Dépistage de la syphilis dans le cadre d`un programme de réduction
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Dépistage de la syphilis dans le cadre d`un programme de réduction
SANTÉ PUBLIQUE Dépistage de la syphilis dans le cadre d’un pro- gramme de réduction de la transmission mère-enfant du VIH : exemple du centre de santé de Wassakara à Abidjan. J. L. Rey (1), M. Coulibaly (1) & V. Noba (2) (1) ESTHER (Ensemble pour une solidarité thérapeutique hospitalière en réseau), 36 rue de Charenton, 75012 Paris, France, E-mail : [email protected] (2) Programme MTCT+, Abidjan, Côte-d'Ivoire. Courte note n° 2657. “Santé publique”. Reçue le 06 juillet 2004. Acceptée le 24 mai 2005. Summary: Syphilis test proposed within the context of a programme to reduce mother/child HIV transmission: example of the Wassakara health care center in Abidjan. During program MTCT+ set up in Abidjan by national authorities with the assistance of the Fonds de solidarité thérapeutique international (FSTI) and Fondation Glaxo Smith Kline (FGSK) free tracking and treatment of the infection by syphilis were proposed to the pregnant women. The practised examinations were one test of agglutination on blades VDRL (Carbon Antigen Biotec the U.K.) and one TPHA test on plates for the positive VDRL (TPHA Nosticon Biomérieux F). Over the period from June 1999 to December 2001, there were 4,320 taking away carried. The laboratory observed 84 positive tests VDRL and 59 confirmed by TPHA, either a seroprevalence syphilis (TPHA) of 1,4 %. In addition there were 391 inalienable results for various reasons (errors of numbering, haemolysed blood, absence of reagents, etc.) or 9,0 %. Among the 59 positive women (TPHA), 30 came to seek their result and 23 women were treated correctly (3 or 4 penicillin delay injections). In addition 7 partners received complete treatment and 8 incomplete treatment. The cost of each detected and treaty case rose with approximately 150 euros, which is relatively low except in temps/personnel and indirect costs for the women. This study confirmed that to make operational a program of MTCT, it is necessary that all the activities of SMI are integrated. The biological assessment must be accessible as a whole, to minimize the additional costs and displacements. A training of all the personnel in 2002 made it possible to improve in an important way the results of the intervention in the center. Introduction L e Fonds de solidarité thérapeutique international (FSTI) a mis en place en 1999, avec la Fondation Glaxo Smith Kline (FGSK) et le Programme national de lutte contre le sida de Côte-d’Ivoire, un programme opérationnel de réduction de la transmission mère-enfant avec prise en charge globale de la cellule familiale (PTME+) dans quatre centres de santé maternelle et infantile (SMI) de la ville d’Abidjan (1). Deux des centres ont été pris en charge en 2000 par le projet américain RétroCI, les deux centres situés à Yopougon ont été suivis jusqu’en 2003 par le FSTI. Méthodologie À toutes les femmes enceintes venant pour une première consultation prénatale était proposé, au cours d’un entretien individuel, un dépistage pour le VIH et la syphilis ; Santé publique serology syphilis SR program MTCT+ Abidjan Côte-d'Ivoire Sub-Saharan Africa sérologie syphilis santé reproductive programme PTME+ Abidjan Côte-d'Ivoire Afrique intertropicale ces examens étaient assurés gratuitement par le programme. Le dépistage de la syphilis était proposé parce que faisant partie du bilan prénatal imposé par la loi, ainsi que le dosage de l’hémoglobine. Les examens pour la syphilis étaient réalisés dans la structure et rendus lors de la consultation suivante. Les tests VIH étaient réalisés dans un laboratoire de référence et rendus lors d’un conseil post-test environ deux semaines après, jusqu’en juin 2000 ; depuis, dans les 72 heures suivantes, tous les examens étant pratiqués sur place par « tests rapides ». Pour la syphilis les examens pratiqués étaient un test d’agglutination sur lames VDRL (Carbone Antigen Biotec UK) et un test TPHA sur plaques pour les VDRL positifs (TPHA Nosticon Biomérieux F). Afin d’évaluer cette activité de dépistage, qui n’intervient pas directement dans le processus de PTME, nous avons repris le cahier de dépistage syphilis du centre de SMI de Yopougon Wassakara et analysé les données concernant les femmes enceintes portant sur la période de juin 1999 à décembre 2001. 