Quelle mobilité pour les cadres territoriaux à l`international

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Quelle mobilité pour les cadres territoriaux à l`international
« Quelle mobilité pour les cadres territoriaux à
l'international ? »
Atelier n°22
Henri BEGORRE, Vice-président de la Communauté urbaine du Grand-Nancy, Maire de
Maxéville, Président de la Commission eau de l’AMGVF, Président du Centre International
de l'eau de Nancy (NANCIE), en charge de l’international au Conseil d’Administration du
CNFPT
Elisabeth MOISY, Directrice générale de la Ville de Saint-Mandé, en charge des
questions de mobilité au Syndicat des directeurs et secrétaires généraux des collectivités
territoriales.
Laurent VIGUIE, Chef du Bureau des échanges européens et de la mobilité, Direction
des Ressources Humaines du Ministère des Affaires étrangères
Pierre POUGNAUD, Conseiller Technique, Délégation pour l’action extérieure des
collectivités locales au Ministère des Affaires étrangères, Président du Collège européen
des experts en Administration publique
L’atelier était animé par Pierrick HAMON (Conseiller spécial au PNUD, Genève /
Président du Cercle René Cassin TPAE) et Nicolas BRAEMER (Rédacteur en chef
délégué de La lettre du cadre territorial)
I.
Une mobilité au Ministère des Affaires Etrangères ou ailleurs ?
(Laurent VIGUIE)
•
Présentation générale
Avec 16 400 emplois pour un budget 2008 de 4,5 milliards d’euros, le Ministère des
affaires étrangères est un « petit » ministère, où les titulaires ne représentent qu’un tiers
de l’effectif, 15 % des agents –dont des fonctionnaires territoriaux- provenant d’autres
administrations. Il s’agit donc d’une administration « ouverte ». Malgré son faible nombre
de postes, ce ministère est, par essence, plus mobile que les autres. 33 % des
fonctionnaires du Ministère changent ainsi de poste tous les trois ans, contre 5 % dans les
autres administrations.
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Le réseau diplomatique du Ministère est constitué de 158 ambassades et de 17
représentations auprès d’organisation internationales. L’offre de mobilité à l’international
passe également par la Mission des Fonctionnaires Internationaux, dont l’objectif est de
faciliter et d’accompagner les projets d’emploi de français dans les organisations
internationales. France Coopération Internationale, qui promeut l’expertise française à
l’international par le biais de l’assistance technique, est également l’un des acteurs de la
mobilité des fonctionnaires. Enfin, la mise en œuvre par l’Agence Française de
Développement des politiques d’aide au développement peut aussi offrir des perspectives
à l’international.
Le Ministère des Affaires Etrangères regroupe un large panel de métiers regroupés sous
huit grands domaines d’activité (direction générale, politique, consulaire, coopération et
action culturelle, communication, administration). Le réseau du Ministère compte
actuellement 65 agents de la fonction publique territoriale, dont près de la moitié sont
placés auprès d’établissements culturels (Instituts Français et Alliances Françaises) et
environ un tiers dans le réseau de coopération ; les 20 % restants sont placés dans la
sphère diplomatique. Ces données n’intègrent toutefois pas les assistants techniques,
pour l’essentiel suivis par France Coopération Internationale.
•
Profils recherchés
Les besoins du Ministère en compétences sont variés et dépassent le simple cadre des
relations internationales. La compétence des cadres territoriaux peut donc se révéler utile
en poste ou en administration centrale. Plus spécifiquement, le Ministère recherche chez
les fonctionnaires territoriaux un certain savoir faire en matière de montage de projet, de
compréhension des enjeux locaux et de compétences terrain. Des qualités de
comportement telles que le lien avec le politique –plus fort qu’au sein de la fonction
publique d’Etat-, la gestion d’équipe, ou encore la maitrise des langues étrangères sont
également recherchées.
