Marie-George Buffet Projet de résolution sur les institutions
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Marie-George Buffet Projet de résolution sur les institutions
Marie-George Buffet Projet de résolution sur les institutions culturelles Madame la Ministre, Monsieur le Président, Cher-e-s collègues, Nous sommes aujourd’hui appelés à examiner un projet de résolution visant à améliorer le processus de désignation des responsables des grandes institutions culturelles. Les objectifs affichés étant la diversité d’expériences et de parcours et la parité entre les femmes et les hommes. Sur ce dernier point, les chiffres sont parlants ! 81,5 % des postes dirigeants de l’administration culturelle sont occupés par des hommes, 70 % de ceux des centres chorégraphique nationaux, 85 % de ceux des centres dramatiques nationaux, 96% pour les opéras. On peut, en effet, mieux faire ! Les décrets du Président de la République et les nominations du ministre n’ont, semble-t-il, été marqués ni par l’audace, ni par le souci de la promotion des femmes ! Il est donc judicieux que notre assemblée puisse s’emparer de la question, nous le faisons sous la forme d’une résolution, c’est un début ! Mais à quand une vraie réforme du mode de désignation, aujourd’hui à la discrétion de l’exécutif, dans le domaine culturel ? Un domaine incluant les télévisions et radios publiques. 1 Cette résolution est-elle un prélude au traitement des processus de désignation dans une prochaine loi ? Si oui, nos débats vont être concrètement utiles. Sinon, cette résolution gardera un seul intérêt, celui d’alerter une fois encore sur les inégalités entre les hommes et les femmes faute de les résoudre. Alors parlons-en. Je partage complètement l’objectif de réaffirmer le principe d’égalité comme un principe fondamental pour l’action publique. Il n’est pas inutile de rappeler ici les raisons qui fondent l’exigence de parité dans le domaine abordé ici mais aussi en politique et plus généralement dans tous les lieux où un pouvoir s’exerce. La parité oblige au partage des responsabilités entre les femmes et les hommes alors que tous les lieux de pouvoir dans la sphère publique ont été construits et occupés au masculin. Notre société patriarcale ayant longtemps confiné les femmes à la sphère privée : la femme au foyer dans les rôles d’épouse et de mère. Une récente étude de l’ « observatoire européen de la répartition des tâches ménagères au sein du couple » révélait d’ailleurs que le domestique demeure principalement à la charge des femmes ! Je ne suis pas étonnée de ce quasi-monopole des hommes dans les lieux de pouvoir dans le domaine culturel, comme d’ailleurs dans le domaine du sport, car, au refus du partage du pouvoir s’ajoute une difficulté, au fil de notre histoire, à reconnaitre la place des femmes dans la création. C’est tout cela qu’il faut bouger ! 2 Le combat pour les droits des femmes a besoin, pour obtenir des avancées, de la mobilisation des femmes pour changer les mentalités et la réalité. Mais toute l’histoire du combat féministe en témoigne, la loi doit acter chaque avancée pour que la société évolue durablement. La parité aux élections sur liste a fait que 48,8% des conseillers régionaux.43% des députés européens, 48,5 % de conseillers municipales dans les communes de plus de 3500 habitants sont des femmes mais, faute de proportionnelle, nous sommes seulement 26,9 % à l’Assemblée. A chaque fois que la parité s’impose, certains s’inquiètent, on l’a encore vu lors de la loi sur l’ES et la recherche : a-t-on suffisamment de femmes compétentes pour siéger ? Je veux les rassurer, elles sont aussi nombreuses que les hommes et leurs places seront bien occupées ! Légiférer pour rompre avec l’exclusion des femmes des lieux de décisions en matière culturelle est donc pour moi une exigence. Je partage également le deuxième objectif de la résolution : diversifier les parcours professionnels et les expériences des personnes appelées à diriger les institutions culturelles. La culture est, en effet, pour moi le contraire de l’uniformité. Elle se construit dans le partage, l’altérité, le mouvement et la critique. Donc sortir des candidatures modèles en matière de carrières, d’expérience voir de milieux pour choisir ces 3 dirigeantes et dirigeants est salutaire pour l’objet même de leur fonction. Pour faire avancer les institutions culturelles au rythme de l’évolution de nos sociétés, et surtout au rythme des anticipations que nécessite tout projet culturel, au rythme des prises de risques indispensables comme celles ayant conduit à la création du centre Beaubourg – G.Pompidou , de l’Opéra Bastille , ou du Louvre à Lens, nous avons besoin de femmes et d’hommes porteurs d’une vision respectueuses de l’intérêt général et respectueux des statuts des personnels. Ces rappels sont pour moi nécessaires pour dire la responsabilité de la République - et donc de l’Etat- dans la création culturelle et son développement. Dans l’audace nécessaire dont il faut faire preuve pour être à la hauteur des défis du 21è siècle en matière culturelle. C’est pourquoi notre résolution d’aujourd’hui me parait bien timide. Vous nous proposez en effet de mettre en place des « commissions de sélection appelées à émettre un avis préalable à la désignation des principaux responsables. » Un avis qui « ne lierait pas l’autorité de nomination, mais serait susceptible de l’éclairer dans son choix ». 4 La nomination reste donc encore « le fait du prince » même si elle devient plus éclairée. N’y a-t-il pas ainsi une mobilisation parlementaire sur un très beau sujet, avec un très bel objectif, qui finalement débouche sur peu de chose ! Ce qui est en jeu en fait, n’est- ce pas tout simplement la démocratie ? Le fait que l’élaboration d’un choix et la prise de décisions soient, en tous domaines, entre les mains des premiers intéressés, de celles et ceux qui sont en premier lieu concernés par les choix à faire. Cela pose, pour ce qui nous occupe aujourd’hui, deux questions : La première : comment sont formées ces commissions, comment sont-elles composées- par exemple, quelle est la part des personnels de l’institution- sur quels critères ? Et donc la deuxième : pourquoi ne pas leur conférer le réel pouvoir de nomination aux postes de direction ? Ces deux questions me semblent primordiales pour dépoussiérer ces désignations et faire couler le sang neuf de la démocratie. Madame la Ministre, chers collègues, le débat est toujours utile et sources d’avancées, souhaitons qu’elles se concrétisent un jour proche, je veux y croire. 5