Suicide et travail La faute inexcusable de l`employeur sera de plus

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Suicide et travail La faute inexcusable de l`employeur sera de plus
Suicide et travail : « La faute inexcusable de l'employeur sera de plus en plus reconnue»
Le 05 mai 2009 par Rédaction L'Usine Nouvelle
Le 15 avril, le Tribunal des affaires de la Sécurité sociale de Tours a conclu que le suicide en 2004 d'un technicien de
la centrale de Chinon était dû au travail. La famille du salarié a décidé d'attaquer EDF pour faute inexcusable de
l'employeur.
Ce jugement du Tribunal des affaires de la Sécurité sociale de Tours, permet à la famille de Dominique Peutevynck
de poursuivre EDF pour "faute inexcusable de l'employeur". Comment en arrive-t-on à une telle procédure ?
Aline Jacquet-Duval : "Dans le cadre des maladies professionnelles, il n'y a pas de recours direct du salarié contre
l'employeur. C'est pourquoi la famille du salarié tente d'abord de faire reconnaître la dépression qui a conduit au
suicide comme une maladie professionnelle auprès de la Caisse primaire d'assurance maladie. Si la caisse la
reconnaît, la famille sera mieux indemnisée. La CPAM imputera les frais directement sur le compte accident du travail
de l'employeur. C'est aussi une des raisons pour lesquelles les entreprises tentent de limiter le nombre et la
fréquence d'accidents du travail et des maladies professionnelles.
Une fois cette dépression reconnue comme maladie professionnelle, la famille peut attaquer l'entreprise pour «
faute inexcusable de l'employeur ». Si cette faute est reconnue, cela augmente l'indemnisation des préjudices de la
victime ou de ses ayants-droits.
Qu'est-ce que cette « faute inexcusable de l'employeur » ?
ll y a faute inexcusable commise par l'employeur quand celui-ci devait avoir conscience du danger auquel il exposait
son salarié. C'est typique des cas d'amiante, où la faute inexcusable de l'employeur est désormais toujours reconnue,
même s'il a fallu se battre pendant quinze ans ! Si on corrèle cela à l'obligation de sécurité et de résultats de
l'entreprise, la faute inexcusable est toujours reconnue.
Mais dans le cadre des maladies psychiques comme les dépressions, les entreprises se retranchent toujours
derrière l'argument de « la fragilité psychique » du salarié.
Oui, elles n'ont pas complètement tort mais ça ne dédouane pas l'entreprise pour autant. Il n'est pas nécessaire que
des conditions de travail difficiles soient la cause unique des malheurs du salarié pour reconnaître la « faute
inexcusable de l'employeur ». Il suffit que dans l'enchaînement des circonstances qui ont mené à la dépression,
certaines d'entre elles soient en lien avec le travail. Mais elles peuvent si être concomitantes d'événements privés
comme un divorce ou un deuil. C'est exactement la même chose dans les situations d'amiante : le salarié peut-être au
contact de ces poussières au sein de son entreprise mais aussi quand il prend le métro : l'employeur sera tout de
même potentiellement responsable.
Si une entreprise est alertée sur une situation difficile d'un salarié par un avis médical, comme ce fut le cas dans
cette affaire, est-elle obligée de le prendre en compte ?
Tout à fait, l'entreprise n'a pas intérêt à laisser sans réponse ce problème et doit diligenter une enquête. Car il suffit
d'une alerte du médecin de travail ou d'un délégué du personnel, du Comité d'hygiène et de sécurité dont c'est le
rôle : La faute inexcusable de l'employeur sera le plus souvent retenue si la dépression est imputée aux conditions de
travail ou si le suicide est reconnu comme accident du travail. Et que l'on peut démontrer que l'entreprise était au
courant, et s'est abstenue de toute mesure ou même de faire une enquête.
Ce n'est pas une situation différente lorsque le salarié est sans casque sur un chantier...

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