la tombe en question dans cette citation célèbre est
celle que Caïn a fait creuser pour ne plus voir l’œil,
et non celle d’Abel son frère.
vieille comme je suis ? Y a-t-il rien qui soit trop
merveilleux pour l’Éternel ? A cette saison je
reviendrai vers toi l’an prochain, et Sarah aura un
fils. Et Sarah nia en disant : Non, je n’ai pas ri ;
car elle eut peur. Mais Dieu lui dit : Si, tu as ri. »
(Genèse, 18, 9-15).
Il me semble que nous avons ici le non le plus
original, au sens temporel du terme. Le non du
petit enfant qui a fait une bêtise et qui a peur de se
faire réprimander s’il avoue. Certes, dans l’exemple
ci-dessus, le protagoniste n’est plus vraiment un
enfant, mais le réflexe est le même.
En cherchant un peu, on trouve un peu plus «tôt»,
si j’ose dire, le non du serpent à Ève, puis celui de
Caïn à Dieu. Voici les textes :
«La femme dit au serpent : Nous mangeons
du fruit des arbres du jardin. Mais quant au fruit
de l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit :
Vous n’en mangerez point et vous n’y toucherez
Henry Fuseli, Le serpent tentant Eve, 1802
© Auckland Art Gallery Toi o Tamaki, gift of Sir George Grey, 1887
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Mensans n° 10
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Donc, deux non, deux explications : un non de peur
de la vérité, et un non de déni de la vérité.
Ce non est l’expression d’une vérité, contrairement
au non du serpent. L’expression d’une résolution.
Il arrive aussi que ce soit Dieu qui essuie un non,
comme dans le dialogue de Moïse à la descente du
mont Sinaï :
« Moïse implora l’Éternel, son Dieu, et dit :
Pourquoi, ô Éternel ! ta colère s’enflammeraitelle contre ton peuple que tu as fait sortir du
pays d’Égypte par ta grande puissance et par ton
bras étendu ? Pourquoi les Égyptiens diraientils : C’est pour leur malheur qu’il les a fait sortir,
c’est pour les tuer dans les montagnes et pour
les exterminer de dessus la terre ? Non ! Reviens
de l’ardeur de ta colère et repens-toi du mal que
tu veux faire à ton peuple. » (Exode, 32, 11-12).
Noé dans un vitrail de la cathédrale de Chartres
Là, le non est impératif. Il porte en lui une action,
Après, il y a le non de Dieu qui suivit la fin du
une action de conviction. C’est un non de refus
déluge et la descente des eaux. Souvenez-vous.
destiné à l’autre, pour infléchir sa volonté (on peut
Noé lâche la colombe une deuxième fois, elle
penser que c’était pas gagné face à Dieu, mais ça a
revient avec un rameau d’olivier dans le bec. Il la
quand-même marché…)
lâche une troisième fois, et cette fois la colombe
De façon symétrique, Dieu parle à l’homme
ne revient pas. Elle a trouvé où nicher. C’est le
avec un non, comme dans un autre dialogue de la
signal pour Noé d’ouvrir les portes. Après avoir fait
Genèse, qui suit le non de Sarah. C’est le passage
descendre les bêtes, Noé bâtit un autel à l’Eternel
où Abraham argumente auprès de Dieu qui veut
et vient alors le texte suivant :
détruire la ville de Sodome à cause du comportement
« il prit de toutes les bêtes pures et de tous
mauvais de ses habitants. Abraham fait remarquer à
les oiseaux purs, et il offrit
des holocaustes à Dieu sur
l’autel. L’Éternel sentit une
odeur agréable, et l’Éternel
dit en son cœur : Non, Je ne
maudirai plus la terre à cause
de l’homme sous prétexte
que les pensées du cœur de
l’homme sont mauvaises dès
sa jeunesse ; et je ne frapperai
plus tout ce qui est vivant,
comme je l’ai fait. Tant que la
terre subsistera, les semailles
et la moisson, le froid et la
chaleur, l’été et l’hiver, le jour
et la nuit ne cesseront point. »
John Martin, La destruction de Sodome et Gomorrhe, 1832
(Genèse, 8, 20).
Illustrations © D.R.
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Dieu qu’il ne peut détruire toute la ville s’il s’y trouve
cinquante justes, voire moins :
«Peut-être des cinquante justes en manquerat-il cinq : pour cinq, détruiras-tu toute la ville ? Et
l’Éternel dit : Non, Je ne la détruirai point si j’y
trouve quarante-cinq justes.» (Genèse, 18, 22).
