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La programmation personnelle vue à travers l’offre de la télévision et de la vidéo
sur IP : fonctions et rôles des nouveaux intermédiaires
Sofia Kocergin
UMS CNRS Laboratoire des Usages en Technologies d’Information Numériques, France
Introduction
L’objectif de cette communication est d’examiner les fonctions et les rôles de nouveaux
intermédiaires dans le champ télévisuel. Ces intermédiaires cherchent à multiplier ou à
modifier les modes de financement et de valorisation du secteur d’audiovisuel. Leur
apparition est concomitante à divers phénomènes : numérisation, multi-médiatisation des
contenus, développement d’offres de triple/quadruple play1. Ce type d’acteur tente de
proposer une approche plus personnalisée du média.
Il est certes trop tôt pour parler de nouvelles formes d’articulation entre les contenants et les
contenus, puisqu’il s’agit de phases exploratoires dans l’industrie. Pourtant, de nombreuses
offres commerciales sont lancées, actuellement en matière de télévision et vidéo sur IP. Elles
explorent des fonctionnalités censées conduire à la maîtrise de cette articulation et à une
conjonction de l’offre et de la demande fondée sur des modèles d’affaires inédits et viables.
Ceci nous amène à considérer ces explorations et à voir dans quelle mesure celles-ci
pourraient aboutir à des évolutions pérennes.
Ces réflexions reposent sur un travail de recherche en cours, entrepris en 2005, dans le cadre
du projet européen « Passepartout » du consortium Information Technologies for European
Advancement (ITEA) et portant sur les évolutions industrielles, législatives, économiques et
les usages de la télévision sur IP. Une étude documentaire et une trentaine d’entretiens auprès
des industriels européens impliqués dans l’audiovisuel au sens large ont été jusqu’ici réalisés.
Le secteur de la télévision sur IP implique d’étudier les techniques de distribution possibles :
fibre optique, ADSL, câble ou le satellite et de comprendre les enjeux concurrentiels en
présence. Pour l’analyse, trois éléments importants de mutations doivent être relevés.
Premièrement, le moyen de diffusion par IP permet une interactivité dans les deux sens : le
spectateur a la possibilité de chercher lui-même les programmes et les œuvres qui
1
l’appellation désignant une stratégie s’appuyant sur l’offre de fourniture d'accès Internet haut débit, de la
téléphonie fixe et de la télévision, auquel peut s’ajouter une offre de téléphonie mobile, tout ceci par un même
fournisseur ayant couplé les différents services sous une même offre, en forme de pack.
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l’intéressent et qui peuvent être autres que les flux proposés par des chaînes. La télévision sur
IP peut hériter ainsi des outils de recherche, de guidage, de recommandation développés dans
le cadre des services Internet.
Deuxièmement, les contenus audiovisuels sont visibles sur les écrans d’ordinateurs, de
téléphones, d’I-pod, d’Archos et autres écrans portables et non plus seulement sur un écran
dédié à la télévision. Cette potentialité complexifie la phase de production des contenus, mais
peut durablement affecter le système de financement des programmes.
Troisièmement, les transformations en cours peuvent se traduire par la recherche d’un
nouveau modèle socio-économique. Le travail des chercheurs dans le domaine des industries
culturelles a montré la complexification dans le temps des modèles socio-économiques de la
télévision. En France, à titre d’exemple, ce modèle a évolué progressivement en partant de la
redevance (1950-1970), à laquelle s’ajoute le paiement indirect par la publicité dans les
années 1970, pour évoluer, avec l’avènement des cablo-opérateurs dans les années 80, vers le
modèle du club (Tremblay, Lacroix), qui s’appuie sur les revenus obtenus par les
abonnements, ainsi que marginalement sur le paiement à la consommation. Bien qu’il soit
trop tôt pour savoir si la question, qui va se poser, concernera plutôt la détermination d’un (ou
de) nouveau(x) modèle(s) ou l’hybridation des existants, on peut constater une accentuation
de la complexité des phénomènes, des offres de services, des partenariats et des modèles
d’affaires.
