Cahors. Alexis Pélissou : «Mon but, c`est la transmission»

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Cahors. Alexis Pélissou : «Mon but, c`est la transmission»
Cahors. Alexis Pélissou : «Mon but,
c'est la transmission»
Publié le 24/06/2013 à 07:35
l'invité de la semaine
Alexis Pélissou avec son successeur, Pascal Bardet. Derrière eux, l'équipe du Gindreau qui sera conservée. /Photo DDM, L.B.
Alexis Pélissou va confier l’âme de son Gindreau, à Pascal Bardet, un Figeacois, élève de Ducasse.
En attendant, le plus célèbre moustachu du Lot s’est raconté…
Il symbolise la cuisine lotoise, gourmande et créative, attachée à ses racines. Alexis Pélissou, 64 ans,
quittera prochainement les cuisines du fameux Gindreau, à Saint-Médard Catus. Le chef étoilé laissera
la place à un jeune Figeacois talentueux, élève du célèbre Ducasse, Pascal Bardet, 38 ans. Le tuilage
est en cours. Et Alexis Pélissou a ouvert la caisse des souvenirs. Succulent évidemment.
Après 40 ans de présence au Gindreau, on suppose que vous avez un pincement au cœur ?
Mon obsession, avec mon épouse Martine, c’était de transmettre et pas à n’importe qui ! Je ne voulais
pas vendre pour vendre. Avec Pascal Bardet et son épouse Sandrine, je suis rassuré. On a appris à se
connaître, on a beaucoup discuté et je suis rassuré. J’ai senti de l’affect chez eux. Ils vivront ici en
famille, comme nous quand nous avons acheté, en 1974, pour 50 000 francs, cette vieille bâtisse qui
tombait en ruines.
Que gardez-vous comme souvenirs depuis cette période ?
J’étais cuisinier en Ariège quand M. Pechmalbec m’a proposé de rejoindre le Bordeaux qui ne se portait
pas très bien. Je n’y ai travaillé que trois mois mais je crois que ça s’est bien passé. Les Cadurciens
me connaissaient et ils s’en sont souvenus quand j’ai ouvert le Gindreau.
Comment se sont passés vos débuts ?
Il faut bien avoir en tête que dans tous les villages, il y avait d’excellentes adresses qui pratiquaient de
la cuisine locale, authentique de bon niveau. Je n’allais pas les concurrencer sur le confit de canard ou
les cèpes. Ma première carte, je l’ai donc élaborée à base de fruits de mer et de soupe de poissons !
Mon grand menu était fixé à 20 francs. Tout s’est bien enclenché.
Vous avez décroché l’étoile en 1991. Était-ce une quête absolue ?
Pas du tout. Mon ami Daniel Chambon l’a obtenu en 1989 et il m’avait dit que je serais le prochain. Le
jour de l’annonce, le téléphone n’arrêtait pas de sonner et quand un ami me l’a annoncé, j’ai cru à une
blague. Moi, ma quête, ça a toujours été le bien vivre, la passion culinaire et l’échange avec les gens.
Mais j’avoue que l’étoile a été un élément déterminant pour notre établissement.
Vous n’avez donc pas changé après ?
Et non ! J’ai toujours cultivé une certaine façon d’être, la fidélité à mes équipes. Mon second, Thierry
Thomas, il est avec moi depuis 1982 ! La clientèle a évolué, moi aussi, mais j’ai gardé les mêmes
bases.
Vous êtes l’un des plus fameux représentants du département. C’est quoi le Lot pour vous ?
C’est la terre des merveilles. C’est la truffe, les arômes. Le Lot m’a façonné.
Un ou deux souvenirs ?
Je pense d’abord à la réception qu’on m’avait demandé pour le Club des 100, un cercle gastronomique
très influent. Il ne fallait pas se louper, surtout que les plats étaient critiqués en direct ! Tout s’est très
bien passé. Je leur avais préparé un menu après des lectures sur Colette. Et je me souviens que la
vaisselle que j’avais commandée était restée coincée à Limoges… C’est mon ami Claude Marco qui
m’avait dépanné.
Une personnalité ?
Tony Blair, ancien Premier ministre anglais, avec son épouse et des gardes du corps qui regardait le
paysage avec des jumelles. Tony Blair était très sympa. Il allait chercher de l’eau en cuisine et voulait
même passer un coup de balai ! Il m’a fait une confidence : «Quand j’étais étudiant en France, j’ai
travaillé dans un bar et j’ai vu qu’il n’y avait qu’un endroit pour les pourboires. J’ai compris alors ce
qu’était le socialisme à la française !»
Et la retraite, ça ne vous fait pas peur ?
Avec Martine, on va rester dans le coin, à Saint-Denis Catus. On va s’occuper de nos truffières, se
reposer, aller dans les marchés du coin. Mais depuis que je sais qu’on a transmis à des gens bien, on
est tranquilles. Et puis, je serais le vieux sage des Bonnes Tables. Vous allez encore me voir !
Questionnaire de Proust
Une fleur : la rose
Un animal : le chien
Un coin dans le Lot : les truffières
Personnage historique : Antonin Carême, le cuisiner qui a codifié la cuisine au XVIIIe siècle.
Personnage contemporain : Salvador Dali (j’ai un peu ses moustaches !)
Principale Qualité : essayer d’avoir le moins de défauts possible.
Principal défaut : essayer d’avoir le plus de qualités possible.
Devise : «l’art et le vin sont les joies de l’homme», Aristote. J’y ajoute la truffe !
Propos recueillis par Laurent Benayoun
La Dépêche du Midi

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