MERCREDI 25 FÉVRIER – 20H John Zorn et Tzadik présentent la

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MERCREDI 25 FÉVRIER – 20H John Zorn et Tzadik présentent la
MERCREDI 25 FÉVRIER – 20H
John Zorn et Tzadik présentent la musique de Serge Gainsbourg
Cyro Baptista & Banquet of the Spirits
Airport
Melody Nelson
Là-bas, c’est naturel
Cyro Baptista, percussions, chant, direction
Brian Marsella, claviers
Shanir Blumenkranz, basse
Tim Keiper, percussions
Elysian Fields
Les Amours perdues
Bonnie and Clyde
Mister Iceberg
Jennifer Charles, chant
Oren Bloedow, basse
Chris Vatalaro, claviers
Kenneth Salters, percussions
Marc Ribot & Ceramic Dog / Eszter Balint
Un Poison violent
Black Trombone
Hier ou demain
Marc Ribot, guitare
Shahzad Ismaily, guitare, percussions, électronique
Ches Smith, batterie
Eszter Balint, chant
Sean Lennon / Charlotte Muhl Kemp / Yuka Honda
Comic Strip
Fuir le bonheur de peur qu’il ne se sauve
L’Homme à la tête de chou
Sean Lennon, guitare, chant
Charlotte Muhl Kemp, chant
Yuka Honda, claviers
Marc Ribot, guitare
Shahzad Ismaily, guitare, percussions, électronique
Ches Smith, batterie
Tous avec John Zorn
Contact
Fin du concert (sans entracte) vers 21h40.
John Zorn et Tzadik présentent la musique de Serge Gainsbourg
Parmi tous les hommages collectifs rendus à Serge Gainsbourg, il en est un qui
a une place à part, tant il surprend de prime abord, tant il suspend l’écoute avec
le temps. Quand en 1997 John Zorn convoque des musiciens de tous horizons
à chacun donner sa version de l’illustre fumeur, il invoque la figure du Great Jewish
Composer, dont il s’explique dans un court texte en notes de pochette. Pour
le saxophoniste, aucun doute n’est possible : l’esthète Gainsbourg a toute sa place
dans la très select série discographique initiée sur le label Tzadik, aux côtés de Burt
Bacharach, Marc Bolan et Jacob do Bandolim. Plus que ces trois-là, tout aussi
fantastiques qu’ils soient, John Zorn peut entrevoir dans la personnalité – sublimement
ambiguë, radicalement controversée, follement créative – de Gainsbourg un double
de lui-même. C’est-à-dire un tout autre, tout aussi rétif aux injonctions d’une culture
de la photocopie et de la reproduction à l’infini.
Entre ces deux zappeurs intempestifs, cela sonne comme une évidence. Entre
le post-moderne messianique et le rétro-futuriste agnostique, il y a un même sens
de la provocation, non pas simplement pour la beauté du geste, mais des emportements
susceptibles de bousculer l’ordre des choses, ces certitudes qui confinent la pensée
sur les terrains livides des petits boutiquiers. Au-delà des a priori, des catégories
contraires où ils sont installés (chanson français et musiques improvisées), les points
d’intersection ne manquent pas entre ces deux trajectoires des plus sinueuses.
À commencer par la porosité de leurs univers respectifs aux idées venues d’ailleurs,
cette curiosité de l’autre, comme une promesse d’inédits. Mais aussi l’urbanité
qui suinte tout autant chez le Parisien que chez le New-Yorkais, tous deux collés
à la jungle de l’asphalte de ces villes-monde, tous deux habités par ces capitales
transartistiques où ils sont nés et ont toujours vécu. Paris et New York apparaissent
tels des miroirs réfléchissants qui résonnent en creux dans leurs natures à l’œuvre.
De même, John Zorn aura fait le pari de l’éclectisme cultivé pour s’épargner les clichés
de la musique de genre, tandis que Gainsbourg, poète à l’écoute du monde, aura
toujours été branché par un son qui annonce d’autres lendemains. Et, malgré
une carrière écrite selon des sources d’inspiration et des choix multiples, malgré
la succession de partenaires, tous au diapason de leurs intentions, malgré tout,
ces deux adeptes du collage poétique et du montage cinématique affichent
une signature sonore, l’un comme l’autre affirment une identité hors-norme,
reconnaissable du premier coup d’oreille. Faire trébucher les œillères, se retrouver
tel qu’en soi-même, toujours plus loin, toujours plus près. « Je connais mes limites.
C’est pourquoi je vais au-delà. » Cette sentence de Gainsbourg aurait très bien pu être
l’œuvre de John Zorn.
Une décennie après la sortie du disque, certains se retrouvent ce soir à Paris, dans
le cadre de manifestations en hommage à l’auteur Gainsbourg. Outre Elysian Fields
et Marc Ribot, accompagné de son superbe Ceramic Dog et de la voix d’Ezter Balint,
le guitariste et chanteur Sean Lennon et le percussionniste touche-à-tout Cyro Baptista
honorent encore une fois l’écriture majuscule de Gainsbourg, comme ils l’avaient réalisé
dans la cire. Comme un readers’ digest, cette sélection est faite de relectures inédites,
de virgules déplacées en accents aigus, de quoi composer entre les lignes un inventaire
digne de l’auteur de « La Chanson de Prévert ».
Jacques Denis
Ce concert est en partenariat avec :
Mécène de l’art de la voix
Les partenaires média de la Salle Pleyel
Imprimeur France Repro | Licences 7503078, 7503079, 7503080
Il y a de la pop chez John Zorn, cette histoire de mélodies atemporelles. Il y a du jazz
chez Gainsbourg, dans le ravin bien entendu, juste au bord du gouffre. Il se découvre
mille autres points de concordance chez ces deux irréductibles aux définitions sommaires.
Tout est son contraire, semble vous dire l’un comme l’autre, jouant avec malice du
contre-pied et de l’effet de surprise, maniant avec une rare pertinence l’humour féroce,
voire le cynisme lucide face aux bassesses d’un monde qui court à sa chute. Néanmoins,
s’il ne fallait retenir qu’un point commun, une ligne de force, ce serait sans doute
l’incertain classicisme, cette urgence d’ouvrir des perspectives en ayant conscience
de la tradition, de tout son poids, dont il faut savoir se délester sans jamais l’oublier.
John Zorn ne sera jamais un gardien de la tradition fixée dans les tables de la loi,
le légataire d’un monde fini. Voilà aussi pourquoi, au-delà de la question de l’identité
qui le taraude, il choisit d’honorer le beau Serge, alors même que l’iconoclaste Français
devenait l’objet d’un culte à New York. Sur son label, le catalyseur de la scène downtown
invitait parmi les meilleurs francs-tireurs de l’underground new-yorkais à reprendre
une partie du songbook, toutes époques confondues. À l’image du casting, les visions
qui s’ensuivirent démontraient à qui en doutait la largeur d’esprit de Gainsbourg.
« Jusqu’à la décomposition, je composerai. » L’homme aux grandes oreilles ne croyait
pas si bien prédire par ce haïku « zornien » par excellence.