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Fiche à jour au 29 novembre 2011
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Matière : Droit des obligations
Auteurs : Nicolas RIAS, Clément DUREZ
SEEAANNCCEE NN° 8 : LLAA CCAAUUSSEE (2DDEE PPAARRTTIIEE)
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LA CAUSE DU CONTRAT
5 I. LA NOTION DE CAUSE DU CONTRAT
5 II. 5 L’UTILITE DE LA CAUSE DU CONTRAT
A. LE CONTROLE DE LA CONFORMITE DES CONVENTIONS A L’ORDRE
PUBLIC ET AUX BONNES MŒURS
5 1. 5 2. CAUSE ILLICITE ET ATTEINTE A L’ORDRE PUBLIC
Civ. 1ère, 11 juin 1996
6 Com., 19 novembre 1991
7 Soc., 19 novembre 1996
7 CAUSE ILLICITE ET ATTEINTE AUX BONNES MŒURS
8 ère
9 ère
Civ. 1 , 3 février 1999
9 Ass. Plén., 29 octobre 2004
10 Civ. 1 , 12 mai 1982
Date de création du document : année universitaire 2010/2011
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B. LE CONTROLE DE L’ECONOMIE GENERALE DES CONVENTIONS
Civ. 1ère, 3 juillet 1996
11 11 III. LA SANCTION DE L’ILLICEITE DE LA CAUSE DU
CONTRAT
11 Civ. 1ère, 22 janvier 1975
11 Civ. 1ère, 7 octobre 1998
12 04/01/2012 - 1:11
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contrat).
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La cause du contrat
La notion de cause du contrat une fois cernée (I), il conviendra de
préciser quelle est son utilité (II), et la sanction prononcée lorsqu’elle ne
présente pas les caractères requis (III).
I. La notion de cause du contrat
Encore désignée sous le terme de cause subjective, la cause du contrat
consiste dans les motifs qui ont déterminé les parties à conclure, dans
l’objectif pratique et concret que ces dernières veulent atteindre. Ceci
étant, tous les mobiles ne sont pas nécessairement érigés en cause de la
convention. En effet, seul le motif déterminant, c’est-à-dire celui en
l’absence duquel le contractant ne se serait pas engagé, est pris en
compte.
II. L’utilité de la cause du contrat
Aux termes des articles 1131 et 1133 du Code civil, la cause du contrat
doit être licite pour que ce dernier puisse être considéré comme
valablement formé. Elle constitue donc, classiquement, un instrument de
vérification de la conformité des conventions à l’ordre public et aux
bonnes mœurs (A). Plus récemment, la jurisprudence a sollicité la notion
de cause subjective dans le but de contrôler l’économie générale des
conventions (B).
A. Le contrôle de la conformité des conventions à l’ordre
public et aux bonnes mœurs
La cause du contrat sera considérée comme illicite dès lors qu’elle
contrevient à l’ordre public (1) ou aux bonnes mœurs (2).
1. Cause illicite et atteinte à l’ordre public
Ce sont notamment dans les hypothèses d’exercice illégal d’une
profession que des exemples de cause illicite d’une convention découlant
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d’une violation de l’ordre public peuvent être trouvées.
- Cause illicite et exercice illégal de la profession de médecin
Civ. 1ère, 11 juin 1996
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu
l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Les Centres Hélène Gale, société à
responsabilité limitée, dont le siège social est 22, cours du Chapeau, 33000
Bordeaux,
en cassation d'un arrêt rendu le 5 avril 1994 par la cour d'appel d'Orléans
(chambre civile, 2ème section), au profit de M. Lefèvre, ès qualités de
liquidateur de la liquidation judiciaire de Paulette Etourmy, demeurant 14,
Jardin de Beaume, 37000 Tours,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de
cassation annexé au présent arrêt;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de
l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 16 avril 1996, où étaient
présents : M. Lemontey, président, M. Ancel, conseiller rapporteur, M.
