Outils de vecteur de communication interne : fidélisation ou

Transcription

Outils de vecteur de communication interne : fidélisation ou
MATUNDU Angela
MUTEBA Die
BENNANI Salah-eddine
LOIZEAU François
SURMIAK Sébastien
Ecole Supérieure de Gestion - Paris
Cours de Communication d’entreprise
M. J. M. LEHU
Les outils de vecteur de fidélisation interne :
Fidélisation ou Manipulation ?
MASTER DE MARKETING ET DE PUBLICITÉ
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ANNÉE 2000-2001
SOMMAIRE
INTRODUCTION
I- FIDELISATION
1) évolution de la fidélisation
2) les enjeux de la fidélisation
3) le mécanisme de la fidélisation
4) l’objectif de la communication interne
II- MANIPULATION, L'AUTRE FACETTE DE LA FIDELISATION
1) les enjeux
2) les techniques utilisées
3) « rassembler pour mieux régner »
4) exemples :
a) à travers la presse
b) à travers le film d’entreprise
III- INTERNET ET LA COMMUNICATION
DANS L’ENTREPRISE MODERNE
1) Principales fonctionnalités d’Internet dans l’entreprise
2) Internet vecteur de fidélisation
3) Internet vecteur de manipulation
CONCLUSION
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Introduction
L’ouverture des frontières, ainsi que la mondialisation, ont bouleversé les stratégies, les
structures et les relations dans divers domaines. La communication (et son actuelle
évolution) illustre parfaitement ces changements et les moyens mis en œuvre pour s’y
adapter.
Plus précisément si l’on se focalise sur les relations entre l’entreprise (les dirigeants) et son
personnel, il est aisé de constater à quel point la communication interne a pris
progressivement une place prépondérante dans la vie de l’entreprise.
On définira la communication interne comme étant le moyen d’attirer la bonne volonté
des collaborateurs (personnel, actionnaires, fournisseurs…); en sachant chercher, trouver,
et conserver le contact permanent avec eux, à commenter le fond du problème lorsqu’il y
en a un.
Pour promouvoir une meilleure communication, une sympathie agissante dans les
relations humaines en vue de soutenir ses activités et d’en favoriser le développement,
l’entreprise moderne utilise de nombreux outils, que nous évoquerons tout au long de
notre réflexion
Les entreprises ont intégré le fait qu’une bonne communication interne entraîne
automatiquement une diffusion large et coordonnée de leur image à l’externe.
L’image d’une entreprise au delà des considérations d’ordre financières, est
l’extériorisation des sentiments ressentis par le personnel à l’interne. La communication
institutionnelle a donc dépassé le simple objectif de communiquer pour s’inscrire dans
une logique de fidélisation.
Cette recherche de fidélisation, moyen de « doper » la rentabilité, et de véhiculer les
valeurs profondes ainsi qu’une image caractéristique de l’entreprise, revêt de nombreuses
facettes. En effet les outils de vecteur de fidélisation interne n’ont cessé de croître en
nombre et en efficacité.
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Cependant on peut se demander dans quelle mesure cet effort de fidélisation
émanant des décisionnaires ne dissimule –il pas une volonté de manipulation ? Et
s’il existe réellement pour eux une frontière entre fidélisation et manipulation.
Notre démarche est d’apporter une vision critique sur l’évolution et l’impact recherché par
l’utilisation de ces outils. Au travers d’une double approche, fidélisation/manipulation. Nous
nous focaliserons sur “la révolution Méta Médium” consécutive aux opportunités offertes par
l’émergence et l’intégration de l’outil Internet au sein des entreprises.
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I- la fidélisation
La fidélisation interne c’est développer un sentiment d’appartenance dans l’esprit
de chaque collaborateur envers l’entreprise.
Cela passe par la motivation et le développement d’un esprit d’implication qui a
pour effet de développer une meilleur productivité.
Ainsi la fidélisation permet à l’entreprise et au personnel de mieux s’adapter à toutes les
situations dans le temps et créer un esprit de confiance mutuelle.
§1- L’évolution de la fidélisation
Compétence en fuite, course à la productivité, réduction des effectifs, regroupements et
fusion en tous genre, plus que jamais les chefs d’entreprises doivent fidéliser leurs troupes.
Fin de la crise, début de la croissance, les entreprises remplissent allègrement les carnets
de commandes et retrouvent le « sourire ». Côté emploi, les patrons songent à reconstituer
leurs effectifs, à les étoffer ou encore à les rendre plus efficaces afin de répondre aux
nouveaux enjeux.
Dans un contexte marqué par une concurrence exacerbée, une course effrénée à la
productivité et des mutations profondes des mentalités, la fidélisation revêt une
importance croissante et considérable.
Ainsi l’heure est donc aux soins intensifs car les licenciements, l’évolution des politiques
d’entreprises, les changements de structures, les rachats, les compressions ou les fusions
ont laissé beaucoup de séquelles et continuent de perturber des collaborateurs dans des
équipes explosées. De plus pour les structures reconstituées, il leur faut assimiler les
méthodes d’une entreprise remodelée.
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Alors aujourd’hui dans les entreprises il ne s’agit plus de problèmes structurels mais bien
culturels. Au delà du salaire, les collaborateurs réclament davantage de reconnaissance et
d’estime mais aussi un véritable attachement réciproque, bref un sentiment réel
d’appartenance à leur entreprise.
§2- Les enjeux de la fidélisation
L’entreprise a compris que pour conserver sa clientèle et donc sa position concurrentielle
il lui faut entretenir des relations solides et durables avec sa force de travail, désormais
principale source de création de valeur.
Cette perception interne a de l’impact sur le travail et l’implication des collaborateurs au
quotidien. Elle a également des incidences sur les perceptions des publics externe, les
collaborateurs étant les premiers vecteurs de communication externe.
Car le personnel est devenu le premier interlocuteur et l’interface direct entre l’entreprise
et le client ; d’ailleurs c’est lui qui véhicule la bonne image de l’entreprise et se voit
défendre et vanter les mérites de l’entreprise à l’externe mais c’est aussi lui qui part à la
conquête de nouveaux clients.
§3- Le mécanisme de la fidélisation
Pour fidéliser, l’entreprise développe des stimuli qui se manifestent dans les différentes
politiques de motivation, de recrutement, de formation et de récompenses parmi d’autres.
Il est important de les définir pour voir en quoi ils permettent la fidélisation.
La motivation, c’est considérer l’homme au-delà de sa seule efficacité. Cette stratégie
conduit à orienter le personnel sur les objectifs de développement de l’entreprise donc à
long terme de le fidéliser.
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Autre mécanisme, le recrutement : l’entreprise met en avant des annonces qui sont
beaucoup plus créatives et stimulantes pour constituer un champs préparatoire au futur
salarié avant son incorporation.
Egalement, les différentes procédures de sélection permettent de développer un sentiment
de fierté pour le nouveau recrut et de rassurer le personnel déjà en place ( l’accès à
l’entreprise reste élitiste).
