L`indivision - CRPF Limousin

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L`indivision - CRPF Limousin
L’indivision
Le régime de l’indivision est relativement fréquent en forêt. Cette situation, relativement
simple en apparence, peut très vite devenir complexe. Après sa définition, nous aborderons les
conséquences pour la gestion du bien indivis, la convention d’indivision, les règles de
majorité, les différents actes, les autres dispositions liées à l’indivision et enfin la sortie de
l’indivision.
Définition
L'indivision est la situation dans laquelle se trouvent des biens sur lesquels s'exercent des
droits de même nature appartenant à plusieurs personnes.
Ainsi les propriétaires indivis (indivisaires) d’une forêt possèdent une quote-part du droit de
propriété (un quart, un tiers,...) celle-ci n’étant pas matériellement identifiable sur le terrain.
Ceci est dû à plusieurs causes :
- Au moment de l’acquisition d’un bien, plusieurs personnes groupent leurs moyens et
achètent le bien en indivision.
- Lors du règlement d’une succession, les héritiers décident de conserver les biens en
indivision. Cette situation peut se répéter lors de successions ultérieures, rendant la
gestion complexe...
- Lors d’une succession, les héritiers ne sont pas tous connus.
Les indivisions ne sont pas obligatoirement à parts égales. Par exemple, deux personnes
peuvent très bien acheter un bien en commun sur la base de leurs apports personnels, comme
40 % et 60 %.
Cette situation est différente de la communauté de biens. Par ailleurs, des biens en indivision
peuvent faire l’objet d’un démembrement nue-propriété usufruit. Mais n’y a pas d’indivision
entre un usufruitier et un nu-propriétaire.
La situation particulière des tombeaux de famille ne sera pas évoquée ici (indivision
perpétuelle).
A noter que l’indivision n’a pas de personnalité juridique propre. De plus, tout indivisaire
peut agir seul en justice pour la défense de ses droits indivis.
Conséquences pour la gestion du bien indivis
Les indivisaires ont des droits égaux pour l’administration de l’immeuble indivis, et ils
doivent s’entendre pour la gestion de l’immeuble. Ce problème est traité, pour les forêts
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privées, par les articles 815 et suivants du Code Civil. L’article 815-9 de ce même code
stipule en effet que :
« Chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination,
dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l'effet des actes
régulièrement passés au cours de l'indivision. A défaut d'accord entre les intéressés,
l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal.
L'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention
contraire, redevable d'une indemnité. »
La gestion des biens indivis peut être difficile, car tout acte de gestion doit être le plus souvent
réalisé à la demande de l’ensemble des indivisaires. Ce qui peut aboutir à des blocages lors du
traitement d’événements exceptionnels comme une tempête. Surtout si cette situation résulte
de mésententes entre héritiers. De plus, la mise d’argent de côté pour faire face à des dépenses
ultérieures implique l’unanimité des associés, et en cas de mésentente entre les indivisaires, la
seule sortie possibilité est la saisie du juge qui ordonnera le plus souvent le partage ou la vente
du bien.
La convention d’indivision
Cependant, des facilités de gestion sont apportées avec l’article 815-1 du code civil : « Les
indivisaires peuvent passer des conventions relatives à l'exercice de leurs droits indivis,
conformément aux articles 1873-1 à 1873-18. »
Les héritiers qui souhaitent rester en indivision peuvent donc choisir de passer entre eux un
contrat appelé "convention d'indivision".
Cette convention va leur permettre de fixer les règles de fonctionnement de l'indivision, et
instituer ainsi une gestion plus souple que celle qui résulterait du simple jeu des règles légales.
La forme de la convention.
La convention d'indivision doit être établie devant le notaire, dès lors qu'il y a un immeuble
(maison, appartement, terrain) parmi les biens indivis. Cette convention doit comporter la
désignation des biens indivis et l'indication des quotes-parts appartenant à chacun. La
convention peut être prévue pour une durée déterminée, qui ne saurait être supérieure à 5 ans,
ou pour une durée indéterminée.
Dans le cas d'une convention à durée indéterminée, l'un des signataires peut à tout moment
demander le partage.
Dans le cas d'une convention d'indivision pour une durée déterminée, l'indivision ne peut
généralement pas être rompue, sauf si un co-indivisaire peut justifier de motifs sérieux à sa
demande en partage, ou s'il était dans cette indivision un mineur, accédant à la majorité. Ce
dernier dispose d'un délai de 1 an après l'anniversaire de ses 18 ans pour faire sa demande de
partage.
