Les préparations pour inhalation
Transcription
Les préparations pour inhalation
Module 7 Marchais 27/01/12 10h30 – 12h30 Brubru et Popie Les préparations pour inhalation I/ DEFINITION GENERALE Les préparations pour inhalation sont des préparations liquides ou solides destinées à être administrées dans les poumons sous forme de vapeurs ou d'aérosols, en vue d'une action locale ou systémique. Elles contiennent un ou plusieurs principes actifs qui peuvent être dissous ou dispersés dans un excipient approprié Elles sont conditionnées en récipients multidoses ou unidoses. Le plus souvent, les préparations pour inhalation sont destinées à être converties en aérosols : dispersion de particules liquides (goutelettes) ou solides dans un gaz Dans ce cas, leur administration est réalisée à l'aide d'un dispositif spécifique : ‒ nébuliseur (aérosoliseur) ‒ inhalateur pressurisé (spray) ‒ inhalateur à poudre Les préparations pour inhalation peuvent, suivant leur type, contenir : ‒ des cosolvants (augmentent la dissolution du principe actif) ‒ des solubilisants ‒ des gaz propulseurs ‒ des diluants (eau pour formes liquides // lactose pour forme solide) ‒ des stabilisants ‒ des conservateurs antimicrobiens…. Ces excipients ne doivent avoir aucun effet notable sur la muqueuse respiratoire et les cils vibratiles (donc moins d’excipients mieux c’est) II/ DEPOSITION PARTICULAIRE DANS LES VOIES AERIENNES Selon la taille et la vitesse d'inhalation des particules, leur déposition au niveau des voies respiratoires s'effectue selon 3 mécanismes principaux : ‒ Impaction ‒ Sédimentation ‒ Diffusion Forme liquide : gouttelettes dans gaz Forme solide : particules dans gaz 1 • Impaction : ‒ Sous l'effet de leur vitesse lié à l’inhalation, les particules de gros diamètre (> 5 μm) se déposent au niveau de l'oropharynx (dépôt ORL). ‒ Favorisé par une inspiration rapide par le nez ou la bouche (selon cible ORL) • Sédimentation : ‒ Sous l'effet de la gravité, les particules de taille moyenne (2 à 6 μm) chutent dans les bronches (dépôt trachéobronchique) « action locale dans les voies aériennes inférieures » Favorisé par une inspiration lente par la bouche ‒ • Diffusion : ‒ Les particules de petite taille (0,5 à 3 μm) sont animées de mouvements browniens les conduisant au niveau des alvéoles et des bronchioles (dépôt pulmonaire profond) ‒ Favorisé par une inspiration lente et profonde par la bouche suivie d’une apnée Cf schéma Impaction (> 5 μm) : dépôt ORL Sédimentation (2 à 6 μm) : dépôt trachéobronchique Diffusion (0,5 à 3 μm) : dépôt pulmonaire profond En pratique, seules les particules entre 1 et 5 μm présentent un intérêt pour le traitement des pathologies respiratoires basses (asthme, BPCO (broncho-pneumopathie constrictive obstructive), mucoviscidose…) III/ FORMES PHARMACEUTIQUES ET DISPOSTIFS D’ADMINISTRATION A. Préparations liquides dispensées au moyen d'un nébuliseur 1) Définition Ce sont solutions (PA soluble) ou des suspensions (PA insoluble) destinées à être converties en aérosols au moyen d’un nébuliseur. Les nébuliseurs peuvent opérer en continu ou être munis d’une valve doseuse 2) Caractéristiques de formulation Les critères de formulation sont comparables à ceux des préparations injectables. • Respect des moyens naturels de défense des voies aériennes (mucus et cils vibratils) : ‒ faible viscosité : ne pas utiliser de produits huileux ‒ pH voisin de la neutralité : risque d'irritation bronchique (pH normal du mucus entre 7 et 8) 2 ‒ ‒ osmolarité voisine de celle du plasma : sinon risque de déclenchement d'une toux voire d'un bronchospasme chez l'asthmatique (dilution dans NaCl 9‰) (osmolarité plasmatique : 280 – 