En ce qui concerne la formation, l’entreprise donne un outil au collaborateur qui est un
précieux savoir faire qui va lui permettre d’optimiser et rentabiliser son travail à court et à
long terme.
Récompenser, c’est récompenser la performance de l’individu et lui donner un avantage
matériel ou immatériel en conséquence.
Ainsi ces quatre stimuli ont un objectif final identique qui est celui de fidéliser le
collaborateur
Toutes ces politiques permettent de créer des barrières à la sortie : c’est à dire que
l’entreprise fait en sorte que le personnel dispose d’un maximum d’avantages qu’il ne peut
retrouver ailleurs, favorisant ainsi l’encrage d’une fidélisation interne.
Tous ces vecteurs font partie d’une communication ponctuelle basée plus sur des faits
dans l’optique de séduire pour fidéliser. Cependant une autre forme de communication
aussi « séductrice » mais plus constante et plus accessible est à la portée des entreprises :
on parle ici de communication interne.
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§4- Objectif de la communication interne
Il est vu et revu que la communication interne est l’un des outils majeurs pour fidéliser
son personnel.
Toute structure a besoin d’une énergie commune pour fidéliser l’ensemble des
collaborateurs. Pour cela, il faut développer chez chacun une volonté constante de faire
toujours plus. Cette motivation suppose que l’entreprise a su trouver l’énergie interne
nécessaire en mobilisant les acteurs pour agir efficacement.
Nous prendrons ici l’exemple de deux outils importants pour la fidélisation du personnel :
le journal d’entreprise et le film d’entreprise.
Le journal d’entreprise est le produit institutionnel de chaque entreprise, auquel on
porte habituellement une attention particulière, ainsi on remarque qu’il correspond
exactement à l’exigence du personnel qui est celle de l’implication.
Le journal d’entreprise représente un signe « électif d’observation ». Il est l’écho de
l’identité de ses orientations stratégiques. Il est destiné directement au personnel et
l’informe sur les valeurs de l’entreprise, le marché et l’environnement dans lequel elle se
trouve.
Le rôle du journal interne est d’établir un lien commun entre les salariés ceci en leur
permettant de participer activement au développement de la culture de leurs structure.
C’est susciter son désir de participer activement au bon développement de la diffusion de
la communication interne auprès des autres collaborateurs.
Le film d’entreprise a pour objectif de fidéliser par l’information et la formation.
L’information : Il est peut être un reportage, une émission, des interviews présentant les
différentes facette de l’entreprise et de son personnel par exemple. Dans ce cas , la
structure met en valeur les compétences et qualités de ces salariés et donc suscite en lui
un sentiment de fierté qu’aucune autre structure ne peut lui apporter.
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Autre manière la formation : on peut présenter au nouvel arrivant un film d’entreprise,
l’objectif ici sera de le féliciter d’avoir choisit de contribuer à la réussite de sa nouvelle
entreprise et de le séduire par les qualités mis en avant dans le film.
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II- La manipulation, l’autre facette de la fidélisation
Comme nous l’avons vu précédemment, le but de la communication interne et de la
fidélisation est d’établir des relations, de multiplier des ponts (par l’intermédiaire de
nombreux outils et vecteurs de communication à savoir : par le biais de publications
diverses, d’entretiens, et de journaux d’entreprise, etc...) entre l’individu et la collectivité
afin de réduire l’isolement des collaborateurs, d’améliorer la sympathie et la coordination
au sein des services et d’intensifier la productivité.
Cependant, chaque fois que la communication a pénétré un nouveau territoire, elle a
suscité les mêmes craintes de manipulation, comment ne pas penser alors à la publicité ?
Qu’en est-il de la communication de l’entreprise et de la fidélisation qui en découle ?
Comment ne pas penser que cette communication qui a pour vocation le bien être et le
mieux vivre de l’employé, n’est pas un instrument de management, outil d’une éventuelle
manipulation managériale ? Cette fidélisation n’est-elle pas à double tranchant ?
Il convient de citer Paul Watzlawick qui disait en 1980 dans son livre Langage du
changement1 que «(...) de nos jours, on frappe de condamnation, comme malhonnête,
toute forme d’influence et en particulier tout ce que l’on peut ranger sous le titre de
manipulation. On ne se contente pas d’attaquer les abus que l’on peut en faire, on s’en
prend à la manipulation en tant que telle».
Ici, notre démarche ne consistera pas à juger la fidélisation, mais au contraire à constater
que parfois la frontière entre fidélisation et manipulation peut être facilement dépassée.
Dans un premier temps, nous tenterons de mettre en avant la manipulation en interne de
façon globale, ensuite, nous essaierons d’examiner la forme qu’elle peut prendre par le
biais d’exemples précis.et d’outils dont nous avons vu les bienfaits dans la première partie
(l’organe de presse, et le film).
1
Paul WATZLAWICK, Le langage du changement, éd. Seuil
-10-
Aujourd’hui, nous pouvons constater que la communication interne signifie que
l’entreprise se conçoit comme un système de communication. Pour cela, l’objectif est de
construire un environnement propice à l’échange et à la collaboration pour obtenir plus
de souplesse et s’adapter ainsi aux marchés.
La communication a donc besoin de considérer l’espace comme homogène pour se
propager.
Le développement de la communication d’entreprise est le signe que celle-ci n’est plus un
monde de conflits, (même si elle n’est pas encore tout à fait consensuelle).
Mais l’absence de conflit, entend bien évidemment la présence d’un message qui
emploiera l’influence de techniques aussi diverses que variées
Les craintes de manipulation se sont atténuées (après la crise du début des années 80),
lorsque l’entreprise a commencé à communiquer avec cette rare complicité.
La communication d’entreprise s’est alors révélée être un véritable échange d’informations
utiles facilitant la mémorisation et la collaboration entre individus qui usent des mêmes
jargons professionnels et partagent un thesaurus où les mots sont chargés de significations
voisines. Le message prend ainsi plus facilement sens pour le destinataire.
C’est alors que les gens ont remis en cause le schéma unidirectionnel Emetteur-MessageRécepteur et pris conscience de leurs participations aux décisions et activités de la société.
Le constat que l’on peut effectuer, c’est que les entreprises cherchent à se forger une
culture homogène, où les thesaurus sont communs et les risques de dispersion du sens
réduits.
Qu’est-ce à dire ? Que les techniques de manipulations n’existent pas ? Que les enjeux
sont limités ?
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§1- Les enjeux
Peut-on manager et refuser d’influer sur les comportements des salariés ? En
revendiquant plus ouvertement son rôle d’instrument de management, la communication
ne risque t-elle pas d’être taxée de manipulation interne ? Le salarié peut-il être considéré
comme la victime d’un néopaternalisme ?