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Règle de la majorité
L’article 815-2 du code civil poursuit le même but : « Tout indivisaire peut prendre les
mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un
caractère d'urgence.
Il peut employer à cet effet les fonds de l'indivision détenus par lui et il est réputé en avoir la
libre disposition à l'égard des tiers.
A défaut de fonds de l'indivision, il peut obliger ses coïndivisaires à faire avec lui les
dépenses nécessaires. »
Il est complété par l’article 815-3 du code civil qui instaure des règles de fonctionnement
basées sur l’existence d’une majorité qualifiée pour effectuer des actes de gestion
limitativement énumérés : « Le ou les indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits
indivis peuvent, à cette majorité :
1º Effectuer les actes d'administration relatifs aux biens indivis ;
2º Donner à l'un ou plusieurs des indivisaires ou à un tiers un mandat général
d'administration ;
3º Vendre les meubles indivis pour payer les dettes et charges de l'indivision ;
4º Conclure et renouveler les baux autres que ceux portant sur un immeuble à usage
agricole, commercial, industriel ou artisanal.
Ils sont tenus d'en informer les autres indivisaires. A défaut, les décisions prises sont
inopposables à ces derniers.
Toutefois, le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte qui ne
ressort pas à l'exploitation normale des biens indivis et pour effectuer tout acte de disposition
autre que ceux visés au 3º.
Si un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis, au su des autres et néanmoins
sans opposition de leur part, il est censé avoir reçu un mandat tacite, couvrant les actes
d'administration mais non les actes de disposition ni la conclusion ou le renouvellement des
baux. »
Il s’agit des deux tiers des droits, qui peuvent être détenus par un ou plusieurs
indivisaires.
Les différents actes
Actes de conservation
Ils peuvent être décidés par un seul. ce sont des travaux destinés à la conservation du bien, ou
d’éviter un dommage matériel ou financier, ou d’éviter la perte d’un bien ou la diminution de
sa valeur.
Il peut être financé soit par des fonds – aussi indivis –, soit par des fonds propres à
l’indivisaire qui décide de faire effectuer ces travaux. L’avance lui sera remboursée à la suite
d’une demande amiable, lors du partage des biens indivis (mais dans un avenir qui peut être
lointain), ou en obligeant les coindivisaires à participer aux frais sur requête engagée au
tribunal (ce qui est la meilleure solution).
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Actes d’administration
Avant la loi de 2006, les actes d’administration étaient soumis à l’unanimité des indivisaires
Désormais, la règle de la majorité des deux tiers suffit pour réaliser de tels actes : travaux
d’entretien, conclusion de baux d’habitation (mais pas les baux ruraux), vente d’un bien dont
le prix est destiné au paiement des dettes de l’indivision.
Cette même majorité peut aussi donner un mandat général d’administration soit à un tiers soit
à un membre de l’indivision.
Actes de disposition
La règle est l’unanimité car ils impactent les biens indivis : conclusion de baux commerciaux
et ruraux, prise d’hypothèque, sauf la vente (loi de 2009), qui a supprimé la règle de
l’unanimité et substitué celle des deux tiers, grâce à l’article 815-5-1 du code civil qui permet
de dénouer la situation des propriétaires indivis lorsqu’ils sont en désaccord :
« Sauf en cas de démembrement de la propriété du bien ou si l'un des indivisaires se trouve
dans l'un des cas prévus à l'article ( indivisaire présumé absent ou, qui par suite
d'éloignement, se trouve hors d'état de manifester sa volonté, ou encore qui fait l'objet d'un
régime de protection) , l'aliénation d'un bien indivis peut être autorisée par le tribunal de
grande instance, à la demande de l'un ou des indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des
droits indivis, suivant les conditions et modalités définies aux alinéas suivants.
Le ou les indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis expriment devant un
notaire, à cette majorité, leur intention de procéder à l'aliénation du bien indivis.
Dans le délai d'un mois suivant son recueil, le notaire fait signifier cette intention aux autres
indivisaires.
Si l'un ou plusieurs des indivisaires s'opposent à l'aliénation du bien indivis ou ne se
manifestent pas dans un délai de trois mois à compter de la signification, le notaire le
constate par procès-verbal.
Dans ce cas, le tribunal de grande instance peut autoriser l'aliénation du bien indivis si celleci ne porte pas une atteinte excessive aux droits des autres indivisaires.
Cette aliénation s'effectue par licitation 1. Les sommes qui en sont retirées ne peuvent faire
l'objet d'un remploi sauf pour payer les dettes et charges de l'indivision.