Nous aborderons les questions relatives à ces évolutions à partir d’analyses concrètes d’offres
qui devraient permettre de clarifier en quoi des services émergents ouvrent des perspectives
nouvelles. La première concerne le segment de la production de programmes multimédiatisés ; la seconde, celui de services interactifs proposés par des opérateurs de bouquets
de chaînes sur le câble, le satellite, la fibre optique ou sur l’ADSL ; la troisième, celui de
l’offre audiovisuelle complète, proposée par des acteurs d’Internet qui se focalisent sur la
recherche de fonctions originales fondées sur une approche communautaire, et jusqu’ici
explorées sur les portails et sur les contenus textuels.
Multi-médiatisation : gérer l’interactivité et la contribution de l’utilisateur final
dans la production des programmes du flot
La multi-médiatisation est un phénomène bien connu de l’audiovisuel. Cependant, les
« téléréalités » apparues dans les années 2000, tels que Loft Story, Star Academy, Big
Brother, introduisent de nouveaux paramètres économiques dans la valorisation des
programmes par les chaînes. A titre d’exemple, l’émission Star Academy, TF1 arrive à
diversifier les modes de valorisation de télévisions jusqu’ici rétribués uniquement par les
annonceurs à l’amont. TF1, grâce à ce type d’émission, se rémunère en amont comme à l’aval
du service. Les circuits d’argent sont alors multiples, impliquant les utilisateurs finaux,
notamment par les revenus issues des SMS et appels téléphoniques surtaxés, les annonceurs
ou d’autres portails.
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Biens en ligne issus du
programme télévisuel
Star’Ac
Ce qui est
valorisé
Mode de
rémunération
Pages consacrées au site
Web de tf1.fr
Audience
Indirect en
amont par la
publicité
Programme
diffusé/distribué en
exclusivité par un autre
portail
Partenariat
Indirect en
exclusif de
amont +Indirect
distribution/diffusi en aval au % sur
on
les ventes
offres proposées à
l’abonnement
(programmes, caméra,
SMS, etc.)
Plusieurs
abonnements
possibles
Direct en amont
Programmes à l’unité
(émission, quiz, etc.)
Programme
distribué à la
demande
Direct en aval
Vente de produits
matériels dérivés
Gadgets, albums,
logos, sonneries
pour mobiles, etc.
Direct en aval
au % sur les
ventes
Figure 1 : Modes de valorisation de l’émission Star Academy de TF1 sur les portails Internet.
Le paiement par l’utilisateur final en amont de service est accentué par l’utilisation des
processus de multi-médiatisation et de modularisation du bien initial. La multi-médiatisation
offre la possibilité à l’abonné de recevoir les informations sur l’émission par SMS (sur son
téléphone portable) ou encore de visionner le flot d’images provenant de plusieurs caméras
24/24h par les chaînes numériques sur le câble ou le satellite.
Partant de ces principes lucratifs de la multi-médiatisation, la société Endemol, à l’origine des
nombreuses émissions de téléréalités, développe des compétences spécifiques permettant une
production « standardisée » de ce type de programmes.
Endemol utilise des modalités de production spécifiques : par exemple, le spectateur est
sollicité pour envoyer ses propres productions vidéo à l’idole de son choix afin que celui-ci
puisse lui transmettre son commentaire. Ce procédé, dévoyant l’esprit de partage propre au
logiciel libre, permet à Endemol de gérer des programmes entièrement constitués des vidéos
d’utilisateurs et diffusés en flot pour les chaînes sur mobiles « Home Video Junk » et
« Xtreme Reality ».
