VIEILLIR EN GUADELOUPE n`est pas de tout repos
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VIEILLIR EN GUADELOUPE n`est pas de tout repos
VIEILLIR EN GUADELOUPE n'est pas de tout repos France-Antilles Guadeloupe 03.11.2010 Depuis quelques années, la Guadeloupe doit faire face au vieillissement de sa population. L'éclatement familial et le manque de structures compliquent sensiblement la prise en charge des personnes âgées. Jacques a 80 ans. Il vit seul chez lui depuis que sa femme est décédée. En raison de sa maladie, il n est plus autonome et a besoin d'aide pour assumer son quotidien. Une aide à domicile vient toute la semaine pour le ménage et la préparation du repas. Le week-end, ce sont ses enfants qui se relaient tant bien que mal pour lui faire ses courses, ses repas et bien sûr lui tenir compagnie. Une situation particulièrement lourde à gérer, mais qui vient de prendre fin. Car Jacques, dont la retraite est bien garnie, est désormais placé en mai son de retraite privée. Un réel soulagement pour ses enfants... Mais peut-être pas pour lui... Isabelle, 86 ans, a connu un autre destin. Atteinte de la maladie d'Alzheimer, elle bénéficiait des soins d'une auxiliaire de vie 24h/24 h. Mais à la mort de son mari, malade lui aussi, elle n'a plus eu les moyens de conserver cette aide à domicile. Ses enfants, qui vivent tous dans l'Hexagone, ont donc fait le choix de la rapatrier là-bas dans une maison de retraite. Elle se rapproche ainsi de ses enfants, mais doit faire face à un déracinement total, qui n'a fait qu'aggraver sa pathologie. Yvonne a 88 ans. C'est une chabine à fort caractère qui a toujours fait preuve d'une autonomie déconcertante. Un dynamisme tel, qu'elle n'a pas eu droit à l'APA, l'allocation personnalisée d'autonomie. Elle vit seule, fait ses courses et prend même le car pour aller visiter ses proches. Mais depuis quelques mois, elle montre des signes de fatigue. Elle laisse son frigo ouvert, oublie ses casseroles sur le feu, etc. Elle souffre également des pieds, ce qui l'empêche de bouger comme avant. Le problème est qu'Yvonne n'a pas eu d'enfants et qu'elle touche une petite retraite. Ce sont donc ses neveux et nièces qui doivent se charger, aujourd'hui, de lui trouver une solution. Carence en établissements et services Aujourd'hui en Guadeloupe, des situations comme celles-ci sont fréquentes. En effet, depuis les années 90, le vieillissement de la population est bien visible. Actuellement, les plus de 60 ans représentent 16,6%, soit une augmentation de 2,6% depuis 1999. Ces personnes âgées constituent, dans certains territoires, plus de 25% de population totale habitant en ville. Les raisons d'une telle évolution : l'allongement de la vie, la baisse de la natalité, l'émigration des jeunes qui entrent dans la vie active et l'immigration des retraités. Sauf que, face à cette demande accrue et récente de prise en charge de la dépendance, la Guadeloupe n'est pas en mesure de fournir une réponse adéquate. Il y a une réelle carence en établissements et services. Même si la solidarité joue encore son rôle, la Guadeloupe n'échappe pas à l'éclatement familial entraînant l'isolement de certaines personnes âgées. Et l'enjeu est d'autant plus important que, selon l'Insee, les 60 ans et plus représenteront en 2030, 31% de la population totale. Le schéma départemental (2010-2013) du conseil général a pour mission d'anticiper les défis qui se poseront les prochaines années. Ses priorités : développer les services de soins infirmiers à domicile, améliorer la qualité de la prise en charge à domicile en organisant la formation de 1 700 aides à domicile et une meilleure adaptation du logement et de l'habitant des personnes âgées. PRATIQUE. La prise en charge : où et comment ? LES MAISONS FAMILIALES Des familles peuvent accueillir chez elles des personnes âgées après avoir obtenu un agrément du conseil général. Elles sont rémunérées par la collectivité à hauteur de 1300 à 1400 euros par mois. Ces familles ne peuvent pas recevoir plus de trois personnes et doivent être régulièrement formées par les équipes du conseil général. Ce système d'accueil est une alternative intéressante car elle permet à la personne âgée de conserver plus longtemps son autonomie pour un moindre coût, sans la souffrance du sentiment d'isolement. En août 2009, en Guadeloupe, 147 personnes âgées étaient placées chez des accueillants familiaux. Ce type d'accueil gagnerait toutefois à être mieux réparti sur le territoire. LES EHPAD Ces établissements publics d'hébergement (permanent ou temporaire) pour personnes âgées dépendantes offrent la possibilité d'un hébergement permanent, temporaire et des accueils de jour. Dotés en personnels qualifiés, ils donnent la possibilité aux personnes âgées de retrouver un « chez soi » . C'est le conseil général qui en assure le fonctionnement. LE CENTRE GÉRONTOLOGIE DU RAIZET AUX ABYMES Le centre hospitalier gérontologie du Raizet (CHGR) est l'établissement le plus ancien dédié à l'accueil des personnes âgées en Guadeloupe. Par le nombre de ses lits (265), il est ici la plus importante des structures de prise en charge des personnes âgées