Ce non est l’affirmation d’une décision, le refus
de réaliser un acte qui n’aurait plus de justification
aux yeux de l’auteur si une certaine circonstance
se réalisait. Un non en réponse à une question que
l’on appelle fermée : la réponse ne peut être que oui
ou non.
Un autre non a, lui, été probablement dur à entendre,
c’est celui de Dieu à Moïse lorsque le peuple d’Israël1
arrive (enfin) en Terre promise. Dieu dit :
Mort de Moïse, tableau d’Alexandre Cabanel (1854)
« David, mon père, avait l’intention de bâtir une
maison au nom de l’Éternel, le Dieu d’Israël. Et
l’Éternel dit à David, mon père : Puisque tu as eu
« Parce que vous avez péché contre moi au
l’intention de bâtir une maison à mon nom, tu as
milieu des enfants d’Israël, près des eaux de
bien fait d’avoir eu cette intention. Mais non, ce
Mériba, à Kadès, dans le désert de Tsin, et que
ne sera pas toi qui bâtiras la maison, ce sera ton
vous ne m’avez point sanctifié au milieu des
fils, sorti de tes entrailles, qui bâtira la maison à
enfants d’Israël, tu verras le pays devant toi ;
mon nom. »
mais non, tu n’entreras point dans le pays que
je donne aux enfants d’Israël. » (Deutéronome,
32, 51-52).
Ce non là est informatif. Il manifeste la vérité en
annonçant une prophétie. Ce n’est pas le roi David
qui construisit le fameux temple de Jérusalem qui,
Ce non est un refus à la demande légitime de
selon un texte du Nouveau Testament, fut construit
Moïse de savoir s’il entrera en Terre promise avec
en quarante-six ans (Jean, 2, 20), mais bien son fils
son peuple. C’est donc un non d’autorité, qui ne fait
Salomon.
pas suite à une question, selon les Écritures. Mais
comme Dieu sait tout, il savait que Moïse devait
De façon très analogue, on peut peut-être dire
s’interroger. Il a donc la réponse sans avoir formulé
aussi que Jésus, dans le Nouveau Testament, vécu
la question.
un non continuel au non. Ou, autrement dit, sa vie ne
Continuons notre voyage au pays du non. Dans
fut qu’un oui à tout, de la naissance dans la pauvreté
le deuxième livre des Chroniques, le roi Salomon
la plus absolue, lui qui se déclara plus tard fils de
constate que Yahvé-Dieu «vit dans une tente» alors
Dieu, jusqu’à la mort sur la croix, qu’il aurait très bien
que lui se prélasse dans un palais somptueux.
pu éviter en demandant à son père plus de douze
Il éprouve des remords et se rappelle ce que son
légions d’anges (voir Matthieu, 26, 53).
père le roi David lui avait dit un jour :
Les Évangiles sont un refus permanent du non,
l’histoire d’un oui.
1
Précisons que c’est de cette expression que le nom de
l’État d’Israël a été tiré. En effet, Israël est le nom que
Dieu lui-même donne à Jacob, petit-fils d’Abraham, le
père d’une multitude de nations (Genèse, 32, 29). A force
de parler du peuple d’Israël, c’est-à-dire les descendants
de Jacob, les douze tribus d’Israël, les juifs ont choisi tout
naturellement le nom d’Israël pour désigner leur nouvelle
patrie.
C’est beau, non ?
Didier Morandi
Illustration © D.R.
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La Garde meurt...
Marc Vidal
Métamorphoses du NON, de l’historique au
trivial.
peux toujours siffler Poupoule et battre la caisse...
J’attends mon nouveau chéquier... Vous avez le
formulaire C32 bis 24 R ? pas celui-là, le rose, de
Mais oui mon chéri ! Sauf que... Cher ami, je n’irai
toute façon il est 15h30 on ferme... Je ne veux pas
pas par quatre chemins... P’t’t ben... Faut voir... Tu
passer pour un nouveau riche !... Ce n’est pas un
m’as regardé ?... C’est un nouveau règlement de
service à te rendre... Demande à ton père... Et pis
Bruxelles... J’ai la migraine... Votre dossier de crédit
quoi encore ?... Décédé, retour à l’expéditeur... Les
est à l’étude au Siège... Mes chers concitoyens,
petits bateaux n’ont pas de jambes et les seins ne
j’ai bien étudié vos doléances... Va voir chez les
remontent jamais sans aide chirurgicale... Prouve-
Panous-Panous si j’y suis
et ne reviens pas me le
dire !... On m’appelle sur
une autre ligne !... J’ai
piscine... Là je ne peux
pas, je suis en rendezvous...
