Le Soir. Edition du 7 mars 2012. Par Colette Braekmann
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Le Soir. Edition du 7 mars 2012. Par Colette Braekmann
Le Soir Mercredi 7 mars 2012 lemonde Abdolfattah Soltani, avocat et défenseur des droits de l’homme iranien, a été lourdement condamné par le tribunal de Téhéran, pour « propagande contre le régime » : 18 ans de prison et 20 ans d’interdiction d’exercer. © AFP. 9 Congo / Le président Kabila est seul pour composer son cabinet et le gouvernement Le roi est nu en première ligne rois mois après les élections législatives du 28 novembre 2011, la vie politique congolaise est toujours en suspens : ce n’est qu’en avril que la Cour suprême de justice, après avoir examiné 500 recours, publiera les résultats définitifs des élections législatives. D’ici là, le président Kabila devra s’atteler à la délicate recomposition des deux principaux centres du pouvoir : le gouvernement et son cabinet présidentiel. Le casting relève du casse-tête. Ce mardi, pour donner la priorité à son mandat de député du Palu (Parti lumumbiste unifié), le Premier ministre Adolphe Muzito a présenté la démission de son gouvernement : « Le président doit avoir les mains libres », a-t-il déclaré. Et c’est bien entre les mains du chef de l’Etat que se trouvent désormais toutes les cartes. En 2006, sa victoire au deuxième tour avait été obtenue grâce au soutien du Palu, qui, en échange, avait obtenu le poste de Premier ministre. Cette fois, la nébuleuse des partis qui ont soutenu le président dispose d’une majorité absolue au Parlement. Sur le plan strictement arithmétique, la nécessité d’une coalition ne s’impose donc plus. Mais le parti le plus proche du chef de l’Etat, le PPRD (Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie), arrivé en tête à l’Assemblée, est passé de 111 sièges en 2006 à 62. En outre, plusieurs poids lourds de l’ancienne majorité présidentielle ont été recalés : des proches du président, anciens membres de son cabinet ou de son entourage, Léonard She Okitundu, Marcellin Cishambo, Jean-Charles Okoto, ainsi que plusieurs ministres sortants com- T L’ESSENTIEL ● Le Premier ministre Muzito a présenté la démission de son gouvernement ce mardi. ● Le président Kabila, qui a perdu son principal collaborateur, doit rebâtir son équipe. ● Avec un brillant technocrate pour conduire le gouvernement ? RÉP. CENTRAFRICAINE SUD-SOUDAN Province Équateur orientale OUGANDA CONGO RÉP. DÉM. Nord Kivu DU CONGO Sud RWANDA Bandundu Kasaï Kivu BURUNDI Kinshasa orientalManiema K KKinshasa Kasaï TANZANIE occidental Bas-Congo Katanga ANGOLA ZAMBIE 200 km LS - 07.03.12 me Tambwe Mwamba (Affaires étrangères), Martin Kabwelulu (Mines) ou Raymond Tshibanda (Coopération internationale). Décimée par la sanction électorale, la « garde rapprochée » du chef de l’Etat a aussi été décapitée par le décès d’Augustin Katumba Mwanke, victime du crash aérien de Bukavu. Ce dernier, député du Nord-Katanga, était le véritable « faiseur de roi » du régime : toutes les nominations et aussi tous les contrats importants passaient par lui. La disparition de ce maillon essentiel place désormais le chef de l’Etat en première ligne, l’obligeant à assumer lui-même les décisions politiques et le choix des hommes. Or, les enjeux de ce deuxième et, en principe, dernier mandat, sont de taille. Le message des électeurs est en effet limpide : il y a exigence de changement, exigence de social. La population entend, d’urgence, bénéficier des fruits de la croissance. Un technocrate compétent et rigoureux, comme le ministre des Finances sortant, Matata Mponyo – rescapé de l’accident de Bukavu –, pourrait, au poste de Premier ministre, incarner cette nouvelle politique, avec la bénédiction des institutions financières internationales. Le casse-tête des provinces Plusieurs femmes incarnent aussi le social, comme Marie-Ange Lukiana, ex-ministre du Travail. Mais aussi, l’épouse du chef de l’Etat, Olive Lembe. Le président entend en tout cas poursuivre la « révolution de la modernité », qu’il s’agisse des transports, des communications ou de l’enseignement. Kabila devra aussi récompenser les provinces qui ont voté pour lui (Katanga, Maniéma, Nord et Sud-Kivu), peu favorisées lors de son premier mandat, et se rallier les autres (Bas-Congo, Bandundu et surtout les deux Kasaïs). Un autre enjeu est la réconciliation avec les Occidentaux, réticents face aux nouveaux partenaires « émergents » et surtout très critiques face au déroulement des élections. L’actuel président du Sénat, Léon Kengo wa Dondo, pourrait être chargé de jouer les « go between… » Pour la pacification de l’Est, Kinshasa cherche toujours le faiseur de miracles… ■ COLETTE BRAECKMAN LE PRÉSIDENT Kabila – ici présentant son programme en septembre –, qui a perdu sa « garde rapprochée », pourrait se tourner vers le ministre des Finances sortant, Matata Mponyo. © AFP/ DR. Les cinq principaux clans LE CLAN DES KATANGAIS JEAN-CLAUDE MASANGU. © AP