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Lundi 19 octobre 2009 - N° 213/2009 ■ LSQ n° 15465 JURISPRUDENCE 28/09 JURISPRUDENCE HEBDO Les arrêts en bref TEST PROFESSIONNEL PRIME POUR SURCROÎT D’ACTIVITÉ Prestation de quelques heures hors conditions normales d’emploi Paiement intégral — Respect de l’engagement non dénoncé Le conseil de prud’hommes, qui a fait ressortir que la prestation pendant quelques heures de Mme X. constituait non pas une relation de travail impliquant que celle-ci soit placée dans des conditions normales d’emploi, mais un test professionnel, a légalement justifié sa décision déboutant l’intéressée de ses demandes d’indemnités de rupture. 왘 Cass. soc., 16 septembre 2009, n° 07-45.485 F-D Å Une candidate à un emploi de secrétaire dactylographe, qui avait effectué un test professionnel, a soutenu avoir exécuté une prestation de travail. Elle a été déboutée aux motifs que le test, qui n’avait duré que quelques heures, n’avait pas été réalisé dans des conditions normales d’emploi. Un test professionnel se différencie de la période d’essai du fait qu’il se situe en dehors de tout contrat de travail. Mais la Cour de cassation exige que l’évaluation soit faite en dehors des conditions normales d’emploi (cf. Cass. soc., 26 novembre 2008, n° 07-42.673, qui a retenu l’existence d’une prestation de travail s’agissant d’une personne ayant participé activement pendant une journée à la livraison des colis avec le véhicule de l’entreprise, en se tenant à la disposition de l’employeur et en écoutant ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses propres affaires). Lorsqu’elle est payée en exécution d’un engagement unilatéral de l’employeur, une prime constitue un élément de salaire et est obligatoire pour l’employeur dans les conditions fixées par cet engagement. Ayant constaté que le versement de la prime avait été décidé par l’employeur pour compenser financièrement un surcroît d’activité durable et permanent qui aurait pu justifier la création d’un emploi à temps partiel, la cour d’appel, qui ne pouvait décider d’un paiement partiel, alors qu’un tel paiement n’avait pas été envisagé et qu’il appartenait à l’employeur de dénoncer régulièrement l’engagement qu’il avait pris, a violé l’article 1134 du Code civil. 왘 Cass. soc., 24 juin 2009, n° 07-45.631 F-D Å L’entreprise avait institué en février 2004 au profit d’une équipe, en contrepartie d’un surcroît d’activité, une prime mensuelle de 1 000 €, prime supprimée en 2005 en raison de la fin du surcroît d’activité. La cour d’appel avait considéré que la prime devait être supprimée si le surcroît d’activité cessait ou être réduite à proportion s’il diminuait. Une solution que la Cour de cassation a censurée : l’employeur ne peut supprimer une prime issue d’un engagement unilatéral qu’en respectant le régime de dénonciation d’un tel engagement (information des IRP, information des salariés et délai de préavis). Les juges ne peuvent en aucun cas accorder un paiement partiel qui n’a pas été envisagé par l’employeur dans son engagement. ZOOM SALAIRE Impossibilité de mettre le salaire en participation TITRE RESTAURANT Le versement d’un salaire constitue la contrepartie nécessaire de la relation de travail. Le versement du salaire ne pouvait être aléatoire et, donc, ne pouvait être mis en participation. 왘 Cass. soc., 16 septembre 2009, n° 08-41.191 F-PB Å À la différence de la participation qui comporte un aléa, le salaire stricto sensu ne peut être aléatoire. La Cour de cassation en déduit que des techniciens/artistesinterprètes ne peuvent valablement accepter que le montant de leur rémunération soit mis en participation pour le financement d’un film. Une telle clause n’a pas de valeur, un salarié ne pouvant renoncer au paiement de son salaire en cas d’échec du film. Le bénéfice des titres restaurant peut être soumis à conditions, sous réserve de leur licéité. La cour d’appel qui a constaté que le salarié ne remplissait pas, pour le mois considéré, la condition en vigueur dans l’entreprise de 15 jours minimum de travail au cours du mois a, par ce seul motif, justifié sa décision (rejet de la demande). 