informations pratiques en matiere d`expropriation - anthian

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L'application de la prescription quadriennale instaurée par
la loi n°68-1250 du 31 décembre 1968.
L'article 1 de ladite loi précise que "sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et
des communes,(…) toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à
partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis".
Cet article appelle les commentaires suivants:
I) Le domaine de la déchéance quadriennale.
Les créances contre l'Etat et les collectivités locales s'éteignent donc par l'effet de la
déchéance quadriennale.
Le champ d'application de cette prescription est général.
Il appréhende toutes les créances détenues sur la collectivité publique, quelle que
soit leur origine (contractuelle, quasi-contractuelle, délictuelle ou quasi-délictuelle).
La déchéance concerne aussi bien les créances ayant pour origine l'exécution d'un
contrat que celles résultant de la mise en cause de la responsabilité de la commune ou
d'actes de gestion du domaine privé de la collectivité.
La prescription quadriennale s'applique également aux demandes en
dédommagement d'une réquisition (CE 3 janvier 1958, Ministre de l'Agriculture c. Flandrois),
d'une confiscation (CE 10 novembre 1961, Sieur Renault), et aux créances rattachées à une
expropriation irrégulière devenue définitive (CE 8 novembre 1963, MERLIN).
Le fait que la dette de la personne publique soit régie par le droit civil et relève de la
compétence des tribunaux judiciaires ne saurait faire obstacle à l'application de la législation
soumettant à la déchéance quadriennale les créances sur les collectivités publiques: il en est
ainsi, particulièrement, en ce qui concerne les dommages causés par les véhicules ( Trib.
des Conflits, 21 janvier 1985, Préfet de la Région Lorraine c. Cour d'Appel de Metz).
Par ailleurs, la déchéance quadriennale a lieu de jouer quelle que soit la qualité du
créancier: étranger ou de nationalité française, personne privée ou personne publique.
Les limites concernant son domaine d'application sont:
- les actions relatives à l'exercice de droits réels;
- la déchéance ne joue que pour les créances "certaines, liquides et exigibles";
- l'existence de textes spéciaux soumettant les créances à d'autres prescriptions (ex:
arrérages de rentes : loi du 24 août 1793 ou arrérages de pensions : loi du 9 juin 1953);
- l'article 5 de la loi de 1968 prévoit que les créances au paiement desquelles il a été
fait opposition entre les mains d'un comptable public ne sont plus soumises à la prescription,
à partir de la date de l'opposition;
- elle ne peut pas être invoquée pour les créances nées d'une décision de justice
passée en force de chose jugée (article 7 al 2 de la loi du 31.12.1968).
II) La mise en œuvre de la déchéance quadriennale:
Pour les collectivités locales, seul l'ordonnateur a compétence pour opposer la
prescription quadriennale.
Le juge exerce un contrôle strict de la qualité de la personne ayant pris la décision
d'opposer la prescription. Le mandataire de la commune, par exemple un avocat, n'a pas
qualité pour opposer la prescription quadriennale (CE 29 juillet 1983 Ville de
Toulouse/Tomps). Quant aux comptables publics, ils ne peuvent qu'informer l'ordonnateur et
suspendre le paiement en attendant sa réponse.
La prescription quadriennale n'est opposée de manière valable que par une décision
expresse. La décision doit être écrite et spéciale, signée par l'autorité compétente de la
collectivité et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait justifiant la
prescription.
En principe, les autorités administratives ne peuvent renoncer à opposer la
prescription quadriennale(article 6 al 1de la loi de 1968). Cependant par exception, en raison
de circonstances particulières et notamment de la situation du créancier, ce dernier peut être
relevé en tout ou partie de la prescription quadriennale.
Cette décision de relevé de prescription est prise par une délibération motivée de
l'organe délibérant. Aucun effet de seuil n'est prévu pour les collectivités (art 6 al 3 de la loi
de 1968).