Grégoire, conseiller, M. Gaunet, avocat général, Mme Collet, greffier de
chambre;
Sur le rapport de M. le conseiller Ancel, les observations de Me Hémery,
avocat de la société Les Centres Hélène Gale, les conclusions de M. Gaunet,
avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu que la société "Les Centres Hélène Gale" fait grief à l'arrêt attaqué
(Orléans, 5 avril 1994) d'avoir annulé pour cause illicite le contrat de
franchise conclu avec Mme Etourmy, en retenant que les pratiques qu'elle
devait mettre en oeuvre étaient constitutives d’exercice illégal de la médecine
ou de la pharmacie, sans avoir relevé, à la charge du franchiseur, aucun des
éléments constitutifs de ces infractions;
Mais attendu que, sans avoir à constater tous les éléments constitutifs des
délits d’exercice illégal de la médecine ou de la pharmacie, la cour d'appel a
retenu que le consentement de Mme Etourmy avait été déterminé par la
perspective d'exercer diverses pratiques dites de "médecine douce", pour la
mise en oeuvre d'une méthode d'amaigrissement et de rajeunissement
associant diététique, acupuncture et auriculothérapie ;
qu'ayant relevé que ces pratiques étaient prohibées par la loi dans le cadre
d'une activité comme celle mise en place par le contrat de franchise, elle a pu
en déduire que la cause du contrat était illicite;
Qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
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- Cause illicite et exercice illégal des prérogatives relevant des seuls
établissements de crédit
Com., 19 novembre 1991
Sur le moyen unique :
Vu les articles 3 et 10 de la loi du 24 janvier 1984 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Lejeune s'est approvisionné en
cassettes pour magnétoscopes auprès de la société DPM par un contrat que la
cour d'appel a qualifié de crédit-bail ; qu'il en a demandé l'annulation en
faisant valoir que la pratique habituelle des opérations de crédit-bail est
réservée aux établissements de crédit, qualité que n'a pas son cocontractant ;
Attendu que, pour rejeter cette demande, la cour d'appel retient que
l'inobservation de la règle invoquée ne peut trouver de sanctions que dans
d'éventuelles poursuites pénales, mais ne peut avoir de conséquences sur la
validité des contrats particuliers ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'interdiction pesant sur toute personne
autre qu'un établissement de crédit d'effectuer à titre habituel des opérations
de crédit-bail protège, non seulement l'intérêt général et celui des
établissements de crédit, mais aussi celui des crédit-preneurs, et que sont, dès
lors, recevables les actions engagées par eux et tendant à l'annulation des
conventions conclues en infraction à la règle précitée, la cour d'appel a violé
les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt n° 916/89 rendu le
28 septembre 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en
conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant
ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims
La cause illicite par la violation de l’ordre public peut encore résulter
d’une clause de non concurrence qui, en raison de circonstances
particulières, porterait atteinte au principe de la liberté du commerce et
de l’industrie.
Soc., 19 novembre 1996
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 7 de la loi des 2-17 mars 1791 et le principe constitutionnel de la
liberté du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 30 avril 1992, la société Auto Service
34, concessionnaire Fiat et Lancia à Béziers, a fait signer à M. Martinez, qui
travaillait à son service depuis 1980 en qualité de magasinier, une lettre en
vertu de laquelle, en cas de cessation de son contrat de travail pour une cause
quelconque, il s'interdisait, à moins d'obtenir son accord, d'entrer au service
d'une entreprise concurrente ou de s'intéresser directement ou indirectement à
tout commerce pouvant concurrencer les produits vendus par elle, pendant 2
ans dans le Languedoc-Roussillon ; qu'après avoir donné sa démission qui a
pris effet le 12 décembre 1992, M. Martinez a créé à Béziers une société
Euro pièces auto, dont il était le gérant, inscrite au registre des sociétés le 31
décembre 1992, ayant pour objet l'achat et la vente des pièces automobiles et
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de pièces pour la carrosserie et pour la mécanique générale, et qui a
commencé ses activités le 1er janvier 1993 ; qu'il a été assigné en référé par
son ancien employeur ;
Attendu que, pour condamner sous astreinte M. Martinez à cesser toute
activité, l'arrêt, qui a admis la validité de la clause de non-concurrence, a
énoncé que cette clause était claire, limitée dans le temps et dans l'espace et
qu'elle lui laissait la possibilité d'exercer sa profession ailleurs que dans les
secteurs de ventes de véhicules, de pièces automobiles et de produits de
station-service, tout en préservant les intérêts de l'employeur ; qu'en exerçant
une activité manifestement concurrente, au moins pour partie, de celle de la
société Auto Service 34, il avait transgressé la prohibition résultant du
contrat et causé un trouble manifestement illicite ;
Attendu, cependant, qu'ayant pour effet d'apporter une restriction au principe
de la liberté du commerce et de l'industrie, posé par l'article 7 de la loi des 217 mars 1791, et à la liberté du travail garantie par la Constitution, la clause
de non-concurrence insérée dans un contrat de travail n'est licite que dans la
mesure où la restriction de liberté qu'elle entraîne est indispensable à la
protection des intérêts légitimes de l'entreprise ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il résultait de ses propres
constatations, d'une part, que les fonctions du salarié ne correspondaient pas
à une qualification spécialisée et n'exigeaient pas qu'il soit en contact avec la
clientèle, d'autre part, que l'activité de son ancien employeur était la vente, la
réparation et l'entretien de véhicules, ce qui n'impliquait qu'indirectement et
de manière accessoire, la vente de pièces détachées, la cour d'appel, qui n'a
pas précisé en quoi, compte tenu des fonctions exercées par son ancien
salarié, la société Auto Service 34 justifiait l'existence d'un intérêt légitime
dont la protection rendait nécessaire l'insertion au contrat de travail de
l'intéressé d'une clause lui interdisant d'exercer l'activité litigieuse, a privé sa
décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deux autres
branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 juillet
1994, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en
conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant
ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de
Toulouse.