300 mosmol/L) absence d'excipients potentiellement dangereux par voie inhalée (inhibition de l'activité ciliaire ou allergisants comme les sulfites) • Des cosolvants ou solubilisants peuvent être utilisés afin d'augmenter la solubilité des PA • Préparations liquides présentées en récipients multidoses peuvent contenir un conservateur antimicrobien 3) Dispositifs d’administration Les nébuliseurs sont des dispositifs qui convertissent les liquides en aérosols sous l'effet : ‒ soit d’un gaz sous pression : nébuliseur pneumatique ‒ soit de vibrations ultrasoniques : nébuliseur à ultrasons ‒ soit à l’aide d’une membrane vibrante nébuliseur à tamis vibrant a) Nébuliseur pneumatique Constitué de : • une chambre de nébulisation comprenant : ‒ un réservoir (contient le liquide à nébuliser) ‒ une buse d'arrivée d’un gaz comprimé (gicleur) ‒ une buse d'alimentation du liquide (tube capillaire) ‒ des impacteurs ou déflecteurs • une source de gaz sous pression (compresseur ou bouteille d’air comprimé ou d’oxygène) • un embout (buccal ou nasal) ou un masque bucconasal Principe de fonctionnement : (schéma sur ENT) Sous l'action d'une dépression créée par le gaz comprimé, le liquide est aspiré sous forme de fins filaments qui sont projetés sur un impacteur provoquant l'éclatement en fines gouttelettes. La taille des gouttelettes obtenues est proportionnelle au débit du gaz comprimé Les gouttelettes les plus grosses sont piégées et retournent vers le réservoir • Mécanisme : ‒ Arrivée du gaz comprimé et création d’une dépression (effet Venturi) ‒ Aspiration du liquide ‒ Formation de gouttelettes de petite taille ‒ Entraînement des gouttelettes par le flux gazeux 3 • Avantage : ‒ Obtention de particules de 1,5 à 6 μm ‒ Appareils robustes ‒ Pas trop cher • Inconvénients : ‒ Distribution granulométrique polydisperse ‒ Débit de nébulisation faible (~ 0,2 ml/min) ‒ Durées d’administration importantes (15 à 20 min) ‒ Pas de réglage possible du débit de nébulisation ‒ Appareillage relativement bruyant ‒ Moins de 10% de la dose nébulisée arrive au niveau pulmonaire (rendement faible) b) Nébuliseur à ultrasons Constituer de : ‒ une chambre remplie d’eau au fond de laquelle se trouve un quartz vibrant ‒ une cuve de nébulisation contenant le liquide à nébuliser ‒ un embout (buccal ou nasal) ou un masque bucconasal ‒ un système annexe de ventilation (facultative) Principe de fonctionnement : (schéma sur ENT) Les ultrasons générés par le quartz apportent au liquide une énergie mécanique qui se dissipe par vaporisation. Il se forme à la surface du liquide un brouillard de très petites gouttelettes. La taille des gouttelettes est proportionnelle à la fréquence de vibration du quartz (fixe pour chaque appareil) • Avantage : ‒ Obtention de particules de 1 à 4 μm ‒ Distribution granulométrique monodisperse ‒ Vitesse de nébulisation modulable (jusqu'à 3 ml/min) ‒ Nébulisation de grand volume possible ‒ Appareillage silencieux • Inconvénients : ‒ Pas utilisable pour les produits visqueux et suspensions ‒ Dégradation possible de molécules thermolabiles : le problème des ultrasons est qu’ils peuvent dégager de la chaleur ‒ + fragiles ? + Chers ? ‒ < 10% de la dose utilisée arrive au niveau pulmonaire 4 c) Nébuliseur à tamis vibrant Constituer de : ‒ un réservoir contenant le liquide à nébuliser ‒ une membrane perforée de multiples petits trous ‒ un quartz piézoélectrique qui fait vibrer la membrane ‒ un embout buccal Principe de fonctionnement L’aérosol est généré par vibration d’une membrane en alliage métallique composée de 6000 trous, sous l’action d’un quartz à basse fréquence (180 kHz) qui fait passer la solution médicamenteuse à