La prestation compensatoire
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La prestation compensatoire
Janine REVEL Fiche de niveau 3. Droit de la famille / Divorce / 2007 La prestation compensatoire Introduite en France en 1975, réformée en 2000 puis 2004, la prestation compensatoire s'entend de la compensation financière ou matérielle due par un époux à son conjoint afin de combler la disparité créée dans leurs conditions de vie respectives par la rupture de leur union. Elle est aujourd'hui attribuée à l'issue de 15% des instances en divorce et bénéficie à la femme dans 98% des cas. I. Conditions d'octroi Tout époux, même fautif, peut prétendre au bénéfice d'une prestation compensatoire dès lors qu'il établit une chute de son niveau de vie due à la dissolution de l'union. Ce droit lui est octroyé soit par la convention homologuée réglant les conséquences du divorce (obligatoirement même dans le divorce par consentement mutuel) et, dans ce cas, aux conditions qu'elle fixe, soit par décision du JAF faute d'accord du couple sur ce point. Cependant, le juge peut refuser d'accorder la prestation demandée si l'équité l'exige : il peut ainsi en décider au vu des critères légaux d'évaluation du montant de la prestation (cf II) ou compte tenu des circonstances particulières de la rupture lorsque la demande émane de l'époux aux torts exclusifs duquel le divorce a été prononcé. II. Montant Le montant de la prestation compensatoire est définitivement fixé dès le prononcé du divorce. Il est arrêté au vu des ressources du débiteur et des besoins du créancier, tels qu'appréciés au jour du jugement et selon leur évolution dans un avenir prévisible. La loi énonce à titre indicatif des critères propres à guider la décision du juge (durée du mariage, âge, état de santé, qualifications professionnelles, droits présents et à venir des époux…). III. Modalités de paiement En principe, la prestation compensatoire est versée sous la forme d'un capital. Sauf accord des époux, le juge détermine alors si elle prend la forme d'un versement de somme d'argent, unique ou fractionné sur une période maximale de 8 ans, de l'abandon d'un bien en propriété ou de l'attribution sur l'un d'eux d'un droit, soit viager soit temporaire, à l'usage, à l'habitation ou à l'usufruit. A titre exceptionnel, si l'âge ou l'état de santé du créancier l'empêche de subvenir à ses besoins, le JAF peut autoriser le versement de la prestation compensatoire sous forme de rente viagère indexée. Il peut encore combiner toutes ces modalités de paiement. Aujourd'hui prévue par la loi, cette faculté n'a été admise par la jurisprudence que peu avant la réforme de 2004 (Civ. 1ère, 16 mars 2004, Bull. civ. I n°87). IV. Révision La révision de la prestation compensatoire peut résulter d'une nouvelle convention des époux homologuée par le JAF. Elle est alors libre. A défaut, elle procède d'une décision judiciaire et obéit à de strictes exigences. Ainsi, si la prestation compensatoire prend la forme d'un capital, sa révision ne peut en affecter que les modalités d'exécution, non le montant. Elle suppose un changement important dans la situation du débiteur. Par décision spécialement motivée, le JAF peut alors étendre la durée des versements périodiques au-delà de 8 ans. Il peut encore exiger un règlement anticipé du solde à la demande du créancier, une fois le régime matrimonial liquidé. La prestation compensatoire versée sous forme de rente peut être révisée, supprimée ou suspendue pour une durée déterminée en cas de changement important dans les besoins et ressources des parties. Mais la révision ne peut jamais aboutir à en augmenter le montant. Le JAF peut encore substituer au paiement d'une rente celui d'un capital. Avant la réforme de 2004, cette possibilité était rarement utilisée, faute de règle de calcul du capital substitué. Elle devrait à l'avenir jouer plus largement puisque le droit aujourd'hui en vigueur définit une méthode unique de calcul basée sur des variables monétaires et financières et sur des circonstances tels l'âge et l'espérance de vie du créancier. V. Transmission Au décès du débiteur, la prestation compensatoire est due par les héritiers acceptants dans la limite de l'actif successoral. Si cet actif ne suffit pas à l'acquitter en totalité, le paiement du solde se fait par réduction proportionnelle des legs particuliers. La mort du débiteur rejaillit aussi sur les modalités de paiement de la prestation compensatoire, sauf accord unanime des héritiers en faveur de leur maintien. Ainsi, le solde de la prestation versée sous la forme d'un capital fractionné devient immédiatement exigible. La rente initiale est quant à elle remplacée par un paiement en capital pareillement caractérisé. Bibliographie - P. MALAURIE et H. FULCHIRON, Droit civil – La famille, Defrenois 2ème éd. 2006, n°785 à 821 p.318 et s. - F. TERRE et D. FENOUILLET, Droit civil – Les personnes, la famille, les incapacités, Précis Dalloz 7ème éd. 2005, n°540 à 556 p.465 et s. - F. GRANET et P. HILT, Droit de la famille, PUG Coll. Le Droit en plus, 2ème éd. 2006, n°168 p.83 et 84