La décentralisation (1982-2004)

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La décentralisation (1982-2004)
La décentralisation (1982-2004)
- Les premières lois de décentralisation
Les mesures adoptées à partir de 1981 - les lois Defferre - revêtent une ampleur
sans précédent depuis le début du XIXème siècle. Il s’agit de créer un "choc
psychologique" afin de réduire les résistances à un bouleversement qui poursuit trois
objectifs : rapprocher les citoyens des centres de décision, responsabiliser les
autorités élues et leur donner de nouvelles compétences, favoriser le développement
des initiatives locales.
La politique de décentralisation engagée en 1981 repose sur trois grands principes :
l’absence de tutelle d’une collectivité sur une autre,
le maintien des différentes structures d’administration locale existantes,
la compensation financière des transferts de compétences.
Les lois Defferre se traduisent par cinq changements principaux :
la tutelle exercée par le préfet disparaît. L’Etat contrôle les actes des collectivités
locales a posteriori, non plus a priori, et ce par l’intermédiaire du préfet, des
tribunaux administratifs et des chambres régionales des comptes,
le conseil général élit lui-même l’autorité exécutive de ses décisions : ce n’est
plus le préfet qui met en oeuvre les politiques du département, mais le président
du conseil général,
la région devient une collectivité territoriale pleine et entière, elle est administrée
par un conseil régional dont les membres sont élus au suffrage universel,
l’Etat transfère des blocs de compétences qui étaient jusqu’à présent les siennes
au bénéfice des communes, des départements et des régions,
les aides financières accordées aux collectivités locales par l’Etat sont globalisées
sous la forme de dotations : dotations globales de fonctionnement,
d’équipement, de décentralisation.
Les bilans couramment dressés relèvent les nombreux acquis de la décentralisation
(meilleure prise en compte des problèmes locaux, renforcement de la capacité
d’initiative des collectivités...) mais soulignent aussi des frictions entre l’Etat et les
collectivités et entre collectivités ainsi qu’un insuffisant transfert de moyens. De plus,
constitutionnellement rien n’est changé. La France reste un pays unitaire, la
démocratie locale n’est pas étendue et le nombre de collectivités reste inchangé.
Après l’adoption des lois Defferre, des textes viennent compléter le dispositif et
intègrent la décentralisation dans le paysage administratif français. La loi du 6 février
1992 relative à l’administration territoriale de la République, par exemple, cherche à
stabiliser et à rationaliser la décentralisation en définissant une meilleure
organisation territoriale de l’Etat. La loi pose le principe d’une meilleure répartition
des missions entre les administrations centrales et les services déconcentrés de l’Etat
et renforce le niveau régional de l’administration.
Par ailleurs, la même loi mais aussi la loi du 12 juillet 1999 renforcent les modes de
coopération au niveau local, afin de remédier à l’émiettement communal.
Enfin, la démocratie locale est renforcée par une meilleure information des habitants
(prévue par la loi de 1992) et aussi par la création de nouvelles structures comme les
conseils de quartier institués par la loi relative à la démocratie de proximité.
Source: www.vie-publique.fr/politiques-publiques/decentralisation/lois-defferre/
- Le contrôle a posteriori des actes des collectivités
locales
La loi du 2 mars 1982 institue un contrôle de légalité des actes des collectivités
locales et de leurs établissements publics, dont l’exercice est confié, sous l’autorité du
gouvernement, aux préfets.
Ce contrôle de légalité a posteriori qui succède au régime antérieur d’approbation
préalable est fondé uniquement sur l’examen de la légalité des actes et non sur leur
opportunité. Il revient désormais au juge administratif saisi par le préfet de
sanctionner le défaut de respect.
Le contrôle de légalité est fondé sur trois principes :
une énumération limitative des actes soumis au contrôle,
un contrôle a posteriori portant sur la seule légalité des actes,
l’intervention du représentant de l’Etat et, le cas échéant, du juge administratif.
Par ailleurs, les actes budgétaires des collectivités locales et ceux des établissements
publics locaux sont soumis à un contrôle qui leur est propre : le contrôle
budgétaire.
Ce contrôle, exercé a posteriori par le préfet, en liaison avec la chambre régionale
des comptes, a pour but de faire respecter les règles applicables pour l’élaboration et
l’exécution des budgets. Ces règles portent sur quatre points essentiels :
la date de vote et de transmission du budget primitif,
l’équilibre réel du budget,
la date de vote du compte administratif et son équilibre,
l’inscription et le mandatement d’office des dépenses obligatoires.