•
Démarches
La mobilité au Ministère des Affaires Etrangères repose avant tout sur une démarche
individuelle qui s’inscrit dans le cadre d’un projet professionnel et/ou personnel. Il s’agit
donc d’une étape dans un parcours professionnel. Pour ce faire, le fonctionnaire peut
recourir à deux approches complémentaires : le réseau de coopération culturelle et le
réseau diplomatique et consulaire
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Par besoin de diversité, le réseau de coopération et d’action culturelle publie toutes ses
offres en ligne. Il s’agit donc d’une démarche transparente et publique s’inscrivant dans le
cadre d’une procédure dématérialisée. En outre, le calendrier est contraint ; les postes
sont donc publiés en juin en vue d’un pourvoi l’été suivant. Les candidatures sont donc à
présenter au plus tard le 1er septembre de l’année précédant le départ.
Cœur de métier du Ministère des affaires étrangères, le réseau diplomatique et
consulaire, privilégie une approche individualisée en publiant des offres sur la bourse
interministérielle de l’emploi public ; ces offres se retrouveront très prochainement sur
Internet. En outre, le calendrier glissant de publication impose une veille régulière sur les
opportunités en cours.
La démarche de mobilité peut également procéder d’une démarche institutionnelle
favorisée par un cadre législatif et réglementaire favorable. Enfin, la mobilité peut être
envisagée sous une approche collective qui nécessite cependant un échange et une
promotion au sein des collectivités.
II.
La mobilité territoriale (Elisabeth MOISY)
La mobilité territoriale est particulièrement difficile car les réseaux de la mobilité restent
relativement éloignés de la fonction publique territoriale. Il est donc difficile pour les agents
de savoir vers quel interlocuteur se tourner pour obtenir des précisions sur les missions
qui les intéressent.
Créée pour faire face à cette difficulté, la Banque de relais entre les collectivités
territoriales et les organismes internationaux (BRET) est de plus en plus sollicitée par
France Coopération Internationale, qui manque parfois d’expertise au sein de son propre
réseau et vient donc puiser dans ce vivier. Il est donc nécessaire d’identifier l’expertise, la
compétence et les souhaits de mobilité des agents dans des fiches synthétiques
précisant également le projet personnel de l’agent.
Plusieurs domaines sont concernés par la mobilité internationale. Il est ainsi possible de
partir en mission dans le cadre de la coopération décentralisée. Les missions peuvent être
de courte ou de moyenne/longue durée. Si la première option ne pose pas de difficultés
particulières, la deuxième en revanche nécessite une certaine préparation tant du point de
vue personnel que familial : le projet de l’agent doit être soutenu par l’ensemble de la
cellule familiale. La mobilité internationale n’a en effet rien d’une visite de tourisme : partir
à l’étranger, c’est assumer une fonction de représentation de son pays. De plus, les
possibilités de retour en poste en cas de mauvaise adaptation sont faibles. Toutefois, les
interlocuteurs facilitant les départs à l’étranger manquent à l’appel. Chaque mission se
déroule dans un contexte local auquel il faut se préparer : les conditions de vie et
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l’environnement culturel ne sont pas les mêmes et il convient de tenir compte de ces
différences dans l’élaboration du projet de mobilité.
III. La délégation pour l’action extérieure des collectivités locales
(Pierre POUGNAUD)
Le départ à l’étranger peut difficilement être un projet isolé. En outre, la valorisation de
l’expérience personnelle ne suffit pas : il faut pouvoir attester de sa capacité à se projeter
à l’extérieur, d’y persister et, le cas échéant, d’infléchir sa carrière sur la base de cette
expérience.
Trois types de départ sont possibles :
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La mobilité temporaire, pour une période maximale de trois ou quatre ans, suivie d’un
retour vers la collectivité territoriale d’origine ;
•
L’appel à expertise technique des collectivités territoriales est un secteur en
développement qui peut provenir d’opérateurs français ou étrangers ;
•
L’intégration finale d’une fonction publique dans une autre, qui demeure une modalité
statistiquement faible relevant le plus souvent de contingences personnelles.
La délégation pour l’action extérieure des collectivités locales se place en tant qu’avocat
de la compétence territoriale auprès du Ministère des Affaires Etrangères. Outre le vivier
des directeurs de Relations internationales, les services techniques constituent pour elle
un vivier de candidats à la mobilité. Il faut également mentionner les perspectives d’emploi
dans l’administration centrale du Ministère des Affaires Etrangères. En la matière, les
compétences généralistes sont de plus en plus prisées dans le cadre du recalibrage de la
diplomatie française qui verra certaines chancelleries allégées.