Les employeurs ne cessent de mobiliser leurs salariés, ils sont invités à produire plus et
mieux pour offrir des services ou des produits à la fois compétitifs et de qualité. Cette
mobilisation générale n’est que le résultat de l’effort toujours croissant des patrons qui
cherchent à réinventer en permanence le dialogue social. Ce dernier prend souvent la
forme d’outils très variés. Un système où tous les attributs de «pilotage» se doivent
d’éliminer les opposants, et d’interdire aux récalcitrants de se révolter, rompre avec le
Taylorisme et ses structures fragiles de vecteurs de communication.
Les actions de stimulation et de motivation, les appels à la mobilisation, les cercles de
qualité, la pratique de séminaires sur l’optimisation des performances de l’entreprise, le
journal interne ou tout simplement le film peuvent apparaître comme des instruments de
management ou comme des instruments de manipulation.
Ces actions visent bien entendu, à augmenter la productivité, le sentiment d’appartenance
mais aussi l’image de marque de l’entreprise, puisque l’employé sera la première personne
susceptible de diffuser une image positive à l’ensemble de son entourage.
Comment ne pas le croire lorsque nous pensons à la restauration rapide qui met en avant
l’employé de la semaine ou du mois, ces photographies qui acclament le Stakhanovisme
sont odieuses. Ces pratiques sont pour autant considérées comme des moyens ingénieux
de gagner de la productivité en prodiguant des gratifications personnelles.
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§2- Les techniques utilisées
Vance Packard, dans son ouvrage La persuasion clandestine2, a montré jusqu’où pouvait
aller l’aptitude des relations publiques pour conditionner les âmes. Le danger de cette
psychologie, à la recherche d’une atteinte de nos profondeurs par le conditionnement, la
séduction et la persuasion c’est de parvenir à une propagande si parfaitement détournée
que l’on finisse par ne plus se rendre compte de l’action psychologique exercée sur nousmêmes. On aboutirait ainsi à l’idée d’une «âme empaquetée», à une influence progressive
sur nos motivations qui permettrait aux relations publiques un envahissement total de
notre inconscient.
La manipulation du peuple par un tyran est une chose assez simple, la véritable difficulté
est d’agir efficacement sur les citoyens d’une «société libre».
Examinons ce que les chercheurs du subconscient cherchent à entreprendre dans le
traitement du personnel des sociétés. En s’inspirant des idées de Pavlov et de ses réflexes
conditionnés, le but visé des entreprises est le façonnage de l’esprit lui-même. Il ne s’agit
pas que de nous persuader mais d’influer sur notre état d’esprit et d’orienter notre
comportement en tant que membre actif.
L’individualisme a pendant longtemps caractérisé nos sociétés. Dorénavant, chaque
entreprise cherche à faire accepter l’idée que l’individu n’a de signification qu’en tant que
membre d’un groupe. Des chercheurs ont diagnostiqué les facteurs susceptibles de nous
faire travailler avec plus d’enthousiasme.
Comme le magazine Fortune le précisa : «un nombre de techniques et de disciplines sont
empruntées aux sciences sociales, et sont chargées de livrer un grand assaut contre l’esprit
de contradiction de l’homme». Le magazine protesta contre le fait que dans certaines
compagnies, les employés n‘avaient littéralement pas un moment de tranquilité, si l’un
d’entre eux était mal disposé envers la compagnie ou envers son entourage, les «ingénieurs
2
Vance PACKARD, La persuasion clandestine, éd. Calmann-Lévy
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sociaux» croyaient de leur devoir de l’aider à se débarrasser de sa mauvaise santé morale.
L’un d’eux aurait dit : «Les médecins-psychologues ont manipulé avec grand succès
l’individu mal adapté. Il me semble qu’il n’y a pas de raison pour que nous n’ayons pas
autant de succès en appliquant les mêmes techniques aux employés». Or, l’adaptation de
l’individu au travail d’équipe est un phénomène devenu très important aussi bien pour lui
que pour son patron.
La manipulation du personnel visait à rendre celui-ci plus heureux et à le faire travailler
plus efficacement. Très souvent, cela consistait simplement à accorder de l’attention à
chaque individu ou à reconnaître que les symboles de son rang pouvaient être d’une
énorme importance.
Une formule d’un relationniste : «Ce à quoi nous travaillons, c’est à fabriquer des esprits»,
nous amène à nous demander ce qui distingue les relations publiques de la propagande
(tout effort pour changer les opinions et les attitudes des hommes). On s’accorde à dire
que ces manipulations ont certes un caractère positif et amusant, mais elles ont aussi et
surtout des implications anti-humanistes. Elles représentent généralement plutôt une
régression qu’un progrès pour l’homme dans son dessein de devenir un être rationnel
capable de se diriger soi-même.
Les limites des relations publiques s’inscrivent ici en gras. Il ne faut pas que l’information
objective que les relations publiques défendaient au départ, risque de s’infléchir vers une
persuasion subversive, et que la sympathie dont on chargeait la communication finisse par
camoufler le raisonnement sagace que l’on pouvait articuler honnêtement.
On peut de nouveau citer Vance Packard lorsqu'il dit : « le monde serait ennuyeux si nous
devions tous être rationnels...il est parfois plus agréable ou plus facile d’être illogique.
Mais je préfère l’être de par ma libre volonté plutôt que de me trouver manipulé ». On
retrouve ici le critère central de liberté qui risque de se trouver dépassé et comme débordé
par la persuasion clandestine.
Et l'auteur de souligner : « le crime le plus grave que commettent les manipulateurs du
subconscient est de violer le secret de nos esprits. Ce droit au secret et à la liberté d’être
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rationnel et irrationnel, c’est cela qu’à mon avis nous devons nous efforcer de protéger ».
En effet, il importe de ne pas se laisser forcer la main par les relations publiques ni moins
encore de subir un véritable « viol des consciences », ici réside le plus grand danger des
relations publiques.
Kapferer dans son livre Les chemins de la persuasion3, reprend cette idée de libre arbitre.
L’auteur s’intéresse à la persuasion (modifier la conduite des gens sans avoir l’air de les
forcer), cette notion qui concerne les attitudes et les comportements de chacun, c’est à
dire touchant directement au champs privé de l’individu, le domaine de l’expression de sa
propre personnalité, du domaine de sa différenciation, en un mot sa liberté. On peut dire
que l’entreprise détermine d’une certaine façon la finalité des actes de ses employés, ils
sont conditionnés par des objectifs, des motivations, des stimulations, cette notion de
liberté est laissé en suspend.
De plus, il analyse et examine comment les communications réussissent à modifier des
comportements de façon inconsciente.
§3- “Rassembler pour mieux régner”
Comme il l’a été dit précédemment, il semble que la tendance actuelle au sein des
entreprises est de réduire les employés à un même dénominateur commun, qui rendra
plus difficile le fait d’être indépendant et individualiste. On parle de “conformité
dynamique”. Il n’y a plus de place pour l’originalité dans l’entreprise, il faut se fondre dans
la masse.