왘 Cass. soc., 16 septembre 2009, n° 08-42.040 F-D Å Les juges contrôlent la ou les conditions d’octroi des titres restaurant. Si l’exigence d’une durée minimale de travail n’est pas illicite, comme le montre cet arrêt, il en va autrement de la qualification professionnelle des salariés (Cass. soc., 20 février 2008, n° 05-45.601, Bull. n° 39, Juris. Hebdo. n° 55/2008 du 3 mars 2008 qui a condamné le fait de réserver l’attribution de titres-restaurant aux salariés non cadres, sans justification). Condition — 15 jours de travail par mois ●●● LIAISONS SOCIALES – Jurisprudence hebdo 1 Jurisprudence N° 213/2009 Lundi 19 octobre 2009 À TRAVAIL ÉGAL, SALAIRE ÉGAL Différence de traitement justifiée par l’origine statutaire des salariés — Compensation de la perte d’avantages Ayant relevé que les différences de traitement susceptibles de demeurer entre les salariés des deux entités HIUP et CMC existant avant la fusion de 1995 étaient justifiées par l’origine statutaire distincte de ces salariés, ceux du CMC bénéficiant, à la date d’effet de la fusion, de droits qu’ils tenaient de leur contrat de travail, dont l’article 15 du protocole d’accord du 31 octobre 1995 était destiné à compenser la perte, la cour d’appel a légalement justifié sa décision (rejet d’une demande de rappel de salaire). 왘 Cass. soc., 16 septembre 2009, n° 08-40.954 F-D Å Suite à la fusion de l’hôpital international de l’université de Paris (HIUP) avec le Centre médico-chirurgical de la Porte de Choisy (CMC), un protocole d’accord a permis d’harmoniser les statuts des personnels (ceux de l’HIUP relevaient de la convention collective FEHAP et ceux du CMC d’accords atypiques). Un médecin de l’ex-HIUP, comparant sa rémunération à celle des médecins de l’ex-CMP, a invoqué une violation du principe « à travail égal, salaire égal ». Il a été débouté : le protocole réservait aux médecins du CMC des droits qu’ils tenaient de leur contrat et qu’ils perdaient du fait de l’harmonisation. La solution s’inscrit dans le flot jurisprudentiel qui admet, parmi les raisons justifiant une différence de traitement, la compensation d’un préjudice. RÉMUNÉRATION DES MAÎTRES DES ÉTABLISSEMENTS PRIVÉS Principe d’assimilation avec la rémunération des instituteurs — Droit à l’indemnité de fonction prévue par la CCN Le principe d’assimilation et d’équivalence de la rémunération des maîtres agréés des établissements d’enseignement privé sous contrat simple avec celle des instituteurs de l’enseignement public concerne uniquement les traitements, avantages et indemnités attribués par l’État, et non les indemnités à la charge de leurs employeurs privés. La cour d’appel, qui a constaté que l’indemnité revendiquée était due en application de la convention collective dont relevait l’employeur, en a exactement déduit que celui-ci était tenu d’en supporter la charge, peu important que la convention conclue avec l’État n’ait pas énoncé de sujétion particulière liée à l’emploi. 왘 Cass. soc., 30 septembre 2009, n° 07-42.694 FS-PBR Å Une éducatrice spécialisée embauchée par une association est devenue enseignante en vertu d’une convention passée entre son employeur et l’État. Bien que rémunérée par le ministère de l’Éducation nationale, elle a réclamé à son employeur le paiement d’une indemnité de fonction prévue par la CCN du 31 octobre 1951 dont il dépendait. Elle a obtenu satisfaction : le principe d’assimilation entre les personnels de l’enseignement public et les maîtres agréés ne concerne que les avantages et indemnités servis par l’État. Les indemnités conventionnelles comme l’indemnité de fonction sont dues par l’employeur, peu important que la convention conclue entre l’employeur et l’État ne mentionne pas l’existence de sujétion particulière. ZOOM TRANSFERT D’ACTIVITÉ À UNE PERSONNE PUBLIQUE Refus d’un contrat de droit public, cause de licenciement — Dispositions sur le licenciement économique inapplicables La cause particulière de rupture du contrat de travail prévue par l’article L. 1224-3 du Code du travail ne relève pas des dispositions de ce code applicables aux licenciements pour motif économique. Si le licenciement d’un salarié qui refuse un contrat de droit public doit être prononcé dans les conditions prévues par le Code du travail, le refus de changer de statut opposé par le salarié repris constitue à lui seul une cause de licenciement. 