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Davies Ward Phillips & Vineberg S.E.N.C.R.L., s.r.l.
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16 avril 2013
Le Tribunal de la concurrence rejette les
accusations d’abus de position dominante à
l’encontre du Toronto Real Estate Board
Auteurs : George N. Addy, Sandra A. Forbes, John Bodrug et Jim Dinning
Le 15 avril 2013, le Tribunal de la concurrence du Canada a rendu sa décision rejetant la demande du
commissaire de la concurrence à l’encontre du Toronto Real Estate Board (le « TREB »). Le
commissaire alléguait que le TREB avait abusé de sa position dominante sur le marché des services
de courtage immobilier résidentiel en instaurant des règles qui limitent la manière dont ses courtiers et
agents membres peuvent fournir certains renseignements aux consommateurs sur Internet.
Davies représentait l’Association canadienne de l’immeuble, l’un des intervenants dans le cadre des
procédures.
L’affaire, qui a fait la manchette en raison de son incidence potentielle pour les acheteurs d’immeubles
résidentiels et leurs agents, présentait également un intérêt particulier pour les associations
professionnelles et leurs membres.
Le Tribunal s’est prononcé sur la question soumise de façon succincte, jugeant que les dispositions
relatives à l’abus de position dominante prévues dans la Loi sur la concurrence (la « Loi ») ne
s’appliquaient pas en l’espèce. Toutefois, il n’a pas écarté la possibilité qu’un comportement similaire
puisse être visé par de nouvelles dispositions de la Loi aux termes desquelles le commissaire peut
s’opposer à certaines ententes entre des concurrents. (Le Tribunal ne s’est toutefois pas prononcé sur
le bien-fondé d’une éventuelle plainte à cet effet contre le TREB.)
Contexte
Le TREB, la plus importante chambre immobilière au Canada, regroupe plus de 35 000 courtiers et
agents immobiliers, principalement de la région du Grand Toronto. Il est propriétaire exploitant d’une
base de données électronique connue sous le nom de système TREB Multiple Listing ServiceMC («
TREB MLSMD » ou « système MLS »), qui est constituée de données courantes et historiques sur
l’achat et la vente de biens immobiliers résidentiels dans la région du Grand Toronto. Seuls les
membres du TREB ont directement accès au TREB MLSMD1, et les membres doivent s’engager à
respecter certaines règles et politiques mises en place par le TREB pour demeurer membres en règle.
En mai 2011, le commissaire a déposé une demande contre le TREB alléguant que celui-ci avait abusé
de sa position dominante sur le marché des services de courtage immobilier résidentiel. Plus
précisément, le commissaire alléguait que les restrictions imposées par le TREB quant aux
renseignements que ses membres pouvaient fournir aux clients sur Internet, notamment à partir de
sites Web protégés par un mot de passe, communément appelés « VOW » (pour Virtual Office Website
) ou bureaux virtuels, avaient pour effet de perpétuer le modèle d'affaires traditionnel adopté par la
plupart des courtiers et agents et empêchaient la création de modèles novateurs qui, selon le
commissaire, permettraient d’améliorer la productivité et de réduire les coûts pour les consommateurs.
Peu après le dépôt de la demande, le TREB a modifié ses règles afin de permettre la transmission de
certains renseignements se trouvant dans le système MLS aux clients à partir de bureaux virtuels sur
Internet. Toutefois, le TREB a maintenu des restrictions interdisant aux membres de relayer certains
renseignements dont ils disposaient aux clients par le truchement d’un bureau virtuel, notamment
certaines données concernant des immeubles déjà vendus et des immeubles « en cours de vente ».
Le commissaire a modifié sa demande, soutenant que les mesures prises par le TREB étaient
insuffisantes pour compenser l’importante entrave à la concurrence causée par les règles du TREB.
En réponse à la demande modifiée du commissaire, le TREB a répliqué, notamment, qu'étant donné
qu’il ne livrait pas concurrence sur le marché des services de courtage immobilier résidentiel, il ne
pouvait pas être accusé d’abus de position dominante dans ce marché.
