Les prescriptions en matière de rémunération des agents publics

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Les prescriptions en matière de rémunération des agents publics
Fiches statut
Rémunération
1/26/AH
Direction Expertise statutaire et ressources humaines
Pôle Gestion statutaire
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LE POINT SUR LES PRESCRIPTIONS EN
MATIERE DE REMUNERATION DES
AGENTS PUBLICS
LES ACTIONS EN PAIEMENT CONTRE L’ADMINISTRATION / LES DETTES DE L’ADMINISTRATION /
LES CREANCES DES AGENTS SUR L’ADMINISTRATION
La loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics dispose dans son article 1er que : « Sont prescrites,
au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées
dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits
ont été acquis. Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public. » (NB : Les régions sont exclues de ces dispositions).
Il s’agit de la règle selon laquelle la créance sur une personne publique, quelle qu’en soit la nature,
s’éteint au bout de quatre ans (prescription quadriennale, appelée également déchéance quadriennale). Le
point de départ de la forclusion est, depuis le 1er janvier 1969, fixé au 1er janvier de l’exercice qui suit celui
au cours duquel est née la créance. Ainsi, la prescription quadriennale comporte un délai qui peut varier
entre 4 ans et un jour et 5 ans moins un jour. L’erreur de l’administration ne permet pas d’interrompre la
prescription quadriennale (CE 10/01/2007, n°280217).
En 2010, un arrêt du Conseil d’Etat (CE 12/03/2010, n°309118), concluait qu’en matière de rémunération, la prescription quinquennale de l’article 2224 (nouveau) du code civil trouvait à s’appliquer (Article
2224 « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire
d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer »).
Mais l’arrêt d’espèce, qui se basait sur d’anciennes dispositions du code civil (1), n’a pas été repris
par le Conseil d’Etat qui a continué à appliquer la loi de 1968 et la prescription quadriennale en matière de
créances sur l’administration (CE 21/03/2011, req. n°339062). Il semble donc que malgré la rédaction
de l’arrêt du Conseil d’Etat du 12 mars 2010, la déchéance quadriennale soit toujours applicable
aux dettes de l’administration.
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(1) (Article 2227 « L'Etat, les établissements publics et les communes sont soumis aux mêmes prescriptions
que les particuliers, et peuvent également les opposer », et article 2277 « Se prescrivent par cinq ans
les actions en paiement : Des salaires ; Des arrérages des rentes perpétuelles et viagères et de ceux
des pensions alimentaires ; Des loyers, des fermages et des charges locatives ; Des intérêts des
sommes prêtées, et généralement de tout ce qui est payable par année ou à des termes périodiques
plus courts. Se prescrivent également par cinq ans les actions en répétition des loyers, des fermages et
des charges locatives ».)
CDG 64 – Septembre 2012
2
LES ACTIONS EN REPETITION DE L’INDU / LES CREANCES DE L’ADMINISTRATION SUR LES
AGENTS / RECOUVREMENT DE SOMMES INDUMENT PERÇUES PAR DES AGENTS PUBLICS
2-1
Avant l'intervention de la loi de finances rectificative du 28 décembre 2011
Deux cas de figure pouvaient être distingués : celui des erreurs de liquidation et celui de l’irrégularité
d’une décision individuelle pécuniaire créatrice de droits.
 Les erreurs de liquidation (décision non créatrice de droits)
Les « trop perçus » des agents publics pouvaient être réclamés par l’administration à tout moment,
dans un délai de 5 ans, dès lors qu’ils résultaient d’une erreur de liquidation. Le Conseil d’Etat a eu
l’occasion de le préciser dans l’arrêt du 12 mars 2010 précité. Il a jugé que la prescription quinquennale
prévue à l’article 2224 du code civil (ancien article 2277 du code civil) était applicable aux actions en répétition de l’indu exercées par l’administration contre les agents publics à raison de rémunérations versées en
l’absence de service fait.
Ont été jugé comme constituant des mesures de liquidation un trop-perçu d'une indemnité de résidence provenant d'une erreur de codification du lieu de résidence (CE 03/09/2008, n°299870), une erreur
de saisie informatique accordant une prime (CE09/05/2011, n°339901), le versement de sommes non dues
durant une période de congé maladie (CE 16/02/2011, n°332162), le maintien du plein traitement à un
agent en congé de maladie ordinaire au-delà du délai de trois mois (CAA Versailles 10/07/2008,
n°06VE01835).
