corrigé sujet 26

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corrigé sujet 26
Eléments de corrigé du sujet : en quoi peut-on parler d’un retour de l’histoire politique ?
PREMIERE PARTIE Comme souvent on peut commencer par l’étude du document 2 C’est un document très classique, à
l’intersection entre le programme de Capes et le programme d’histoire de Seconde. Vous ne pouvez pas l’ignorer. Il faut donc prendre
garde à ne pas le commenter pour lui-même mais sous l’angle du sujet c'est-à-dire en posant la question : en quoi l’étude des tables
claudiennes permet-elle de faire de l’histoire politique ? L’analyse du document permet de poser des éléments de définition du terme
« politique ». Ainsi, de façon très classique, la table claudienne est une trace de l’action du pouvoir impérial : à ce titre faire de l’histoire
politique c’est faire l’histoire des actions et des décisions du pouvoir, chercher à en expliquer les raisons (en terme d’intention et en
terme de « causes ») et à en décrire les effets (ici l’intégration des élites gauloises à l’Empire romain. Le document est également une
trace des conflits politiques qui opposent le pouvoir impérial au pouvoir sénatorial romain, en ce sens faire de l’histoire politique c’est
faire l’histoire des affrontements des groupes sociaux et politiques, des alliances (ici entre Claude et les élites gauloises contre la
« vieille » classe sénatoriale romaine) faire de l’histoire politique c’est ici faire l’histoire de la politique mais aussi faire une histoire
sociale du fait politique. Il est possible d’étudier le document comme un témoignage du discours impérial adressé aux populations de
la « capitale des Gaules » et le choix des élites gauloises d’exposer ce discours, ce qui amène à retourner l’étude en s’intéressant non
aux intentions du pouvoir mais aux formes du discours et à la réception du discours ; en poussant un peu plus loin dans cette
direction « post-moderne » l’étude du document peut s’intéresser à l’utilisation de l’objet depuis sa « découverte » au XVIème siècle
jusqu’à sa patrimonialisation par les édiles lyonnais du XXème siècle (musée, mise en tourisme, mobilisation comme un marqueur de
la métropolisation ancienne de la cité lyonnaise…). Ce qui revient à faire une histoire politique des usages du passé et de l’histoire. Ce
tour d’horizon, incomplet, des approches possible du document permet de montrer la diversité des approches de l’histoire politique et
peut donc être placé au début ou à la fin de l’exposé : au début pour poser les problèmes à la fin pour illustrer ce qui aura été
démontré, voire réparti dans les trois parties qui suivent en référence aux différents moments historiographiques ou aux différentes
approches de l’histoire politique.
Quoiqu’il en soit l’introduction devra discuter ce mot « retour » qui suppose que l’histoire politique avait disparu et qu’elle est
revenue. Or si l’histoire ne « repasse pas les plats », l’historiographe encore moins ! Le « en quoi » de l’énoncé invite à décrire la façon
dont s’est opéré ce « retour » de l’histoire politique c’est la dimension historiographique du sujet. Le questionnement sur le mot
« retour » invite quand à lui à comparer l’histoire politique d’aujourd’hui à ce qu’elle était avant son éclipse pour se demander s’il s’agit
bien de la même chose, c’est la dimension épistémologique du sujet. Enfin il est nécessaire de chercher à expliquer la relation entre les
historiens (y compris les enseignants) le politique pour proposer quelques pistes d’explication de ce regain d’intérêt.
I.
Dimension historiographique. Montrer l’évolution de l’intérêt des historiens pour le phénomène politique et la place de ce
phénomène dans la recherche et la publication historique. Une place centrale et quasi exclusive avant la première guerre mondiale. Un
rejet marqué à partir des années 20 sous l’impulsion des Annales. Un regain d’intérêt depuis les années 80. Il faut montrer que ce
« renouveau » n’est pas un simple retour à l’histoire des grands hommes et de leurs grandes actions mais une rencontre entre les
thèmes classiques de l’histoire politique (institutions, conquête et exercice du pouvoir, mobilisation de la politique soit comme
principe d’explication des évènements soit comme ce-qui-doit-être-expliqué, chronologie dans le court terme…) et les thèmes issus de
l’histoire sociales ou de l’histoire culturelle : histoire des femmes, histoire de relations de pouvoir, histoire de l’autorité par exemple. Le
document 1 permet d’illustrer la diversité des objets de cette histoire politique renouvelée et la proximité entre l’histoire politique et
l’histoire culturelle. Le même document invite aussi, d’un point de vue plus strictement historiographique, à évoquer le rôle de René
Rémond dans ce « renouveau » et celui des institutions qui y ont contribué (Paris X Nanterre, Science Po Paris, l’institut d’histoire du
temps présent). Il convient donc de citer quelques historiens contemporains (au moins René Rémond, les droites en France ; Maurice
Agulhon la République au village). Le regain d’intérêt de ces historiens pour l’histoire politique est également lié à deux phénomènes :
le constat d’une dispersion de l’histoire (Dans « l’histoire en miette » Françoise Dosse fait le procès des dérives de l’école des Annales
sur des objets de peu d’importance (des historiens nombrilistes qui ne s’intéressent pas au monde et à la société dans laquelle ils
vivent) ; la chute de l’URSS a pris les historiens, comme les autres, de court, les poussant à s’interroger sur leur capacité à expliquer le
monde.
