La loi sur la protection de l`enfance - Département des Bouches

Transcription

La loi sur la protection de l`enfance - Département des Bouches
"LA LOI SUR LA PROTECTION DE L'ENFANCE :
QUEL CONTENU POUR QUELLES CONSEQUENCES ?"
RAPPORTEUR :
LA PRESIDENTE :
LES VICE-PRESIDENTS :
M. JACQUES BERRIN
MME SIMONE BOURRELLY
M. FABRICE AUBERT
M. JACQUES BERRIN
Le Jeudi 14 Janvier 2010
PREAMBULE
S’agissant d’un sujet aussi technique, il m’a paru opportun dans un premier temps de
rappeler ce qu’était « la protection de l’enfance », son évolution au cours des dernières
années, et de mettre en perspective l’ensemble des problématiques que cette politique
publique présente. Et ce au regard d’une société en crise, dont l’impact sur la famille et les
enfants, est considérable.
C’est en second lieu que j’évoquerai au plan départemental, pour le Conseil général des
Bouches-du-Rhône les conséquences de la mise en œuvre de la réforme de la protection de
l’enfance.
Notamment au travers d’un état des lieux (les considérants de ce rapport) et ensuite par
quelques « propositions ».
On trouvera ainsi dans « le rapport définitif » une brève présentation de « la protection de
l’enfance » et une série de documents qui illustrent ce sujet.
C’est dans « la proposition d’avis » que je vous soumettrai ensuite que figureront les aspects
relatifs au département des Bouches-du-Rhône et à la mise en œuvre par le Conseil Général
de cette politique qui relève depuis les premières lois de décentralisation (1983/1986) de ses
compétences obligatoires.
Enfin il me parait aussi indispensable de s’interroger sur les futures conséquences de la
réforme des collectivités territoriales, qui à terme ne manquera pas de modifier de façon
substantielle la mise en œuvre de la protection de l’enfance, politique publique que tous les
responsables institutionnels, s’accordent à qualifier de prioritaire.
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Enfin je rappelle ici que le CDC examine actuellement plusieurs saisines du Président du
Conseil Général, dossiers de fond qui concernent directement les familles, les enfants, et les
jeunes du département, politiques publiques prioritaires.
Ainsi notamment ce rapport sur la protection de l’enfance, mais aussi celui sur la santé des
adolescents (Madame REYNAUD et Monsieur GHIRARDI), et celui des modes de garde de la
petite enfance (Madame MARRONE) sont actuellement en cour
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LA REFORME DE LA PROTECTION DE L’ENFANCE
(Loi n° 2007-293 du 5 mars 2007)
I INTRODUCTION
A - Historique de la genèse de la loi du 5 mars 2007, réformant la protection de l’enfance.
Plusieurs étapes ont marqué la protection de l’enfance en France avant cette nouvelle loi :
La première est l’ordonnance du 2 février 1945 relative à la justice des mineurs, suivie de
l’ordonnance du 23 décembre 1958 qui confie l’assistance éducative au juge des enfants.
La deuxième étape, date des lois de décentralisation de 1983, et de celle du 6 janvier 1986
qui confie aux Conseils Généraux la responsabilité de l’aide sociale à l’enfance (ASE) (1).
La troisième étape, avec la loi du 10 juillet 1989 marque un virage majeur en définissant le
principe de la prévention des mauvais traitements à l’égard des mineurs et à la protection de
l’enfance.
Elle pose en effet les bases d’une obligation de signalement à la justice des cas de
maltraitance des enfants (2).
Mais ces différentes lois n’ont pas modifié la dualité du système de protection de l’enfance.
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La protection administrative, exercée par les Conseils Généraux, avec l’aide du
secteur associatif, comprend l’ensemble des interventions individuelles et collectives,
de nature essentiellement préventive.
L’accord des personnes qui bénéficient de ces actions est obligatoire. Il s’agit de
prévenir un risque en matière d’éducation, d’entretien, de santé, de sécurité ou de
moralité. C’est le service de l’ASE du Conseil général qui assure cette mission.