Plus de 60 % des compétences à l’étranger sont aujourd'
hui assurées par le savoir faire
des collectivités locales et, de plus en plus, l’investissement public sera le fait des
collectivités territoriales, par exemple sous la forme de programmes territorialisés. Le
besoin en experts de l’action territorialisés sera donc croissant et les profils des
fonctionnaires territoriaux est intéressant à cet égard. Cet intérêt ne suffit toutefois pas à
garantir un départ en mobilité, et des solutions telles que les accords bilatéraux sont très
intéressantes de ce point de vue. Une forte synergie des réseaux sera toutefois
nécessaire pour faire évoluer la question de la mobilité des fonctionnaires territoriaux.
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IV. Questions/Réponses
De la salle
La mobilité vers l’entreprise n’a pas été abordée alors que 90 % de la mobilité en Europe
est mise en œuvre par des opérateurs privés. Avez-vous des éléments d’information sur
des agents territoriaux qui se seraient mis en disponibilité auprès de bureaux d’études ?
Dans quelle mesure mettre en œuvre une mobilité internationale dans le cadre d’une
mobilité statutaire ?
La question du retour de l’agent me semble tout aussi importante que difficile. Avez-vous
des exemples d’agents ayant réussi à valoriser leur expérience au sein de leur collectivité
d’origine à leur retour et, le cas échéant, dans quel cadre ?
Quid de la charge salariale lorsqu’un agent s’en va pour une courte durée ?
Le Ministère des Affaires Etrangères vérifié-t-il réellement le niveau de langue des agents
qui le représentent à l’étranger ?
Laurent VIGUIE
Concernant les langues, le Ministère a mis en place un système de tests.
Pierre POUGNAUD
Si le détachement ne pose pas de problème statutaire particulier, la mise à disposition
pose davantage difficulté car elle n’est seulement possible qu’auprès des administrations
centrales et des organisations internationales. J’invite donc le législateur à s’interroger à
ce sujet.
S’agissant de la charge salariale, il me semblerait normal que la collectivité d’origine
participe au financement de la mission. En effet, la valorisation de l’agent qui en est retirée
présente également un intérêt pour la collectivité locale d’origine. Il existe toutefois
certains montages proposés par FCI visant à faciliter la compensation du préjudice subi
par le départ de l’agent.
Concernant enfin le retour de l’agent, j’estime qu’il est regrettable que la France ne sache
pas davantage capitaliser le retour d’expérience.
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Pierrick HAMON
Le détachement n’est pas suffisamment valorisé dans le déroulement de carrière. La
question du retour est essentielle, et il n’est pas rare que l’agent en position de
détachement ne soit « oublié », ses collègues restés sur place étant alors prioritaires. Il
est donc essentiel de savoir valoriser cette expérience internationale et d’en favoriser la
reconnaissance par les directeurs généraux.
Elisabeth MOISY
La construction européenne conduit progressivement à une homogénéisation des
modalités de la mobilité à l’échelle communautaire. Nous devons donc nous habituer à
une coopération européenne de plus en plus fréquente et il serait regrettable que notre
manque d’habitude de la mobilité nous laisse à la marge de cette tendance.
Nicolas BRAEMER
Quid du cas spécifique des administrateurs territoriaux ?
Henri BEGORRE
Nous devrons trouver une réponse concrète et rassurante à cette question dans le cadre
paritaire.
Henri BEGORRE
Les ressources humaines et la mobilité internationale sont souvent présentées comme
des points faibles des collectivités locales. Il existe cependant une réelle volonté de la
puissance publique de prendre ces problèmes en charge si bien que les collectivités se
trouvent souvent sur un pied d’égalité avec les ministères lors de la mise en œuvre de
décentralisations à l’étranger. Du point de vue du missionné, il faut cependant que des
négociations menées par sa collectivité de rattachement permettent de prévoir un cursus
qui soit à la fois valorisant pour l’agent et sa collectivité, cela dans la perspective d’un
retour et d’une carrière qui s’échelonne sur plusieurs dizaines d’années. Le CNFPT peut à
cet égard jouer un rôle dans l’élaboration de réponses appropriées.
Document rédigé par la société Ubiqus
Strasbourg, les 3 et 4 décembre 2008
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