Chapitre 11 - L`exécution du contrat 1 L`exécution du contrat
Transcription
Chapitre 11 - L`exécution du contrat 1 L`exécution du contrat
DROIT – COURS DE CLASSE DE PREMIÈRE STG Chapitre 11 - L’exécution du contrat Quand des parties concluent un contrat, c’est pour qu’il soit exécuté. L’exécution est donc un moment important de la vie du contrat (1). Toutefois, dans certains cas, la parole donnée n’est pas respectée et le contrat est inexécuté (2). 1 L’exécution du contrat Le Code civil veille à l’exécution du contrat. À cette fin, il pose deux principes : celui de l’effet obligatoire du contrat (1.1) et celui de l’effet relatif du contrat (1.2). 1.1 L’effet obligatoire du contrat Le contrat est la loi des parties (1.1.1). Toutefois, dans un souci d’équilibre, le Code civil limite la portée de cette « loi » en exigeant que les contrats soient exécutés de bonne foi (1.1.2). 1.1.1 Le contrat : loi des parties Aux termes de l’article 1134, alinéa 1er, du Code civil : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. » Ce texte pose le principe de la force obligatoire des contrats passés entre les personnes. Le contrat est donc la loi des parties, à condition, toutefois, qu’il ait été régulièrement formé. En vertu de ce principe, les parties sont tenues d’exécuter l’arrangement contractuel qu’elles ont négocié. De même, elles ne peuvent pas modifier unilatéralement le contrat. 1.1.2 La bonne foi dans l’exécution des contrats Le dernier alinéa de l’article 1134 prévoit que les conventions « doivent être exécutées de bonne foi ». Est de bonne foi celui qui parle avec sincérité ou bien encore celui qui agit avec droiture, franchise, honnêteté. La jurisprudence tire de cette disposition des conséquences pratiques : les parties doivent exécuter loyalement les obligations mises à leur charge. Par exemple, un chauffeur de taxi doit emmener son client à destination en empruntant le chemin le plus court. Par ailleurs, les parties sont tenues à un devoir de coopération. Par exemple, dans un contrat de travail, l’employeur et son salarié collaborent : ils échangent des informations, travaillent ensemble. 1.2 L’effet relatif du contrat Le contrat n’a d’effet qu’entre les parties contractantes. Ce principe dit de l’effet relatif (1.2.1) reçoit des exceptions (1.2.2). 1.2.1 Le principe Aux termes de l’article 1165 du Code civil, « les conventions n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes ». Le contrat ne crée donc ni droits ni obligations à l’égard des tiers (personnes étrangères au contrat). Par exemple, le nouvel occupant d’un logement n’est pas tenu de poursuivre le contrat de téléphone de l’ancien locataire ; ce contrat ne lie que les parties signataires. 1 DROIT – COURS DE CLASSE DE PREMIÈRE STG 1.2.2 Les exceptions au principe Des tiers peuvent être concernés par le contrat. Un contrat peut créer une charge pour autrui : par exemple, les héritiers qui acceptent la succession sont tenus par les contrats passés par le défunt comme s’ils les avaient passés euxmêmes ; ils succèdent aux droits et créances du défunt. Ils sont aussi tenus des dettes, sauf s’ils refusent la succession. Un contrat peut profiter à autrui : il en est ainsi de la stipulation pour autrui. Dans cette situation, une personne (le stipulant) obtient d’une autre personne (le promettant) qu’elle s’engage envers une troisième personne (le tiers bénéficiaire) restée étrangère à cette convention. L’assurance-vie utilise ce mécanisme : dans ce contrat, une personne (le stipulant) convient avec son assureur (le promettant) que celui-ci versera une somme d’argent à une troisième personne (par exemple, la fille du stipulant) à son décès. 2 L’inexécution du contrat La liberté contractuelle laisse les parties libres de contracter ou de ne pas contracter. Nul n’étant forcé de contracter, celui qui a donné sa parole contractuelle doit la respecter. Dans le cas contraire, il peut être forcé à respecter son engagement ou à indemniser son cocontractant (2.1). La question de l’indemnisation renvoie à celle de la responsabilité contractuelle (2.2). 