왘 Cass. soc., 30 septembre 2009, n° 08-40.846 FS-PBR Å Les règles applicables aux salariés de droit privé repris par une personne de droit public gérant un service public administratif ont considérablement évolué ces dernières années. Cet arrêt du 30 septembre, qui se prononce sur le licenciement d’un salarié qui refuse un contrat de droit public, ne correspond d’ailleurs plus à l’état actuel du droit, une loi du 3 août 2009 ayant modifié la législation. C’est en 2002 que la Cour de cassation a admis, sous l’influence de la jurisprudence communautaire, l’application de l’article L. 122-12, devenu L. 1224-1 du Code du travail, en cas de reprise d’une activité par une personne publique (Cass. soc., 25 juin 2002, n° 01-43.467, Juris. Hebdo. n° 778, Bull. n° 209). En 2004, le Tribunal des conflits est venu préciser que le transfert n’avait pas pour effet de transformer la nature juridique des contrats et que seul le juge judiciaire était par suite compétent pour apprécier un licenciement (Trib. confl., 19 janvier 2004, n° 3393 publié au rec. Lebon et 21 juin 2004, n° 3415). Solution adoptée par la Cour de cassation en 2005 (Cass. soc., 23 novembre 2005, n° 03-45.439, Juris. Hebdo. n° 933, Bull. n° 339). Ultime étape ayant donné lieu à la présente affaire, une loi du 26 juillet 2005, codifiée à l’article L. 1224-3 du Code du travail, oblige la personne publique à proposer aux salariés repris un contrat de droit public incluant les clauses substantielles de leur contrat et lui impose, en cas de refus des salariés, de procéder à leur licenciement « dans les conditions prévues par le présent code ». Appliquant ce texte, la Cour de cassation précise dans le présent arrêt que le refus d’un salarié de changer de statut constitue, à lui seul, une cause de licenciement ; peu importe donc les modifications éventuellement apportées par la personne publique, celles-ci n’entrent pas en ligne de compte dans l’appréciation de la cause du licenciement. Autre précision : ce licenciement ne relève pas de la catégorie des licenciements économiques. La loi n° 2009-972 du 3 août 2009 a toutefois modifié l’article L. 1224-3 : la personne publique n’a plus à procéder au licenciement du salarié qui refuse un contrat de droit public, le « contrat prend fin de plein droit », précise en effet la loi nouvelle (Légis. soc., -Empl. & chôm.- n° 175/2009 du 28 août 2009). ●●● 2 LIAISONS SOCIALES – Jurisprudence hebdo Jurisprudence N° 213/2009 Lundi 19 octobre 2009 CHSCT Projet de réorganisation susceptible de concerner d’autres entreprises — Expertise justifiée Ayant constaté, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation, que le projet de réorganisation important mis en place à l’initiative de la direction du groupe Eiffage entraînait la disparition de la société CICO appelée à devenir un simple établissement de la société absorbante Forclum Ile-de-France, ainsi qu’une nouvelle organisation des établissements de la société CICO et le transfert d’une partie de son personnel au service de la société Quillery, relevant d’un autre groupe, la cour d’appel a pu en déduire que ce projet était de nature à modifier les conditions de travail du personnel et justifiait le recours à un expert, alors même que d’autres entreprises que la société CICO étaient concernées par ces modifications. 왘 Cass. soc., 29 septembre 2009, n° 08-17.023 F-PB Å Conformément à un projet de restructuration au sein d’un ZOOM HEURES SUPPLÉMENTAIRES groupe, une société devait devenir un établissement de la société dont elle était jusqu’alors filiale, et les salariés d’un département devaient voir leur contrat de travail transféré à une autre société du groupe (appliquant un accord 35 heures différent). La question se posait de savoir si le CHSCT de la société pouvait désigner un expert sur le projet de restructuration en tant que projet important modifiant les conditions de travail (C. trav., art. L. 236-9.I.2° devenu L. 4614-12.2°). L’importance du projet n’était pas contestée : modifications de l’organigramme et de la structure juridique de certaines sociétés, changement d’employeur, déplacement du siège, transfert de 21 salariés dans une société avec un statut collectif différent, etc. Mais, selon l’entreprise, les conditions de travail des 595 salariés n’étaient pas affectées, seuls 21 salariés passant chez un nouvel employeur voyant leurs conditions modifiées. Or, a-t-elle plaidé, ces conditions de travail ne dépendent pas d’elle, de sorte qu’elle n’avait pas de prise sur elles. Mais les juges du fond ont considéré que le projet modifiait les conditions de travail d’un nombre significatif de salariés et que l’expertise était donc justifiée, peu important que d’autres entreprises soient concernées par les modifications. La Cour de cassation a confirmé cette solution. Base de calcul de la majoration — Rattachement direct à l’activité personnelle du salarié DISCRIMINATION SYNDICALE (NON) Les éléments de rémunération dont les modalités de fixation permettent leur rattachement direct à l’activité personnelle du salarié doivent être intégrés dans la base de calcul des majorations pour heures supplémentaires. En ne prenant pas en compte les primes de rendement, sans rechercher si la commission sur le chiffre d’affaires et la prime annuelle de résultat étaient directement rattachées à l’activité personnelle de la salariée, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision. 