Bulletin d`information : Ziralo et Buzi (Sud Kivu)

Bulletin d’information : Ziralo et Buzi (Sud Kivu)
EVALUATION DES BESOINS
Groupements de Ziralo et Buzi (Kalehe) - Décembre 2013
Contexte
Les groupements de Buzi et de Ziralo sont situés dans la
Zone de Santé de Minova, territoire de Kalehe dans la
province du Sud Kivu. Les événements de novembre 2012,
avec la prise de Goma et de Sake par le M23 puis en mars
2013 avec la reprise des hostilités, ont eu un impact
humanitaire direct sur le territoire de Kalehe, frontalier à la
province du Nord Kivu.
Les populations du Nord Kivu s’étaient alors déplacées vers
la Zone de Santé de Minova, des mouvements retours de ces
populations avaient ensuite été observés dès décembre
2012 puis au mois de septembre 2013. La zone est
également caractérisée par la présence de Raïa Mutomboki
et des Maï Maï Nyatura qui s’affrontent régulièrement,
entrainant des mouvements de populations chroniques.
ACTED a effectué une évaluation multisectorielle du 30
octobre au 5 novembre 2013 dans les groupements de Buzi
et de Ziralo en raison de la fréquence des mouvements de
population dans la zone et du peu d’acteurs humanitaires
sur place.
provenance du territoire de Masisi à se déplacer le 15
octobre 2013 vers les groupements de Buzi et de Ziralo. Les
personnes déplacées internes (PDI) proviennent notamment
de Ufamandu, Ngungu et Biriko et 12 800 PDI ont trouvé
refuge à Lumbishi, 1600 PDI à Matutira et Myanda où
environ 1200 d’entre eux se sont installés dans trois sites
spontanés selon OCHA.
Par ailleurs, le groupement de Ziralo est considéré comme
une « zone mixte ». En effet, en sus d’être une zone
d’accueil pour les populations déplacées en provenance du
groupement d’Ufamando, le groupement de Ziralo,
accueille également 8802 personnes retournées (soit 1467
ménages retournés) depuis janvier 2013, selon OCHA. Les
mouvements de retour dans le groupement de Ziralo ont
débuté en janvier 2013 suite au retrait des FDLR qui étaient
auparavant présents dans cette zone.
Profil socio-économique
La vie socio-économique des villages enquêtés s’articule
principalement autour des activités agro-pastorales, suivi
par le petit commerce puis, dans une moindre mesure, de
l’extraction artisanale de la tourmaline et de l’or.
Situation sécuritaire et logistique
La sécurité dans la zone est relativement calme à l’heure
actuelle, à l’exception de sporadiques affrontements entre
RM et MM Nyatura majoritairement dû à des conflits
fonciers entre communautés Tembo et Hutus. En effet, en
raison d’un accès aux terres arables de plus en plus
compétitif, la zone a vu les conflits fonciers se multiplier au
cours des dernières années.
En ce qui concerne l’aspect logistique, la route entre Bukavu
et Minova a été réhabilitée par la MONUSCO et est
praticable toute l’année. Certains ponts sont détériorés mais
n’empêchent pas la circulation. En revanche, le tronçon
Minova – Ziralo est problématique. Il n’est pas possible
d’atteindre Ziralo, ni en véhicule tout-terrain ni en moto,
quelque soit la saison. En effet, la première partie du
tronçon Minova – Numbi – Lumbishi, nécessite sept à huit
heures de moto. A partir de Lumbishi, il faut six heures de
marche pour effectuer la seconde moitié et atteindre
Tushunguti, le chef-lieu du groupement de Ziralo.
Mouvement de population depuis 2012
Selon les informations compilées par le Bureau Central de la
Zone de Santé de Minova, les groupements de Buzi et de
Ziralo accueillent actuellement 54 158 personnes déplacées
(soit 9026 ménages déplacés) – soit 19% de la population
totale de la Zone de Santé de Minova.
