actualités - propriété intellectuelle

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actualités - propriété intellectuelle
ACTUALITÉS - PROPRIÉTÉ
INTELLECTUELLE
SEPTEMBRE 2004
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L’intention n’est pas pertinente pour déterminer si une marque de commerce a été
« employée » : Tommy Hilfiger Licensing, Inc. c. International Clothiers Inc.
Dommages-intérêts exemplaires accordés pour diffamation sur Internet :
Barrick Gold Corp. c. Lopehandia
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La Cour fédérale entend un appel sur une question théorique en raison du risque de
responsabilité en vertu de l’article 8 du Règlement sur les médicaments brevetés (avis
de conformité) : Apotex Inc. c. Bayer AG et Bayer Inc.
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La Cour fédérale confirme que les décisions de la Commission d’opposition n’ont pas
force de chose jugée dans une instance d’usurpation de marque de commerce
L’intention n’est pas pertinente pour déterminer si une
marque de commerce a été « employée »
Tommy Hilfiger Licensing, Inc. c. International Clothiers Inc., 2004 CAF 252
MONTRÉAL
TORONTO
OTTAWA
CALGARY
VANCOUVER
NEW YORK
LONDRES
La Cour d’appel fédérale a récemment eu à déterminer si, pour prouver la violation d’une
marque de commerce, le demandeur devait établir que le défendeur avait eu l’intention
d’employer la marque pour indiquer l’origine des marchandises. Dans la Loi sur les marques
de commerce canadienne, « marque de commerce » est définie comme étant une « marque
employée par une personne pour distinguer, ou de façon à distinguer » les marchandises et
les services d’une personne de ceux d’une autre. La question de droit en appel consistait à
déterminer si on pouvait considérer qu’une marque avait été employée pour distinguer des
marchandises en l’absence d’intention du vendeur d’employer la marque à cet effet. La Cour
d’appel fédérale a statué qu’une partie pouvait « employer » une marque comme une marque
de commerce, même si l’intention n’était pas prouvée. La Cour a de ce fait écarté la
possibilité d’invoquer en défense à une poursuite pour violation de marque l’excuse qu’un
dessin pouvait jouer un rôle purement décoratif.
Les faits dans cette affaire sont assez simples. En 1994, International Clothiers a acheté des
chemises destinées à l’origine à Wal-Mart. Ces chemises comportaient un écusson identique
à un écusson bien connu de Tommy Hilfiger, qui avait fait l’objet d’une marque de
commerce. Elles avaient aussi des étiquettes affichant la marque de commerce ASH CREEK,
marque bien connue appartenant à Wal-Mart. International Clothiers a fait enlever les
étiquettes ASH CREEK et les a fait remplacer par les siennes, GARAGE U.S.A. Cependant,
les écussons ont été laissés sur les chemises, vendues de février à septembre 1995. En outre,
HONG KONG
SYDNEY
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après septembre 1995, International Clothie rs a continué à vendre des chemises comportant des écussons
similaires, mais non identiques, aux écussons de Tommy Hilfiger.
Selon le juge de première instance, International Clothiers a porté atteinte au droit d’auteur de Tommy
Hilfiger dans le dessin d’écusson et a fait passer ses marchandises pour celles de Tommy Hilfiger.
Cependant, le juge a rejeté l’allégation de violation de marque de commerce, puisque rien ne prouvait que les
écussons avaient été employés sur les vêtements vendus par International Clothiers « pour les distinguer »
des marchandises des autres.
En revanche, la Cour d’appel fédérale a conclu que rien n’exigeait la preuve d’une telle intention de la part du
contrevenant. La question cruciale consistait plutôt à déterminer si International Clothiers, indépendamment de
ses intentions, avait employé l’écusson pour indiquer l’origine des marchandises ou dans ce but. La preuve
indiquait que International Clothiers connaissait la pratique consistant à apposer un écusson ou un logo sur un
vêtement, sans nom de marque, pour en indiquer l’origine. En l’espèce, et à la lumière de la conclusion du juge
de première instance selon laquelle l’allégation de commercialisation trompeuse de marchandises était étayée
par la preuve du risque de confusion chez les consommateurs, la Cour d’appel fédérale a estimé qu’il importait
peu qu’International Clothiers ait réellement eu ou non l’intention d’employer l’écusson dans le but d’indiquer
l’origine des marchandises puisque le dessin, en fait, jouait ce rôle.