travers la membrane La taille des gouttelettes dépend : ‒ du diamètre des trous ‒ de la fréquence des vibrations ‒ des propriétés physicochimiques du produit • Avantage : ‒ Obtention de particules de 1 à 4 μm ‒ Distribution granulométrique monodisperse ‒ Temps de nébulisation rapide (< 10 min) ‒ 80% de la dose utilisée arrive au niveau pulmonaire ‒ Appareillage silencieux et de petite taille • Inconvénients : ‒ Nébulisation de petit volume ‒ Nettoyage compliqué et long (membrane) ‒ Nécessite la participation active du patient (inspiration) ‒ Prix élevé 4) Utilisations en thérapeutique (à ne pas apprendre) *prescription initiale hospitalière a) Asthme et BPCO • Traitement continu anti-inflammatoire de l’asthme ‒ solution pr nébul. : cromoglicate de Na (Lomudal®) ‒ suspension pr nébul. : béclométasone (Béclospin®) budésonide (Pulmicort®)* • Traitement symptomatique de l’asthme aigu et/ou des poussées aiguës de BPCO ‒ solution pr nébul. : terbutaline (Bricanyl®) salbutamol (Ventoline®) ‒ suspension pr nébul. : ipratropium (Atrovent®) 5 b) Mucoviscidose • Fluidifiant bronchique ‒ solution pr nébul. : dornase alpha (Pulmozyme®)* • Antibiothérapie ‒ solution pr nébul. : tobramycine (Tobi®) ‒ solution (à reconstit.) pr nébul. : colimycine c) Pneumocystose • Traitement préventif (seconde intention) ‒ solution (à reconstit.) pr nébul. : pentamidine (Pentacarinat®)* d) HTA pulmonaire • Anti-agrégant plaquettaire ‒ solution pr nébul. : iloprost (Ventavis®)* • Décongestionnant ‒ solution pr nébul. : HE de Melaleuca viridiflora (Goménol soluble®) B. Préparations liquides dispensées au moyen d’inhalateurs pressurisés 1) Définition Ce sont des solutions ou des suspensions conditionnées dans des récipients pressurisés comportant une valve doseuse (Metered Dose Inhaler ou MDI) Ils sont maintenues sous pression avec un gaz (ou un mélange de gaz) propulseur liquéfié approprié, qui peut également servir de solvant du PA 2) Caractéristiques de formulation ‒ Gaz propulseurs liquéfiés sous une pression de 1 à 6 bars (20°C) →hydrofluoroalcanes Ex: Tétrafluoroéthane (HFA 134a) Heptafluoropropane (HFA 227) ‒ Des excipients facilitant le fonctionnement de l'inhalateur et stabilisant la préparation peuvent être ajoutés (ex: lécithine de soja, acide oléique, trioléate de sorbitane ‒ Des cosolvants ou des solubilisants peuvent être également présents 6 3) Dispositifs d’administration Principe de fonctionnement : (schéma sur ENT) Le récipient est fermé hermétiquement par une valve doseuse qui permet au produit contenu de sortir. Un bouton-poussoir est fixé à l'extérieur sur cette valve permettant son ouverture ou sa fermeture. La dose délivrée est établie en terme de dose prémesurée par l'intermédiaire de la valve doseuse. Dans le récipient, il y a 2 phases en équilibre : ‒ une phase liquide constituée par le gaz propulseur liquéfié sous pression dans lequel le PA est dissous ou dispersé ‒ une phase gazeuse (gaz propulseur) En actionnant un bouton-poussoir, la pression exercée par la phase gazeuse provoque la sortie du liquide. Au contact de l'atmosphère, le gaz propulseur liquéfié se vaporise immédiatement augmentant son volume de 200 à 300 fois. Cette vaporisation provoque la dispersion de la préparation en gouttelettes de taille < 5μm compatible avec une activité thérapeutique au niveau pulmonaire. La valve doseuse permet de délivrer des doses prédéterminées de la préparation (50 à 150 μl) • Avantage : ‒ ‒ ‒ ‒ • Maîtrise de la taille des particules obtenues Réduction de la dose de PA administrée/voie générale Facilement transportable 10 à 15 % de la dose administrée arrive au niveau pulmonaire Inconvénients : ‒ Synchronisation