- La répartition des compétences entre l’Etat et les
collectivités locales
Les transferts de compétences, issus des lois Defferre, sont opérés en fonction de
deux principes :
le premier est celui de la stricte compensation des charges pouvant résulter du
transfert de compétences. Ce principe implique un transfert des ressources
correspondant aux charges des compétences transférées : l’Etat abandonne
certaines ressources fiscales (vignette, droits de mutation...), des crédits sont
attribués aux collectivités sous la forme d’une dotation générale de
décentralisation.
le second principe impose que soit respectée la liberté des collectivités locales.
Celles-ci s’organisent comme elles l’entendent. Aucune collectivité locale
n’exerce de tutelle sur une autre, l’Etat seul arbitrant et réglant les conflits entre
elles.
Les novations considérables induites par les deux lois de 1983 (loi du 7 janvier et loi
du 22 juillet) sur les réglementations et les procédures applicables, leurs répercutions
sur l’organisation des services ainsi que les masses budgétaires en jeu conduisent le
gouvernement à élaborer un calendrier sur trois ans des transferts de compétences.
La première année voit s’effectuer les transferts de compétences dans les domaines
de l’urbanisme et du logement, de la formation professionnelle et de l’aménagement
du territoire. Ainsi, le département se voit confier la responsabilité de décider et de
financer les opérations de remembrement, la région reçoit la compétence de droit
commun en matière de formation professionnelle continue et d’apprentissage, enfin
la commune est chargée de l’élaboration des documents d’urbanisme (plan
d’occupation des sols) et elle délivre les autorisations d’utilisation du sol (permis de
construire).
L’année suivante, sont concernées les attributions relatives à l’action sociale, à la
santé et aux transports. Les départements reçoivent ainsi une compétence générale
en matière de prestations d’aide sociale et en matière de prévention sanitaire et de
services sociaux. Cette compétence de droit commun concerne notamment l’aide
médicale, l’aide sociale à l’enfance, aux familles et aux personnes âgées, la lutte
contre les fléaux sociaux, la vaccination... De plus, les départements deviennent
compétents pour créer et gérer les ports maritimes de commerce et de pêche, les
communes pour créer et gérer les ports maritimes affectés à la plaisance. Enfin, les
transports scolaires relèvent de la compétence exclusive des départements.
La troisième année, interviennent les transferts de compétences dans les secteurs de
l’éducation, de la culture et de l’environnement.
En matière d’enseignement public, une nouvelle répartition des compétences est
fixée d’abord pour l’équipement scolaire : les locaux de l’enseignement élémentaire
et préélémentaire relèvent de la commune, les collèges des départements, les lycées
et certains établissements spécialisés de la région. En outre, une nouvelle
organisation de la planification scolaire associe les collectivités locales à
l’établissement du schéma prévisionnel des formations et du programme prévisionnel
des investissements. Sur le plan administratif, un conseil départemental de
l’éducation nationale comprenant des élus locaux se substitue aux différents
organismes consultatifs qui interviennent en matière scolaire. Enfin, les collectivités
locales peuvent utiliser les locaux scolaires pour réaliser des activités culturelles,
sportives, sociales ou socio-éducatives complémentaires.
Dans le domaine de l’environnement, compétence est donnée aux départements en
matière de chemins de randonnée et aux communes en matière de périmètre de
protection autour des réserves naturelles.
En ce qui concerne l’action culturelle, la nouvelle répartition donne aux collectivités
locales une compétence de droit commun en matière de bibliothèques, de musées et
de services d’archives, l’Etat ne conservant pour l’essentiel qu’une mission de
contrôle.
- La déconcentration
Il est généralement admis qu’il n’y a pas de bonne décentralisation sans une
déconcentration parallèle des services de l’Etat. Les élus locaux, dotés de nouvelles
compétences, doivent pouvoir s’adresser au niveau local à un représentant de l’Etat
dont les attributions lui permettent d’engager l’Etat sans en référer
systématiquement à l’échelon central.
La loi d’orientation du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la
République place sur un pied d’égalité services de l’Etat et collectivités territoriales en
indiquant que "l’administration territoriale de la République est assurée par les
collectivités territoriales et par les services déconcentrés de l’Etat". La loi introduit
également le principe de subsidiarité. Le décret 92-604 du 1er juillet 1992 portant
Charte de la déconcentration affirme la compétence de droit commun des services
déconcentrés de l’Etat et clarifie le rôle dévolu à chaque échelon territorial. Les
services déconcentrés de l’Etat constituent ainsi l’administration de droit commun
chargée, dans une circonscription territoriale déterminée, de mettre en oeuvre les
politiques publiques décidées au niveau national, d’appliquer ou de faire appliquer
une réglementation ou de délivrer des prestations aux usagers. Placés, pour la
plupart d’entre eux, sous l’autorité des préfets qui représentent localement le
gouvernement, ils regroupent 95 % des effectifs de la fonction publique de l’Etat. Le
décret du 15 janvier 1997 prévoit la compétence du préfet pour les décisions
administratives individuelles prises au titre des 4200 régimes d’autorisation existants.