Les compétences ainsi acquises par cette entreprise sont moins relatives à la seule fonction
production qu’à la gestion de productions amateurs multi-médiatisées. Ce positionnement lui
permet aujourd’hui de détenir le leadership sur la gestion des chaînes sur IP ou sur mobiles en
général. Ainsi, elle gère des programmes principalement pour le compte de distributeurs :
opérateurs mobiles, chaînes de jeux et de pari sur le câble en Grande-Bretagne, par exemple,
ou bouquet de chaînes de TV sur IP de KPN au Pays-Bas. La diffusion de programmes sous
sa marque propre ne semble donc pas être au fondement de l’activité principale de cette
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société, appartenant au groupe RTL et qui domine le marché européen de la production des
programmes de flux avec sa filiale FremantleMedia.
La télévision sur IP permet donc aux producteurs de tester de nouveaux formats et modes de
production, expérimentations s’inscrivant dans une logique de réduction des risques financiers
et de recherche d’amélioration de la valorisation de programmes particuliers adaptés à la
multimédiatisation. Ainsi, un jeu de téléréalité multi-médiatisé, impliquant le téléspectateur
tel que « Gold Rush » (originairement produite pour le portail d’AOL) est repris par plusieurs
chaînes aux USA, dont notamment le CBS.
Afin de permettre la diffusion de leur production sur différents terminaux, les sociétés de
production doivent gérer différents formats technologiques, notamment dans le cas de
diffusion sur mobiles. A cause des nombreux problèmes relatifs à l’encodage, à
l’enrichissement par l’interactivité, et des limites des budgets accordés aux programmes
interactifs pour nouveaux terminaux, peu d’entreprises peuvent se lancer dans une entreprise
comme celle d’Endemol. Cette société travaille avec des équipes très réduites, les
professionnels embauchés doivent être polyvalents. Ce constat laisserait-il augurer que ce
type de programme s’inscrirait dans une autre économie que les productions audiovisuelles
classiques.
Il semble que le passage au numérique conduit des acteurs de la production télévisuelle à
s’investir dans deux directions. D’une part, il convient, pour ce type d’acteur, de concevoir et
de produire de nouvelles formes de programmes multi-médiatisés, capables de s’adapter à des
situations d’usages différentes. Ce souci les conduit, par exemple, à impliquer des créateurs
amateurs et à gérer ce type de contenus en intégrant les contraintes techniques diverses. En
effet, la production de programmes pour la TVHD, celle pour les petits écrans de terminaux
utilisés en situation de portabilité, etc. nécessite l’intégration d’un nombre croissant de
paramètres. D’autre part, l’acquisition de ces compétences variées permet à certaines sociétés
de production de devenir incontournables pour les différents distributeurs (opérateurs de
réseaux distributeurs tels que les fournisseurs de paquets de programmes sur mobiles ou par
ADSL) à qui elles proposent des programmes de flux complets, à l’instar d’une chaîne de
télévision
L’interactivité dans le salon : structuration autour de EPG et la VOD comme
principaux services interactifs fournies par les opérateurs des bouquets de
chaînes
Sur le marché très concurrentiel des opérateurs de réseaux proposant des services de Triple/
Quadruple Play, nombreux proposent les services audiovisuels agrégés dans les « bundles »,
sorte d’offres en paquets offrant à la fois des programmes de télévision hertzienne standard,
les bouquets TV, des chaînes TV à la carte, des chaînes locales, des canaux évènementiels, de
la Pay Per View, de la vidéo à la demande et des système incluant des PVR2 (enregistreurs
numériques).
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PVR pour Personal Video Recorder
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Figure 2 : Offre audiovisuelle numérique par satellite de l’opérateur BskyB en Grande Bretagne (Source : Screen Digest 2006)
Même si dans ce domaine les premières confrontations entre des industriels traditionnels de
l’audiovisuel, des opérateurs de télécommunications d’un côté et des acteurs d’Internet et
d’informatique (Google, Yahoo, Microsoft, Apple, Napster, Netflix, Movielink) de l’autre
s’opèrent, ces offres construites autour de la télévision de salon sont toujours principalement
régies par des règles de l’audiovisuel tel que nous les connaissons, impliquant les
équipementiers amont et aval, éditeurs et producteurs de contenus, opérateurs et diffuseur et
le législateur… Cependant, la chaîne de valeur se complexifie.