Depuis le 5 octobre 2013, des accrochages entre les RM et
les Maï Maï Nyatura ont pris place dans le groupement
d’Ufamandu, Territoire du Masisi (Nord Kivu). Ces
évènements ont contraint plus de 15 000 personnes en
Décembre 2013
Secteur
Habitat
Accessibilité
Elevage
Sources de
revenus
Production
agricole
Assistance
humanitaire
Potentialités/Défis dans les
Moyens Plateaux
En terre et couverte de paille
Uniquement à pied
Poule, dinde
Agriculture et petit commerce
principalement
Arachide, manioc, huile de
palme, un peu de maïs
Relativement limitée compte
tenu des difficultés d’accès
Bien que vivant en majorité de l’agriculture, la population
interrogée en focus groupes a déclaré que le secteur connait
d’énormes problèmes conjoncturels. En effet, selon les
agriculteurs, la production agricole a fortement diminué de
part les mouvements de population chroniques et la
présence d’hommes en armes. .
De manière générale, 70-80% de la population hôte
semblent tirer principalement ses revenus de la vente des
récoltes tandis que moins de 20% disposent de quelques
têtes de bétail et vendent donc des produits d’élevage
(viande et lait de vache). La population déplacée est quant à
elle davantage orientée vers les activités journalières telles
que les transports de marchandises (pour les petits
commerçants) ou les travaux agricoles dans les champs d’un
tiers.
Les principales sources de revenu de la majorité de la
population sont précaires car elles sont liées à des activités
www.acted.org
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périodiques ou dépendantes non seulement de l’accès à la
terre mais des échéances du calendrier agricole : vente de
récoltes, transport de marchandises pour approvisionner les
marchés ou travaux champêtres.
Les discussions menées en focus groupe ont également
permis d’obtenir un aperçu du choc économique qu’ont subi
les
populations
déplacées/retournées
liées
à
l’affaiblissement des moyens d’existence.
La perte des récoltes en provenance de ce groupement pour
la saison A pourrait avoir des répercussions désastreuses lors
de la phase de récolte (janvier – mars 2014) par rapport à la
disponibilité des denrées alimentaires dans les marchés des
Hauts Plateaux et sur leur prix de vente.
Au moment de l’enquête, 20% des récoltes (cultures
vivrières) sont destinées à la vente et le restant est divisé
entre l’autoconsommation (75%) et le stockage additionnel
de semences (5%). Compte tenu des perspectives
susmentionnées, le risque de voir la part dédiée à
l’autoconsommation augmentée est élevé.
Utilisation des récoltes
Cultures vivrières
50%
75%
Stockage des
semences
10%
Cultures agricoles et accès aux moyens de productions
35%
Dans la zone enquêtée, les cultures principales sont
essentiellement constituées du manioc, de l’arachide, de
l’huile de palme et dans une moindre mesure du haricot.
Le principal obstacle aux cultures vivrières et maraichères
dans les zones est l’accès aux semences de bonne qualité et
aux outils aratoires (houes, haches, tridents, etc.). En effet,
les semences disponibles sur place sont dégénérées pour la
majeure partie et les semences améliorées sont impossible
à trouver dans les marchés locaux de la zone.
Par ailleurs, les populations déplacées, dont la première
source de revenus reste les travaux agricoles, doivent payer
un loyer pour cultiver la parcelle d’autrui. Ce loyer varie de
30 à 100 USD par saison culturale, selon l’éloignement de la
parcelle par rapport au village et ne leur permet pas
d’obtenir un rendement suffisant suite à la vente de
récoltes agricoles
Enfin, il est à noter que la distance séparant les habitations
des champs varie entre 0,5 et 3 km, ce qui peut poser des
problèmes en matière de protection pour les ménages les
plus vulnérables mais aussi, comme vu précédemment, pour
ceux qui sont les moins nantis. Dans certaines localités, la
contrainte sécuritaire décourage même certains ménages à
cultiver les parcelles perçues comme excessivement
éloignées du village.
5%
Décembre
2012
Autoconsommation
5%
20%
Vente au marché
Entraide
communautaire
Septembre
2013
De plus, une faible récolte ne contribuera pas au
renforcement du niveau de résilience communautaire car le
stock de semences pour les saisons culturales à venir
n’augmentera pas.
Sécurité alimentaire
La situation alimentaire des populations de la zone est
actuellement inquiétante tout comme les stratégies de
survie qu’elles ont adoptées. Selon les évaluations du
RRMP1, en moyenne, 41% de la population enquêtée dans
la localité de Shanje a un score de consommation
alimentaire « pauvre » (inférieur à 28) et 34% de la
population enquêtée a un score de consommation
alimentaire « limite » (entre 28,5 et 42).
