Le petit botaniste

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Le petit botaniste
Le petit botaniste
Groupe Solabia
Clin d’œil ethnobotanique
Avril. 01 – N° 31
Dans sa collection “Découvertes et invitation aux voyages”,
Le petit botaniste vous invite sur la Route des Epices :
“Il était une fois la Muscade d'Indonésie...”
Qui ne conserve pas un souvenir gourmand de la
saveur chaude, agréablement amère et citronnée de
la noix de muscade, délicatement saupoudrée sur
une purée de pommes de terre bien crémeuse ?
Nombre d'amateurs gourmets trouveront là un plaisir
proche de l'extase, qui ne doit cependant pas faire
oublier que cette noix charmeuse, avant de venir
flatter nos papilles, eut un parcours des plus
mouvementés.
L'archipel des îles Moluques, en Indonésie, dont le
muscadier est originaire, fut le théâtre d'une bataille
acharnée pour le monopole de son
commerce. D'abord atteint par les
Portugais au 16ème siècle, puis convoité par les Hollandais qui s'y implantèrent pendant deux cents ans,
les Anglais s'en rendirent maîtres
au début du 19ème siècle. Mais les
îles Moluques repassèrent rapidement aux mains des Hollandais,
jusqu'en 1864, date à laquelle leur
monopole tomba, grâce à l'acharnement de Pierre Poivre. Ce Français au nom prédestiné, fervent
amateur de botanique (et sans
doute également fin gastronome),
aurait dérobé quelques plants aux
Hollandais, propageant ainsi la
culture de cet arbre, tout en rendant la consommation de la noix de
muscade accessible au monde entier.
Pourquoi tant de convoitises ? Pure gourmandise
sans doute, mais aussi et surtout un intérêt économique de premier ordre. A cette époque, tous les
moyens étaient bons pour s'assurer du monopole du
"Pacha des Tropiques". Ainsi les Hollandais
installèrent leur hégémonie en brûlant tous les
arbres existants, à l'exception d'un petit nombre,
soigneusement gardé. Ils allèrent même jusqu'à
tremper les noix dans un bain de chaux pour
empêcher toute germination postérieure. D'ailleurs
la croyance se propagea alors que les noix de
muscade ne pouvaient être plantées et pousser…
Extraordinaire par les passions qu'il déchaîna, le
muscadier (Myristica fragrans) est également unique
dans le monde des épices car c'est un arbre à
"double épice" : il fournit la noix de muscade et le
macis.
Ce n'est pas sans raison que le muscadier a été
surnommé "le pacha de la flore tropicale" car il
existe des arbres mâles et femelles, et un muscadier du sexe fort suffit pour un harem de dix à vingt
muscadiers du sexe faible. Le fruit résultant de cette
polygamie a l'aspect d'un abricot jaunâtre, renfermant dans son enveloppe charnue
une amande dont l'enveloppe,
laquée d'une patine brune et
luisante, est protégée par un arille
d'un magnifique rouge cramoisi, le
macis, parfois appelé improprement "fleur de muscade".
Inconnue des Anciens, la muscade
ne semble avoir fait son apparition
en Occident qu'au début du MoyenAge, importée par les Arabes.
Partout en Europe, la muscade
connut un énorme succès populaire. Il n'était d'ailleurs pas rare à
l'époque de conserver sur soi une
petite boîte en bois, ou en argent
pour les plus aisés, renfermant une
râpe et un compartiment pour loger
la noix. Il était ainsi possible d'en parfumer plats et
boissons à tout moment de la journée.
Epice de la gastronomie, la muscade fait aussi
partie de la pharmacopée : elle est utilisée comme
tonique et stomachique.
De la noix de muscade est tirée une huile
essentielle, indiquée contre la fatigue nerveuse et
pour soulager les muscles douloureux, et également
un "beurre de muscade" (tiré de l'huile fixe)
recommandé pour son effet anti-irritant et ses
propriétés stimulatrices du flux sanguin.
La noix de muscade présente aussi des propriétés
toniques et astringentes.
À très bientôt sur la Route des Epices, pour d’autres découvertes botaniques…
Le petit botaniste

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