L’opérateur de réseau, jusqu’alors agissant principalement en tant que concentrateur de
recettes (collecte d’argent, distribution d’argent, facturation, sécurisation transactions), ne
peut plus faire face seul aux multiples fonctions qu’il doit désormais assurer.
En effet, son rôle s’élargit dans le domaine de la prescription auprès des utilisateurs finaux,
ainsi que dans l’agrégation auprès des prestataires, comme nous pouvons l’observer à travers
l‘exemple de la société ODG au Royaume Uni.
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Figure 3 : Les domaines d’intermédiation entre partenaires dans la fournitures de services de vidéo à la demandes du câblo-opérateur NTL
Telewest au Royaume Uni (Source : présentation ODG 2006).
L’opérateur NTL Telewest sous-traite son service de VOD à la société OnDemand
Group/FilmFlex. Sur le tableau, nous pouvons constater que l’opérateur NTL Telewest doit
désormais gérer les aspects techniques relatifs à la multiplication des réseaux et des
terminaux, sécuriser et gérer les transactions. De plus, l’opérateur reste l’intermédiaire auprès
de l’utilisateur final. Quant à ODG, la société se spécialise dans la recherche, préparation,
promotion des contenus : négociation des licences des films avec les studios hollywoodiens et
autres producteurs, gestion du partage des revenus entre acteurs, encodage des contenus en
vue de leur diffusion, promotion des films. Parmi les nouvelles opérations réalisées sur les
contenus, nous noterons l’intégration de métadata provenant de multiples sources. La gestion
de la VOD, qui devient un service interactif de base, est similaire à celle d’une chaîne
thématique.
Pour l’instant, la majeure partie des opérateurs offrant la VOD n’en retire pas de revenus
supplémentaires significatifs. Les chiffres tournent autour de 2-3% du chiffre d’affaire, mais
peuvent atteindre 1/3 des revenus chez Fastweb en Italie, par exemple. A première vue, donc,
il ne s’agit pas d’un service majeur des opérateurs des réseaux, bien qu’il apporte une
véritable plus-value en terme de fidélisation des abonnés, réduisant le churn de 70% (Source :
OnDemandGroup/NTL Telewest).
Cependant, une évolution en terme d’usage de la télévision de salon est initiée par ce type de
service, il s’agit de l’interactivité et des débuts de la personnalisation. Tous les acteurs
interrogés s’accordent à dire que l’interactivité utilisée pour la télévision n’est pas celle
fonctionnant sur Internet. En effet, les services interactifs sur la télévision ne sont pas en soi
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porteurs d’usages et de valeur pour l’utilisateur final. Les applications interactives phare des
opérateurs sont les EPG constitués de la mosaïque et du pilote, reliés à des fonctions de pause
et d’enregistrement de programmes.
« L’interactivité doit permettre d’accompagner l’abonné pour lui permettre de mieux
consommer ces programmes. Pour nous, l’interactivité, avant tout, c’est la mosaïque,
c’est le pilote… La mosaïque permet d’avoir le panorama des chaînes, ça change sur
chaque chaîne, avec les petites infos programmes qui passent, et d’avoir une vision du
bouquet. Personne ne dit « c’est de l’interactivité », puisque c’est tellement naturel.
Mais ça, ça marche très, très bien chez nos abonnés. C’est notre signe de fabrique, mais
c’est de l’interactivité.
Le pilote, c’est la petite application qui nous permet d’aller voir sans quitter son flux
vidéo ce qu’il y a sur les autres chaînes, avec à chaque fois, le résumé et puis la
possibilité d’enregistrer. Cela veut dire que je peu directement enregistrer le
programme qui est en cours. Je peux l’enregistrer sur le disque dur, ou, s’il est déjà
commencé, je me dis que j’aurais quand même bien aimé le revoir, je vais regarder les
rediffusions et je vais enregistrer les rediffusions.» (CanalSat, 2006).