La Cour d’appel de l’Ontario accorde des dommages-intérêts
exemplaires pour diffamation sur Internet
Barrick Gold Corp. c. Lopehandia
Dans une décision majoritaire (2 contre 1), la Cour d’appel de l’Ontario a ordonné à Jorge Lopehandia de
verser 75 000 $ en dommages-intérêts généraux et 50 000 $ en dommages-intérêts punitifs à Barrick Gold
Corporation (Barrick). En outre, la Cour d’appel a interdit à M. Lopehandia et à sa société, Chile Mineral Fields
Canada Ltd., par injonction permanente, d’afficher ou de publier dans Internet des propos diffamatoires
concernant Barrick, ses dirigeants, ses administrateurs ou ses employés. Puisqu’il s’agit de la première décision
d’un tribunal d’appel dans une affaire de diffamation sur Internet, elle servira de guide aux tribunaux de
première instance dans ce domaine et pourrait ouvrir la voie à d’autres poursuites de cette nature.
Le litige entre M. Lopehandia et Barrick découle des revendications de M. Lopehandia concernant l’une des
propriétés minières de Barrick au Chili, le projet Pascua Lama. M. Lopehandia a envoyé à Barrick une lettre
dans laquelle il prétendait que lui et trois autres personnes étaient les propriétaires bénéficiaires des concessions
minières exploitées dans le cadre du projet Pascua Lama. Il a menacé de poursuivre Barrick et de lui déclarer
une « guerre totale » si Barrick ne lui versait pas 3 millions de dollars américains dans un délai de dix jours.
Après étude des prétentions de M. Lopehandia, Barrick les a rejetées. M. Lopehandia a alors commencé une
campagne de salissage sur Internet en affichant une multitude de messages sur les babillards électroniques de
différents sites Web destinés à renseigner les personnes intéressées par les exploitations aurifères, et
notamment par l’investissement dans les actions des sociétés aurifères. M. Lopehandia a accusé Barrick de
fraude, d’évasion fiscale, de blanchiment d’argent, de manipulation des prix mondiaux de l’or, d’entrave à la
justice, d’activités liées au crime organisé, de tentative de meurtre, d’incendie criminel et de génocide.
La Cour d’appel a confirmé la décision du tribunal de première instance selon laquelle les déclarations de
M. Lopehandia sur Barrick étaient diffamatoires et qu’il les avait publiées dans un but malveillant.
Cependant, elle a infirmé la décision de ce tribunal concernant les dommages-intérêts et l’injonction. Le juge
de première instance n’avait pas accordé de dommages-intérêts exemplaires puisque, selon lui, la teneur
émotionnelle et déraisonnable des messages de M. Lopehandia était telle que les gens d’affaires ou les
investisseurs raisonnables ne l’auraient jamais pris au sérieux. En outre, le juge a estimé qu’il n’existait
aucune preuve de vulnérabilité réelle de Barrick. Par conséquent, il a conclu qu’une condamnation à des
dommages-intérêts compensatoires, y compris aux frais, représentait un moyen de dissuasion suffisant pour
empêcher M. Lopehandia de récidiver. Selon la Cour d’appel, le juge de première instance a mal analysé la
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preuve et a commis une erreur de principe en tirant ces conclusions. Elle a donc condamné M. Lopehandia à
verser des dommages-intérêts exemplaires à Barrick.