LOUIS KOYAGIALO. © D.R. LES KASAÏENS COURTISÉS EVARISTE BOSHAB. © D. R. ADOLPHE LUMANU. © D. R. À L’EST : DENTS DE SCIE PIERRE LUMBI. © D. R. JEAN-BOSCO BAHALA. © D. R. Un groupe décapité Des amis qui ont déçu Les ex-rivaux de Katumba Son chef de file était le défunt Augustin Katumba Mwanke ; son pilier est Jean – Claude Masangu, l’inamovible directeur de la Banque centrale, artisan de la réforme monétaire. Le vice-Premier ministre Louis Koyiagialo symbolise la fidélité et pourrait se retrouver à la tête du prochain gouvernement, la popularité de Moïse Katumbi, le gouverneur du Katanga, suscitant beaucoup de jalousies. Aux côtés du président, on retrouve Me Jean Mbuyu, ancien conseiller spécial déjà présent du temps de Laurent Désiré Kabila, ainsi que deux ambassadeurs de la RDC à Bruxelles, Jean-Pierre Mutamba et Henri Mova Sakanyi. John Numbi, le puissant chef de la police, a été mis sur la touche depuis l’assassinat de Floribert Chebeya. Le pasteur Daniel Ngoy Mulunda, président de la Commission électorale, reste un conseiller très écouté, et, sur le plan militaire, le général Célestin Kifwa et le colonel Yav montent en puissance. (C. B.) Même si les deux Kasaïs sont restés les réservoirs de voix d’Etienne Tshisekedi, ces provinces avaient envoyé des hommes de poids dans l’entourage du président : Evariste Boshab, président de l’Assemblée, mais dont l’aura a diminué, Adolphe Lumanu, ministre de l’Intérieur, resté très puissant, Raymond Tshibanda, chargé de la Coopération internationale, mais qui a échoué aux législatives. Inconfortablement chargé de remplacer Jean-Pierre Bemba à la tête du Mouvement pour la libération du Congo, François Mwamba pourrait recevoir des propositions. Parmi les proches du chef, on retrouve aussi le député Francis Kalombo, ou l’ex-journaliste Colette Tshomba, élue à Kinshasa. Les faveurs accordées aux Kasaïens n’ayant eu aucun impact électoral, d’aucuns se demandent cependant si la politique de séduction à leur égard se poursuivra. (C. B.) Les ressortissants du Kivu ont souvent été victimes de la défiance de Katumba Mwanke : Vital Kamerhe, démis de son poste de président de l’Assemblée nationale, est passé à l’opposition et ne semble pas vouloir se réconcilier ; Marcellin Cishambo fut envoyé au Sud-Kivu comme gouverneur, mais a gardé le contact. Pierre Lumbi, originaire du Maniéma, tenta, au poste de « conseiller spécial », de balancer l’influence de Katumba. Le succès de son parti, le Mouvement social pour le renouveau, pourrait propulser plus haut encore le négociateur des contrats chinois. L’Est du pays demeure un vivier d’hommes de confiance : l’abbé Jean-Bosco Bahala, ex-animateur de radios communautaires à Bukavu, dirige le Conseil supérieur de l’audiovisuel ; le pilote privé du président est le très discret Charles De Schrijver, né au Sud-Kivu de père belge. Kikaya Bin Karubi, ambassadeur à Londres, vient du Maniéma. (C. B.) www.lesoir.be 06/03/12 21:08 - LE_SOIR LE CERCLE FAMILIAL JAYNET KABILA. © AFP. ZOE KABILA. © D. R. Le clan, rapproché et discret Le clan de la famille et de ses proches garde une influence difficile à mesurer : si « Maman » Sifa Mahanya, la mère du président, semble moins présente qu’au début, la sœur jumelle Jaynet, à la tête de sa Fondation, et le frère Zoé (portrait craché de son aîné) qui se lance en politique au Katanga, bénéficient d’un accès direct à la présidence. L’ambassadeur Mugalu, en charge de la « maison civile », demeure très écouté ; des « tontons », anciens compagnons de lutte de Laurent Désiré Kabila, gardent la confiance et parfois l’oreille de l’héritier, mais demeurent discrets. On retrouve parmi eux She Okitundu, qui a échoué à se faire élire, Kikaya Bin Karubi, ambassadeur à Londres, des amis d’enfance rencontrés en Tanzanie ou lors des débuts au Congo. Le général Amisi, dit « Tango Four », jouit d’une protection surprenante. (C. B.) LES TRANSFUGES ANTOINE GHONDA. © D. R. LE GÉNÉRAL AMISI. © D. R. Des alliés de circonstance Au plus fort de la guerre et de la négociation, Joseph Kabila avait des « passerelles » parmi les rebelles d’en face : Olivier Kamitatu, actuel ministre du Plan, et Antoine Ghonda, ambassadeur itinérant, étaient des proches de Jean-Pierre Bemba. Les anciens mobutistes sont nombreux : Alexis Tambwe Mwamba, en charge des Affaires étrangères, José Endundo au Tourisme, Kyungu wa Kumanza à l’Assemblée provinciale du Katanga… L’actuel ministre de l’Agriculture, Norbert Kantintima, chargé de contrer Vital Kamerhe au Sud-Kivu, fut gouverneur à Bukavu du temps du RCD Goma ; Bizima Karaha, l’un des chefs de la rébellion pro-rwandaise, s’est rallié ; le général Amisi, surnommé « Tango Four », l’un des anciens compagnons du rebelle Laurent Nkunda, commande l’armée de terre ; le général Bosco Ntaganda, réclamé par la Cour pénale internationale et unanimement détesté, contrôle presque tout le « Front de l’Est ». (C. B.) 1NL du 07/03/12 - p. 9
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