Le PERP, une solution parmi d`autres

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Le PERP, une solution parmi d`autres
Le PERP, une solution parmi d'autres
Le PERP a des atouts. Mais y souscrire vous engage pour 10, 20, 30 ans ou plus. C'est donc
d'abord l'occasion de vous interroger sur votre stratégie en matière de retraite.
Les caractéristiques du PERP sont maintenant bien connues : il s'agit d'un produit destiné à la
constitution d'une rente viagère qui sera perçue par son titulaire au moment de la retraite. Des
avantages fiscaux ont été mis en place pour inciter les épargnants à souscrire : les cotisations
(versements) ouvrent droit, dans certaines limites, à une déduction de même montant du revenu
imposable. Cet avantage à l'entrée est compensé par des inconvénients majeurs : le capital n'est pas
disponible (les possibilités de sortie anticipée sont peu nombreuses), la sortie en rente est obligatoire
et cette rente sera imposable au même titre que les autres pensions de retraite (abattement de 10 %
et 20 %).
Alors, le PERP est-il intéressant, notamment au regard des avantages offerts par d'autres produits
d'épargne (l'assurance vie, les PEP...) ? Si oui, est-il intéressant pour tout le monde ? A qui s'adresse
le PERP ? L'arme principale du PERP c'est l'avantage fiscal qu'il procure. Les distributeurs du
produit, assureurs et banquiers, l'ont d'ailleurs bien compris qui axent leur communication sur la
déduction fiscale des cotisations. A l'inverse, enlevez l'avantage fiscal, et le PERP devient un
produit qui semble présenter beaucoup d'inconvénients. Il paraît donc indispensable de bien cerner
quel est l'avantage fiscal réellement accordé aux épargnants.
Le paramètre à prendre en compte ici est le taux marginal d'imposition (TMI) du souscripteur, c'est
à dire le taux applicable à la tranche de revenus la plus élevée. L'économie d'impôt est vraiment
intéressante si l'épargnant est fortement imposé (TMI maximum) pendant la phase d'épargne et si
ses revenus (rente du PERP comprise) diminuent lorsqu'il passe à la retraite. Autrement dit, le
PERP semble avoir été conçu principalement pour des personnes en milieu de carrière, fortement
imposées, et qui vont voir leurs revenus baisser lors du départ à la retraite compte tenu de la
faiblesse des régimes de base et complémentaires. Pour les autres, l'avantage du PERP est plus
aléatoire. En effet, le gain fiscal, s'il existe, ne sera connu qu'au moment du départ à la retraite, soit
dans 20 ou 30 ans. Or, il n'est pas possible de dire précisément aujourd'hui ce que sera la
réglementation fiscale des revenus dans 20 ans, ou le niveau de revenu du souscripteur.Il nous paraît
donc important de ne s'engager sur un PERP qu'avec un avantage fiscal substantiel, tel qu'il peut
être anticipé au départ.
Salariés : attention aux retraites entreprise Un élément supplémentaire doit être pris en compte par
les salariés. Ces derniers peuvent bénéficier, grâce à leur employeur, de produits retraite avantageux
(contrats dit « article 83 » ou « PERCO »). Or les versements effectués par l'employeur ou le salarié
sur ces produits viennent en diminution du maximum déductible fiscalement au titre du PERP.
Ainsi, des salariés très avantagés dans leur entreprise peuvent très bien ne plus avoir droit à la
déduction PERP parce qu'ils ont « consommé » toute leur enveloppe de déductibilité fiscale au titre
des produits d'épargne retraite. En outre, si vous disposez en tant que salarié d'un PERCO, ce
dernier est toujours plus intéressant fiscalement lorsque votre employeur abonde fortement le plan.
Précisément, lorsque le taux auquel l'employeur abonde le PERCO est supérieur au TMI (c'est de ce
dernier que dépend l'économie d'impôt procurée par le PERP), ce plan est la meilleure solution
fiscale.
Exemple : lorsque vous versez 100 euros dans le PERCO, votre employeur abonde à hauteur de 60
euros. Le taux de l'abondement est donc de 60 %. Votre TMI étant au maximum de 48,09 %, il est
plus intéressant fiscalement de verser ces 100 euros dans le PERCO plutôt que dans un PERP. Les
lois Madelin comptent Les indépendants peuvent, quant à eux, souscrire des produits d'épargne
retraite Loi Madelin. Là encore, les primes versées sur ces contrats viennent réduire le droit à
déduction au titre des PERP. Enfin, l'enveloppe fiscale PERP est aussi diminuée des cotisations
versées sur les contrats PREFON.
Au final, il nous apparaît que le PERP n'est pas intéressant fiscalement :
–
si vous êtes non imposable ou faiblement imposable ; - si vous êtes en début de carrière (le TMI
de départ donc l'avantage d'entrée sera faible et pourrait être compensé - voire plus que compensé
- par l'impôt de sortie - TMI plus élevé) ;
–
- si vous ou votre employeur cotisez à d'autres produits (Madelin, Art. 83, PERCO, PREFON) et
que votre investissement PERP n'est plus déductible.
Les contraintes du PERP
Souscrire un PERP c'est accepter de ne revoir la somme qu'on y verse que dans 10, 20 ou 30 ans.