Je
reprends
contact avec vous dès
que
Mais
j’ai
du
bien
nouveau...
volontiers
!
Dès que j’ai récupéré des
liquidités / ma voiture /
ma perceuse / mes dates
de vacances... T’es belle
quand t’es en colère...
Passe ton bac d’abord...
Même dans tes rêves !...
D’abord, tu fais la vaisselle
/ le ménage / le repassage
/ repeins les volets / tonds
la pelouse / gagnes au Loto... Ce n’est pas que je
moi que ton fiancé n’a pas de casier judiciaire...
ne veux pas t’aider... ça va bien dans ta tête ?...
Votre dossier de crédit est reparti au Siège... Négatif
C’est pas moi, m’sieur l’juge, je jouais aux cartes
mon lieutenant !... Qu’est-ce que tu disais ?...
avec des potes1... Tu sais, chérie, Saint-Trope / La
C’est la crise... Mon gars, tu te la mets sur l’oreille
Plagne / Miami / Davos / les Seychelles, c’est très
et t’attends qu’elle soit sèche... Er kann mich am
surfait... Mes chers concitoyens, cette injustice
Arsch lecken... Tu notes bien, hein ? c’est pas que
cessera bientôt... Votre dossier de crédit est sur
j’veux pas... Tu me prends pour Rothschild ?... Non
mon bureau... Je vais en parler à ma femme / mon
possumus !... Y a du possible... J’en causerai à mon
mari / ta mère... Allô ? j’arrive dans un tunnel... Plus
cheval... Are you talking to me ?... Votre dossier de
tard, mon ami, laissez-moi profiter de nos hôtes... Tu
crédit est presque accepté, mais il nous faudrait des
1
Variante : « J’étais sur une chaîne publique chez Delarue
avec une voyante aveugle, un scatophile unijambiste et un
Mensan ! ».
garanties supplémentaires, après il repart au Siège...
Désolé, belle-maman, on a déjà réservé pour juillet...
Je t’appelle la semaine prochaine... Monsieur
Photo Guillaume Piolle
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Wellington, des navisseaux2 !... Compte dessus et
revenu du Brésil / de Saint-Paul-de-Vence / de
bois de l’eau fraîche... On en parle dès que je suis
Bobigny / de Tarnopol-sur-Don / de mon opération
2
de la prostate... Clic, bang !!!... Tu déménages
D’après les érudits locaux : véritables paroles authenti­
quement prouvées vraies du général Cambronne à
Waterloo sans précision de l’usage que pouvait faire le
perfide albioneux ainsi apostrophé de ladite légumineuse
avant le dernier massacre, méfiez-vous des contrefaçons.
Note pour les Béotiens, les navisseaux étaient des navets
longs cultivés par les admirables producteurs maraîchers
de l’excellent terroir nantais nourri, tel les bords fertiles
du Nil, par les riches alluvions de la Loire arrachées à
nos majestueuses montagnes. Nantes, patrie de notre
glorieux général, décédé en 1842, entouré des soins
de son infirmière et épouse écossaise (et pas anglaise
comme le prétendent sournoisement certains salisseurs
de mémoire auxquels il conviendrait d’intimer l’ordre de
fermer leurs claque-truc). « Je ne peux pas avoir dit ‘La
Garde meurt et ne se rend pas’, puisque je ne suis pas
mort et que je me suis rendu ! » a-t-il révélé tardivement.
En vérité, je vous le redis : méfiez-vous des légendes
faciles. Tout ceci en contradiction avec l’affirmation du
célèbre historien napoléonien Jean Yanne : « Cambronne
ne mâchait pas ses mots, ça vaut mieux pour lui ».
encore ? Invite-moi pour la crémaillère !... Je n’ai
pas encore reçu votre courrier / message / pigeon
voyageur / mousquetaire / estafette / porteur de
menhirs... Nuts !... Plus tard tu me remercieras... Je
suis très satisfait de l’issue des négociations... Je lui
envoie mes témoins... J’attends un coup de fil de la
Préfecture / Direction / Présidence... L’informatique
est en panne... Faut pas me prendre pour une
pomme !... Mon vieux, ça me fait rudement plaisir
de t’avoir revu...