II.
Dimension épistémologique L’histoire ancienne, l’histoire médiévale et l’histoire moderne ont reçu l’onde de choc du
renouveau de l’histoire politique de façon d’autant plus atténuée qu’elles étaient éloignées de notre temps. Ce constat s’explique par
des raisons institutionnelles (il y a peu d’historiens de l’Antiquité à l’IHTP) bien entendu, mais aussi pour des raisons de sources et de
méthode. L’histoire politique avait été rejetée au nom d’arguments épistémologiques : elle était descriptive et posait le récit comme
une fin en soi. L’explication y était empirique, les arguments d’ordre psychologique et la place de la contingence y étaient trop
importante pour justifier le statut de science auquel devait aspirer l’histoire qui cherchait plutôt à se rapprocher des champs
scientifiques de la sociologie, de l’économie et de l’anthropologie. L’histoire politique classique avait également pour défaut de limiter
l’horizon de l’historien à la courte durée (« l’écume » selon Braudel) et à l’événement en négligeant l’épaisseur de l’économie et de la
société (selon le schéma Labroussien). Le « retour » de l’histoire politique est en partie lié à une revalorisation de conceptions de
l’histoire qui redonne une place à la contingence, à la décision (devenue objet d’histoire), et qui remet en cause les notions de « forces
profondes » et de « temps long ». C’est aussi l’ouverture de nouvelles sources de l’histoire politique : confinée aux sources officielles et
diplomatiques, l’histoire politique classique avait implosé avec l’avènement de l’école des Annales et son intérêt pour des sources non
officielles et variées. L’histoire politique renouvelée puise à cette diversité des sources qui lui suggèrent parfois de nouveaux objets :
presse écrite et audio-visuelle, enquêtes d’histoire orale, archives de partis politiques, de syndicats (doc 1)… Ainsi cette histoire
politique renouvelée emprunte parfois aux approches de la micro-histoire c'est-à-dire au changement d’échelle chronologique (on peut
citer par exemple le récent Massacre des Italiens de Noiriel).
III.
Dimension scolaire et civique
Cette dimension peut être abordée si elle est reliée aux précédentes en particulier du fait que le document 2 est explicitement un
document à étudier dans le programme de 2nde ce qui renforce un constat : l’histoire politique occupe une place privilégiée dans les
programmes du lycée où elle peine à faire de la place à d’autres entrées (cf programmes de 1ère et de Terminale). C’est souvent sous la
forme d’une histoire politique et diplomatique très classique, évènementielle et narrative qu’elle se présente (document 3) : ceci
marque nettement la différence (le fossé ?) entre l’Histoire-Recherche et l’Histoire-Enseignement. Cette dernière a une finalité
d’éducation citoyenne fortement affirmée qui, même si elle a beaucoup changé dans ses finalités et dans ses justifications, demeure la
principale justification du maintien de l’enseignement de l’Histoire à tous les niveaux de la scolarité secondaire (quoique…).
Puisqu’enseigner l’histoire politique c’est donner les moyens aux élèves d’avoir une éducation à leur rôle d’électeurs et d’acteurs
politiques au sein de la démocratie, l’évolution des institutions et de la vie politique du pays font partie de ces moyens d’éducation au
politique. Mais, quoiqu’en disent certains discours sur l’histoire (Sarkozy-Guaino-Gallo), nous ne sommes plus sous la III°
République, et cette éducation politique ne peut plus passer par le canal de la seule admiration de l’œuvre des grands hommes au
service de la République. L’histoire politique au collège et au lycée doit répondre à des questions plus complexes (sur l’engagement et
le désengagement citoyen, sur l’efficacité du politique, sur l’autorité, sur la construction des collectifs…) qui rejoignent les
questionnements des historiens universitaires. De son côté l’histoire savante entretien une relation ambigüe avec la politique. Les
historiens ont fourni au XIX° et sous la III° République une partie importante du personnel politique (Guizot, Thiers, Jaurès,
Lavisse…). L’engagement politique a constitué une composante essentielle de l’identité des historiens au XX°s. Dans l’affaire Dreyfus
(Seignobos) dans la Résistance (Bloch, Vernant) ou dans la collaboration (Carcopino), dans la guerre d’Algérie (Vidal Naquet…) dans
le mouvement communiste (Leroy Ladurie, Soboul…) et si cet engagement politique direct est moins systématique aujourd’hui il
demeure dans des prises de positions affichées à gauche (G. Noiriel, N. Offenstadt, P.Blanchard…), comme à droite (H. Carrère
d’Encausse, J. Marseille…). Mais ce qu’expriment davantage les historiens lorsqu’ils interviennent dans le débat public, c’est une
volonté de séparation nette entre histoire et politique (pétition « liberté pour l’histoire », Comité de Vigilance sur les Usages de
l’Histoire…). Paradoxalement (ou pas) c’est au moment où l’engagement politique des historiens est moins généralisé que le
phénomène politique reprend de l’intérêt à leur yeux.