Il est devenu primordial d’appartenir à un groupe et de “jouer en équipe”.
”Les gens qui s’agglutinent sont plus faciles à guider, à maîtriser, à rassembler”.Cette
tendance à se laisser diriger par autrui s’avère être très intéressante pour les dirigeants
soucieux de manipuler le plus efficacement leur personnel. Cette manipulation est souvent
implicite, au premier abord, on a l’impression qu’ils cherchent à rendre le personnel plus
heureux et à le faire travailler de façon productive. Ceci en accordant toute son attention à
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chaque individu, ou en reconnaissant que les symboles de son rang peuvent avoir de
l’importance pour un employé dans une compagnie extrêmement stratifiée. L’individu fait
partie d’un corps dont il est le membre, et chaque membre a son importance. Mais en
voulant fédérer les individu pour qu’ils assimilent pleinement la culture de l’entreprise,
celle-ci dépasse parfois certaines limites.
Nous pouvons citer en exemple l’entreprise Disney.
On entre chez Disney comme on en religion, de plus on y applique des systèmes
spécifiques de formation et de gestion des ressources humaines. Au niveau de sa
communication interne, Disney veille à ce que soit véhiculées les valeurs de la firme, et à
ce qu’elle soient sans cesse rappelées.
Elle prétend à l’universalité de ses parcs, et de là en découle une série de codes destinés au
personnel qui doit les refléter dans les animations.
Les rapports spécifiques existants entre le personnel et les formateurs sont assimilé à de
l’infantilisation, et de la déprogrammation. A cause de ces pratiques, la Disney World
Company a été qualifiée de paternaliste, et fut vivement critiqué en tant qu’employeur.
Nous ne serons donc pas surpris d’apprendre le départ d’un million de cadres de
l’entreprise, n’étant pas en accord avec “ l’art de vie Disney”.
La société à trop mis en avant sa culture, elle n’a pas laissé beaucoup de place à l’initiative
personnel, l’employé n’est qu’un exécutant au service de l’idéologie.
Sa devise ”mieux former et perfectionner” démontre que l’entreprise veut façonner son
personnel et le perfectionner afin qu’il puisse être en harmonie avec “Le monde idéal et
merveilleux de Disney”.
Si on peut reprocher à la Disney World Company de s’être trop considérée vers la fin des
années 80 comme un guide spirituel et un protecteur des grands préceptes de la vie en
société, elle est tout de même un bon exemple de volonté d’améliorer la cohésion interne
pour toucher à l’externe le plus grand nombre(sans distinction sexuelle, politique ou
religieuse).
3
Jean-Noël KAPFERER, Les chemins de la persuasion, éd. Dunod.
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Cet exemple illustre bien la volonté que peut avoir une entreprise de manipuler son
personnel(en agissant sur sa personnalité, en exploitant ses faiblesses par exemple)et la
légitimation de cette manipulation par le souci de transmettre au monde entier une image
réussie de cohésion interne et d’assimilation de la culture d’entreprise, ainsi que le désir
d’augmenter sa. productivité.
On se demande alors où se situe la ligne de démarcation entre une entreprise qui se sert
de sa solide culture comme un atout de compétitivité et une entreprise qui pousse
l’homogénéité de sa culture au point de paraître propagandiste à son entourage ?
De cette façon on peut essayer de comprendre comment des outils destinés à assurer une
meilleur cohésion au sein de l’entreprise, en vue de fidéliser les employés peuvent être
utilisés dans une autre optique.
§4- Exemples
a) à travers la presse
L’organe intérieur semble, de prime abord, à la portée de tout le monde. Les détails les
plus futiles, les plus personnels, peuvent y prendre place ; naissances, mariages,
promotions constituent une possibilité certaine de renouvellement ; des articles d’ordre
général ou des variétés distrayantes, permettent un remplissage honorable. L’organe
intérieur suppose toutefois au sein même de l’entreprise, une ambiance assez détendue ;
une telle initiative, émanant de la direction ne risque pas dans ces conditions d’être mal
accueillie par le personnel.
Dans le cas contraire, l’organe intérieur doit s’attendre à adopter une position de lutte, qui
ne semble pas devoir lui être assignée à l’origine. L’entreprise doit bien entendu réunir un
nombre suffisant d’employés pour justifier un tirage, bien que le simple bulletin
stéréotypé constitue une porte de sortie pour les affaires par trop réduites.
Procédant du principe même de toutes relations publiques (bien faire et le faire savoir), les
organes d’entreprise seraient en théorie les manifestations d’attitudes purement
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désintéressées. N’oublions pas trop cependant que les affaires commerciales ou
industrielles ne sont pas des oeuvres philanthropiques et que l’équilibre d’un budget peut
faire place à des réalisations non indispensables jamais à des réalisations totalement
inutiles. Sous ces diverses formes, la presse d’entreprise permet de créer envers la firme
un courant de sympathie, courant qui ressemble, dans bien des cas au Pactole...
Faciliter les liaisons, calmer les esprits, ouvrir la porte aux suggestions, faire mieux
comprendre le sens du travail effectué, élargir les vues du personnel en le valorisant, tel
peut être le rôle de l’organe intérieur. Plus profondément intégrés à l’affaire, en saisissant
mieux le fonctionnement, les employés deviennent plus efficaces et s’intéressent à leur
travail, ce qui est un bien pour tout le monde.
L’accueil du nouvel arrivant au sein de l’entreprise est primordial car la première
impression bonne ou mauvaise laissera des traces indélébiles : une maladresse une
certaine indifférence, risquent de l’empêcher à tout jamais d’être en harmonie avec
l’entreprise qui l’emploie.
Par le contact humain, personnel, qu’elles impliquent, les techniques d’accueil sont avant
tout orales. Un entretien de quelques instants entre le directeur et le nouvel engagé ne
remplace pas toute la documentation qu’il convient de lui donner, mais sera suffisant pour
qu’il la lise...
L’ensemble de ces renseignements est assez souvent consigné dans un « livret d’accueil »
auquel l’employé pourra se référer ultérieurement.
Le but recherché par les techniques d’accueil est à la fois de placer le nouvel employé dans
un climat favorable à son activité, et de faciliter les échanges qui pourront avoir lieu entre
l’entreprise et lui-même.
Le journal d’entreprise peut être perçu comme un outil de manipulation à cause de
l’absence de confrontation avec l’extérieur, et le fait qu’il soit parfois vécu par la base
comme un moyen de communication descendant, venant de la direction générale et
s’adressant à tout le personnel.