L'aliénation effectuée dans les conditions fixées par l'autorisation du tribunal de grande
instance est opposable à l'indivisaire dont le consentement a fait défaut, sauf si l'intention
d'aliéner le bien du ou des indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis ne lui
avait pas été signifiée selon les modalités prévues au troisième alinéa. »
Dans ce dernier cas, le notaire va d’abord vérifier si le –ou les- demandeurs sont bien
propriétaires des deux tiers des droits. Il rédige ensuite un acte constatant que la majorité des
propriétaires souhaite vendre à un prix convenu tout ou partie des biens indivis. Il va constater
leur accord, et, dans le mois, le signifier aux autres indivisaires n’ayant pas comparu.
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Acte par lequel les copropriétaires par indivis d'un bien qui ne peut être partagé sans dépréciation, le font mettre
aux enchères.
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En cas d’opposition ou au cas où ces derniers ne se manifestent pas dans le délai de trois
mois, le notaire le constatera par procès-verbal, transmis ensuite au tribunal pour
l’organisation d’une vente aux enchères (à la barre ou devant notaire).
Cette procédure n’est pas applicable en présence d’un incapable : mineur ou majeur sous
régime de protection, d’un absent ou d’une personne hors d’état de manifester sa volonté.
Dans ce cas, seul le partage –amiable ou judiciaire – sera possible.
Autres dispositions liées à l’indivision
Un indivisaire peut demander une avance sur sa part de succession. Le notaire chargé du
règlement de la succession n’a pas le pouvoir de la lui accorder. Soit les héritiers sont
d’accord pour le faire, soit l’héritier demande au tribunal de la lui accorder. Le tout bien
entendu s’il existe des fonds disponibles.
Un indivisaire peut donner ou vendre sa quote-part. en totalité, en partie, sur tous les biens
ou certains d’entre eux. Mais en cas de vente à un tiers, les autres indivisaires bénéficient
d’un droit de préemption (article 815-14 du code civil) mais le Tribunal devra veiller à ce que
cette vente ne porte pas un préjudice moral ou financier aux autres indivisaires.
Un indivisaire peut occuper un bien indivis. Il est redevable d’une indemnité d’occupation
doit être calculée en fonction de la valeur locative existant lors de la fixation de cette
indemnité, même si cette valeur locative a été modifiée à la suite de travaux. Elle est payable
lors du partage de la succession.
Mais ce montant et les conditions de paiement peuvent être librement débattues.
Il ne peut qu’être recommandé de constater cette occupation par un écrit pour en fixer la
durée, ainsi qu'un montant d'indemnité d'occupation et les modalités de règlement
Les fonds en indivision
Chaque indivisaire va recevoir une quote-part des recettes égale à ses droits.
Il devra participer aux dépenses dans les mêmes conditions.
La sortie de l’indivision
L’article 815 stipule: « Nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage
peut être toujours provoqué, à moins qu’il n’y ait été sursis par jugement ou convention ».
A peine de nullité de l'acte, l'indivisaire qui entend céder, à titre onéreux à une personne
étrangère à l'indivision, tout ou partie de ses droits dans les biens indivis, est tenu de notifier
à, ou aux autres, le nom, le domicile et la profession de la personne qui se propose d'acquérir.
La nullité est encourue en raison de ce qu'en se dispensant de faire une telle notification, le
cédant fait fraude au droit de préemption du ou des autres indivisaires.
Dans le cadre d’une indivision successorale, le partage des biens mis en succession peut être
provoqué à la demande d’un membre de l’indivision (ou indivisaire). Le partage est reportable
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sur 2 ans sur décision de justice ou sur 5 ans renouvelables si le report est demandé par le
conjoint survivant ou si un enfant n’a pas atteint la majorité.
Enfin, les créanciers personnels d'un indivisaire ont la faculté de provoquer le partage au nom
de leur débiteur et les coïndivisaires, celle d'arrêter le cours de l'action en partage en
acquittant l'obligation au nom et en l'acquit de ce dernier. Les formes de cette dernière action
ont été définis par la jurisprudence.
Pour prévenir des blocages…
Le mandat à effet posthume offre la possibilité pour toute personne d’organiser de son vivant
la gestion de sa succession future et de confier à un – ou plusieurs – personne désignée à
l’avance le soin d’administrer tout ou partie de ses biens pour un héritier déterminé.
Voir aussi :
- La communauté ;
- Le pacs ;
- Le groupement forestier ;
- nue-propriété usufruit ;
- l’union libre.
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