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La protection judiciaire regroupe les interventions individuelles, prises sur décision
du juge des enfants (JE). Elle vise à contrôler l’exercice de l’autorité parentale sans y
porter atteinte, en apportant aide et accueil à la famille, qui n’avait pas accepté l’aide
proposée dans le cadre de la protection administrative.
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(1)Auparavant les actions de l’ASE étaient définies en fonction des différentes catégories juridiques d’enfant,
pris en charge (enfants surveillés, enfants recueillis temporairement, enfants secourus, enfants en garde,
pupilles de l’Etat). L’innovation a consisté à substituer à une approche juridique une logique plus dynamique,
en définissant des missions. Mais la loi du 6 janvier 1986 n’organisait aucune procédure de prévention ni de
détection.
2)Mais le dispositif de protection de l’enfance issu de la loi du 10 juillet 1989 s’est révélé inadapté, car son
champ d’application, en se limitant aux enfants maltraités, ne répondait plus aux évolutions de la société, avec
des familles fragilisées par la précarité et la monoparentalité, s’adressant elles-mêmes directement aux services
de l’ASE pour recevoir un soutien par rapport à leurs enfants.
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Ce type de protection s’imposait tout naturellement dans les cas de maltraitance.
Mais il est progressivement apparu que ce dispositif de protection de l’enfance se heurtait à
plusieurs difficultés :
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Une mauvaise définition du cadre d’intervention des Conseils Généraux,
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Un repérage souvent insuffisant, voire même défaillant de la maltraitance (3),
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Une articulation pas très facile entres les différents « partenaires » (département,
justice, associations et ASE),
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Un partage encore insuffisamment clarifié des missions entre l’aide sociale à
l’enfance et la justice,
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La question du secret professionnel des différents acteurs du dispositif.
B - La mise en œuvre de la réforme du concept de protection de l’enfance.
Ce sont les années 2005-2007 qui vont faire avancer la protection de l’enfance, avec le vote
de la loi n°2007-293 du 5 mars 2007 « réformant la protection de l’enfance ».
Mais si c’est cette loi qui constitue le socle de la réforme d’autres textes ont aussi constitué
au mouvement de la réforme ainsi :
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La loi du 27 juin 2005 visant à professionnaliser les assistants familiaux,
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La loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences
commises au sein du couple (violences intrafamiliales) ou à l’encontre des mineurs,
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La loi n°2007-297 relative à la prévention de la délinquance (4)
Cette nouvelle étape de la protection de l’enfance est en effet une réforme car elle a vocation
à clarifier, tant pour les professionnels chargés de la mettre en œuvre, que pour les familles
bénéficiaires, les objectifs de la protection de l’enfance et en définit la notion même.
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(3)Ce sont les affaires d’OUTREAU (Affaire pénale d’abus sexuel sur mineur qui déboucha sur une erreur
judiciaire d’une ampleur sans précédent) et d’ANGERS (le plus grand procès de pédophilie tenu en France) qui
ont pour une large part inspiré le législateur dans cette réforme de la protection de l’enfance, et l’ont accélérée.
4)En effet deux lois importantes ont été promulguées le même jour, le 5 mars 2007, avec aussi celle relative à la
prévention de la délinquance.
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Ainsi le nouvel article L-112-3 du Code de l’action sociale et des familles (CASF) stipule que
désormais :
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« La protection de l’enfance a pour but de prévenir les difficultés auxquelles les
parents peuvent être confrontés dans leurs responsabilités éducatives, d’accompagner
les familles, et le cas échéant d’assurer une prise en charge partielle ou totale des
mineurs ».
La loi met ainsi en œuvre un ensemble d’interventions en faveur des enfants et de leurs
parents, les actions peuvent ainsi être destinées à des jeunes majeurs (- 21 ans) connaissant
des difficultés susceptibles de compromettre gravement leur équilibre.
La réforme a ainsi pour but de prévenir les difficultés que certains mineurs privés
temporairement ou définitivement de leur famille peuvent rencontrer et alors d’assurer leur
prise en charge.