La décision du Tribunal
Pour que le Tribunal conclue qu’il y a abus de position dominante, l’existence des éléments suivants
doit être établie :
•
•
•
une ou plusieurs personnes contrôlent sensiblement ou complètement une catégorie ou espèce
d’entreprises à la grandeur du Canada ou d’une de ses régions;
cette personne ou ces personnes se livrent ou se sont livrées à une pratique d’agissements
anticoncurrentiels;
la pratique a, a eu ou aura vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement
la concurrence dans un marché.
Le Tribunal a jugé que, étant donné que le TREB ne livrait pas concurrence à ses membres (fait qui n’a
pas été contesté par les parties en l’instance), aucun des éléments susmentionnés n’avait été établi
dans les allégations du commissaire.
Le Tribunal a déclaré qu’il était lié par la décision Canada Pipe rendue par la Cour d’appel fédérale en
2006, où la cour a conclu que, pour que l’élément énoncé en b) ci-dessus soit établi, les agissements
anticoncurrentiels dont il est question doivent viser un concurrent de l’entreprise en position dominante.
Puisque le TREB ne livre pas concurrence à ses membres, l’interdiction de transmettre certaines
données aux consommateurs à partir d’un bureau virtuel ne pouvait avoir d’effets négatifs sur un
concurrent, condition requise dans la décision Canada Pipe. En outre, comme il n’y a pas eu
d’agissements anticoncurrentiels, le Tribunal a jugé que l’élément énoncé en c) ci-dessus n’avait pas
non plus été établi eu égard aux faits de l’espèce.
Enfin, comme le TREB ne livre pas concurrence sur le marché des services de courtage immobilier
résidentiel, le commissaire ne pouvait démontrer que le TREB contrôlait le marché en question, et donc
l’élément a) ci-dessus n’avait pas été établi.
Par contre, le Tribunal a observé que, bien que les dispositions en matière d’abus de position
dominante ne s’appliquaient pas en l’espèce, le commissaire pourrait possiblement obtenir une
ordonnance dans des circonstances similaires en vertu de l’article 90.1 de la Loi, qui interdit la
conclusion d’ententes entre des personnes, dont deux ou plusieurs sont des concurrents, ce qui
auraient pour effet de diminuer considérablement ou d’empêcher la concurrence. (Le Tribunal ne s’est
pas penché sur le bien-fondé d’une telle demande à l’encontre du TREB.) Par conséquent, même si les
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associations professionnelles peuvent être soulagées du fait que le Tribunal n’a pas jugé le TREB
coupable d’agir en infraction des dispositions relatives à l’abus de position dominante de la Loi puisque
celui-ci ne livre pas concurrence à ses membres, ces associations doivent garder à l’esprit que, comme
la Loi interdit de conclure des ententes entre concurrents ayant pour effet de réduire considérablement
ou d’empêcher la concurrence, certains comportements pourraient néanmoins être contestés.
1
Certains courtiers et agents qui n’exercent pas dans la région du Grand Toronto peuvent également
avoir accès aux données du TREB MLSMD en vertu d’ententes de réciprocité entre leur chambre
immobilière et le TREB.
Davies Ward Phillips & Vineberg S.E.N.C.R.L., s.r.l. est un cabinet intégré qui compte plus de 240
avocats et dont les bureaux sont situés à Montréal, à Toronto et à New York. Le cabinet, dont la
pratique s’étend au-delà des frontières, est spécialisé en droit des affaires et se retrouve
systématiquement au cœur des opérations commerciales et financières les plus importantes et les plus
complexes pour le compte de ses clients.
Les renseignements et commentaires fournis aux présentes sont de nature générale et ne se veulent
pas des conseils ou des opinions applicables à des cas particuliers. Nous invitons le lecteur qui
souhaite obtenir des précisions sur l’application de la loi à des situations particulières à s’adresser à un
conseiller professionnel.
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