"Platonov": Emmanuelle Devos et le collectif "Les Possédés

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"Platonov": Emmanuelle Devos et le collectif "Les Possédés
 ­ Publié le 11/01/2015 à 12:54
"Platonov": Emmanuelle Devos et le collectif "Les
Possédés" subliment Tchekhov
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L'actrice française Emmanuelle Devos au 65e Festival de Cannes le 21 mai 2012
© AFP/Archives ­ Valery Hache
C'est la première pièce d'un tout jeune Tchekhov de 18 ans, et tout est déjà là, la mélancolie d'un monde
finissant, les rêves de jeunesse piétinés par la vie, dans ce "Platonov" magnifiquement porté par le
collectif "Les Possédés" et la comédienne Emmanuelle Devos.
L'actrice de 50 ans, très demandée au cinéma comme au théâtre ("La porte à côté" à Edouard VII la
saison dernière) est tout simplement parfaite dans cette pièce de plus de trois heures où elle incarne la
jeune veuve d'un général, à la tête d'un domaine en faillite.
Autour d'elle gravite tout le petit monde de Tchekhov: jeunes femmes romantiques, paysans enrichis,
aristocrates oisifs, bourgeois avides ... Au centre de cette micro société, un homme fascine et séduit
toutes les femmes, Platonov, "notre petit Platon", pour l'un, "un second Byron" pour l'autre.
Intellectuel velléitaire, Platonov a arrêté ses études, il végète à la campagne dans un emploi de maître
d'école, s'ennuie auprès de Sacha, sa "petite paysanne".
Rodolphe Dana est ce Platonov séduisant et veule, généreux et hyper égoïste, "le meilleur exemple de
l'incertitude de notre époque".
On ne sait jamais s'il s'amuse avec les femmes pour tromper le temps, ou s'il est le jouet de toutes celles
qui sont folles de lui, dépassé par les événements. "Je suis en train de me perdre", dit­il, torturé par ses
désirs contradictoires. "Trop de passion et pas assez de force", entend­on dans le texte, servi par une
belle traduction moderne d'André Markowicz et Françoise Morvan.
Emmanuelle Devos a la grâce et la complexité des héroïnes tchékhoviennes, dont on découvre la
profondeur au fur et à mesure de la pièce. Sa présence irradie le plateau, elle est "la générale", mais
aussi une femme amoureuse, avide de brûler sa jeunesse avant de dépérir dans ce trou perdu.
Tout cela est joué au plus près du texte, sans costumes ni tralala, avec une fluidité qui font passer les
3H40 à toute vitesse. C'est tragique, mais c'est aussi souvent très drôle. Et lorsque tout est joué, détruit
irrémédiablement, "Que faire? Enterrer les morts et réparer les vivants".
"Platonov", jusqu'au 11 février au Théâtre de la Colline à Paris, puis en tournée (Colombes, Gap,
Marseille, Toulouse, Brest, Dunkerque, Lille, Angers, Tours etc.)
11/01/2015 12:53:26 ­ PARIS (AFP) ­ © 2015 AFP