Le Canada dans le conflit de l`ex-Yougoslavie (1991
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Le Canada dans le conflit de l`ex-Yougoslavie (1991
Lemieux, Pierre-Olivier. « Le Canada dans le conflit de l’ex-Yougoslavie (1991-1999) : une réorientation de la politique étrangère ». Dir. : Julien Goyette, codir : Justin Massie, UQAM. La fin de la Guerre froide en 1989 entraina plusieurs changements sur la scène internationale. Dominé par les deux superpuissances et leurs alliés depuis la Deuxième Guerre mondiale, le globe devint exposé à plusieurs conflits identitaires régionaux ou communaux. Ainsi, le rôle des organisations internationales, telles que les Nations Unies (l’ONU) et l’Organisation du Traité de l’Atlantique du Nord (l’OTAN), s’accroit durant les années 1990. Membre engagé de ces deux organisations, le Canada a dû prendre part à plusieurs conflits à travers le monde, que ce soit au Kuwait, en Somalie, au Rwanda ou en Yougoslavie. Toutefois, les réalités de la situation mondiale de l’après-guerre froide ont fait en sorte que le pays, reconnu comme le fondateur des Casques bleus en 1956, dut s’adapter à de nombreux nouveaux facteurs, dont plusieurs concernent le respect des droits humanitaires et la guerre contre le terrorisme. En ce sens, les années 1990 ont marqué le début d’un schisme entre les représentations populaires et la réalité sur le terrain. Dans ces nouveaux types de conflits intraétatiques, il devint essentiel d’intervenir plus directement afin d’atteindre les objectifs de paix et de sécurité – contrairement aux anciennes approches de neutralité et de supervision de l’ONU qui suffisaient à établir un climat de discussion durant les conflits interétatiques. Il devint d’autant plus complexe pour les gouvernements de justifier leurs déploiements militaires à l’étranger. Ce fut initialement le cas pour les opérations canadiennes en ex-Yougoslavie. Afin de surmonter ces nouveaux défis stratégiques, les chefs de l’État canadien ont dû prendre des décisions qui affectèrent directement l’image pacifique du pays. Cette mise en contexte permet d’entrevoir un moment décisif dans l’histoire de la politique militaire canadienne durant les années 1990. Lorsqu’on revient sur cette participation du Canada dans les Balkans, on remarque qu’au milieu de la décennie, le pays s’éloigne de son rôle traditionnel de gardien de la paix à travers l’ONU pour évoluer vers un rôle plus robuste visant à imposer la paix aux côtés de l’OTAN. En fait, durant cette période, le Canada fut divisé entre deux idéologies : l’atlantisme et l’internationalisme. La première valorise un rôle d’allié fiable au sein des États-Unis et du reste de l’alliance, tandis que la seconde favorise un rôle d’acteur neutre et indépendant dans le cadre des opérations de maintien de la paix (Massie, « La politique étrangère et de défense du Canada », 2013). Au milieu de la décennie, le premier concept l’emporta sur le second. Ce changement est particulièrement apparent lorsqu’on examine l’implication canadienne en Yougoslavie. L’offensive de l’OTAN contre un État souverain qui n’avait ni attaqué ni même menacé l’un de ses membres marqua un changement dans la politique de cette alliance et, par le fait même, du Canada. Cette décision eut ainsi un impact direct sur l’image pacifiste du pays. En favorisant désormais l’approche atlantiste, le Canada, tout en continuant de justifier l’usage de ses forces à des fins de respect des droits humanitaires, semble plutôt se rapprocher d’un rôle de combattant. Le déroulement de l’intervention canadienne en ex-Yougoslavie, de la Bosnie jusqu’au Kosovo, s’impose donc comme un champ d’études pertinent afin de comprendre cette transformation de l’identité militaire canadienne. Bien que plusieurs analyses relevant de la science politique et du journalisme ont été consacrées à ce thème, peu d’entre elles jettent un éclairage historique sur l’intervention canadienne dans ce conflit. Plutôt que de fournir des analyses stratégiques ou encore de se limiter à des enjeux spécifiques, un récit à la fois chronologique et analytique des événements principaux fera d’abord ressortir les différentes étapes de l’entière participation canadienne durant le conflit yougoslave. À travers l’analyse des décisions et des actions prises par le Canada au cours de cet épisode, il sera possible de reconstituer la position du pays à l’égard de ses interventions militaires au tournant du millénaire. Enfin, il convient également d’étudier la réception de ces efforts et de ces actions par les organisations internationales majeures impliquées telles que l'ONU et’l’OTAN. Au total, cette étude permettra de saisir l’évolution du rôle militaire du Canada à travers l’un des conflits les plus médiatisés de cette époque.