Ces fonctions d’interactivité de base sont liées avec celles de la personnalisation. Un premier
niveau de ce que CanalSat considère comme personnalisation consiste à pouvoir verrouiller
les programmes interdits aux jeunes. Le deuxième niveau permet de choisir ses chaînes
préférées. « Après, on a tous les outils de recherche : les recherches par critères, mais il y a
aussi les recherches par mots-clés. On s’approche un petit peu du Google. Et puis, ce que
l’on va faire bientôt, c’est encore un niveau au-dessus de personnalisation qui permettra de
mémoriser sa sélections de recherche dans un espace « Mes recherches préférées », qui lui
permettront d’obtenir directement les programmes qui correspondent à ses critères, comme
par exemple les sports mécaniques ». (CanalSat, 2006)
Les outils de guidage et de navigation, ainsi proposés dans les programmes développés par
CanalSat, permettent à l’opérateur de réseau de prendre davantage d’engagements sur les
fonctions de prescription auprès de l’utilisateur final.
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Fonction
Editeur
(journal/livre)
Télévision et
Radio
Télématique
Opérateur- Grande distribution
réseaux
Accès
PRESCRIPTION (usagers)
Production contenu
Edition contenu
Promo/animat. contenu
Prescription usage
Labellisation
Qualif. pdt/marchand
Agrég. d’audience
SAV
Tiers de confiance
AGREGATION (prestataires)
Prospection cont/serv.
Qualif. des usagers
Logistique commande
Acheminement biens
Sécurisat. des flux
CONCENTRATEUR RECETTES
Collecte d’argent
Distrib. d’argent
Facturation
Sécuris. transactions
Figure 4 : Les fonctions d’intermédiation sur les médias et dans le secteur du commerce et de la distribution des biens. Les parties grisées
sont les fonctions déjà couvertes avant l’introduction d’Internet. Les parties foncés sont des nouvelles fonctions remplies par les opérateurs
et des fournisseurs de services de TV sur IP et d’audiovisuel numérique généralement.
L’exemple des outils de OnDemand Group va dans le même sens. Cette société assure la
fonction d’agrégation auprès des fournisseurs de services et des contenus, de négociation en
négociant au coup par coup les contenus avec les différents studios, en gérant les aspects liés
à la post-production, aux métadata, etc.
Les portails et gestionnaires d’information sur Internet, souvent cités par nos interlocuteurs du
monde de l’audio-visuel comme éléments perturbateurs, ont acquis des avantages certains
dans les domaines de la prescription, ainsi que de l’agrégation. Avec le développement de la
télévision et la vidéo sur IP, ils peuvent mettre en œuvre des stratégies visant à prolonger leur
activité en s’attaquant aux fonctions dévolues jusqu’ici aux seuls acteurs traditionnels de
l’audiovisuel et en intégrant des fonctions assurées par la seule distribution (comme le montre
le tableau ci-dessus).
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Les acteurs d’Internet à l’assaut de l’audiovisuel : virtualisation des équipements
autour des portails de recherche et de communauté
Deux outils, concernant la vidéo, nous semblent participer à la popularisation de l’utilisation
vidéo sur ordinateur et sur Internet aujourd’hui. Il s’agit des outils de recherche dans les
contenus vidéos, s’appuyant soit sur les annotations, espèces de métadata appliquées par les
propriétaires des contenus appelés taggs (MySpace, YouTube), soit par la recherche du texte
obtenu par transcription automatique de la bande son des vidéos (Blinkx). Il s’agit, également,
des vidéos fournies par les utilisateurs finaux et partagées au sein des communautés fermées
ou ouvertes (DailyMotion, MySpace, YouTube, etc.). Les sites cités s’inscrivent dans une
tendance générale, connue sous l’appellation « Web 2.0 ou encore « Social Computing ». La
plateforme informatique proposant ces outils, fournit des applications aux utilisateurs qui leur
permettent de communiquer au sein de communautés. Ainsi, on assiste à la superposition de
réseaux techniques et humains qui favorisent la création de contenus par les utilisateurs et leur
partage. Cette tendance implique la mise en synergie des applications produites :
-
par des créateurs ou producteurs amateurs comme les blogs,
-
par des moteurs de recherche comme Google, Yahoo, MSN, AskJeeves et Technocrati
-
par des fournisseurs de comparaisons de prix comme ShopZilla et Froogle, ou de
services de partage Peer to Peer comme BitTorrent et Gnutella,
-
ou encore par des sites d’e-commerce entre utilisateurs comme Ebay, Amazon et
Craiglist,
-
par des services de podcast comme Juice, PodcastAlley, Odeo et PodShow, ou des
Wikis et des services collaboratifs comme Wikipedia, Basecamp et SocialText,
-
par des réseaux sociaux comme DailyMotion, MySpace, Friendster et Orkut.