Conclusion Le regain d’intérêt des historiens pour l’histoire politique est incontestable. On peut parler de retour de l’histoire politique
au plan historiographie et même, en partie, au plan des motivations des historiens. Mais le terme de « retour » est inapproprié si l’on
considère ce que recouvre l’expression « histoire politique » aujourd’hui tant les objets et les sources de l’histoire politique ont été
renouvelés et tant les finalités de cette histoire politique sont éloignées de ce qu’elles étaient avant l’éclipse !
SECONDE PARTIE peut-on parler d’un désintérêt des Français pour la politique ?
Après une rapide introduction à partir de n’importe quel fait divers d’actualité qui illustre le rejet de la politique « politicienne » dans
les médias (à l’heure ou j’écris ces lignes le « mouvement des indignés en Espagne et ailleurs qui permet d’ailleurs de poser la question
en soulignant qu’elle repose sur une hypothèse implicite paradoxale : le désintérêt pour la politique est souvent considéré comme une
évidence, il convient cependant de l’interroger. Les trois composantes de ce type de question sont sans doute ici trop déséquilibrées
pour faire le plan. Il est préférable, si possible, de construire un argumentaire en Thèse-Antithèse, la description des occasions et des
modalités d’approche de cette question en classe tenant lieu de synthèse.
1) Thèse : le désintérêt est un fait observable. On commencera par décrire et expliquer le document. Puis il faudra donner
d’autres indicateurs du désintérêt : diminution du nombre d’adhésion aux partis politiques, désaffection des réunions
publiques, rareté et faible audience des émissions politiques à la télévision. On peut même considérer que les alternances
répétées et la montée de l’extrême droite sont des manifestations autant que des effets… On peut évoquer les analyses
sociologiques de ce désintérêt (beaucoup plus important dans les « classes populaires ») en envisageant quelques pistes
d’explication : déclin du Parti Communiste et des perspectives politiques qu’il proposait à la « classe ouvrière », déclin de la
cette dernière comme groupe de référence des identités, éclatement des références identitaires et des revendications
collectives, échecs des politiques de lutte contre le chômage, sur médiatisation des « affaires » impliquant les politiques,
développement de la satyre (de la candidature de Coluche en 1980 aux guignols de l’info…).
2) Antithèse : la société est encore très largement politique. D’abord parce qu’il n’est pas de société sans politique et qu’on
pourrait affirmer que regarder Arte plutôt que TF1, écouter Skyrock plutôt que France Culture ou l’inverse est un acte
politique. On peut reprendre l’analyse du document pour constater que les élections au cours desquels des enjeux politiques
apparaissent (2nd tour de la présidentielle en 2002, en 2007, référendum sur la Constitution européenne) sont encore très
fréquentées. On peut aussi montrer les formes d’engagement politiques diversifiés depuis les années 80 ex : « Touche pas à
mon pote », marches « blanches », développement des mouvements de protection de l’environnement local (non dénués de
phénomène NIMBY), émeutes des « banlieues », manifestations massives contre le CPE, contre la réforme des retraites...
3) Synthèse : montrer rapidement que ces questions peuvent être abordées quasiment à tous les niveaux de la scolarité
secondaire en EC,, ex : en 6ème sur la commune, en Terminale sur les nouvelles formes d’engagement citoyens dans la
mondialisation ou l’Europe, en 3ème et en 1ère en posant directement la question du sujet. Puis développer quelques pistes sur
le rôle de l’enseignement de l’Histoire, de la Géographie et de l’EC (JS) dans l’indispensable éducation au politique. Les deux
premières disciplines contribuent à cette éducation en montrant que les événements ne sont jamais des fatalités, que l’action
des forces sociales et politiques leur donne du sens et a des effets, que les conflits, les débats sur l’aménagement de l’espace
(en géographie) débouchent sur des décisions sur lesquelles les acteurs qui s’engagent ont une prise à toutes les échelles.
L’Education civique permet aussi de façon très concrète de montrer les effets de l’action politique et l’intérêt du débat,
fondement de la démocratie.

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