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b) à travers le film
Ce qui donne au film de relations publiques sa supériorité sur les autres moyens de
communication utilisés, c’est non seulement que le film répond parfaitement aux
conditions exigées des communications pour être efficaces, ni même qu’il s’adapte
parfaitement à la formule de la nécessité de plaire de l’information et de l’objectivité
modernes (si une information est présentée de manière ennuyeuse, c’est comme si elle
n’existait pas ou si elle était fausse), mais c’est surtout que le film est bien autre chose
qu’un simple mode de connaissance, que le sec support d’une information. Le film c’est la
vie. Ou plutôt c’est la reproduction, la re-création complète de la vie, de l’univers (monde
extérieur et monde intérieur), c’est-à-dire la synthèse d’un cadre matériel (technique,
politique, administratif, économique, etc.) et des hommes (dans la totalité de leurs
fonctions : physique, économique, sentimentale, intellectuelle, morale esthétique, etc.),
qui vivent dedans.
Il peut devenir un outil de manipulation dans la mesure où l’information véhiculée et
transmise au spectateur, est en réalité un moyen de formation, de persuasion en vue de
l’adaptation la plus parfaite possible au milieu dans lequel il vit. Le film permet aussi de
montrer par personnes interposées (les personnages de l’écran), les conditions de cette
adaptation.
En outre, il suffit de s’être trouvé une fois devant un écran de cinéma ou de télévision
pour apprécier ce mécanisme de fascination, cette faculté de capter presque
’irrésistiblement l’attention, cet immense pouvoir quasi-magique de suggestion, voire de
persuasion qu’il renferme.
Voir un bon film, c’est participer à une tranche de vie toujours plus remplie que la sienne.
C’est cette possibilité de personnalisation, d’humanisation, de “spectacularisation”, qui
confère au film message quel qu’en soit l’objet, une telle puissance, une telle efficacité.
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La communication, instrument du management et donc outil d’influence, sera-t-elle
considérée comme un pas en avant vers une meilleure compétitivité profitable à tous, ou
comme le dernier moyen «d’exploiter» les ressources humaines. L’avenir nous le précisera
avec le développement des nouvelles technologies de l’information.
Tous les problèmes semblent pouvoir être résolus dans le film, toutes les barrières
sociales, culturelles, religieuses… peuvent être supprimées. Il peut tout puisqu’il
représente la vie, une vie simplement un peu plus facile à comprendre, à sentir, clarifiée,
ordonnée autour d’une idée en fonction d’un but.
La manière dont sont utilisés les outils cités précédemment (avec ou sans messages
idéologiques) est naturellement fonction du positionnement adopté par l’entreprise, c’est à
dire la façon dont elle légitime ou non les ambitions et les moyens qu’elle met en œuvre,
«la fin justifie-elle les moyens ?».
Les deux premières parties de ce dossier nous ont permis d’aborder les outils traditionnels
de fidélisation par l’intermédiaire d’une double approche. La partie qui suit à pour objet
d’illustrer notre réflexion au travers d’un outil qui apporte une nouvelle dimension, que ce
soit dans les façons de travailler que de communiquer : le Méta-medium Internet.
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III - Internet et la communication
dans l'entreprise moderne
§1- Principales fonctionnalités d'Internet dans l'entreprise
Les entreprises n'ont pas attendu la vulgarisation d'Internet pour profiter des évolutions
technologiques des réseaux.
L'histoire des entreprises nous renseigne sur l'importance que représente le réseau
informatique pour une affaire commerciale, en jouant le rôle aussi bien d'un élément de
maîtrise des coûts (financiers, délais) que celui d'un élément de son avantage concurrentiel
(différenciation).
Le développement des technologies Internet a révolutionné le monde de l'entreprise en
simplifiant les procédures et en offrant la possibilité d'élargir l'étendue des applications au
delà de la simple transmission de données. Aujourd'hui, on peut parler de transactions
commerciales via Internet, de communication électronique (interne et externe), de travail
à domicile …etc.
On distingue trois technologies mises à la disposition des entreprises :
• Intranet :
Intranet ou le réseau interne de l'entreprise est une solution informatique qui relie
différents ordinateurs, éventuellement de différents départements de l'organisation,
en reproduisant la même architecture d'Internet.
• Commerce-Net :
Commerce-Net ou commerce électronique est l'exploitation du réseau Internet à
des fins commerciales. L'entreprise utilise alors le réseau mondial pour vendre ces
produits et services.
• Extranet :
Extranet est l'interconnexion de plusieurs Intranets, d'une même entreprise ou de
plusieurs entreprises, souvent reliées dans un cadre Clients - Fournisseurs.
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C'est un niveau de connexion très développé et assez difficile à mettre en place. En
réalité, il suppose plus de travail méthodologique, technique et culturel que
l'installation d'un Intranet.
Le Business-Net est une extension de l'Extranet qui consiste en la mise en relation,
sur Internet, des acteurs d'une sphère métier pour des échanges automatisés,
accélérés et distribués.
Par ailleurs, à un niveau plus opérationnel, Internet offre une pluralité d’outils devenus
indispensables au bon fonctionnement des sociétés.
Nous essayerons d’en énumérer quelques-uns, afin de montrer l’importance d’une telle
technologie au service de l’entreprise dans sa prise de décision, notamment en ce qui
concerne les liaisons avec les personnels. Les plus importants peuvent être résumés par les
suivantes :
• Recrutement de nouveaux employés :
Internet permet de disposer d’une base de données importante de ses propres
utilisateurs, dans certains cas demandeur d’emploi. L’entreprise trouve un choix
considérable pour le recrutement de ressources humaines.
• Accès à l’information rapide :
Internet permet également le transfert d’information, beaucoup plus rapidement
que le courrier postal ou le Fax. L’entreprise pourra avoir accès aux informations à
partir de n’importe quels pays. Ainsi, il devient plus facile aux entreprises de
communiquer avec leurs filiales implantées partout dans le monde et de
transmettre des informations importantes.
La communication devient rapide grâce aux mails ou encore par FTP.
• Information disponible pour tous :
Internet permet aussi de mettre à la disposition des internautes - et donc le
personnel ou son entourage - toute information susceptible de les intéresser, que
ce soit sur un produit précis, son mode de fonctionnement ou encore sur
l’entreprise elle même.
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• Télétravail :
Cet autre outil qui progresse énormément aux Etats Unis permet à un grand
nombre de personnes de travailler de chez elles sur leurs micro ordinateurs pour le
compte d’une entreprise. Le travail sera transféré en fin de journée ou au fur et à
mesure à l’entreprise.
Gestion informatisée :
Un nombre croissant d’outils de gestion par ordinateur se développent, plus
formalisés et empiriques. Désormais, prendre une décision s’avère plus facile et
rapide : il suffit d’introduire les données nécessaires et les prévisions peuvent être
lues, le logiciel ira même jusqu’à proposer quelques solutions adéquates avec le
moins de risques possibles.
Une entreprise ne pourrait se passer d’utiliser de tel logiciel pour son étude
financière, ni encore même au niveau de la gestion de ses ressources humaines.
Dorénavant pour la gestion du stock, pour la facturation, le paiement, les comptes
clients…etc. de nombreux programmes sont crées et facilitent d’une manière non
négligeable la performance de l’entreprise au niveau de son travail.