II L’ESPRIT DE LA REFORME DE LA LOI DE 2007
Il s’agit en fait de concilier des intérêts « opposés » :
- Ceux de l’enfant,
- Et les droits des parents.
La problématique consiste à renforcer la prévention tout en conservant les moyens de
s’occuper des enfants admis à l’ASE.
Comment concilier l’aide et la sanction.
Le législateur de 2007 a principalement voulu mettre un terme aux placements systématiques
de l’après-guerre.
Les magistrats et les travailleurs sociaux devront désormais s’efforcer de maintenir l’enfant
dans son milieu familial.
Le dispositif repose ainsi sur un équilibre difficile à atteindre entre l’intimité de la famille, les
libertés individuelles, et l’autorité parentale, et d’autre part la nécessité de prendre en
compte l’intérêt de l’enfant.
Il convient donc de veiller sur la famille, sans la stigmatiser, accueillir les enfants, dans une
stabilité affective et psychique, tout en organisant des allers er retours chez leurs parents, les
protéger tout en aidant les parents à exercer leurs responsabilités et compétences parentales.
L’objectif est de privilégier la prévention, à laquelle ne sont consacrés que trop peu de
crédits. Cela suppose que cette priorité soit assortie d’un accroissement significatif des
moyens humains (notamment dans les services de la protection maternelle infantile) et
financiers inhérents, que tous les départements ne sont pas en mesure de fournir.
Concernant la judiciarisation, croissante de la protection de l’enfance ces dernières
années, il n’est pas certain que la réforme proposée suffise à faire tempérer
« l’interventionnisme » des juges des enfants sauf à orienter leur action vers la répression de
la délinquance.
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C’est pourquoi pour tenter de remédier à la difficulté de choisir entre le maintien de l’enfant
dans sa famille et le placement, la loi du 5 mars 2007 donne désormais une base légale à des
formules d’accueil alternatives plus souples (que certains département avaient déjà initiées) :
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Accueil de jour,
Accueil exceptionnel ou périodique,
Accueil spécialisé,
Accueil d’urgence.
Cela vise à diversifier les modes de prise en charge afin de mieux répondre aux situations
spécifiques de la famille et de l’enfant.
III LA NECESSAIRE EVALUATION DES RESULTATS DE LA REFORME DE LA
PROTECTION DE L’ENFANCE
Il sera en effet fondamental d’analyser les résultats à court et moyen terme d’un tel dispositif
confié aux départements. C’est notamment le rôle dévolu à « l’Observatoire National de
l’Enfance en danger » (ONED), notamment grâce à ses liens avec les Observatoires
Départementaux (ODPE).
Mais plus de deux ans après la promulgation de la loi du 5 mars 2007, « le Fonds National
de Financement de la Protection de l’Enfance (FNFPE) », qui était prévu (5) n’a pas été
abondé, le décret d’application le concernant n’ayant pas encore été publié.
Il s’agit là d’un grave sujet d’inquiétude, les départements craignant que la part de l’Etat
dans le transfert des charges ne soit pas assurée.
En l’espèce l’Assemblée des Départements de France (ADF) pour exprimer son
mécontentement a décidé, il y a quelques mois d’introduire un recours contre l’Etat pour
manquement à ses obligations légales.
Ainsi le Conseil d’Etat dans une décision qui vient d’être rendue (le 30 décembre 2009) a
enjoint à l’Etat de respecter ses engagements, en lui fixant un délai de 4 mois pour créer le
FNFPE.
Dans un communiqué du 31 décembre 2009 le Premier ministre a indiqué qu’aucune
disposition n’avait été retenue dans la loi de finances pour 2010, mais qu’il envisageait de
proposer des modifications législatives et règlementaires.
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(5)L’article 27 de la loi du 5 mars 2007 prévoyait en effet un Fonds National de financement de la protection de
l’enfance au sein de la Caisse Nationale des Allocations Familiales (CNAF), avec notamment un versement
annuel de l’Etat, fixé par la loi de finances.
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