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HISTOIRE DES ARTS : LE MYTHE D'OEDIPE
Présentation dans le contexte historique et social :
Le mythe est un récit fabuleux imaginé par les auteurs de l'Antiquité, au Vème siècle avant J.-C. sur des sujets
variés comme la naissance de la terre, la vie, la passion ou la mort. Les mythes leur permettaient de répondre
aux questions que se pose l'être humain sur son existence : pourquoi sommes-nous amoureux, en colère,
jaloux ? Pour expliquer pourquoi il était mal de tuer, de mentir ou d'avoir des relations sexuelles avec un
membre de sa famille. Les Grecs ont inventé ces récits fabuleux, les mythes, pour expliquer ce que l'être humain
court comme risque s'il ne respecte pas certains interdits.
Pour un Grec, seuls les dieux peuvent commettre des excès, le péché d' « ubris ». Pour que les hommes de
l'Antiquité comprennent les dangers d'une mauvaise conduite, des auteurs ont écrit des pièces qui mettaient en
scène des êtres humains victimes de la malédiction divine et de leur propre démesure. Le théâtre est un lieu où
se retrouvent les citoyens et les auteurs sont chargés de les « éduquer » en leur montrant comment les dieux
punissent les hommes qui ne respectent pas les interdits. Les spectateurs éprouvent de la terreur face à la
cruauté des dieux mais aussi de la pitié pour le héros qui est frappé par la malédiction divine. Le spectacle a
pour objectif de le faire réfléchir et le « purge » ainsi de ses passions. Voilà ce qui arrive quand on ne respecte
pas le « bien ».
Présentation dans le contexte artistique :
Le mythe d'Œdipe circule en Grèce dès le VIIIème siècle avant J.C.
Au Vème av. J.C. le poète ESCHYLE écrit pour le théâtre une pièce sur le mythe d'Œdipe mais c'est
SOPHOCLE (Ier s. av. J.C.) qui transforme le mythe en chef-d’œuvre.
Les auteurs latins comme SENEQUE ont réécrit le mythe et depuis le Moyen-Age, les auteurs de théâtre
(CORNEILLE au XVIIème siècle, VOLTAIRE au XVIIIème, GIDE, COCTEAU, ANOUILH au XXème s.),
des auteurs de BD comme Joan SFAR, des peintres et des médecins s'y intéressent toujours.
Œuvres de référence :
•
Extraits de pièces de théâtre
•
Le tableau de Jean-Dominique INGRES, «Œdipe explique l'énigme du sphinx ».
•
Le dessin humoristique de Philippe GELUCK, Le Chat.
Analyse de l'objet d'étude :
Œdipe appartient à la prestigieuse famille grecque des Labdacides. En commettant une terrible faute, son
grand-père Labdacos a condamné sa famille à la malédiction. Œdipe est le fils de Laïos et de Jocaste qui règnent
sur Thèbes. Prévenus par l'oracle que cet enfant tuerait son père et épouserait sa mère, ses parents lui trouent
les pieds et les lui lient (d'où son nom) puis l'abandonnent. Œdipe est adopté par Polybe et Mérope mais averti
par l'oracle de Delphes, il fuit ses parents et, au cours d'une dispute, tue par mégarde un homme.
Il réussit à résoudre l'énigme du Sphynx qui garde les remparts de la ville de Thèbes (« qui a quatre pattes le
matin, deux à midi, trois le soir ? ») et entre dans la ville de Delphes. Reconnaissante de les avoir délivrés du
Sphynx, Jocaste l'épouse, et donne au nouveau roi de Thèbes quatre enfants (Etéocle, Polynice, Antigone,
Ismène). La prophétie s'est accomplie. La peste s'abat sur le royaume de Thèbes, Œdipe consulte l'oracle qui
lui révèle l'origine de ce mal : le meurtrier du roi Laïos n'a pas été arrêté.
Après avoir enquêté, Œdipe découvre que c'est lui le coupable. Jocaste se pend et Œdipe devenu lucide se crève
les yeux car il est ébloui par l'affreuse vérité : il a tué son père, a épousé sa mère, ses enfants sont aussi ses
frères et sœurs. Il s'enfuit.
Ses fils s'entretuent pour hériter du trône, le frère de Jocaste devenu roi refuse à son neveu Polynice d'être
enterré, Antigone désobéit à son oncle et meurt à son tour enterrée vivante.
Intention des artistes :
Depuis l'Antiquité, ce mythe a permis aux artistes de donner au public leur vision de l'être humain mais aussi
de délivrer un message qui change suivant les époques.
Pour les Grecs, il faut obéir aux dieux car ils n'hésitent pas à punir les humains qui cherchent à échapper à leur
destin. Œdipe incarne parfaitement cet homme excessif qui croit maîtriser son destin, qui triomphe du Sphynx
mais qui est cruellement puni pour son orgueil. Il symbolise l'homme pris au piège. Quoi qu'il fasse, il ne
parvient pas à échapper à son destin, il fuit mais il est toujours rattrapé. Il aime mais son amour est impur et
ceux qui l'aiment, femme et enfants meurent à leur tour.
A chaque époque, ce mythe permet de montrer l'affrontement entre deux pulsions contradictoires : vouloir faire
le bien et commettre le mal, se croire libre et être prisonnier d'une faute, être loyal à sa famille et désobéir à la
loi, chercher la vérité et la fuir quand on la trouve.
Au XVIIIème siècle, l'écrivain français VOLTAIRE se sert du mythe pour dénoncer la cruauté des gens de
l’Église qui prive l'être humain de sa liberté. Il fait d'Œdipe un héros révolté par l'injustice de son destin.
Pour le peintre INGRES, Œdipe est un héros de vingt ans plein de force et c'est sa confiance en lui qui lui
permet d'affronter le Sphynx et d'en triompher. Il ne connaît ni la peur ni le doute et ne prend pas garde aux
avertissements du destin.
Pour le dramaturge André GIDE, en 1931, Œdipe est un héros qui n'a pas peur d'affronter son destin et qui
avance sur ses deux pieds comme dans l'énigme du Sphynx.
Dans La Machine Infernale de Jean COCTEAU, en 1934, l'auteur donne une vision pessimiste de la destinée
humaine. Œdipe est victime de la machine infernale des dieux, il n'est pas libre, il avance sans savoir où il va,
en aveugle, ce qui est l'image même du destin.
Le médecin Sigmund FREUD qui est un des fondateurs de la psychanalyse s'est servi de ce mythe pour
expliquer l'origine des névroses de certains adultes qui le consultaient. Ces malades souffraient de troubles non
pas physiques mais psychiques qui venaient d'un conflit non résolu dans leur enfance. Tous les enfants
dépendent de leur mère qui s'occupent d'eux et qu'ils voudraient garder pour eux seuls. Le père est un obstacle
entre le petit garçon et sa mère, il voudrait tuer son père pour avoir sa mère pour lui tout seul. C'est ce que le
docteur Freud appelle le complexe d'Œdipe. Les filles connaissent la même rivalité avec leur mère. Ce désir
d'éliminer le parent rival est interdit par la loi et l'enfant en prend conscience en grandissant. Si le conflit n'est
pas résolu, l'enfant devenu adulte peut souffrir de troubles de la personnalité.
Le personnage d'Antigone est devenu également un mythe en incarnant la fidélité à des valeurs, la résistance
face au tyran. Antigone c'est la France libre et résistante face au vieux Créon qui incarne le maréchal Pétain
soumis aux lois de l'envahisseur nazi.