Compte-rendu - collegeaucinema37.com
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FORMATION SUR LE FILM LES RAISINS DE LA COLERE de John Ford Le mercredi 11 janvier 2012, l’association Collège au Cinéma 37 a invité Jean-Baptiste Thoret, enseignant, historien, critique de cinéma et spécialiste du cinéma américain pour parler du film de John Ford Les Raisins de la colère programmé pour les élèves de 4ème/3ème. Sandrine Millot, enseignante au collège André Bauchant de Château-Renault, pense travailler sur la scène « Mie de pain » lorsque Pa se présente à l’épicerie sur la route pour avoir du pain (44 min 38 sec). En général, le film est le développement des dix premières minutes. L’un des grands sujets du cinéma américain est le peuple, la question de la famille (Comment se crée le peuple américain ?). La communauté, la famille et le peuple sont les sujets au centre du cinéma de John Ford. Les deux personnages essentiels du film sont Tom Joad et la mère de Tom, Ma Joad. Il est important de parler aux collégiens de John Ford et de son cinéma. Il a fait l’histoire du cinéma de 1917 à 1962 où il a raconté l’histoire des Etats-Unis à travers ses films. Il a mis sa propre expérience d’émigré irlandais dans le film. Il y a eu beaucoup de films sur la période de la dépression comme par exemple Bonnie and Clyde d’Arthur Penn. Alors que John Carradine joue Jim Casy dans Les Raisins de la colère, son fils, David Carradine jouera également dans un film sur la dépression dans les années 1970. Le cinéma de Ford est passionnant car il couvre trois grandes périodes de l’histoire du cinéma et de l’idéologie américaine. Le fils du désert est un film clé dans le cinéma de John Ford. ANALYSE DU DEBUT DU FILM PLAN PAR PLAN La mise en scène de John Ford est en avance sur le cinéma. - Générique : La musique, liée au western, qui va couvrir tout le film est Red River Valley, l’hymne du western (page 16 du dossier pédagogique du CNC). Beaucoup de temps est nécessaire pour se dire que ce film est contemporain. Le départ de la musique a une dimension nostalgique et elle est plus enjouée quand ils arrivent en Californie (terre promise). Le fond du générique représente un arbre ce qui anticipe plusieurs motifs : - La terre : idée d’ancrage de la fiction que la famille Joad va quitter, - La métaphore de la filiation : dans le film, il y a quatre niveaux (enfants, Tom Joad, parents de Tom et grands-parents de Tom) A la fin du film, les enfants sont fascinés par les toilettes alors qu’ils ont laissé derrière eux leurs grands parents décédés en route. Le film raconte l’histoire d’une famille qui prend la route pour survivre afin que cette famille n’explose pas. Après quatre ans passés en prison, Tom Joad pense retrouver l’Amérique qu’il a quittée. L’esthétisme des personnages très incarnés est très beau dans le cinéma de John Ford. - Premier plan : Le premier plan est le même que le dernier du film de Charlie Chaplin, Les Temps Modernes. Jean-Baptiste Thoret conseille de voir Les Temps Modernes, Les Raisins de la colère et le Magicien d’Oz ; la fin d’un film est le début de l’autre. Le rêve américain est toujours au bout de la route. Charlot part vers l’horizon dans Les Temps modernes et Tom Joad revient de l’horizon dans Les Raisins de la colère. Il y a quatre ans entre les deux films avec le message d’espoir à la fin du film Les Temps Modernes et celui du désespoir au début du film Les Raisins de la colère en faisant faire le trajet contraire à Tom Joad. Par rapport au dernier plan de Chaplin, les poteaux et les fils électriques sont rajoutés : c’est le moment où le paysage américain commence à être grillagé, difficile à traverser (Western Union de Fritz Lang). Le vrai drame est que l’espace est maintenant privatisé. L’idée du croisement des deux routes est précisée peu à peu avec l’enseigne du magasin au plan suivant : « Cross Road ». Le spectateur va suivre une Amérique qui est à la croisée des chemins. Tom Joad est un véritable héros aux Etats-Unis. Même Bruce Springsteen a fait un album ayant pour titre « The Ghost of Tom Joad » : http://fr.wikipedia.org/wiki/The_Ghost_of_Tom_Joad. Il est intéressant de se dire que l’on trouve une fois sur deux dans un livre d’Histoire Géographie un photogramme du film Les Raisins de la colère pour illustrer la période de la dépression. - Plan « Cross Road » : John Ford tourne le retour d’un homme dont