Marc Vidal
SIG Casumir
Solution de la p. 6 :
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De l’expression des émotions dans la tempérance
Thierry Brunschwig
Non à la colère
Sous sa forme vulgaire
Quand elle n’est que défoulement
Sans respect de l’autre
Elle n’est que perte de temps
Bris d’une relation qui fut nôtre
Oui au respect des différences
À l’expression des émotions
Dire ce que l’on pense
Tout en restant humain et bon
Oui a la délicatesse
Entre les gens
Un peu de gentillesse
Est utile de temps en temps
Non à la tristesse ici
Qui nous noie
Telle un tsunami
Nous laissant échoué(e) plus d’une fois
Abandonné(e) sur la rive
Sans que plus rien n’arrive
Oui aux pleurs qui libèrent
À la respiration qui nettoie
Le passé de nos pères et mères
Quand chacun à l’intérieur trouve son roi
Oui au respect de soi plein d’attentions
À l’expression des émotions
Se libérer par les pleurs
Se décharger en un lieu sûr, loin de toute peur
Non à la peur qui paralyse
Qui rend malade
Rend toute chose fade
Quand même la douce brise
Ne peut nous aider
Tant nous en sommes affectés
Oui à la peur qui signale un danger
Qui maintient en éveil
Et loin de nous arrêter
Sur les bons sujets nous éveille
Oui à l’introspection
Au dialogue intérieur
Pour nous mettre en action
Rayonner à l’extérieur
Non à la culpabilité qui déchire
Qui noue toute notre base
Et nous amène au pire
Non au fardeau qui écrase
Sous son poids délétère
Quand on ne peut plus rien faire
Oui à la culpabilité qui rappelle
Nous rend plus conscients
À nos devoirs appelle
Et permet de tenir notre rang
Oui à la culpabilité qui éveille
Recentre sur les devoirs
Appel de chaque soir
Pour que l’action fasse merveille
Non à la honte en soi
La plus cachée des émotions
Quand le mépris de soi
Empêche même d’être bon
Quand la honte d’être
Conduit à un insensé paraître
Oui à ma honte qui modèle
Donne une nouvelle direction
Vers de nouveaux horizons
Enfin nous appelle
Oui à la honte qui fait agir
Pour que le monde soit meilleur
Et résiste au pire
Et donne aux autres un peu plus de bonheur
Non à la joie
Quand elle est aveuglement
Quand on se perd soi
Loin de tout entendement
Quand on perd tout son temps
Avec de bien inutiles passants
Oui à la joie qui éclaire
Qui transporte
Pour que chacun espère
Voit le bonheur à sa porte
Oui à la joie de l’intelligence
Une bien belle fulgurance
Et aux rires des mensans
Au si bel entendement
Thierry Brunschwig
Photo : La Cathédrale, Rodin. © D.R.
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Nom de non
Jacques Quintallet
S’il faut faire l’éloge de quelque chose, alors que
ce soit du rien.
traces, le premier cantonné aux enclos des titilleurs
d’imparfaits du subjonctif et autres espèces en voie
« Rien » présente en français cette particularité
d’extinction, le deuxième converti en plaisir honteux
lexicale intéressante de signifier, étymologiquement,
et solitaire des amateurs forcenés d’archaïsmes,
« une chose ». « Quoi ? Qu’ouïs-je ? Pourquoi
et le troisième restreint strictement au domaine de
diantre ? Et comment se fait-ce ? », entends-je au
la vue – « je n’y comprends goutte », pourtant, ça
fond de la salle (quasi déserte d’ailleurs). Notre peu
aurait de la gueule.
de science, donc, étalons-le :
Qu’y puis-je si, pour parler, le meilleur outil dont je
Nos amis les Romains usaient pour négation
dispose – ou, plus précisément, celui que je sais le
d’un simple « ne » (prononcé « né »), ou alors d’un
moins mal manier –, c’est ce vieil idiome limoneux où
simple « non » (prononcé « nonne »), mais alors,
on dit « une chose » (res, rem) pour parler de rien ?