2. Cause illicite et atteinte aux bonnes mœurs
C’est entre autre avec les donations que la question de l’illicéité de la
cause tenant à la violation des bonnes mœurs a l’occasion de se poser.
Ainsi, pendant longtemps, la jurisprudence a considéré que la donation
faite dans le but de maintenir une relation adultère était illicite en ce
qu’elle contrevenait aux bonnes mœurs. Cependant, toute donation faite
à un concubin adultère n’était pas, de fait, illicite. Il convenait d’établir
qu’elle avait été précisément consentie dans le but de maintenir une
relation adultère.
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Civ. 1ère, 12 mai 1982
Sur les deux moyens réunis : attendu que, selon l'arrêt attaque, M. Chassagne
a remis a Mme Guesnery, sa maîtresse, une somme de 1 million de francs en
espèces en vue de l'acquisition d'un appartement a cannes ;
que, s'étant porte caution solidaire d'un prêt de 400 000 francs souscrit par les
époux guesnery pour cette acquisition, il a intégralement rembourse
l'organisme prêteur, la sovac, qui lui a délivré une quittance subrogative ;
qu'ayant, ensuite, demandé aux époux guesnery le remboursement de ces
diverses sommes, comme constituant des libéralités illicites, tendant au
maintien de ses relations adultères avec Mme Guesnery, la cour d'appel l'a
déboute de sa demande, aux motifs que le don manuel n'était pas conteste,
qu'en se portant caution il avait eu une intention libérale, et que la cause des
libéralités litigieuses devait être recherchée dans la réparation d'un dommage
et
l'accomplissement
d'un
devoir
de
conscience
;
attendu que M. Chassagne fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statue, alors
que, selon le premier moyen, agissant pour réclamer le remboursement des
sommes pour lesquelles il s'était porte caution, en qualité de subrogé dans les
droits de la sovac, tant en vertu de la quittance subrogative que de l'article
2029 du code civil, il bénéficiait des mêmes droits que le subrogeant contre
les époux Guesnery, débiteurs, ce qui excluait toute notion de libéralité ;
que, selon le second moyen, la cour d'appel, pour admettre le caractères licite
des libéralités litigieuses, aurait omis de rechercher si, dans leur ensemble,
les faits examinés par elle séparément n'apportaient pas la preuve que ces
donations avaient eu pour cause le maintien des relations illicites entretenues
par M. Chassagne avec Mme Guesnery, avec la complicité de son mari ;
mais attendu que la cour d'appel, après avoir souverainement estimé que
l'engagement de caution pris par M. Chassagne procédait d'une intention
libérale de sa part, en a justement déduit que cet engagement réalisait une
donation
indirecte
au
profit
de
Mme
Guesnery
;
que, dès lors, l'intention libérale étant exclusive de l'exercice, par M.