Ainsi, deux applications sont rapidement identifiables :
• Garder le contacte avec les vendeurs :
Les vendeurs ont souvent besoin d’informations concernant la politique de la
société et sur l’environnement mais aussi sur le produit. Le Web permet d’adresser
des recommandations à ses vendeurs sur les objectifs et la manière dont ils doivent
les atteindre. La manière la plus utilisée et la plus privée qui est le e-mail, qui assure
un maximum de sécurité. Ainsi les vendeurs où qu’ils soient pourront lire les
informations que la société leur envoie régulièrement.
• S’ouvrir au marché international :
Grâce au net et notamment par les pages Web il est plus facile d’établir un
dialogue avec le marché international. En fait, avant d’aller sur le web,
l’entrepreneur doit décider de la manière avec laquelle il maniera son entreprise à
l’international pour que celle-ci devienne pour lui une véritable opportunité et non
pas un risque certain. D’un autre côté, le web permettra à l’entreprise disposant de
-23-
filiales à travers le monde de communiquer avec elles aux même prix qu’une
communication locale.
§2- Internet vecteur de fidélisation
L'entreprise moderne a rapidement compris l'intérêt d'exploiter les nouvelles
technologies, désormais présentes partout, pour véhiculer la communication interne.
L'objectif étant de suivre les tendances technologiques et d'en profiter pour améliorer la
fidélisation des personnels.
Différentes possibilités d'exploiter Internet à ces fins sont offertes à l'entreprise. Le choix
peut dépendre des conditions financières, des enjeux concurrentiels, des impératifs
d'organisation ou autres… L'entreprise peut également opter à une démarche progressive,
en plusieurs étapes, pour exploiter à fond les nouvelles technologies.
Avant de parler d'Internet, une première étape, , est de mettre l'entreprise en réseau
interne.
L'Intranet permet en effet de faciliter la communication et de réduire les tâches à faible
valeur ajoutée.
Le personnel dispose désormais d'un moyen de communication qui véhicule l'information
dans les deux dimensions verticale et horizontale. Ainsi, les flux de communication
descendante mais aussi ascendante sont de plus en plus intéressantes puisqu'ils permettent
notamment une personnalisation de la diffusion vers le bas de la hiérarchie et une
remontée beaucoup plus aisée, et par là une implication motivante. De leur part, les flux
horizontaux permettent aux employés de différents services de mieux se connaître et de
mieux collaborer dans la réalisation de leurs tâches respectives.
Aussi faut-il noter que, à travers l'informatisation des supports de communication,
l'entreprise élimine les procédures "inutiles" et souvent perçues par le personnel comme
des tâches à faible valeur ajoutée.
Intranet permet en définitive d'améliorer les conditions de travail et de favoriser
l'instauration d'une culture d'entreprise.
-24-
Une deuxième étape est celle de l'exploitation d'Internet au sein de l'entreprise, c'est-à-dire
que cette dernière donne à son personnel accès au réseau planétaire dans ses locaux et
durant les horaires de travail.
C'est une approche qui reste souvent discutable notamment lorsqu'il s'agit de déterminer
les fonctionnalités qui seront autorisées au sein de l'entreprise. Toutefois, donner au
personnel accès à Internet, que ce soit un droit à la navigation et la messagerie ou à l'une
des deux uniquement, représente pour le personnel une ouverture sur le monde externe.
Encore faut-il préciser que les liens entre vie professionnelle et vie personnelle de
l'employé deviennent à ce moment plus intenses et plus solides. L'un des exemples les
plus répandus aujourd'hui est celui du cadre qui suit le cours de ses actions en bourse
durant toute la journée, ou celui de l'autre qui profite de la pause matinale pour passer ses
commandes alimentaires auprès d'un supermarché en ligne.
Aujourd'hui, la plupart des entreprises connectées sur Internet ont publié leur site
corporate.
Ce site, qui d'ailleurs peut être consulté aussi bien à l'intérieur de l'entreprise qu'à son
extérieur, permet aux employés de s'identifier dans une image sociale reconnaissable par
tous.
En fait, le site procure toutes les informations susceptibles de persuader le personnel et ce
afin de lui faire adhérer à la culture d'entreprise. Or, de par son accessibilité universelle, le
site permet au monde externe d'avoir une meilleure image sur l'entreprise et son
personnel, ce qui constitue une forme de reconnaissance sociale pour ces derniers.
L'importance d'Internet comme outil de fidélisation augmente selon l'usage qu'en fait
l'entreprise.
Dans une mesure encore peu répandue aujourd'hui mais en croissance notamment aux
Etats-Unis, des entreprises ont opter pour délocaliser quelques postes pour lesquels la
présence physique des responsables dans l'entreprise n'est pas indispensable. C'est en effet
ce qu'on appelle le "télétravail". Dans cette optique, l'employé n'est pas tenu de se
présenter à l'entreprise pour effectuer son travail.
-25-
Depuis sa maison, il se connecte sur Internet et accède aux protocoles de communication
définis par son entreprise (FTP, Tel Net, e-mail ou autres). Il récupère les directives ou
consignes de ses supérieurs, réalise son travail et, une fois fini, le transmet à l'entreprise.
Ceci représente pour l'employé un accès précieux à une autonomie et une liberté tellement
recherchées de nos jours.
En réalité, l'employé est tenu de réaliser son travail de la même manière qu'auparavant,
mais les conditions de travail sont radicalement différentes. Il n'est plus sous la
surveillance permanente de son supérieur, il n'est plus obligé à se déplacer chaque matin
jusqu'à son bureau, non plus à travailler scrupuleusement selon l'horaire administratif. Il
est tout à fait concevable, pour certaines tâches, qu'un employé travaille le soir plutôt que
la journée. Il peut également travailler dans sa chambre à coucher, son salon, sa terrasse,
sa cuisine ou ailleurs. Encore, il peut travailler en pyjama, en tenue de sport ou en
costume selon ses propres préférences…
Tout cela permet à l'employé d'avoir un meilleur rendement et d'atténuer le stress. Cette
forme de travail représente une valorisation incomparable pour l'employé du fait qu'a
priori il y a moins de contrôle hiérarchique. Elle peut également être source
d'épanouissement du fait que la personne se sente beaucoup plus indépendante. Ainsi, elle
devient une source d'auto-motivation : l'employé s'impliquera davantage pour garder ce
"privilège".
Ce mécanisme est parfaitement adaptable à d'autres situations plus complexes et où
l'Internet apporte des solutions beaucoup plus appréciées. C'est notamment le cas des
entreprises multi-sites, internationales ou globales.
Pour ces dernières, qui travaillent d'ailleurs au niveau mondial et au rythme des 24 heures
sur 24, l'enjeu est d'instaurer une image globale pour ses différents personnels qui, du fait
du caractère international, sont divisés en plusieurs cultures.