2.1 L’exécution forcée ou par équivalent 2.1.1 L’exécution forcée Au cas où le débiteur refuserait de s’exécuter, le créancier peut exercer sur lui une contrainte pour l’obliger à respecter les obligations mises à sa charge. Par exemple, l’acheteur oblige son vendeur à livrer le matériel ; dans ce cas, on parle d’exécution forcée. Le créancier va donc réclamer l’exécution en nature du contrat. L’exécution forcée suppose la réunion de deux conditions. D’une part, il faut une mise en demeure. Il s’agit d’un acte qui constate le retard du débiteur et qui apporte la preuve du caractère volontaire de ce retard. Ce constat est effectué par divers moyens, notamment la sommation. Cet acte, signifié par huissier, a pour objet de mettre le débiteur en demeure d’exécuter ses obligations. D’autre part, il faut un titre exécutoire. Ce titre, qui prend la forme d’un jugement ou d’un acte notarié, permet de recourir, si besoin, à la force publique (ex. : une saisie mobilière). 2.1.2 L’exécution par équivalent Dans certaines situations, l’exécution en nature n’est pas possible. Par exemple, une pièce unique objet du contrat (tableau ou bijou) ne peut pas être remplacée par un objet identique si cette pièce est perdue. Il faut avoir recours à une autre forme de réparation : l’exécution par équivalent. Celle-ci se traduit par le versement de dommages-intérêts par le débiteur au créancier. Les dommages-intérêts correspondent à une somme d’argent versée au créancier et qui est destinée à compenser le préjudice subi du fait de l’inexécution du contrat. Dans certains cas, les dommages-intérêts ne sont pas dus. Il en est ainsi en cas de force majeure. Il s’agit d’un événement extérieur aux parties et irrésistible. À titre d’exemple on peut citer la chute d’un arbre sain à la suite d’une tempête 2.2 La mise en œuvre de la responsabilité contractuelle Le débiteur qui ne respecte pas sa parole contractuelle engage sa responsabilité. La mise en cause de cette responsabilité obéit à des conditions particulières (2.2.1). Elle exige que l’on distingue les 2 DROIT – COURS DE CLASSE DE PREMIÈRE STG obligations de moyens et de résultat (2.2.2) et elle permet au débiteur d’écarter, dans certains cas, sa responsabilité (2.2.3). Par ailleurs, le problème de l’inexécution prend un tour particulier en matière de contrat synallagmatique (2.2.4). 2.2.1 Les conditions de mise en œuvre de la responsabilité contractuelle La mise en œuvre de la responsabilité contractuelle suppose la réunion de trois conditions : il faut un dommage, une faute contractuelle et un lien de causalité. Le dommage est une atteinte subie par une personne dans son corps (dommage corporel), dans son patrimoine (dommage matériel ou économique) ou dans ses droits extrapatrimoniaux (atteinte à l’honneur, par exemple). Celui qui attend aujourd’hui une marchandise qu’il ne reçoit pas subit un dommage. Il ne peut pas revendre la marchandise ; il ne peut pas non plus en disposer. La faute contractuelle provient d’une inexécution ou d’une mauvaise exécution du contrat (ex. : nonlivraison ou livraison tardive de marchandise). La cause importe peu ; le dommage tient au fait que les projets du cocontractant sont perturbés par cette situation. Le lien de causalité est le troisième élément. En pratique, cela veut dire qu’il existe entre la faute contractuelle et le dommage un lien de cause à effet. Le dommage, par exemple la perte d’un client, a été provoquée par la faute contractuelle, par exemple le retard de livraison. 