En accordant une injonction permanente interdisant à M. Lopehandia d’afficher ou de publier d’autres propos
diffamatoires sur Internet concernant Barrick, la Cour d’appel a aussi infirmé une conclusion du tribunal de
première instance, qui estimait ne pas avoir compétence puisque rien ne prouvait que M. Lopehandia possédait
des éléments d’actif en Ontario ou y exerçait des activités. La Cour d’appel a fait la déclaration suivante :
[TRADUCTION] « La nature hautement transmissible de l’acte fautif en l’espèce est un
facteur à considérer pour déterminer si une injonction permanente devrait être accordée. Les
tribunaux se retrouvent devant un dilemme. D’un côté, ils peuvent abandonner la partie au
motif qu’un recours contre de telles transmissions éphémères partout dans le monde est
inefficace et ainsi conclure que seul un tribunal du territoire où se trouve l’initiateur de la
communication peut ordonner que cesse l’acte fautif. D’un autre côté, les tribunaux peuvent
au moins faire en sorte que l’inconduite ne se reproduise pas dans leur propre territoire. »
La Cour d’appel a conclu qu’elle avait compétence parce qu’au moins un des babillards électroniques utilisés par
M. Lopehandia pour disséminer les messages diffamatoires était situé à Toronto. De plus, la Cour a jugé qu’il
existait un lien réel et substantiel entre Barrick et l’Ontario. En effet, Barrick dont les actions sont négociées à la
Bourse de Toronto est établie en Ontario où elle a son siège social, ses employés et une réputation commerciale.
La Cour fédérale entend un appel sur une question théorique en
raison du risque de responsabilité en vertu de l’article 8 du
Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité)
Apotex Inc. c. Bayer AG et Bayer Inc.
En vertu du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) (le Règlement), un propriétaire de
brevet peut faire retarder l’approbation d’un nouveau médicament par Santé Canada, s’il allègue que ce
médicament porte atteinte à ses droits protégés par brevet. En contrepartie, toutefois, l’article 8 du Règlement
édicte que si les allégations du propriétaire de brevet se révèlent non fondées, il sera responsable envers
l’autre partie de toute perte entraînée par le retard.
La Cour d’appel fédérale a accepté d’entendre l’appel d’une décision de la Section de première instance
interdisant l’approbation de certaines préparations de la ciproflaxine, médicament mis au point par Apotex,
avant l’expiration de certains droits de brevet détenus par Bayer. Apotex a fait appel de la décision de la Section
de première instance de la Cour fédérale. Cependant, peu de temps après, les droits de brevet applicables
détenus par Bayer ont expiré, et le ministre de la Santé a approuvé le nouveau médicament. Par conséquent, le
propriétaire du brevet, Bayer, a présenté une requête en rejet d’appel pour cause d’absence d’objet.
Un tribunal n’est jamais tenu d’entendre une cause théorique. Ainsi il peut refuser de statuer lorsque, même
si un différend réel peut avoir existé entre les parties, ce différend n’existe plus parce que les faits à l’origine
du litige ont changé ou parce que l’affaire a été réglée. En l’espèce, la Cour fédérale a toutefois refusé de
rejeter l’appel. En effet, elle a constaté que même si l’approbation du nouveau médicament avait été
accordée, ce qui rendait certaines questions litigieuses sans objet, l’article 8 du Règlement avait comme
« effet pratique » ou « conséquence accessoire » de permettre à la partie appelante de recevoir des
dommages-intérêts si l’ordonnance d’interdiction était annulée. La Cour d’appel fédérale a déclaré que si une
partie avait été exclue à tort du marché pendant la durée de vie d’un brevet, le fait que l’appel soit tranché
après l’expiration du brevet ne devrait avoir aucune incidence sur le droit de cette partie de recevoir des
dommages-intérêts.
