distribution : pfizer unichem, une affaire à suivre
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distribution : pfizer unichem, une affaire à suivre
26 a c t u a l i t é s DISTRIBUTION PFIZERUNICHEM, UNE AFFAIRE À SUIVRE Depuis le mois dernier, la filiale anglaise du laboratoire Pfizer fait distribuer ses médicaments par un prestataire unique : la société Unichem. Les répartiteurs anglais et européens ont organisé une riposte. Portée devant la « Haute Cour », l’affaire n’est pas encore tranchée par l’Office du commerce équitable. —————— J-J. CRISTOFARI sons, ouvert 24 h/24, flexible et réacepuis le 5 mars dernier, les tif, sur lequel comptent les malades médicaments vendus par le et les prescripteurs du Royaume-Uni laboratoire Pfizer sur le terest sérieusement menacé par les ritoire du Royaume-Uni plans de sociétés pharmaceutiques, sont distribués par la seule société qui cherchent à contrôler la distribuUnichem, filiale du groupe Alliance tion et la formation des prix de leurs Healthcare (ex-Alliance Boots produits », avançait en février dernier WSCA), leader européen de la réparle directeur exécutif de l’association, tition pharmaceutique. Le choix Martin Sawer. Pour ce dernier, opéré par Pfizer de recourir aux serl’émergence d’un modèle mixte de vices d’un unique prestataire a prodistribution des médicaments voqué en septembre dernier une conduit à terme à peser sur les pharlevée de bouclier dans les rangs des macies, à réduire la comrépartiteurs(1). A l’appétition entre les répartipui de son choix d’un teurs et à augmenter les logisticien unique, Le dossier n’est coûts à charge du NHS. Pfizer UK fait alors toujours pas valoir la nécessité de Feu vert au DTP. Aussise rapprocher des oftranché tôt portée par les répartificines, de sécuriser teurs devant l’Office du ses livraisons et de c o m m e rc e é q u i t a b l e contrecarrer plus effi[l’équivalant de l’autorité de la cacement la pénétration des médicaconcurrence] (Office Fair Trading), ments contrefaits sur ses propres l’affaire a donné lieu, dans un preg a m m e s. Un e e x p l i c a t i o n q u e mier temps, à une action en référé contestent aussitôt les répartiteurs devant la Haute Cour du Royaumeanglais, en tête desquels figurent les Uni. Lancée par un groupe de huit filiales anglaises des groupes allegrossistes au motif que le choix d’un mands Celesio (AAH Pharmaceutiunique répartiteur constitue « une cals) et Phoenix (Phoenix Health Care entrave à la concurrence et un libre Distribution), largement soutenus choix », le référé est toutefois rejeté par d’autres membres du BAWP(2), association qui rassemble les grossistes par la même Cour, en début mars, à du secteur. « Le BAPW croît que le la veille de la mise en place de l’acservice de commandes et de livraicord Pfizer Unichem. Pour le Dr Da- D P H A R M A C E U T I Q U E S _ AV R I L 2 0 0 7 vid Baker, président de la DDA(3), qui rassemble les médecins anglais propharmaciens, la décision des juges de la Haute Cour est lourde de conséquences. « Si vous avez une seule chaîne d’approvisionnement et que celle-ci se brise, nous n’aurons plus aucune possibilité de nous fournir en produits estampillés Pfizer, ce qui sera dommageable », commente ce dernier. Mais ce que craint surtout le représentant des médecins dispensateurs, tout comme les répartiteurs, c’est que d’autres laboratoires emboîtent le pas du géant mondial et réduisent également leur nombre de prestataires. « Un bon nombre d’autres sociétés considèrent des modèles similaires, bien que, à ce que nous comprenons, aucune d’entre elles ne considère encore réellement la voie du fournisseur unique », indique le Dr Baker, qui pressent que cet accord pourrait faire école. Reste que le dossier relatif à ce nouveau modèle « direct to pharmacy » (DTP) est encore dans les (1) Cf. « Avis de Tempête dans la distribution », Pharmaceutiques, décembre 2006 (2) British Association of Pharmaceutical Wholesalers (3) Dispensing Doctors Association (4) OPA lancée par fonds d'investissement Kohlberg Kravis Roberts (KKR) et Stefano Pessina, vice-Président d'Alliance Boots 27 mains de l’OFT qui, mi-mars, n’a toujours pas tranché. « La compagnie est confiante dans le fait que le nouvel accord de distribution est parfaitement conforme avec les lois applicables en Europe et en Angleterre », indique le