Ces différentes sociétés sont les principaux nouveaux laboratoires d’usages dans
l’audiovisuel.
Certains acteurs historiques d’Internet, tel Yahoo et Microsoft, s’attaquent encore plus
directement au rôle des opérateurs de réseaux de distribution audiovisuelle.
Ainsi, Yahoo Go TV permet à l’utilisateur final de gérer ses fichiers multimédias, images,
sons et vidéo, affichés sur la TV, reliés au PC. Il est ainsi possible de transformer le PC en
magnétoscope numérique, d’enrichir la plateforme de modules additionnels autorisant
l’écoute de la radio, l’affichage de la météo, etc. Ce service gratuit, assez proche du Windows
Media Center de Microsoft, fait partie de la gamme Yahoo Go, destiné aux utilisateurs de
mobiles, aux téléviseurs ainsi qu'à ceux qui souhaitent faire des fonctionnalités Yahoo partie
intégrante de leur bureau Windows.
Les fonctions fournies par Yahoo Go TV ne sont pas sans rappeler celles des opérateurs
réseau fournissant leurs services à travers des set-top box, utilisant de nombreux protocoles,
standards et technologies, assurant la redistribution des bénéfices sur l’ensemble de la chaîne
de valeur. Ainsi Yahoo, mais aussi Google, proposant chacun des services indépendants des
plateformes technologiques et de multiples équipements à cycle de vie court, pourraient
rapidement atteindre l’utilisateur à l’échelle planétaire. Dans ce cas, toute l’économie de
l’audiovisuel devrait être repensée et notamment les rôles des différents acteurs.
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L’étude des différentes fonctions dites d’intermédiation semble alors indispensable pour
comprendre la manière dont pourrait se reconfigurer les stratégies d’acteurs et se redéfinir le
ou les modèle(s) économique(s) qui visiblement vont évoluer.
Conclusion
Nous avons cherché à dégager les compétences spécifiques aux réseaux interactifs
numériques, dans le processus d’intermédiation entre l’amont et l’aval. L’évolution de la
télévision et de la vidéo sur IP pourrait modifier les règles actuelles en jeu dans l’audiovisuel,
ceci du fait que de très nombreux acteurs sont concernés. Le principe de la télévision et de la
vidéo sur IP, fondé sur la logique aval, privilégie une programmation horizontale et
personnelle. Cette logique, bien que complémentaire à la programmation réalisée
verticalement à travers la grille de programmes propre à chaque chaîne, déstabilise
actuellement le secteur de l’audiovisuel. Comme nous l’avons vu à travers nos exemples,
cette possible individualisation de la consommation télévisuelle, reposant sur des offres de
services inédits impliquant plus ou moins fortement l’utilisateur, implique la mise en place de
savoir-faire spécifiques et la détermination d’une nouvelle fonction centrale au carrefour des
savoir-faire audio-visuel, opérateur de réseau et de la grande distribution. Ces nouveaux
intermédiaires auraient pour fonction l’enrichissement de contenus et l’exploitation des
productions personnelles. Cette tendance va-t-elle engager les acteurs de l’audiovisuel dans
les recherches de nouvelles perspectives ?
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