LAGA La théorie du chaos justifie-t
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LAGA La théorie du chaos justifie-t
LAGA La théorie du chaos justifie-t-elle un usage constant des statistiques ? La modélisation de phénomènes physiques par des équations différentielles déterministes induit souvent un comportement statistique. Nous allons illustrer ceci par des exemples, contre-exemples et un problème ouvert. Fig. 1 ensemble appelé attracteur (fig. 1). Une orbite typique de l’équation différentielle de Lorenz possède la propriété statistique suivante [2] : Pour toute région de l’espace, la moyenne temporelle du nombre de fois que la trajectoire va visiter cette région converge. Figure 1 : Attracteur de Lorenz, image réalisée en collaboration avec P.Y. Fave. Figure 2 : La dynamique du bord du disque contient seulement deux points fixes A et B. Tous les points du disque sauf le centre sont attirés vers le cercle. La moyenne du temps passé à coté de A (ou B) ne converge pas. contact Laboratoire Analyse, Géométrie et Applications (LAGA) UMR 7539 CNRS Directrice : Laurence Halpern p 01 49 40 36 05 Institut Galilée 10 Le langage mathématique est capable de modéliser une grande variété de phénomènes physiques en astronomie, mécanique, météorologie, écologie et même biologie. La plupart de ces modèles se présentent sous la forme d’une équation différentielle : dt M(t) = f(M(t)), où M(t) représente l’état du système à l’instant t, et où f est la loi d’évolution ne dépendant que de l’état à l’instant t. En général, étant donnée une condition initiale M0, il existe une unique courbe M(t) solution de l’équation ci-dessus et telle que M(0)=M0. L’ensemble {M(t)}t est l’orbite de M0. À court terme, les solutions de l’équation approximent très bien les observations expérimentales. Le comportement à long terme présente bien plus de difficultés. La théorie du chaos est née à la fin du 19ème siècle avec les travaux de Poincaré sur la dynamique de trois corps en mécanique céleste [1]. Ces travaux aboutirent à un exemple d’équation différentielle physique dont les orbites sont extrêmement compliquées et, surtout, ne dépendent pas continûment de M0. Ainsi, les solutions dépendent de façon sensible aux conditions initiales : une petite perturbation change radicalement la position de la solution M(t) en un instant t suffisamment lointain. Cette découverte fut révolutionnaire puisque les orbites du problème à deux corps célestes sont des coniques (ellipses, paraboles et hyperboles), qui dépendent continûment des conditions initiales. La sensibilité aux conditions initiales s’appelle aussi l’effet « aile de papillon ». Par une expérimentation numérique, Lorenz observa qu’une équation différentielle, simplifiant celle régissant la météorologie, était sensible aux conditions initiales. Par un battement d’aile, un papillon peut changer de façon infime la pression de l’air, ce qui revient à perturber les conditions initiales de l’équation. Les orbites s’accumulent sur un Ainsi, cette trajectoire est attirée par un « attracteur statistique ». Est-ce toujours le cas : pour toute équation différentielle, les orbites typiques sont-elles toujours attirées par un attracteur statistique ? Il existe des contre-exemples très simples de système dynamique n’ayant pas d’attracteur statistique (fig. 2). Mais qu’en est-il si l’on suppose non seulement les conditions initiales typiques, mais aussi l’équation différentielle typique ? Une partie du LAGA travaille pour donner une réponse positive à ce problème ouvert [3]. Ce comportement statistique est prouvé pour les équations différentielles linéaires, ainsi que pour les dynamiques sur un intervalle données par l’itération d’un polynôme de degré 2 [4]. Cependant, on ne sait déjà plus si c’est le cas pour les polynômes de degré 3. Pour les équations différentielles en dimension au moins 3, cette question est aussi fondamentale que difficile. Références [1] Poincaré, H. Sur le problème des trois corps et les équations de la dynamique, (1890), Acta 13 [2] Tucker, A Rigorous ODE Solver and Smale’s 14th Problem, (2002), Found. Comp. Math. vol.2. [3] Palis, J. A global perspective for nonconservative dynamics, (2005). An. I.H.P. Non Lin. n.22 [4] Lyubich, M. Almost every real quadratic map is either regular or stochastic. (2002), Ann. of Math. n.156. Pierre Berger [email protected] Fig. 2