de l'archipel guadeloupéen. Les travaux de reconstruction de ce centre sont en cours. LES ASSOCIATIONS DE COMMUNE/LES INDÉPENDANTS Certaines associations viennent en aide aux personnes âgées pour du portage de repas, du ménage ou pour tout simplement de la présence à domicile quelques heures par jour ou la nuit. D'autres professionnels, comme les auxiliaires de vie, les aides soignantes, etc., proposent leur service de manière indépendante. L'HOSPITALISATION À DOMICILE (HAD) Permet d'assurer au domicile du patient des soins médicaux et paramédicaux importants, pour une période limitée mais renouvelable en fonction de l'évolution de son état de santé. LES SERVICES DE SOINS INFIRMIERS À DOMICILE (SSIAD) L'objectif des SSIAD est d'assurer, sur prescription médicale aux personnes âgées malades ou dépendantes les soins infirmiers et d'hygiène générale, l'aide à l'accomplissement des actes essentiels de la vie : toilette, habillage, médicaments, pansements, etc. LES MAISONS DE RETRAITE PRIVÉES Elles sont quelques-unes en Guadeloupe à proposer des hébergements permanents ou temporaires. 3 QUESTIONS À GERMAINE GUIZONNE-LACRÉOLE, CONSEILLÈRE GÉNÉRALE CHARGÉE DE PERSONNES ÂGÉES : Quel était le but de la Semaine bleue organisée en octobre sur tout le département ? Le thème choisi cette année était : « À tout âge, acteurs proches et solidaires! ». Il s'agissait de prouver aux gens que les personnes âgées ont besoin d'amitié, de tendresse et d'attention. Ce sont des personnes ressources sur lesquelles on peut souvent compter et qui ont un rôle de transmission. Car avoir de l'âge ne veut pas forcément dire être malade. À travers toutes ces manifestations, nous voulions mettre l'accent sur les liens, les liaisons intergénérationnelles. Que le social retrouve sa place. La Semaine bleue est là pour valoriser la personne âgée. Car aujourd'hui ça se perd, il y a trop d'individualisme. On voit même des personnes qui meurent toutes seules chez elles. Cela n'existait pas auparavant. Pensez-vous que les familles abandonnent leurs parents ? On constate ces dernières années un éclatement de la cellule familiale. Les familles se délitent. Chacun vit de son côté ou dans l'Hexagone. Beaucoup de personnes âgées se retrouvent donc seules chez elles. En moyenne, sur quatre enfants, seul un s'occupe véritablement de ses parents. À son niveau, le conseil général encourage les enfants à se rapprocher de leurs parents. Il faut savoir qu'un parent n'a pas besoin d'avoir un enfant en permanence à ses côtés. Mais une petite tendresse, un regard, de l'affection... C'est déjà beaucoup. Le département vient d'adopter le schéma départemental de l'autonomie 2010-2014. Quelles sont les mesures phares ? Nous souhaitons mettre en œuvre des actions de coordination entre intervenants au domicile de la personne, assurer la qualité des interventions en favorisant notamment la professionnalisation de la filière et le développement d'emplois qualifiés. Concrètement, nous voulons améliorer le portage des repas et le déplacement des personnes âgées. Mais entre le maintien à domicile et les établissements d'hébergement, il convient de favoriser le développement de solutions de logement adaptées pour les personnes peu dépendantes et d'améliorer le dispositif des familles d'accueil. REPÈRES 7 000 personnes touchent l'Apa L'allocation personnalisée d'autonomie (APA) est une mesure sociale en faveur des personnes âgées et dépendantes. Pour l'obtenir, il faut être âgé de 60 ans révolus et justifier d'une perte d'autonomie évaluée par l'équipe médico-sociale de secteur à l'aide d'une grille d'évaluation nationale. Le dossier est constitué auprès du CCAS (Centre communal d'action sociale) de la commune de résidence qui le transmet au conseil général. Les équipes médicosociales évaluent la perte d'autonomie en relation avec le médecin traitant de la personne âgée. Par la suite, elles proposent un plan d'aide qui est soumis pour acceptation à la personne âgée et à son entourage. Le dossier est présenté à la commission départementale APA qui fixe le montant de l'aide en fonction du plan d'aide établi et du ticket modérateur. Le montant varie de 300 à 1 100 euros par mois. En Guadeloupe, en 2009, 7 197 personnes âgées touchaient l'Apa. Cela coûte 50 millions d'euros par an au conseil général. 15 millions sont versés à des prestataires type associations et 35 millions sont directement versés à l'usager. Manque de places pour les malades d'Alzheimer En Guadeloupe, les chiffres de la maladie d'Alzheimer sont préoccupants : 4 541 cas de démences seraient estimés, dont 3 542 Alzheimer, 1 041 démences dont 750 Alzheimer chez les 60-75 ans, 3 500 démences dont 2 792 Alzheimer chez les 75 ans et plus. Il existe des hôpitaux de jour, des services d'aide à domicile et des familles d'accueil spécialisées. Mais très peu d'unités spécialisées sont actuellement installées. Des efforts sont à faire. Le PRIAC (programme interdépartemental d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie) prévoit l'ouverture de 204 places en accueil de jour spécialisé dans la prise en charge des personnes atteintes ou de troubles apparentes.