Score de Consommation Alimentaire
Evaluation RRMP / Shanje - Mai 2013
25%
19%
26%
34%
44%
32%
Perspectives agricoles
41%
38%
42%
Les perspectives pour l’année 2014 sont plutôt négatives
dans les groupements de Buzi et de Ziralo. En effet, les
déplacés (récemment arrivés en provenance du groupement
d’Ufamando) ne produiront rien pour la saison A car leur
déplacement a coïncidé avec la période de semis pour les
cultures vivrières (septembre – octobre 2013).
Total
Population
déplacée
Population
autochtone
SCA Acceptable (>42,5)
SCA Pauvre (<28)
1
Décembre 2013
SCA Limite (28,5<42)
Rapports du RRMP, Shanje, Mai 2013
www.acted.org
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Pour expliquer cette situation d’insécurité alimentaire,
plusieurs facteurs sont mis en avant dans le rapport IPC (9e
cycle) tels que :
 L’abandon des cultures suite à l’insécurité
et aux mouvements de population
 La difficulté d’accès aux terres cultivables
due à la prolifération et à l’activisme de
groupes armés ;
 L’inaccessibilité aux zones de production
suite à l’impraticabilité des routes de
desserte agricole ;
 Le faible revenu des ménages ;
 La baisse de la production agricole due au
manque de semences améliorées et
d’outils ;
 L’abandon des activités agricoles au profit
de l’exploitation artisanale de minerais.
Comme vu précédemment, le revenu mensuel des ménages
dans cette zone a été plus ou moins divisé par trois sur une
période allant de 9 à 24 mois pour les retournés et les
déplacés, et dans une moindre mesure pour les ménages
hôtes. Cette baisse significative des revenus a un impact
néfaste sur le régime alimentaire des ménages car il affecte
leur pouvoir d’achat.
Coût total par
personne par
jour
Coût total par
personne par
jour
Septembre 2013
Novembre 2013
Marché de Numbi
786 FC
925 FC
Marché de
Lumbishi
786 FC
925 FC
Marché de
Tushunguti
885 FC
1 008 FC
Prix du panier
alimentaire
journalier
De plus, les commerçants grossistes ou semi grossistes ne
sont pas présents dans la zone.
Répartition des types de commerçants dans les
trois marchés évalués
100%
90%
27%
32%
33%
80%
70%
8%
11%
11%
9%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
17%
16%
20%
13%
39%
28%
27%
8%
Numbi
Lumbishi
Tushunguti
Vendeurs des produits non alimentaires
Vendeurs de viandes et poissons
Vendeurs des légumes
Vendeurs de céréales et de légumineuses
Vendeurs de bétail
L’absence de ces derniers est directement liée au coût de
transport élevé des marchandises, puisque les
approvisionnements se font à pieds via des porteurs depuis
les centres économiques éloignés tels que Minova, Goma et
Kalungu.
Ces différents facteurs ont eu une influence sur les prix des
denrées alimentaires importées sur les trois marchés qui ont
sensiblement augmenté en l’espace de deux mois :
l’ensemble des denrées enregistrent en moyenne une
inflation entre 34% (Numbi) et 44% (Tushunguti).
Marché locaux
Les marchés de Numbi et Lumbishi sont les principaux
marchés situés dans les Hauts Plateaux de Kalehe dans le
groupement de Buzi. Celui de Tushunguti est un marché
secondaire situé dans le groupement de Ziralo.
Ces marchés subissent également un déficit en
approvisionnement suite à la situation sécuritaire qui
prévaut actuellement à Ufamando d’où provient une
importante quantité de vivres (haricot, pomme de terre,
sorgho). Pour rappel, le marché de Ngungu à Ufamando
(fermé actuellement pour des raisons sécuritaires) dans le
territoire de Masisi joue un rôle non négligeable en termes
d’échanges commerciaux dans cette zone. C’est en effet, un
marché principal de la zone qui approvisionne
habituellement les marchés des Hauts et Moyens Plateaux
de Kalehe.
Pour plus de détails :
Geoffrey BAEUMLIN
Responsable de Développement de Projets
Bukavu, ACTED en RDC - [email protected]
Décembre 2013
Avec le soutien financier
et technique de OFDA.
Dominique GERARD
Coordinatrice Provinciale Sud Kivu
Bukavu, ACTED en RDC - [email protected]
www.acted.org