quel « ne » et quel « non » ! Un « ne » ou « non »,
Où on dit « l’homme » (homo, hominem, « on ») pour
à mon avis, articulé, sonore, un « ne » ou « non » à
dire « quelqu’un » ? Ça me permet, notez bien, de
se décrocher le maxillaire, un « ne » ou « non » de
brouiller les pistes, de vous faire prendre quand je
profond derrière la glotte, éructé à pleins décibels,
veux vessies pour lanternes et étrons pour chocolats
un « ne » ou « non » à souffler la moumoute de
fourrés. C’est bien ça, somme toute, « l’absente de
l’interlocuteur – à supposer que les Romains aient
tout bouquet » : c’est aussi l’absent de tout pot de
usé de moumoutes – loin au-delà des palissades de
chambre, l’absent de tout compte en banque, l’absent
l’oppidum – ou des colonnes de Jupiter Capitolin, ça
de tout orifice quelle qu’en soit la lubrification : je dis,
m’est tout un. « Sutor, ne ultra crepidam », aurait
j’écris « fleur », j’écris « caca », j’écris « gros sous »,
dit César à l’outrecuidant artisan qui se mêlait de
j’écris « vit », « dard », « nœud », rien à faire (à
lui causer politique – savetier, pas plus haut que
foutre ?), on n’y voit que traits sur le papier, ou sur
la semelle –, mais le « pas » français se trouve là
l’écran, on dit la chose et ce faisant on la subtilise, la
rendre à lui seul le « ne » latin parce que la phrase
dissimule aux regards, vieil illusionnisme ; ça n’y est
latine est elliptique, et qu’il faut lui sous-entendre un
pas, rien n’y est – mais rien y est, et y est bien. « Il y
verbe : savetier, ne te hasarde pas (par exemple)
a quelqu’un », comme dirait Bloy : c’est occupé, que
plus haut que la semelle, et l’on retombe dans le
nul n’entre, même géomètre, s’il n’a pour lui la force
binôme « ne … pas » que le latin ignore.
Bref : en français le « ne » amorce le piège,
des baïonnettes.
Il n’est pas nécessaire de refaire le coup taoïste
laissant encore une issue de secours : « ne... que »,
de la roue de chariot dont tout l’intérêt réside
par exemple, laisse exister quelque chose ; mais le
dans le vide en son centre, lequel seul lui permet
« pas », ou le « plus », ou le « jamais », ou justement,
de tourner, pour voir qu’hors du rien point de...
au revers de sa nature, le « rien » (ou, avec le même
De quoi d’ailleurs ? Pas de salut, pour sûr, ne
renversement de polarité, le – ou la – « personne »),
réintroduisons pas par la fenêtre le monothéisme
forclôt sans retour – mince, non, il ne forclôt pas,
crétin qu’on vient de prier poliment de sortir par la
puisqu’on ne peut que forclore ou être forclos, prière
porte. Pas de joie ? Non, le rien ce n’est pas joyeux,
de ne pas conjuguer, ô joies des verbes défectifs,
ça n’a justement rien de joyeux. De paix ? Hors du
disons donc avec les grammairiens modernes qu’il
rien point de paix ? Testons. Ça ne sonne pas mal.
est forclusif. Encore a-t-on sérieusement réduit
Pas mieux que « hors du rien point d’amour » ou
la consommation de forclusifs depuis quelques
« hors du rien point de tout », toutefois : le même
siècles : « ne... point », « ne... mie », « ne... goutte »,
inconvénient toujours des mots à tout faire, donc à
pourtant joliment imagés, ne subsistent qu’à l’état de
ne rien faire, mots bons toutous, prêts à tout, bons
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Mensans n° 10
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à rien – qu’à déclencher une connivence quand
Le rien, oui, par lequel nous avons insidieusement
tout va bien, quand la boucle référentielle boucle
fait détour, il a droit de cité. À la rigueur. Il y a de
bien et frisotte dans le sens du poil ; le petit « bon
la friandise nihiliste qui passe très bien en société.
sang, mais c’est bien sûr » qu’appellent aussi les
Mais le « non » ? Lui qui se passe de forclusif, qui
bonnes histoires drôles, ou le reflet du soleil dans
suffit à lui seul et en une syllabe à couper court à
le détail du décor, que même le chef opérateur
la négociation ? Ce mot-phrase dont les Grecs pas
ignorait, et qui vole tout le sens du plan où les
plus que les Romains ne disposaient ­– ajoutons
personnages s’évertuent bien en vain à discourir
à leur décharge et par souci de symétrie qu’ils
quand tout ce que je vois c’est ce reflet. Les deux
n’avaient pas non plus de « oui » ? « Oui », il advient
comparaisons pourtant sont contradictoires : l’une
en français par des voies compliquées : « hoc illud
évoque la mécanique fine, le ressort d’horlogerie
(est) », « il en est ainsi », qui par avalages successifs
qui se détend pile au bon instant, l’autre le hasard,
de phonèmes devient « oïl » dans le nord de la
l’imprévu ; ce qu’elles ont en commun malgré tout,
France (les méridionaux, toujours paresseux, s’en
et qui fait qu’elles sont toutes deux justes, c’est
tiennent à « oc », du coup ils sont punis et rejetés
l’exactitude, le tempo, voulu ou pas, mais précis, et
dans l’usage dialectal et la chienlit folklorique), puis
donc incontestable.