A l'ère de l'ouverture mondiale, les solutions d'adapter la communication de chaque site
(unité industrielle ou commerciale) à chaque pays ou à chaque culture semblent peu
viables. L'accès à l'information étant sans limites, les personnels doivent être mis en
commun dans le cadre d'une même culture d'entreprise. Internet permet à ce niveau
d'interconnecter les différents Intranets de la société pour créer un lien informatique entre
les différents personnels, facilitant ainsi la connaissance et la communication entre les
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employés. Aussi le télétravail acquiert une autre dimension : celle de permettre aux
employés de travailler chez eux, dans n'importe quel pays où ils se trouvent. Cela
représente pour l'employé une ouverture internationale au niveau professionnel, mariée à
une stabilité locale au niveau personnel. C'est sans doute un facteur de motivation sans
égal.
A travers ces états de figure, on a vu comment Internet peut-être exploité par l'entreprise
pour répondre à des besoins et des désirs particuliers de son personnel : mieux travailler,
travailler un peu plus à l'aise, s'ouvrir sur l'extérieur de l'entreprise, s'identifier à une image
sociale, s'ouvrir sur le monde et travailler sans limite géographique…
La réponse à ses besoins et attentes constitue un facteur de satisfaction pour le personnel
et à la fois une barrière à la sortie. Ce peut être, par analogie avec le Marketing tribal, un
niveau de connaissance des attentes et habitudes professionnelles, d'adaptation des
conditions de travail aux particularités de chacun, et de par là le profit d'un certain
nombre d'avantages difficilement voire rarement trouvables ailleurs. Ce qui permet à
l'entreprise de bénéficier d'un avantage compétitif qui favorise la fidélité des personnes
travaillant pour elle.
Après avoir expliquer en quoi l’intégration des nouvelles technologies constituaient un
formidable outil de fidélisation pour les dirigeants, nous allons maintenant dépeindre
« l’envers du décor », et montrer en quoi cet outil peut s’inscrire dans une logique
manipulatoire d’autant plus puissante.
§3- Internet vecteur de manipulation
La réflexion qui suit n’est pas une prise de position, mais simplement une approche qui a
pour objectif de susciter une discussion ouverte mêlant critiques et points de vue sur un
sujet actuel.
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La spécificité d’Intranet est d’offrir la possibilité au corps hiérarchique de centraliser
l’ensemble des outils de fidélisation, ou tout au moins, d’en centraliser leur
communication auprès du personnel.
Chaque salarié se voit donc conférer un accès libre et simplifié aux informations liées à la
vie de l’entreprise de manière régulière dans le temps.
Au premier regard, cette insertion du mécanisme de réseau dans la dynamique de travail
apparaît comme judicieuse et bénéfique pour chaque membre du personnel. Malgré tout,
certaines limites à ce système peuvent être mise en lumière. En particulier, deux aspects
de l’intranet méritent réflexion.
Tout d’abord se pose la question de la nature et du mécanisme de diffusion des
informations de « fidélisation » .
L’intranet offre la possibilité à l’entreprise (au sens hiérarchique du terme) de
personnaliser les informations véhiculées aux différents salariés. C’est un moyen de
contourner les limites du « discours de masse », en communiquant non plus à l’ensemble
du personnel de manière identique, mais de formuler et de proposer à chaque salarié un
discours auquel il sera captif, et donc, d’autant plus réactif. En effet, toute entreprise se
doit de connaître les caractéristiques principales de la personnalité de chaque maillon qui
la constitue. C’est ainsi que nombre d’entre elles ont recours, notamment, à la psychologie
afin de déterminer le plus précisément que possible le profil de chacun. Ces informations
sont très importantes pour les instances dirigeantes, car elles permettent de répondre
objectivement à des demandes implicites, voire subjectives, du personnel, mais aussi, de
détourner certaines de leurs résistances en leur faisant accepter « malgré eux » des
propositions qui répondent en premier lieu aux intérêts des dirigeants.
Intranet permet donc de segmenter les offres, de les personnaliser, de les rendre
transparentes quant à un quelconque avantage retiré par la direction. En ce sens, il
possible de parler de manipulation, d’autant plus que la segmentation s’opère aussi dans le
choix temporel de diffusion. En effet, si on a l’information que tel salarié est plus réceptif
le matin, à une plage horaire précise, par rapport au reste de la journée, et que l’on
souhaite qu’il soit réactif à un message précis, intranet est l’outil tout indiqué.
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L’intranet s’inscrit dans l’exemple ci-dessus comme un support efficace pour optimiser
astucieusement la fidélisation, en véhiculant la « bonne » information au bon moment.
Mais au delà d’être un simple support, l’intranet est un puissant outil de contrôle.
En effet, développer une communauté virtuelle au sein de l’entreprise, c’est en quelque
sorte donner la possibilité aux dirigeants de surveiller à distance la valeur ajoutée générée
par chaque salarié. Pour illustrer cette idée nous utiliserons la notion de traçabilité. Celle-ci
s’exprime par l’intermédiaire du travail en réseau, dont la configuration est validée par
l’équipe dirigeante. Cette équipe a le loisir d’ « épier » à tout moment ce que chaque salarié
est en train de réaliser sur son ordinateur, sans s’en rendre compte. Dans cette logique, la
direction peut, grâce à intranet, analyser le comportement de son personnel, en tirer des
conséquences sur la nature de la communication à employer, et se doter d’arguments
irrévocables dans un objectif de sanctions. L’intranet qui au premier abord semblait licite,
« car dans l’air du temps", et bénéfique, car facilitant l’accès aux informations de toute
nature, à l’ensemble du personnel, apparaît ici comme un moyen « pervers » de le
manipuler.
Mais la traçabilité, la « manipulation » qui en découle, peut dépasser le cadre interne de
l’entreprise. En effet, quitte à être connecté à la communauté virtuelle de son entreprise,
pourquoi ne pas l’être de chez soi ?.
Nous faisons bien évidemment allusion aux opportunités qu’offrent Internet à la force de
travail. Sans entrer dans les détails, car ne faisant pas l’objet de ce dossier, force est de
constater qu’une nouvelle manière de travailler émerge et tend à se développer : le travail à
distance. Qui ne se laisserait pas tenter par la liberté de travailler chez soi, et de n’être
relier à son employeur uniquement par Internet et une Webcam ?. Fournir cette liberté à
un employé lui confère valorisation, épanouissement, et donc, d’autant plus de volonté à
s’impliquer dans son travail : ce n’est autre qu’un moyen d’optimiser la fidélité. Malgré
tout, on peut se poser la question de savoir si cet accès à la liberté n’est pas en réalité un
leurre. En effet, il est tout à fait envisageable que certains dirigeants exigent de la part du
salarié internaute un surcroît de valeur ajoutée au risque de devoir réintégrer la « réalité
matérielle » de l’entreprise. L’entreprise se dote donc d’un nouveau moyen persuasif de
fidélisation, qui dans cet esprit, peut aisément s’apparenter à de la simple manipulation.