III) Les limites de sa mise en œuvre:
Dans ce cadre juridique très protecteur pour les finances publiques, le législateur se
devait d'organiser, malgé tout, un minimum de protection pour le créancier de la personne
publique, qui aurait sans cela bien des difficultés à recouvrer sa créance. Ainsi, la loi du 31
décembre 1968 prévoit deux blocs de dispositions: le premier envisage les cas d'interruption
de la prescription (art 2 de la loi), le deuxième, les cas de suspension (art 3).
Ces deux notions ne doivent pas être confondues:
-L'interruption fait s'arrêter le délai de la prescription et, au 1er janvier de l'année
suivant la date d'interruption, c'est un nouveau délai de 4 ans qui débute.
-La suspension fait également s'arrêter la prescription, cependant c'est le même délai
qui repart dès la fin de la suspension, en tenant compte du temps déjà écoulé.
A) Les cas d'interruption de la prescription:
Aux termes de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968, la prescription quadriennale
fait l'objet d'une interruption dans 4 situations bien précises:
- suite à une demande de paiement ou une réclamation écrite adressée par un
créancier à l'autorité administrative, quelle que soit la personne publique destinataire. Ce
document, pour être efficace à l'égard de la prescription quadriennale, doit faire référence
expressément au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance.
- suite à un recours contentieux exercé à propos du fait générateur, de l'existence, du
montant ou du paiement de la créance. Ceci est valable quels que soient l'auteur du recours,
la juridiction (même si elle est incompétente), l'administration partie à l'instance (même si elle
n'est pas la personne publique débitrice). Dans l'hypothèse d'un recours contentieux, le
nouveau délai de prescription quadriennale débute au 1er janvier de l'année suivant celle au
cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée.
- suite à une communication écrite d'une administration intéressée, même si elle n'est
pas adressée au créancier, et dès lors qu'elle a trait au fait générateur, à l'existence, au
montant ou au paiement de la créance.
- suite à l'émission d'un moyen de règlement, même si ce règlement ne couvre
qu'une partie de la créance ou si le créancier n'a pas été exactement désigné.
B) Les cas de suspension de la prescription:
A côté de ces cas d'interruption objectifs qui sont d'application stricte et que les
juridictions prennent en compte dès lors que les conditions sont remplies, il existe des cas de
suspension de la prescription, qui sont beaucoup plus subjectifs et pour lesquels le juge
administratif à une latitude d'appréciation plus large. Ces cas de suspension sont prévus à
l'article 3 de la loi de 1968 qui indique que "la prescription ne court ni contre le créancier qui
ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une
cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant
l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement".
La jurisprudence du Conseil d'Etat reflète l'application stricte qui est faite de cet article
3 par les juridictions administratives. L'impossibilité d'agir doit être réelle et dans les cas de
force majeure, toutes les conditions doivent être remplies (caractère imprévisible, irrésistible
et extérieur à la cause).
En ce qui concerne la légitime ignorance du créancier, l'attitude des juges est encore
plus restrictive. Le créancier doit avoir été dans l'impossibilité de connaître l'existence de sa
créance, c'est-à-dire que cette existence doit n'avoir été mentionnée dans aucune
publication auquel il aurait pu avoir accès. Le juge s'efforce toujours de rechercher dans ce
cas si les circonstances ont bien entraîné une ignorance réelle et insurmontable du
créancier.
Conclusion: Même si la loi du 31 décembre a atténué le principe de la déchéance
quadriennale, cette dernière reste un moyen de défense majeur pour les personnes
publiques.
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Loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968
Loi relative à la prescription des créances sur l'Etat, les
départements, les communes et les établissements publics
Article 1
Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes,
sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous
réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas
été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année
suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Sont prescrites,
dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les
établissements publics dotés d'un comptable public.