« oui » après encore quelques spasmes de paresse
articulatoire ; par comparaison, « non »
sort de manière plus fluide du « non »
latin (prononcé « nonne », rappelonsle) : chute du -n final, nasalisation du
o, et le tour est joué. Et en plus, c’est,
aussi bien en termes alphabétiques que
visuellement, un parfait palindrome :
il s’inverse sans faire d’histoires, et si
on l’écrit en majuscules d’imprimerie :
NON, surprise : renversez-le et il est
toujours là, comme le logo des jeans
NeWMaN qui m’épatait tant quand
j’étais épatable – alors qu’avec « oui »
essayez toujours, vous n’en tirerez rien,
il ne fonctionne que dans un sens, aller
simple et pis c’est tout.
Voilà : le rien se doit d’être précis, petit rien de
Et pourtant, pourtant… Il semble qu’on soit
l’instant juste, du sentiment juste, ou bien grand rien
aujourd’hui dans la « yes session » permanente,
du vide précisément vide, même si pas pleinement
comme ces pitoyables commerciaux en mal de
vide somme toute, où ce qui peut rester de plein
créativité qui s’imposent des réunions où toute
démontre seulement, non de la négligence dans le
idée émise devra a priori être considérée comme
nettoyage, mais bien qu’on en est à un tel point de
bonne, ou au moins comme potentiellement
vide que peu importe le reliquat d’être : il compte
bonne, comme « porteuse », pour faire avancer le
pour du beurre. D’où le goût très contemporain pour
schmilblick : en d’autres termes le « non » en est
le « petit rien », précisément, la sensation fugitive,
banni, le « oui mais » à peine toléré. Il faut être
mais dont dure le sillage, des petites madeleines à
positif. Comme dit Allen Konigsberg : « La réponse
la première gorgée de bière et du je ne sais quoi au
est oui, mais quelle est la question ? ». Voilà qui
presque rien.
est bien vu : de même que dans les référendums
la « bonne » réponse, la réponse attendue est
Photo © www.photo-libre.fr
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toujours « oui », de même il est attendu de vous
le pourliche des capitaines d’industrie, garants
que vous soyez pour, ou qu’en tout cas vous vous
ultimes, eux, Zinédine Zidane et le téléthon, de
absteniez d’être contre (pas contre les gays, pas
votre cohésion je ne dirai même pas en tant que
contre l’islam, pas contre les Traditions mais pas
société, mais en tant qu’espèce. Philippe Muray
non plus contre le Progrès ; contre Sarkozy, à la
avait un mot pour ça : c’est l’avènement de
rigueur, vous pouvez, mais c’est parce qu’il est
l’homo festivus, contre quoi il ne voyait guère (et
tout petit et parce que vous avez l’âme frondeuse).
encore : si rarement…) que la littérature qui soit
Alors que « non », c’est au mieux le conservatisme,
capable de restituer « la négativité en action du
au pire la réaction, c’est le blocage instantané et
donné » ; mais comme il se gaussait des mesures
la soupe à la grimace. Essayez, juste pour rire, de
hygiénistes et militait pour les Gauloises maïs, le
répondre « Non » la prochaine fois que quelqu’un
cancer du poumon l’a fort heureusement rattrapé à
vous demandera « Ça va ? », la douche froide
61 ans, soit plus de quinze en deçà de la moyenne
est garantie sur le bulletin météo de l’harmonie
syndicale promise au mâle occidental qui surveille
son tour de taille et ne coïte
qu’encaoutchouté avec une aussi
tenace attention qu’il limite son
empreinte carbone à la surface de
son F2, afin que les petits-enfants
des 8 milliards de ses congénères
qui peupleront l’ici-bas d’ici 2050
puissent jouir des mêmes droits
que lui à un ciel d’azur et une
mer turquoise dans la célébration
permanente des splendeurs de la
fraternelle Humanité.