le spectateur ne connaît rien mais dont on sait qu’il revient dans un « chez lui » qui n’existe plus. John Ford fait de Tom Joad une ombre toujours au bord de l’expressionnisme. Dans ce plan, le magasin est en lumière et Tom Joad est spectateur de la scène. Il arrive dans un monde qui n’est plus le sien et il en devient spectateur, c’est la confrontation de l’Amérique de la terre et de l’Amérique du capitalisme. On découvre ce nouveau monde dans les yeux de Tom Joad. Dans le film, lorsque deux personnes s’opposent, John Ford utilise le champ contre champ. Ce plan nous montre la première confrontation entre ces deux Amériques, avec le chauffeur de camion qui montre à Tom Joad l’Amérique légaliste et ce dernier qui lui répond que « les vrais bons mecs ne s’intéressent pas aux panneaux ». C’est une éternelle question dans le cinéma américain avec ce rapport à la morale, à la loi. Le jugement moral de l’individu remporte toujours sur la loi. - Discussion dans le camion : La confrontation commence quand l’un des deux personnages regarde l’autre. On continue dans la reprise et les précisions de la privatisation de l’espace avec les barbelés. Joad passe son temps à passer des frontières. A chaque fois qu’il y a un arbre, un nouveau personnage est introduit. - Dialogue Tom Joad / Jim Casy Le film a été tourné en Studio et en extérieur en raison des contraintes budgétaires mais l’utilisation du studio correspond également à un choix du réalisateur. Cette scène est tournée en studio (toile peinte) et c’est par le son que l’on s’en rend compte (écho). Elle peut nous faire penser au Magicien d’Oz avec les barrières. C’est une façon de nous dire qu’il y a deux personnages qui ont connu l’époque de la liberté, de l’espace agraire… et Ford nous dit que finalement, la réalité de l’espace, de l’horizon est un leurre. Dans ce plan, les personnages sont « enfermés dehors ». L’idée de la frontière est fondamentale en Amérique. Frederick Jackson Turner a écrit un essai sur la frontière où il définit l’Ouest comme un concept de progrès et de transformation : http://www.medarus.org/NM/NMTextes/nm_03_04_frontier.htm. Ce plan anticipe ce que va être le trajet du road movie. Road movie : Les Raisins de la colère est le premier film qui va poser tous les codes de road movie. Le road movie est un déplacement, un mouvement d’un point A à un point B ou d’un point A à un point A. « Le western, c’est le cinéma américain par excellence » André Bazin Le road movie est le devenir du western. Ils ont échangé les chevaux avec des voitures ou des motos. Le road movie se déplace dans le temps. Dans Apocalypse Now, Martin Sheen remonte la rivière ce qui permet de revenir sur l’Histoire. Dans Les Raisins de la colère, ils se rendent à l’Ouest et de temps en temps, ils se mettent sur le bas côté où ils font des rencontres. Prendre la route signifie partir à la rencontre du peuple américain. Le road movie reprend une route balisée alors que le western prend une route en sens inverse de la conquête de l’Ouest. Le peuple : Ce road movie va permettre de vérifier l’état du peuple américain. Les « Okies » sont traités de « white trash » (http://fr.wikipedia.org/wiki/White_trash) à la station service où deux hommes disent qu’ils n’ont pas de sentiments. Le film Les Raisins de la colère est hanté par la peur du « white trash ». Survival movie : « Survival movie » est l’idée de prendre la route qui est soudainement interrompue. Dans le film, il y a plusieurs façons de rencontrer le peuple, les gens. A chaque fois que les Joad s’arrêtent, ils rencontrent une certaine vision de l’Amérique. - Le camp « prison » (1 h 14 min 37 sec) Etrangement, les plans tournés font penser aux camps de concentration que John Ford a filmé à leur libération en 1945 ; c’est une manière sombre de filmer. - Plan de l’histoire de Muley : Ce plan marque le retour du champ contre champ où il n’y a pas de lien entre les personnages. Dans le flash-back, lors de la discussion avec l’homme d’affaires, ce dernier reste figé et derrière une surface vitrée comme un guichetier à la Poste alors que Muley parle à visage découvert. En vue de rétablir l’équilibre entre les deux personnes, John Ford réalise une plongée sur le puissant pour montrer sa « petitesse ». Suite à ces champs contre champs, une transgression dans l’axe est faite ce qui rend la conversation impossible entre les deux personnages. Le