espace juridique - Chambre d`Agriculture de la Vienne

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Chronique Juridique
6 janvier 2015
Pour parution Vienne Rurale du Vendredi 9 janvier 2015
Apport de biens communs à une société
Un agriculteur prénommé Denis, installé depuis 1999, veut créer une société (EARL) avec son
voisin et souhaite faire apport des actifs de son exploitation à la nouvelle structure (matériel,
cheptel…). Il est marié depuis 1995 à Marie sans contrat de mariage (régime de la communauté
réduite aux acquêts). Les biens composant son apport, achetés après son mariage, sont des
biens communs à l’agriculteur et à son épouse.
Qui a la qualité d’associé ?
Comme il s’agit de biens communs, qui de Denis ou Marie va avoir la qualité d’associé ?
Pour avoir la réponse, il faut se référer à l’Article 1832-2 du Code civil : en cas d’apport de biens
communs à une société de personnes (sociétés civiles, SARL, SNC) la qualité d’associé est
reconnue à l’époux qui fait l’apport. Dans notre exemple, seul Denis se verra attribuer la qualité
d’associé.
Reconnaissance de la qualité d’associé à l’époux commun en biens
Toutefois, Marie peut devenir associée de la société à hauteur de la moitié des parts souscrites
par son conjoint si elle en émet le souhait au moment de l’apport. Pour cela, elle devra notifier à la
société son intention d’être personnellement associée.
Si Marie ne revendique pas la qualité d’associé lors de l’apport, elle pourra changer d’avis et
revendiquer la qualité d’associé plus tard. Lorsque cette revendication intervient postérieurement à
l’apport, son entrée dans la société devra être autorisée par les autres associés dans les
conditions prévues aux statuts (clause d’agrément). Son conjoint, qui ne peut pas être neutre dans
cette situation, ne pourra pas prendre part au vote et ses parts sociales ne seront pas prises en
1
compte pour le calcul du quorum et de majorité de l’assemblée des associés qui statuera sur
l’entrée de Marie dans la société.
Marie peut exercer ce droit jusqu’à la dissolution de la communauté conjugale (divorce ou décès).
En cas de divorce, la Cour de cassation a considéré, dans un arrêt de mai 2013, que le conjoint
commun en biens pouvait revendiquer la qualité d’associée aussi longtemps qu’un jugement de
divorce passé en force de chose jugée (définitif) n’est pas intervenu. Dans cette affaire, une
épouse avait notifié à plusieurs sociétés - quelques jours après avoir assigné son conjoint en
divorce - son intention d’être associée pour la moitié des parts de son époux acquises par emploi
de biens communs. Le prononcé du divorce, trois ans plus tard, a prévu que celui-ci allait prendre
effet, dans les rapports des époux en ce qui concerne leurs biens, à la date de l’assignation, c’està-dire avant la date de revendication. Saisie de cette affaire, la Cour de cassation a répondu que
le conjoint pouvait revendiquer la qualité d’associé jusqu’au prononcé du divorce, même si la date
une date d’effet du divorce était antérieure à son prononcé.
L’accord de l’époux commun en biens
Attention toutefois : même si l’époux commun en biens ne souhaite pas revendiquer la qualité
d’associé, il devra être averti de cet apport. L’avertissement du conjoint commun en biens (Marie
dans notre cas) devra être justifié par une mention inscrite dans l’acte d’apport. En général, celui1
Conditions de présence ou de représentation des associés pour que l’assemblée puisse valablement
délibérer
ci intervient à l’acte et le signe en précisant qu’il a bien été averti de l’utilisation de biens
communs.
Nathalie MICHEL, Juriste
Chambre d’Agriculture de la Vienne

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