Bon,
mais
je
m’emporte,
je
m’emporte... là, ne tombons pas
dans
le
lyrisme-même
de
la
négativité, même sardonique, là
où « sans moi » suffirait, qui peut
encore s’écrire « non merci ». Et
ne reculant devant nulle ficelle à
sociale obligée. Il n’y a plus de « non » parce qu’il
l’approche de la péroraison, on plagiera allègrement
n’y a plus de mal, ou alors du si caricatural qu’on
Eugène Grindel, en y changeant juste une lettre :
est à Guignol : Ben Laden, Pol Pot, Kim Jong-Il,
Dieudonné, le génocide rwandais et la TVA à 5,5
pour les restaurateurs, on est dans le ridicule
de gros calibre autant que dans le « c’est pas
Dieu possib’ qu’il y ait encore des choses comme
J’écris ton non
Liberté.
Et encore, ça fait couillon, comme fin, non ? Ben
si, ça fait couillon, oui. Tu vois ? On n’en sort pas.
Jacques Quintallet
ça ».
SIG Casumir
Tout ça parce que l’Histoire est terminée. Hegel
l’a dit, Obama l’a fait : thèse, antithèse, hop,
nous voilà dans la synthèse, tous à nous aimer
et consommer en chœur et avec cœur. Rideau,
m’sieurs-dames, par ici la sortie, n’oubliez pas
photo © www.photo-libre.fr
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Non, rien de rien...
Andrea Hanke
Avec Édith Piaf, je ne regrette rien. La vie est
Non, je ne proteste plus contre la guerre, mais je
passionnante, bien qu’elle ne soit pas toujours ce
prie pour la paix. Il y a des tests impressionnants :
qu’on a attendu à un certain moment.
quand un certain nombre de personnes, assez faible
La dernière chose que j’ai apprise au sujet du
« non », c’est le « oui » inconditionnel.
(une centaine dans une grande ville), médite, la
criminalité et le nombre des entrées en psychiatrie
Je m’explique... Malgré ou grâce à mon apparte­
nance à Mensa, j’apprends tous les jours.
baissent de manière mesurable et significative. Non,
je ne suis plus certaine de rien et je ne crois plus
Parfois je m’étonne d’avoir appris ou compris une
rien. Est-ce l’effet direct de la méditation ou est-ce
certaine chose si tardivement… mais j’ai encore
que ces personnes se sont mises à prier et méditer
environ la moitié de ma vie devant moi. Non, je n’ai
à cause d’une modification des activités solaires ?
pas 50 ans, je les ai dépassés. Non, je n’attends
Autre hypothèse ?
pas les 100 ans. Non, je ne suis pas
Je ne critique plus notre système
voyante. Non, je ne connais pas la
médical ou bancaire ou …(à remplir
date de ma « mort ».
selon vos besoins), non, j’ai décidé
Alors, la moitié de ma vie, cela
que j’agis dans notre monde endormi
pourrait concerner la quantité des
et inconscient. Je rassemble mes
choses qui me restent à apprendre ?
neurones
Mais non, l’infini n’a pas de moitié…
dialogue. Par exemple, je fais un
C’est juste une estimation : la densité
courrier adressé aux personnes qui
de ma vie future peut équivaloir à peu
pourraient prendre leur plaisir ou
près à la moitié de ma vie passée ?
rassembler leurs neurones à leur
et
je
commence
un
Non, pas « ma vie », je parle de ma
tour en lisant ce courrier ou qui le
vie dans mon corps actuel sur terre…
classent verticalement… Quelle que
Non, je ne crois rien et je ne sais rien,
soit leur réaction, je prendrai plaisir à
mais je sympathise avec la notion du
la noter et à m’interroger sur la suite
karma. Non, pas par croyance, mais par choix. Je
à donner. Je trouve ces rassemblements de mes
n’ai pas encore élucidé tous les détails du sujet,
neurones très passionnants, puisqu’en sus, je le fais
mais je prends mon temps. Je prends mon temps
dans la bonne humeur et avec le sourire.
Bref, le « oui » me permet de me réjouir de ma vie et
pour tout. Je prends le temps pour vivre. Non, je ne
suis plus pressée, stressée, je fais une chose après
de ma créativité, pendant que le « non » m’obligerait à
l’autre, par choix de la priorité que je donne.
porter toute mon attention sur quelque chose que je ne
Alors, pas d’ombre sans le soleil, pas de « non »
perçois comme ni positif ni réjouissant. J’ai remarqué
que je passionne les personnes qui m’écoutent dans
sans « oui ».