laboratoire Pfizer à l’annonce de la décision de la Haute Cour, qui lui donne en quelque sorte un feu vert au DTP. Du côté du pres- tataire, on se veut tout aussi rassurant. Ornella Barra, Wholesale and Commercial Affairs Director d’Alliance Boots WSCA, confirme son soutien aux pharmaciens qu’elle place au cœur de sa stratégie. « Le marché pharmaceutique est en évolution constante et les changements structurels actuels auront un impact beaucoup plus important à l’avenir, L E GIRP REJETTE LE MODÈLE ANGLAIS Monika Derecque-Pois, directrice générale du Groupement international de la répartition pharmaceutique (GIRP), basé à Bruxelles, fait le point sur les conséquences de l’accord Pfizer-Unichem. La Haute Cour a tranché. Allezvous aller plus loin et porter le dossier devant la Commission européenne ? > Le fait que la « High Court » n’a pas accepté le principe d’une action en référé ne préjuge en rien de la légalité du nouveau système mis en place par Pfizer. Et la question de sa compatibilité avec les règles de la concurrence au niveau national reste complètement ouverte ! Nous n’avons pas encore considéré que cette action mérite d’être portée devant les instances européennes. Cet accord remet en cause un modèle « historique » de la répartition. Quelles réponses lui apportez-vous ? > Sur la base du modèle de distribution à gamme complète, les membres du GIRP remplissent une obligation de service public vital en garantissant la disponibilité continue de toute la gamme de produits pharmaceutiques disponible sur le marché à tous les citoyens européens. En France, dans un dépôt de répartiteur, 12 % de tous les produits sous prescription représentent 80 % du chiffre d’affaires de ce dépôt. Alors que les 88 % restants comptent seulement pour 20 % du chiffre d’affaires. Si les producteurs de médicaments qui représentent ces 12 % décident de faire distribuer leurs spécialités de la même façon que Pfizer au Royaume-Uni, la plupart des grossistes ne seront pas en mesure de maintenir leur niveau de service actuel, ni d’opérer en tant que grossistes à gamme complète. La question de savoir comment sera garanti l’accès des patients à tous les médicaments, à tout moment et partout dans le pays, devra donc être prise en compte par les autorités de santé. Les grossistes-répartiteurs remplissent comparé aux changements que nous avons vécus ces dix dernières années », pronostique la directrice. Nul doute que le leader européen de la répartition, objet à la mi-mars d’une OPA(4), entend conserver la main dans la difficile partie qui se joue désormais sur le terrain de la distribution. A l’évidence, les changements s’y préparent là aussi. ■ d’une manière générale une fonction essentielle dans la protection de la santé publique. Ils doivent être considérés de façon différente des sociétés qui ne distribuent que les médicaments les plus vendus et les plus rentables et qui ne voient dans la distribution de médicaments qu’un moyen de réaliser des profits sans assurer un rôle de service public. Pensez-vous que ce modèle anglais du DTP soit de nature à réduire les coûts de la distribution ? >Il est illusoire de penser que le modèle mis en place actuellement en Grande-Bretagne apportera des réductions de coûts significatives pour Pfizer, dans la mesure où le laboratoire sera obligé de concéder des réductions suffisamment importantes aux pharmacies pour couvrir leur « claw back » (qui est souvent presque aussi important que les marges elles-mêmes !). De plus, Pfizer aura à financer la marge du « fournisseur de logistique », en contrepartie de la livraison des médicaments aux pharmacies. Dans le cas où ces accords de « direct to pharmacies » se multiplieront, ils augmenteront de façon significative le coût global de la distribution des médicaments. A l’heure actuelle, les grossistes pharmaceutiques mettent à la disposition de leurs partenaires de la chaîne de distribution – producteurs et pharmacies – des services à valeur ajoutée qui sont en permanence améliorés et ajustés à leurs besoins. ■ Retrouvez chaque jour sur notre site www.pharmaceutiques.com rubrique Emploi&Carrières, les offres (des laboratoires et des prestataires) et demandes d’emplois dans le secteur pharmaceutique. Renseignements et tarifs : 01 44 05 83 37 ou [email protected] AV R I L 2 0 0 7 _ P H A R M A C E U T I Q U E S