spectateur se rend compte que le pouvoir n’est plus centralisé. On va d’une logique pyramidale à une logique non centralisée. Comment s’attaque-t-on à quelqu’un qui n’a pas de tête ? Dans les scènes où Muley, Casy et Tom Joad sont dans la maison des parents de Tom, ces moments s’appuient sur l’expressionnisme. Dans Le Cheval de Fer (1925), John Ford filme l’arrivée du train comme il filme les engins Caterpillar dans Les Raisins de la colère. Lorsqu’ils arrivent sur les terres, cela donne l’idée d’un écrasement. Ce que dit Muley, c’est que la route va être prise par les familles par contrainte (road movie contraint) contrairement à Charlot dans Les Temps Modernes. Au début du film, les personnes de pouvoir sont toujours filmées avec des machines (chauffeur au début, Caterpillar, garçon qui vient détruire la maison de Muley). Quand la famille Muley reconnaît le garçon venant détruire la maison, il y a un retour d’humanité chez ce garçon mais la violence de la destruction va quand même s’exercer : à un argument d’appartenance à la terre, l’autre répond par un argument commercial (3 dollars par jour). La maison est en train d’être détruite puis la caméra bascule des personnes vers leurs ombres à terre, l’ombre d’eux-mêmes ce qui veut dire d’une certaine façon que ces personnages appartiennent à cette terre. A aucun moment, les Okies n’ont le droit à un plan de départ avec une profondeur de champ contrairement aux machines. - Plan du départ de la famille Joad : La famille Joad devient une communauté en partant et en acceptant que Casy se joigne à eux. Nous pouvons remarquer la mise en scène de ce départ. John Ford a choisi de ne pas accompagner le départ des Joad. Il filme cela comme une catastrophe. Au moment où Joad part vers une ouverture, John Ford reste sur une fermeture. L’association Collège au Cinéma 37 remercie Jean-Baptiste Thoret pour sa venue à Tours et pour son analyse du film Les Raisins de la colère. Bibliographie A la recherche de John Ford de Joseph McBride – Editions Acte Sud Filmographie Filmographie sur le road movie : Thelma et Louise de Ridley Scott Easy Rider de Dennis Hopper Tueurs nés d’Oliver Stone Little miss sunshine de Jonathan Dayton et Valérie Faris Quelques sites utiles http://www.abc-lefrance.com/fiches/Raisinsdelacolere.pdf Fiche technique sur le film http://site-image.eu/?page=film&id=380 Dossier pédagogique du site image sur le film http://ww2.ac-poitiers.fr/daac/spip.php?article761 Pistes pédagogiques réalisées par Nathalie Rulier, formatrice DAAC à l’académie de Poitiers http://www.ac-grenoble.fr/lycee/diois/Latin/spip.php?rubrique354 Pistes pédagogiques de l’académie de Grenoble http://www.ac-nice.fr/ia83/culture/spip/spip.php?article175 Pistes pédagogiques de l’académie de Nice http://lewebpedagogique.com/educationimage42/files/2011/02/RaisinsColere.pdf Dossier pédagogique réalisé par Laurent Godel de l’académie de Lyon http://www.cineclubdecaen.com/realisat/ford/raisinsdelacolere.htm Fiche sur le film réalisée par le ciné-club de Caen http://www-zope.acstrasbourg.fr/sections/enseignements/secondaire/pedagogie/les_disciplines/lettres/image__cinema/cinema/college_au_cinema/les_raisins_de_la_c/downloadFile/attachedFile_1/RAISINS_de_la_COLE RE.s1.CORRECTION.pdf?nocache=1323685793.53 Fiche pédagogique réalisée par Carine Hassler du collège Gambetta à Riedisheim http://www.ac-grenoble.fr/lycee/diois/Latin/IMG/pdf_Les_raisins_de_la_colere_-_Progression_du_recit.pdf Comparaison entre le livre et le film faite par Robert Delord de l’académie de Grenoble http://www.iletaitunefoislecinema.com/chronique/2008/les-raisins-de-la-colere-the-grapes-of-wrath Article de Christophe Chemin http://www2.cndp.fr/TICE/teledoc/dossiers/dossier_raisins.htm Fiche pédagogique sur le film réalisée par Philippe Huneman, professeur de philosophie http://www.cinemaparlant.com/fichespeda/q-r-s/fp_raisinscolere.pdf Fiche pédagogique réalisée par le Cinéma parlant http://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=les%20raisins%20de%20la%20col%C3%A8re%20p%C3%A9dago gie&source=web&cd=20&ved=0CF4QFjAJOAo&url=http%3A%2F%2Fwww.ia53.acnantes.fr%2Fservlet%2Fcom.univ.collaboratif.utils.LectureFichiergw%3FCODE_FICHIER%3D1301919038936%2 6ID_FICHE%3D188799&ei=b7IFT-G3B4LtgbvstTWAQ&usg=AFQjCNEubIi6zMDEao400KHST58Q8S5qUA&cad=rja Dossier pédagogique réalisé par Yannick Lemarié de l’action culturelle du rectorat de Nantes