390 Dépistage de la syphilis dans le cadre dʼun programme de réduction de la transmission mère-enfant du VIH. Résultats S ur la période concernée, il y a eu 4 320 prélèvements effectués pour sérologie VIH et syphilis. Pour la syphilis, le laboratoire a observé 84 tests VDRL positifs et 59 ont été confirmés par TPHA, soit une séroprévalence syphilis (TPHA) de 1,4 %. Par ailleurs, il y a eu 391 résultats indisponibles pour diverses raisons (erreurs de numérotage, sang hémolysé, absence de réactifs, etc.), soit 9 %. Le nombre total de femmes qui sont revenues chercher leurs résultats était de 2 477, soit un taux de retour global de 57,3 %. Parmi les 59 femmes positives (TPHA), le taux de retour est de 50,8 % (DNS/p = 0,3). Pour le VIH, 66 % des femmes étaient revenues chercher leur résultat de sérologie et 57 % des femmes séropositives. Sur ces 2 942 femmes informées, 313 sont infectées par le VIH et 179 ont bénéficié d’une intervention de PTME par AZT. Nous n’avons pas pu relier les deux résultats, les deux activités étant séparées au niveau du laboratoire. Pour la syphilis, l’âge moyen des femmes séropositives (21,1 ans +/– 5,9) était significativement (p = 0,04) plus jeune que celui des femmes séronégatives (23,7 ans +/– 4,2). Il a été proposé à toutes les femmes (et leurs conjoints) un traitement gratuit anti syphilitique ; nous avons donc analysé le cahier des traitements réalisés par la formation. Sur les 30 femmes informées de leur sérologie syphilis, 23 femmes ont été traitées correctement (trois ou quatre injections de pénicilline retard) et 7 ont reçu un traitement incomplet (une ou deux injections de pénicilline retard). Par ailleurs, 7 conjoints ont reçu un traitement complet, et 8 un traitement incomplet. Cette faible participation des conjoints est retrouvée dans le cadre du dépistage du VIH, pour lequel seuls 14 % des conjoints sont venus se faire dépister. Dans les deux cas, il s’avère impossible à de nombreuses femmes d’informer leur partenaire. Le coût d’un dépistage de la syphilis étant évalué à 2 euros (réactifs, matériel et salaires), le coût du dépistage d’un cas positif pouvait s’estimer à 149 euros. Le coût d’un traitement complet étant de 6 euros, le coût d’un cas dépisté et traité s’élevait à environ 150 euros. Discussion C ette étude a confirmé que, pour rendre opérationnel un programme de PTME, il est nécessaire que toutes les activités de SMI soient intégrées (2). L’apparition du sida a entraîné des activités supplémentaires dans le cadre de la Bull Soc Pathol Exot, 2005, 98, 5, 390-391 SMI : souvent, comme dans cette évaluation, ces activités ont été ajoutées sans être intégrées. Le bilan biologique doit être accessible dans sa globalité pour minimiser les coûts annexes et les déplacements. Le dépistage du VIH et les autres examens biologiques doivent être réalisés et les résultats rendus dans un même temps : dans notre étude, le taux de retour, en deux temps, était de 66 % pour le VIH, et de 57 % pour la syphilis (p = 10-5). La différence entre les deux taux peut être attribué au rôle du conseil pré et post-test, présent pour le VIH et pas pour la syphilis. La proportion de femmes ayant reçu leurs résultats est un indicateur majeur, car le post test permet à la femme d’avoir des informations sur la conduite à tenir pour rester négative ou pour éviter la contamination de son enfant, ce qui est vrai aussi bien pour le VIH que pour la syphilis. Se pose aussi la question du contenu du bilan biologique ; il est nécessaire de le discuter entre tous les responsables concernés, car l’accessibilité à la PTME est diminuée si la disponibilité et/ou le coût du bilan prénatal complet est un obstacle et si les déplacements demandés aux femmes enceintes se multiplient. Dans le cas du centre étudié, on aurait même pu se poser la question de l’utilité du dépistage de la syphilis, car il faut faire 100 tests pour dépister un test positif et seulement un traitement sur deux est réalisé. Il serait alors possible de faire porter les efforts sur d’autres activités plus « rentables », par exemple sur une amélioration de la qualité globale du laboratoire. Il est, en effet, urgent de corriger les 9 % de résultats non disponibles pour des raisons liées au fonctionnement du laboratoire. Au total, se confirme la nécessité pour entreprendre une action de PTME de réfléchir, dès le départ, à une réelle intégration de toutes les activités de SMI et d’impliquer l’ensemble des acteurs (sages femmes, infirmiers, administratifs, laboratoire, travailleurs sociaux, personnel d’entretien, associations). Une formation commune de tout le personnel en 2002 a permis d’améliorer de façon importante les résultats de l’intervention dans le centre étudié. Références bibliographiques 1. 2. COULIBALY M, NOBA V, REY JL, MSELLATI P, EKPINI R, et al. – Bilan de l’intervention de PTME du programme PNLS/ FSTI à Abidjan (Côte-d’Ivoire, 1999-2002) (accepté pour publication, Méd. Trop.). OMS – WHO Strategic Approaches to the Prevention of HIV Infection in Infants. Report of a WHO meeting Morges 20-22 march 2002, Genève. 391