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On peut gagner une bataille et perdre la guerre :
La Cour fédérale confirme que les décisions de
la Commission d’opposition n’ont pas force de chose
jugée dans une instance d’usurpation de marque
de commerce
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GROUPE DE LA PROPRIÉTÉ
INTELLECTUELLE
MONTRÉAL
(514) 397-3000
Dominique Babin
[email protected]
Bruno Barrette
[email protected]
Dans une affaire d’usurpation de marque de commerce, la Cour fédérale a confirmé
qu’il convient d’accorder peu d’importance aux décisions de la Commission
d’opposition des marques de commerce pour trancher une question d’usurpation. En
effet, dans cette affaire, bien que le prédécesseur de la demanderesse ait obtenu gain
de cause sur une opposition, la demanderesse a vu déboutée sa demande fondée sur
l’usurpation de marques de commerce et la substitution.
Hélène Deschamps-Marquis
[email protected]
Les demanderesses, Alticor Inc. et La Compagnie Quixtar Canada (collectivement
Alticor) étaient titulaires de la marque de commerce NUTRILITE, enregistrée au
Canada en 1952 et employée notamment en liaison avec des préparations chimiques
(sous forme de supplément vitaminiques, de sels minéraux et de suppléments à base
d’herbes médicinales) vendues dans le cadre d’un programme de commercialisation à
paliers multiples. Depuis 1992 environ, la défenderesse, Nutravite Pharmaceuticals
Inc. (Nutravite), produisait et vendait au Canada une gamme de suppléments
vitaminiques, de sels minéraux et de suppléments à base d’herbes médicinales sous la
marque de commerce NUTRAVITE. Nutravite a tenté d’enregistrer sa marque de
commerce en 1992, mais le propriétaire antérieur de la marque NUTRILITE s’est
opposé avec succès à la demande.
Kim D.G. Alexander-Cook
[email protected]
Comme il arrive bien souvent dans ces cas, malgré le succès de l’opposition à la demande
d’enregistrement de la marque NUTRAVITE, Nutravite a continué à vendre ses produits
dans des magasins de détail sous la marque NUTRAVITE. Pour cette raison, Alticor a
intenté en 1999 un procès pour usurpation de marque de commerce et substitution.
Roula Eatrides
reatrides @stikeman.com
La Cour fédérale a conclu que la date qui importait pour déterminer la probabilité de
confusion entre les marques NUTRILITE et NUTRAVITE était celle du procès.
Autrement dit, la Cour devait examiner l’effet de la coexistence des deux produits sur
le marché canadien et juger si une quelconque confusion pouvait en résulter.
Alticor a invité la Cour à accorder l’autorité de la chose jugée à la décision de la
Commission d’opposition des marques de commerce, qui avait conclu à la confusion
entre les marques et accueilli l’opposition présentée par son prédécesseur Amway à
l’enregistrement de la marque NUTRAVITE. Cependant, la Cour a fait remarquer
qu’une instance devant la Commission d’opposition différait d’une instance pour
usurpation. Dans l’opposition, il revenait au déposant, Nutravite, de démontrer, selon
la prépondérance des probabilités, que sa marque ne créait aucun risque de confusion
probable avec la marque NUTRILITE. Cependant, dans une action en usurpation, il
revient au titulaire de la marque de commerce prétendant être lésé (Alticor) de prouver
qu’il existe un risque vraisemblable de confusion. En résumé, la Cour a fait remarquer
que même si elle applique les mêmes dispositions de la Loi sur les marques de
commerce relatives à la confusion, la Commission d’opposition examine un dossier
différent et tranche une question différente selon un autre fardeau de preuve. Par
conséquent, la Cour a conclu que la décision de la Commission d’opposition des
marques de commerce ne devait pas être considérée comme un fait pertinent dans les
instances d’usurpation devant la Cour fédérale, ou sinon qu’il convenait de lui
accorder peu d’importance.
OTTAWA
(613) 234-4555
Stuart C. McCormack
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Jonathan Blakey
jblakey @stikeman.com
Nicole Brousseau
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D. Jeffrey Brown
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Paul Carrière
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Eugene F. Derényi
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Vicky Eatrides
veatrides @stikeman.com
Randall J. Hofley
rhofley @stikeman.com
Lynn Larson
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Nicholas McHaffie
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Justine M. Whitehead
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(416) 869-5500
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Martin Langlois
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