nécessaire entre l'inspiration et l'administration (chambre de nébulisation) ‒ Utilisation limitée des CFC (fréons) comme gaz propulseurs 4) Utilisation en thérapeutique (à ne pas apprendre) • Bronchodilatateurs β2-stimulants ‒ Action brève : salbutamol (Ventoline®), salbutamol (Airomir®Autohaler®) ‒ Action prolongée : salmétérol (Serevent®), formotérol (Formoair®) • Bronchodilatateurs anticholinergiques : ipratropium (Atrovent®) • Corticoïdes : béclométasone (Beclojet®)(Beclone®) (Beclospray®)(Becotide®)(Qvar® Autohaler)(Qvarspray®); fluticasone (Flixotide®) • Bronchodilatateurs β2-stimulants + corticoïdes ‒ formétérol + béclométasone (Innovair®) ‒ salmétérol + fluticasone (Seretide®) 7 C. Poudres pour inhalation 1) Définition Ce sont des préparations présentées sous forme de poudres unidoses ou multidoses administrées au moyen d'inhalateurs à poudre sèche (Drug Powder Inhaler ou DPI) 2) Caractéristiques de formulation • • PA micronisé additionné le cas échéant d'un diluant inerte approprié (lactose pour inhalation) et conditionné : ‒ soit dans une gélule (système unidose) ‒ soit dans une alvéole (système unidose) ‒ soit dans un réservoir (système multidoses) Absence de gaz propulseur 3) Dispositifs d’administration Inhalateurs de poudre sèche Il permet la dispersion dans l’air inspiré par le patient d’une dose déterminée de poudre, après désagrégation mécanique de celle-ci par passage à travers un dispositif spécifique activé par l'inspiration La dose de poudre à administrer est : ‒ soit prédéterminée de manière unitaire (gélule ou alvéole préremplie) ‒ soit prémesurée par remplissage d'un doseur vide Inhalateurs de poudre sèche : Poudre préconditionnée en gélules Poudre préconditionnée en alvéoles voir schéma sur le ENT Poudre prémesurée dans un doseur vide Dispositifs commercialiés : Aerolizer® (Novartis) gélules Spinhaler® (Sanofi Aventis) gélules Diskhaler® + Rotadisk® (GlaxoSK) alvéoles Diskus® (GlaxoSK) alvéoles Clickhaler® (Celltech-Pharma) réservoir Easyhaler®(Orion Pharma) réservoir Novolizer® (Viatris) réservoir Turbuhaler® (AstraZeneca) réservoir 8 • Avantages : ‒ Obtention de particules < 5 μm ‒ Suppression de la synchronisation ‒ Absence de gaz propulseurs et d'excipients bien tolérés • Inconvénients : ‒ Débit inspiratoire ↑ par rapport aux inhalateurs pressurisés ‒ Dose unitaire nécessaire ↑ par rapport aux inhalateurs pressurisés ? ‒ Mauvaise appréciation par le malade de la dose délivrée ? ‒ Plus chers que les inhalateurs pressurisés 4) Utilisation en thérapeutique (juste pour info) a) Bronchodilatateurs β2-stimulants • • • Action brève : ‒ salbutamol (Asmasal® Clickhaler®) (Ventilastin® Novolizer®) ‒ terbutaline (Bricanyl® Turbuhaler®) Action prolongée : ‒ formotérol (Asmelor® Novolizer®), (Foradil® Aerolizer®) ‒ salmétérol (Serevent® Diskus®) Corticoïdes : ‒ béclométasone (Asmabec® Clickhaler®), (Bemedrex® Easyhaler®) (Miflasone® Aerolizer®) ‒ budésonide (Miflonil® Aerolizer®) (Novopulmon® Novolizer®) (Pulmicort® Turbuhaler®) ‒ fluticasone (Flixotide® Diskus®) • Bronchodilatateurs β2-stimulants + anticholinergique : fénotérol + ipratropium (Bronchodual® Spinhaler®) • Bronchodilatateurs β2-stimulants + corticoïdes : ‒ Salmétérol + fluticasone (Seretide® Diskus®) ‒ Formotérol + budésonide (Symbicort® Turbuhaler®) V. CONCLUSIONS Les préparations pour inhalation ou « aérosols » sont des formes pharmaceutiques adaptées dans le traitement des affectations respiratoires basses (asthme, BPCO, mucoviscidose…) La mise au point et le contrôle sont délicats à réaliser. Le nombre de spécialités actuellement commercialisées est relativement limité (coût de développement ↑, marché étroit) 9