-29-
Il est évident que tout salarié n’aura pas cette opportunité de se couper partiellement de la
vie de l’entreprise sans contre-partie. Un proverbe dit que « la liberté n’a pas de prix »,
mais celle du travail à distance ne pourra certainement pas être obtenue sans concessions
de la part des intéressés. Nous pourrions par exemple imaginer que certains avantages liés
à la vie « interne » de l’entreprise soient remis en question, voire supprimer, car n’ayant
plus de raison d’être du fait de l’extériorisation du salarié. Il s’agit par exemple de la
participation de l’entreprise aux repas : puisque ceux-ci ne seront plus pris au restaurant
d’entreprise, les dirigeants peuvent entrevoir une possibilité de diminuer ce coût
alimentaire ( en plus de la diminution du coût lié à l’espace gagné par l’amoindrissement
du personnel dans les locaux).
D’autres avantages, comme la prise en charge par l’entreprise d’une partie des dépenses de
transport ou la voiture de fonction, risquent d’être supprimés, mais aussi surprenant que
cela puisse paraître, légitimés, car le prix à payer pour jouir d’une certaine liberté.
Internet dépasse le cadre de l’intranet, car au delà de stimuler, il contraint
« astucieusement » à la fidélité. Et ce, car il permet d’inverser le processus de la relation
direction-personnel : l’entreprise entre dans l’intimité du salarié.
Le fait de travailler chez soi exige d’autant plus le sens des responsabilités, de
l’organisation, une véritable rigueur, tant dans la qualité du travail accompli que dans le
respect des délais. Dans ce cadre, l’entreprise se voit offerte la possibilité d’ « exiger » un
haut degré d’implication et d’investissement de la part de son personnel connecté, et de
lui imposer à distance des procédures très strictes. L’entreprise pourra par exemple définir
des plages horaires précises pendant lesquelles l’internaute se devra d’être connecté (brief,
compte rendus, réunions virtuelles…), au risque de réprimandes certainement plus vives
que s’il s’agissait d’un retard à une réunion prévue au siège.
La distance entre l’employeur et l’employé apparaît dans cette optique un moyen de
pression qui dépasse la seule volonté de fidéliser. L’internaute se retrouve dans une
situation où il est partiellement couper de la vie de l’entreprise, des autres salariés. N’étant
plus, ou dans une faible mesure, présent dans les locaux, l’internaute ne sera plus
réellement actif dans la vie interne de l’entreprise, mais deviendra un maillon externe,
passif dans la mesure où des informations lui seront transmises, et qu’il n’aura pas les
éléments du terrain pour se faire sa propre opinion critique. De plus, on donne
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généralement plus de poids aux propos et interventions à ceux qui « font parti des mûrs »,
ce qui amoindri considérablement le discours de ceux qui les ont quitté. C’est là un point
très important qui illustre en quoi la fidélisation peut se détourner en manipulation.
Imaginons un employeur qui souhaite licencier un salarié pour diverses raisons, quelques
soient leur raison d’être et leur légitimité, mais sans détenir la « faute » indiscutable pour le
faire, Internet peut s’avérer être la « solution ».
En effet, en travaillant à distance, l’employé n’a plus concrètement de véritables contacts
avec les autres membres du personnel, ce qui provoque une cristallisation du phénomène
de solidarité. D’autre part, cet employé n’entretiendra de véritables relations qu’avec son
supérieur hiérarchique, ou directement avec la direction générale. Enfin, l’outil
informatique n’est nullement à l’abri de défaillances techniques imprévisibles, mais qui
peuvent aussi résulter d’une volonté humaine de nuire à autrui.
L’employé internaute, bien que salarié de l’entreprise, n’est plus qu’un maillon externe, ce
qui facilite d’autant plus le processus de licenciement.
Il est bien évident, comme nous l’avons déjà précisé, que cette approche est très
discutable et mérite débat, mais il serait naïf d’imaginer que les actions des différentes
directions envers leur personnel n’aient comme unique objectif de les récompenser, de les
fidéliser, sans pour autant y déceler des perspectives d’intensification de contrôle et de
productivité.
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CONCLUSION
Notre démarche a été d’aborder le thème de la fidélisation interne d’une manière
particulière, afin de susciter la réflexion sur les motivations et les vecteurs de cette
communication interne, qui peuvent s’apparenter dans certains cas à une forme de
manipulation.
Comme nous l’avions déjà évoquer, cette notion et cette approche sont à considérer avec
recul, et uniquement comme une manière différente d’aborder le sujet proposé.
L’objectif et l’ambition de toute entreprise est avant tout la recherche de la réussite.
Comme nous l’avons vu, le rôle joué par la communication interne est central. Sa finalité
est de favoriser le changement et de faire évoluer l’ensemble des perceptions, des publics
de l’entreprise, de façon à générer des attitudes et des comportements permettant à celleci d’atteindre ses objectifs.
Faire évoluer les comportements demande une cohésion en matière de vecteurs de
communication, des vecteurs qui puissent être en adéquation avec l’état d’esprit de
l’entreprise pour propager plus facilement cette notion d’appartenance et d’identification.
Mais cette stimulation par de subtiles et nombreux moyens de fidélisation nous ont amené
à réaliser que l’employé pouvait être souvent « fidéliser » à son insu, ce qui s’apparenterait
à de la manipulation.
A travers l’illustration de quelques exemples, et l’appui de certains outils, nous avons
constater que cette frontière pouvait souvent être dépassée. En effet, le fruit de notre
réflexion et de nos recherches ont semé le doute dans notre esprit, dans la mesure où la
démarcation entre la fidélisation et la manipulation est beaucoup plus fine qu’il n’y paraît.
C’est d’ailleurs dans cette voie périlleuse que semble s’engager l’intégration des nouvelles
technologies au sein des entreprises.
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Loin de nous d’imaginer que cette optique est générale dans toutes les entreprises, mais il
nous semble naïf de penser que cette démarche n’existe pas.
Au contraire la communication interne est condamnée à séduire, ne serait-ce que pour
attirer et susciter l’intérêt, « la principale règle est de toucher et de plaire », ici comme chez
Molière et Racine.
Bien évidemment, séduire peut soulever de nombreux sens, l’effort de la communication
interne est de substituer partout où cela est possible la « camaraderie » à la crainte et l’auto
motivation à la sanction hiérarchique.
De cette réflexion, on peut alors se poser la question de savoir quelle est l’éthique que doit
respecter et s’imposer la communication de l’entreprise pour ne pas être considérée
comme propagandiste et manipulatoire ?.
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BIBLIOGRAPHIE
!
Vance Packard, La persuasion clandestine, éd. Calmann-Lévy
!
Jean-Noël Kapferer, Les chemins de la persuasion, éd. Dunod
!
Paul Watzlawick, Le langage du changement, éd. Seuil
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