Article 2
La prescription est interrompue par : Toute demande de paiement ou toute
réclamation écrite adresée par un créancier à l'autorité administative, dès
lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à
l'existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que
l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du
règlement. Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait
générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel
que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est
incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement
la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ; Toute communication
écrite d'une administration intérressée, même si cette communication n'a
pas été faite directement au créancier qui s'en prévaut, dès lors que cette
communication a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au
paiement de la créance ; Toute émission de moyen de règlement, même si
ce règlement ne couvre qu'une partie de la créance ou si le créancier n'a
pas été exactement désigné. Un nouveau délai de quatre ans court à
compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu
lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours
juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année
suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose
jugée.
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Article 3
La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par luimême ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause
de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé
comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il
représente légalement.
Article 4
Les dispositions de la présente loi ne s'appliquent pas en matière de
remboursement de dépôts et de consignations, non plus qu'aux intérêts
des sommes déposées ou consignées .
Article 5
Les créances au paiement desquelles il a été fait opposition entre les mains
d'un comptable public ne sont plus soumises à la prescription à partir de la
date de l'opposition .
Article 6
Modifié par Décret 98-81 1998-02-11 art. 1 JORF 14 février 1998.
Les autorités administratives ne peuvent renoncer à opposer la prescription
qui découle de la présente loi. Toutefois, des autorités administratives
compétentes, les créanciers de l'Etat peuvent être relevés en tout ou en
partie de la prescription, à raison de circonstances particulières et
notamment de la situation du créancier . La même décision peut être prise
en faveur des créanciers des départements, des communes et des
établissements publics, par délibérations prises respectivement par les
conseils généraux, les conseils municipaux et les conseils ou organes
chargés des établissements publics. Ces délibérations doivent être
motivées et être approuvées par l'autorité compétente pour approuver le
budget de la collectivité intéressée.
Article 7
L'Administration doit, pour pouvoir se prévaloir, à propos d'une créance
litigieuse, de la prescription prévue par la présente loi, l'invoquer avant que
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la juridiction saisie du litige au premier degré se soit prononcée sur le fond.
En aucun cas, la prescription ne peut être invoquée par l'Administration
pour s'opposer à l'exécution d'une décision passée en force de chose jugée.
Article 8
La juridiction compétente pour connaître de la demande à laquelle la
prescription est opposée, en vertu de la présente loi, est compétente pour
statuer sur l'exception de prescription.
Article 9
Les dispositions de la présente loi sont applicables aux créances nées
antérieurement à la date de son entrée en vigueur et non encore atteintes
de déchéance à cette même date . Les causes d'interruption et de
suspension prévues aux articles 2 et 3, survenues avant cette date,
produisent effet à l'égard de ces mêmes créances.
Article 10
Sont abrogées toutes dispositions contraires à celles de la présente loi et
notamment les article 9, 9 bis et 10 de la loi modifiée du 29 janvier 1831.
Article 11
Modifié par Loi 99-209 1999-03-19 art. 222 JORF 21 mars 1999.
En Nouvelle-Calédonie, à Saint-Pierre-et-Miquelon dans les territoires de la
Polynésie française, des Terres australes et antarctiques françaises et des
îles Wallis et Futuna, la présente loi est applicable aux créances
mentionnées à l'article 1er ainsi qu'aux créances sur ces territoires. Dans
les îles Wallis et Futuna, la présente loi est également applicable aux
créances sur les circonscriptions.
Par le Président de la République : C. DE GAULLE Le Premier ministre,
MAURICE COUVE DE MURVILLE. Le ministre d'Etat, garde des sceaux,
ministre de la justice, par intérim, JEAN-MARCEL JEANNENEY. Le ministre
de l'économie et des finances, FRANCOIS ORTOLI.
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TRAVAUX PREPARATOIRES: Assemblée nationale: Projet de loi n° 338;
Rapport de M. Baudouin, au nom de la commission des lois (n° 468);
Discussion et adoption le 28 novembre 1968. Sénat: Projet de loi, adopté
par l'Assemblée nationale, n° 69 (1968-1969); Rapport de m. Mignot, au
nom de la commission des lois, n° 98 (1968- 1969); Discussion et adoption
le 19 décembre 1968.
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