2.2.2 Obligations de moyens et de résultat La faute contractuelle n’est pas appréciée de la même façon selon qu’il s’agit d’une obligation de résultat ou de moyens. L’obligation de résultat Dans l’obligation de résultat, le débiteur s’engage sur un résultat donné. Si ce résultat n’est pas obtenu, le débiteur est présumé fautif. Par exemple, dans un contrat de transport, le transporteur s’engage à faire parvenir une marchandise dans un lieu donné et en un temps donné. S’il ne respecte pas sa parole contractuelle, il engage automatiquement sa responsabilité. Toutefois, celle-ci peut être écartée si le débiteur de l’obligation établit l’existence d’une cause d’exonération (force majeure, fait d’un tiers ou du créancier). L’obligation de moyens Dans l’obligation de moyens, le résultat n’est pas promis. Le débiteur s’est seulement engagé à mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour y parvenir. Si le résultat n’est pas obtenu, le débiteur n’est pas présumé fautif. Pour établir une faute éventuelle, le créancier devra lui-même la prouver, en démontrant qu’il y a eu imprudence ou négligence de la part du débiteur. Par exemple, si le médecin ne guérit pas son patient, il n’est pas présumé automatiquement en faute. Le patient devra prouver que le médecin a commis une négligence ou une imprudence. Il devra démontrer que le médecin n’a pas mis au service de son patient toutes les ressources de ses compétences. 2.2.3 Les causes d’exonération du débiteur Pour échapper à la mise en œuvre de sa responsabilité, le débiteur dispose de trois moyens : la force majeure, le fait de la victime et le fait d’un tiers. La force majeure La force majeure est un événement extérieur aux parties et irrésistible. Par exemple, une tempête détruit un hangar dans lequel était entreposé de la marchandise appartenant à une autre personne que le propriétaire. 3 DROIT – COURS DE CLASSE DE PREMIÈRE STG Le fait de la victime Lorsque le comportement de la victime apparaît comme la cause exclusive du dommage, il supprime la responsabilité du débiteur. Par exemple, une personne munie d’un titre de transport monte dans un train en marche ou bien traverse une voie de chemin de fer au lieu d’emprunter le passage souterrain. Le fait d’un tiers Le tiers est toute personne autre que la victime (le défendeur). Si le fait du tiers est la seule cause du préjudice subi par la victime, le défendeur doit être exonéré. Par exemple, un voyageur agressé dans un train par un autre voyageur invoque la responsabilité contractuelle de la SNCF ; celle-ci pourra écarter sa responsabilité en prouvant que le dommage a été causé par le fait d’un tiers, imprévisible et irrésistible. 2.2.4 Le cas particulier des contrats synallagmatiques L’inexécution d’un contrat synallagmatique, c’est-à-dire dont les obligations sont réciproques, offre des voies de recours particulières. En effet, en cas d’inexécution de ces contrats, il est possible de recourir à la résolution ou à la résiliation. La résolution Dans un contrat synallagmatique, les parties contractantes s’engagent réciproquement l’une envers l’autre. Celui qui ne respecte pas sa parole perturbe donc les prévisions de son partenaire. Le créancier qui ne réussit pas à obtenir satisfaction peut alors demander au juge la résolution du contrat, c’est-àdire l’anéantissement rétroactif du contrat synallagmatique. La résolution repose sur une idée de bon sens : l’obligation de l’un n’a plus de raison d’être lorsque l’autre n’en fournit pas la contrepartie. Elle remet les parties dans leur état antérieur (ex. : l’acheteur restitue le bien au vendeur, qui le rembourse). La résiliation Tous les contrats synallagmatiques ne sont pas susceptibles de résolution. Remettre les choses au même et semblable état qu’auparavant est parfois impossible. Il en est ainsi pour les contrats à exécution successive : par exemple, dans un contrat de travail, l’employeur ne peut pas rendre au salarié sa force de travail. Dans ce cas, le contrat est résiliable : ses effets passés demeurent, mais il ne peut plus produire d’effet pour l’avenir. La résiliation est donc l’anéantissement pour l’avenir d’un contrat synallagmatique à exécution successive 4