De plus, vingt-six décrets des 19 et 24 décembre 1997 déconcentrent environ six
cents procédures. Le préfet de département détient désormais une compétence de
principe en matière de décisions individuelles.
Les efforts ont également porté sur :
une déconcentration accrue de la gestion des personnels et de la procédure de
mise à disposition des fonctionnaires (décret n° 97-695 du 31 mai 1997) ;
la déconcentration des crédits d’intervention et l’engagement dans la voie de la
globalisation des crédits, par une réduction du nombre d’articles budgétaires et
la réforme du contrôle financier local (décret n° 96-629 du 16 juillet 1996) ;
le renforcement de la capacité d’action du préfet dans le domaine immobilier,
notamment par l’institution à son profit d’une procédure d’avis conforme pour les
projets immobiliers des services de l’Etat dans son département (décret n° 97142 du 13 février 1997) ;
la simplification des régimes d’autorisation et de déclaration administrative
préalable (décret n° 97-503 du 21 mai 1997).
- La coopération intercommunale
En France, le nombre des communes est très élevé (36 677 selon l’INSEE) et les
tentatives de regroupement communal ont toujours échoué.
La coopération intercommunale tente donc de pallier les inconvénients de
l’émiettement communal en permettant une préservation de l’identité communale
tout en réorganisant le cadre de l’administration territoriale.
De nombreuses formes de coopération ont été créées (syndicats de communes,
SIVOM, districts urbains, communautés urbaines, communautés de villes,
communautés de communes...), et la multiplication des structures s’est
accompagnée d’une grande complexité du régime juridique et financier, chaque
catégorie étant dotée de règles spécifiques.
La loi du 12 juillet 1999 cherche donc à rationaliser les modes de coopération
intercommunale en ne conservant que trois structures (EPCI - établissements publics
de coopération intercommunale) à fiscalité propre : les communautés urbaines, les
communautés d’agglomération et les communautés de communes
A côté de ces structures à fiscalité propre, les syndicats de communes et les
syndicats mixtes prennent en charge une intercommunalité de services. Par ailleurs,
la loi définit un "tronc commun" de règles applicables à l’ensemble des catégories
d’établissements publics de coopération intercommunale.
- La démocratie locale
Un des objectifs poursuivis par la politique de décentralisation est de rapprocher le
processus de décision des citoyens et de favoriser ainsi l’émergence d’une véritable
démocratie de proximité. Les lois Defferre transfèrent des compétences de l’Etat vers
les collectivités locales et réactivent le rôle et le pouvoir de ces dernières. En
revanche, des collectivités locales vers la population rien ou presque n’est transféré.
La notion de « démocratie locale » apparaît pour la première fois dans la loi
d’orientation du 6 février 1992 pour l’administration territoriale de la République.
Mais son acception est restreinte : elle désigne le droit de la population à
l’information et à la consultation. La loi tend à améliorer l’information et la
participation des habitants (mise à disposition des documents budgétaires,
publication des délibérations autorisant des interventions économiques, création et
encadrement de procédures de consultation directe...) ainsi qu’à renforcer le droit
des élus au sein des assemblées locales. Elle institue également les commissions
consultatives des services publics locaux qui ont pour fonction de permettre
l’expression des usagers des services publics.
La loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité vise à permettre une
meilleure association des citoyens aux décisions locales, en renforçant la démocratie
participative et les droits de l’opposition au sein des assemblées délibérantes. Elle
améliore également les conditions d’accès aux mandats locaux et les conditions
d’exercice de ces mandats en apportant une réponse au problème du statut de l’élu.
La loi rend notamment obligatoire la création de conseils de quartiers dans toutes les
communes de plus de 20 000 habitants. Associant des habitants du quartier et des
membres de la municipalité, ils peuvent être présidés par une nouvelle catégorie
d’adjoints aux maires, les adjoints de quartier. Les conseils de quartier ont un rôle
consultatif, mais également un pouvoir de proposition pour la réalisation
d’équipements de proximité dans les quartiers concernés.