 L’irrégularité d’une décision individuelle créatrice de droits
Le Conseil d’Etat a aligné les règles de l’abrogation sur celle du retrait dans un arrêt Coulibaly du 6
mars 2009 (req. n°306084). Les décisions individuelles créant un avantage financier, telles que l’attribution
d’une prime ou d'une nouvelle bonification indiciaire (NBI) (CE 12/12/2008, n°300635), ne pouvaient être
retirées et abrogées qu’à deux conditions : elles devaient être illégales et leur retrait ou leur abrogation devait intervenir dans un délai de 4 mois à compter de la prise de décision.
La frontière entre l’erreur de liquidation et la décision créatrice de droit était parfois particulièrement
ténue, notamment depuis l’intervention de l’arrêt Soulier (CE 06/11/2002 n°223041).
Cette situation en raison de sa complexité, constituait un facteur d’insécurité juridique.
2-2
Depuis l’intervention de la loi du 28 décembre 2011
L’article 94 de la loi de finances rectificative pour 2011 (n°2011-1978), modifiant l’article 37-1 de la
loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, dispose que « Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en
matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter
du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive. / Toutefois, la répétition des sommes versées n'est pas soumise à ce délai dans le cas de paiements indus résultant soit de l'absence d'information de l'administration par un agent de modifications de sa situation personnelle ou familiale susceptibles d'avoir une incidence sur le montant de sa rémunération, soit de la
transmission par un agent d'informations inexactes sur sa situation personnelle ou familiale. / Les deux
premiers alinéas ne s'appliquent pas aux paiements ayant pour fondement une décision créatrice de droits
prise en application d'une disposition réglementaire ayant fait l'objet d'une annulation contentieuse ou une
décision créatrice de droits irrégulière relative à une nomination dans un grade lorsque ces paiements font
pour cette raison l'objet d'une procédure de recouvrement ».
CDG 64 – Septembre 2012
La loi du 28 décembre 2011 inscrit désormais dans le droit positif une solution unique, qu’il s’agisse
de simples erreurs de gestion ou bien de décisions créant un avantage financier. Les créances résultant de
paiements indus en matière de rémunération au profit des agents peuvent être recouvrées dans un délai
de 2 ans à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue
définitive (décision prise depuis plus de 4 mois).
Exemple : une NBI (décision créatrice de droits) versée à tort le 16 janvier 2012 pourra désormais être recouvrée jusqu’au 1er février 2014.
Toutefois, ce délai de deux ans ne s’applique pas lorsque les paiements indus résultent :
- soit du fait que l’agent omet d’informer l'administration des modifications de sa situation personnelle ou familiale susceptibles d'avoir une incidence sur le montant de sa rémunération,
- soit du fait que l’agent transmette des informations inexactes sur sa situation personnelle ou
familiale.
Dans ces deux cas de figure, le délai quinquennal reste en vigueur (CE12/03/2010, n°309118) Le
délai relatif à la prescription quinquennale se calcule en jours et est acquis à l'expiration du dernier jour du
terme (C.Civ. art. 2219, 2228 et 2229).
Il faut cependant rappeler que toute décision obtenue par fraude ne constitue pas une décision créatrice de droits peut être retirée à tout moment (CE 29/11/2002, n°223027 et CE 03/04/2006, n°285656).
L'omission de transmission ou la transmission d'informations inexactes pour obtenir un avantage financier
peut constituer une fraude et exclure l'application des règles de prescription.
Enfin, le délai de 4 mois reste de rigueur pour le retrait ou l’abrogation :
 d'une décision créatrice de droits, prise en application d'une disposition réglementaire ayant fait
l'objet d'une annulation contentieuse
 d'une décision créatrice de droits irrégulière relative à une nomination dans un grade.
Les nouvelles dispositions de l’article 94 ne s’appliquent pas aux paiements faisant l'objet d'instances contentieuses en cours à la date de publication de cette loi.
----------------------------------------DETTES DE
L'ADMINISTRATION
CREANCES DE L'ADMINISTRATION
Type de prescription
Prescription quadriennale
Prescription biennale
Point de départ
de la forclusion
A compter du 1er janvier de
l’exercice qui suit celui au
cours duquel est née la
créance.
A compter du premier jour du mois suivant celui de la date
de mise en paiement du versement erroné y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de
droits irrégulière devenue définitive
- sauf lorsque la décision à l'origine de la créance est née de
l'omission ou de la transmission erronée d'information par
l'agent à l'administration : 5 ans
Exceptions
X
- sauf lorsque la décision à l'origine de la créance est née de
l'omission ou de la transmission erronée d'information par
l'agent à l'administration de nature frauduleuse : pas de délai
de retrait ou d'abrogation.
- sauf lorsque la décision créatrice de droits a été prise en
application d'une disposition réglementaire ayant fait l'objet
d'une annulation contentieuse ou qu'elle est irrégulière et
relative à une nomination dans un grade: 4 mois.
CDG 64 – Septembre 2012