왘 Cass. soc., 23 septembre 2009, n° 08-40.636 FS-PB Å Une responsable de magasin percevait, outre un salaire fixe, un pourcentage sur le chiffre d’affaires hors taxes, ainsi qu’une prime annuelle en fonction des résultats du magasin. Le rappel de salaire au titre des heures supplémentaires effectuées entre 2001 et 2004 auquel elle avait droit devait-il être calculé en tenant compte des éléments variables de sa rémunération ? Pour la cour d’appel de Caen, les primes de rendement n’avaient pas à être prises en compte. En l’absence de précision dans la loi, la jurisprudence ne prend en compte, outre le salaire de base effectif réel, que les primes inhérentes à la nature du travail. S’agissant des primes de rendement, elle exclut de la base de calcul de la majoration celles qui dépendent de la productivité générale de l’entreprise. Récemment, elle a néanmoins admis qu’une prime de production qui était fonction de la production d’un groupe d’ouvriers, à laquelle contribuait nécessairement le rendement individuel de chacun des salariés du groupe, devait être incluse dans le salaire servant de base aux majorations pour heures supplémentaires (Cass. soc., 29 octobre 2007, n° 06-42.426). La Haute juridiction précise sa position dans le présent arrêt : un élément de rémunération ne doit être inclus dans la base de calcul de la majoration pour heures supplémentaires que si ses modalités de fixation permettent de le rattacher directement à l’activité personnelle du salarié. Les juges du fond devront rechercher si les éléments variables étaient directement rattachés à l’activité personnelle de la salariée, ce dont on peut douter si plusieurs salariés travaillaient dans le magasin. La rédaction des avenants des commerciaux est donc essentielle : à défaut d’établir un lien entre l’activité du salarié et une prime, cette dernière ne pourra être prise en compte dans le calcul de la majoration des heures supplémentaires. La cour d’appel a, par motifs opérants, constaté que le fait pour l’employeur de n’avoir pas proposé par deux fois aux salariées le poste qui se libérait se justifiait par des raisons objectives tenant, la première fois, à ce que le poste était à mi-temps en raison du départ de la salariée qui l’occupait en préretraite progressive, alors que les salariées travaillaient respectivement à plein-temps et à 80 %, et la seconde fois, au fait que la salariée choisie par l’employeur exerçait auparavant ces mêmes fonctions à temps partiel et qu’en outre, aucune des deux salariées n’avait postulé dans les délais pour occuper ce poste. 왘 Cass. soc., 29 septembre 2009, n° 08-42.123 F-D Å Deux salariées qui avaient des engagements syndicaux ont reproché à leur employeur un acte de discrimination syndicale, ce dernier ne leur ayant pas proposé, et ce à deux reprises, un poste qui s’était libéré. Les juges les ont déboutées, considérant que les décisions de l’employeur s’expliquaient par des raisons objectives étrangères à la moindre discrimination. LIAISONS SOCIALES – Jurisprudence hebdo Changement de poste — Raisons objectives AIDE AUBRY I Compétence de l’Urssaf pour vérifier les salariés concernés par l’accord de RTT S’il n’appartient pas à l’Urssaf de vérifier l’exécution des engagements auxquels est subordonnée l’aide prévue par l’article 3 de la loi n° 98461 du 13 juin 1998, elle est compétente pour déterminer les salariés qui entrent dans le champ d’application de la convention conclue relativement à cette aide entre l’employeur et l’État. 왘 Cass. civ. 2e, 8 octobre 2009, n° 08-13.523 FS-PB Å L’entreprise avait perçu l’aide incitative à la réduction du temps de travail (loi Aubry I) sur la rémunération de cinq commerciaux pour un montant total de 10452 €. Les juges du fond ont annulé le redressement opéré par l’Urssaf, au motif que celleci ne pouvait qu’aviser l’autorisation administrative compétente de ses constatations (manquement aux engagements de réduction du temps de travail) et ne pouvait se dispenser d’attendre une décision de cette autorité. L’arrêt a été censuré : certes, l’Urssaf n’est pas compétente pour contrôler l’exécution par l’employeur de ses engagements, ce contrôle étant exercé par l’autorité signataire de la convention avec l’entreprise, mais elle l’est pour contrôler le champ d’application de l’accord de RTT en vérifiant son application à chaque salarié. 3