Dans le monde actuel d’illusions, qui nous entoure
cet esprit.
ou dont nous nous entourons, nous pourrions passer
Non à la fin du monde ou à la fin du temps en
notre temps à crier « non » sans interruption ; si nous
2012 dans le sens que la majorité des êtres humains
écoutons la radio, regardons la télé, lisons le journal,
l’interprète ou l’ignore.
les mails… au moins dans les derniers, il y a plus
de bonnes nouvelles que de mauvaises, selon notre
Non à la peur, non à la maladie comme quelque
chose de négatif…
Non au non, vive la vie quelle qu’elle soit. Nous la
choix, bien sûr.
Alors, j’ai décidé de relever le défi : positiver en
construisons.
Andrea Hanke
permanence, pas facile…
Photo © Courtaux
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La tirade du NON (Culture Prisunic)
Ariane Geay
Ah non c’est un peu court, jeune homme,
On pouvait dire – ah dieu, bien des choses en
somme,
– Tonifiant :
Non non tout mais pas ça,
Tais-toi tais toi ne raconte pas ça
En variant le ton, par exemple, tenez :
– Grasseyant :
– Brillant :
Non, rrrrien de rien, non, je ne regrette rien,
Elle dit non, non, non,
Ni le bien qu’on m’a fait, ni le mal,
Et moi ça me fait de la peine,
Tout ça m’est bien égal...
Elle dit non, non, non,
Et moi je fais des bonds
– Tonitruant :
Gaston, y’a l’téléfon qui son
Retrouve ces joyaux de la chanson française
Et y’a jamais person qui y répond
et internationale sur ton site d’écoute préféré en
Gaston, Gaston
recherchant :
Non non non non, non, non,
Édith Piaf – Je ne regrette rien
Non non non, non, non,
Les Poppys – Ne criez pas
Ptet bien qu’c’est importon...
Les Poppys – Rien n’a changé
Serge Gainsbourg – Je t’aime, moi non plus
– Poppysant :
Michel Polnareff – La poupée qui fait non
Non, ne criez pas, ne criez pas ah-ah-ah-ah-ah,
Julio Iglesias – Je n’ai pas changé
Oh non-on-on
Art Company – Suzanna
Ou encore (en tapant dans ses mains) :
L’Affaire Louis Trio – Tout mais pas ça
Non, non, rien n’a changé,
Dany Brillant – Elle dit non, non, non
Tout tout a continué,
Non, non, rien n’a changé,
Tout tout a continué-hé-hééé
C’est quoi ? C’est où ?
– Malentendant :
Je t’aime...
Moi non plus
– Frisottant :
C’est une poupée qui fait non, non, non, non
Toute la journée elle fait non, non, non, non
– Roucoulant :
Non, toi non plus tu n’as pas changé...
– International :
She said « good-bye », and I said … NO
Suzanna, Suzanna
Envoyez vos réponses à mag @ mensa.fr
I’m crazily lovin’ you
La meilleure sera publiée
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Diagordon
Henri Descargues
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0
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20
30
40
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60
70
80
90
0 – 90
Une impossibilité par manque de temps
52 – 92
N’a pas rien sur le dos
0 – 99
N’ont même plus droit à la parole
54 – 51
Utopie
4 – 34
Part
56 – 26
Connais
5 – 38
Ville du non
58 – 98
Mesure la lumière
9 – 0
Provoqué pour un oui ou pour un non
65 – 95
Oublie
15 – 11
Enleva la coque
66 – 62
Aide à sortir d’une situation négative
16 – 19
Fils d’Aphrodite
69 – 67
Non dits
20 – 22
Non vrai
70 – 16
Dit non au courage
23 – 3
Demi-bouc
70 – 72
Coup non admis
24 – 60
Colorée
75 – 77
Petite amie
27 – 67
Unités de séjour
87 – 67
Éclos
29 – 23
Sans arrêt
89 – 84
Proposer en espérant un oui
30 – 34
Non erroné
90 – 9
Action d’un ange qui supprima de
39 – 17
Avec seulement pour la surenchère
40 – 43
Jaune qui n’est pas gai
90 – 99
Dispenses
40 – 73
Non non-être
92 – 29
Épanouissement
45 – 5
Dire non à la rébellion
93 – 71
Changement de timbre
45 – 48
Suit souvent oui et non
97 – 77
Un anglais
52 – 22
Sans ordre
99 – 9
Refuser d’avancer
52 – 85
Met bas
nouveaux Égyptiens
Mensans n° 10
31
prochain thème :
tout ce que vous vouliez dire
quand on ne vous demandait rien
envoi des articles :
[email protected] avant le 1er juillet 2010

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