Les possibilités de sortie anticipée sont en effet extrêmement réduites : invalidité, fin de droits à
l'assurance chômage ou liquidation judiciaire. Pas question donc de piocher dans cette épargne
après quelques années, pour faire face à des difficultés financières, financer l'achat d'une
résidence principale, ou aider la petite dernière à finir ses études. De ce point de vue, le PERP ne
soutient pas la comparaison avec un contrat d'assurance-vie classique dont la durée est plus
courte et qui permet de nombreuses possibilités d'accès à l'épargne (rachat du capital, emprunt à
taux réduit...).
Autre inconvénient du PERP, le déblocage de l'épargne au moment de la retraite se fait
obligatoirement en rente. Or les conditions de cette sortie en rente ne sont pas connues au
moment de la souscription du PERP. Ces conditions dépendent notamment de la table de
mortalité qui sera utilisée par la compagnie d'assurance, table qui dépendra de l'espérance de vie
au moment de la transformation en rente. Bref, il faut bien admettre que souscrire aujourd'hui à
un PERP, c'est en quelque sorte acheter un service dont la « qualité » n'est pas encore connue...
Là encore les contrats d'assurance vie sont mieux placés puisque l'épargnant peut choisir de sortir
en capital.
Enfin, l'épargne du PERP n'est pas transmissible aux héritiers. Certes, une reversion de la rente à
un bénéficiaire désigné peut être prévue au cas de décès, mais cela diminue alors le montant de
celle qui est versée au souscripteur. Au contraire, le capital disponible au terme d'un contrat
d'assurance fait partie de la succession de l'épargnant et viendra grossir le patrimoine
transmissible. Par ailleurs, le contrat d'assurance vie permet, en cas de décès avant le terme, de
transmettre le capital aux bénéficiaires en franchise totale ou partielle d'impôt sur la succession
(contre assurance décès).
Ainsi, le PERP est à éviter :
–
- si vous souhaitez disposer d'un capital au terme de la période d'épargne ; - si vous souhaitez
piocher dans votre épargne avant la retraite en cas de besoin (apport pour l'achat de la résidence
principale par exemple) ;
–
- si vous souhaitez transmettre le fruit de votre épargne à vos héritiers. L'occasion de faire un
bilan... Le PERP s'adresse d'abord aux personnes fortement imposées dont les revenus vont très
probablement diminuer au moment du départ à la retraite. Et même dans ce cas, il doit être conçu
comme un produit d'épargne complémentaire, spécialement destiné à assurer un revenu d'appoint
après le départ à la retraite. Le PERP n'est certainement pas la réponse miracle au problème de la
retraite.
Mais son lancement est l'occasion pour tous de se projeter au moment du départ à la
retraite : -quel sera le montant prévisible de la retraite ? - à quelles dépenses faudra-t-il faire
face ? - le patrimoine constitué permettra-t-il de dégager des revenus complémentaires ou, au
contraire, entraînera-t-il des dépenses nouvelles ? Répondre à ses questions c'est dégager un
profil qui varie nécessairement selon les cas.
Ainsi à 30-35 ans, sans doute faut-il penser en priorité à l'achat d'une résidence principale. Un
effort d'endettement à cet âge est une bonne solution pour se constituer un capital car il constitue
une « épargne forcée » qui n'aurait probablement pas été mise en oeuvre en l'absence
d'acquisition de la résidence principale. En outre, il apparaît que cet investissement dans la
pierre, à condition évidemment de pouvoir revendre sans moins value, est une opération
financière gagnante en raison principalement du bas niveau actuel des taux d'intérêt à l'emprunt.
Enfin, au moment du départ à la retraite, l'absence de charges liées à un loyer ou au
remboursement d'un crédit immobilier permet de dégager un revenu disponible plus important.
A partir de 40-45 ans, certains cadres ou indépendants seront peut-être fortement fiscalisés alors
que leur retraite de base et complémentaire ne leur garantira qu'un revenu nettement inférieur à
ce qu'ils perçoivent aujourd'hui. Dans ces conditions, le PERP est une bonne réponse pour
s'assurer un revenu complémentaire constitué dans des conditions fiscales avantageuses.
Toutefois, il ne faudrait y consacrer qu'une part de l'effort d'épargne.
Outre une épargne de précaution disponible en cas de coup dur, on peut avoir intérêt à effectuer
des placements sur des produits de long terme. Sur 15 ou 20 ans, un placement en actions bien
diversifié offre un très bon rendement pour un risque limité. Le capital sera alors disponible pour
des projets personnels (résidence secondaire, voyages, aide aux enfants et petits-enfants) ou dans
une optique successorale.
L'assurance vie reste dans cette optique la meilleure solution : le capital constitué est géré
librement dans des conditions fiscales favorables. D'autres pourraient également être tentés par
des investissements immobiliers. L'investissement locatif bénéficie d'avantages fiscaux
intéressants (voir « Dossier Robien ») et si l'on sait choisir un bien immobilier et que l'on accepte
les contraintes et risques d'un propriétaire bailleur, cette piste ne doit pas être négligée.
En conclusion, le PERP s'adresse d'abord aux personnes fortement imposées dont les revenus
vont très probablement diminuer au moment du départ à la retraite. En effet, compte tenu de la
durée viagère de ce produit (jusqu'au décès), et de la méconnaissance des conditions de sortie en
rente à la souscription, nous ne conseillons la souscription d'un PERP que si la réduction d'impôt
lors de la phase d'épargne est maximale. Même dans le cas où le PERP apparaît fiscalement très
intéressant, il doit être conçu comme un produit d'épargne complémentaire, spécialement destiné
à assurer un revenu d'appoint après le départ à la retraite.
Bérénice De Lahaye