Chassagne, des droits qu'il tenait de la quittance subrogative, la cour d'appel
a,
sur
ce
point,
légalement
justifié
sa
décision
;
et attendu qu'en relevant, dans l'exercice de son pouvoir souverain
d'appréciation les circonstances de la cause, qu'aucun des faits allégués n'est
de nature a établir que la cause impulsive et déterminante des libéralités
litigieuses ait été la formation, la continuation de la reprise de relations
adultères ou encore leur rémunération, la cour d'appel a, sur ce point encore,
légalement
justifié
sa
décision
;
qu'aucun des griefs du pourvoi ne peut donc être retenu ;
par ces motifs : rejette le pourvoi forme contre l'arrêt rendu le 17 décembre
1980 par la cour d'appel de Paris.
Ceci étant, depuis un arrêt de revirement, quand bien même la libéralité
serait consentie dans le but de maintenir des relations adultères, elle n’est
plus considérée comme illicite, ce qui traduit l’évolution dont les bonnes
mœurs peuvent faire l’objet
Civ. 1ère, 3 février 1999
Sur le moyen unique :
Vu les articles 1131 et 1133 du Code civil ;
Attendu que n'est pas contraire aux bonnes mœurs la cause de la libéralité
dont l'auteur entend maintenir la relation adultère qu'il entretient avec le
bénéficiaire ;
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Attendu que le 26 octobre 1989, Roger Y... est décédé en laissant à sa
succession son épouse et M. Christian Y... qu'il avait adopté ; que par
testament authentique du 17 mars 1989, il a, d'une part, révoqué toute
donation entre époux et exhérédé son épouse, et, d'autre part, gratifié Mme
X... d'une somme de 500 000 francs ; que M. Christian Y... a soutenu que la
cause de cette disposition était contraire aux bonnes mœurs ;
Attendu que pour prononcer la nullité de la libéralité consentie à Mme X...,
la cour d'appel a retenu que la disposition testamentaire n'avait été prise que
pour poursuivre et maintenir une liaison encore très récente ;
En quoi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20
novembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en
conséquence
Cette position a été confirmée par le célèbre arrêt « Galopin » rendu par
l’assemblée plénière de la Cour de cassation le 29 octobre 2004. Cet
arrêt, qui a fait l’objet de nombreuses critiques doctrinales1, consacre le
dépérissement de la notion de « bonnes mœurs » en droit des contrats.
Ass. Plén., 29 octobre 2004
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 900, 1131 et 1133 du Code civil ;
Attendu que n’est pas nulle comme ayant une cause contraire aux bonnes
moeurs la libéralité consentie à l’occasion d’une relation adultère ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Première
Chambre civile, 25 janvier 2000, pourvoi n° D 97-19.458), que Jean X... est
décédé le 15 janvier 1991 après avoir institué Mme Y... légataire universelle
par testament authentique du 4 octobre 1990 ; que Mme Y... ayant introduit
une action en délivrance du legs, la veuve du testateur et sa fille, Mme
Micheline X..., ont sollicité reconventionnellement l’annulation de ce legs ;
Attendu que, pour prononcer la nullité du legs universel, l’arrêt retient que
celui-ci, qui n’avait “vocation” qu’à rémunérer les faveurs de Mme Y..., est
ainsi contraire aux bonnes moeurs ;
Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la seconde branche
du moyen : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu
le 9 janvier 2002, entre les parties, par la cour d’appel de Paris.
1
V. par exemple Ph. Malaurie, « Les voyous du sexe et la Cour de cassation : le vieux
polisson pigeonné », RDC. 2005 n°1278 et A. Bénabent, « L’énigme de l’arrêt «
Galopin » : parle-t-on fidélité ou vénalité ? », RDC. 2005 n°1281.
11
B. Le contrôle de l’économie générale des conventions
La Cour de cassation a eu récemment l’occasion de solliciter la cause du
contrat non pas pour apprécier sa licéité mais pour s’assurer de ce que
l’objectif poursuivi par l’un des contractants pouvait être atteint.
Civ. 1ère, 3 juillet 1996
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu que la société DPM fait grief à l'arrêt attaqué (Grenoble, 17 mars
1994) d'avoir annulé, pour défaut de cause, le contrat de création d'un " point
club vidéo " et de location de cassettes conclu avec M. et Mme Piller, en
retenant que la cause, mobile déterminant de l'engagement de ces derniers,
était la diffusion certaine des cassettes auprès de leur clientèle, et que cette
exploitation était vouée à l'échec dans une agglomération de 1314 habitants,
alors que, d'une part, dans un contrat synallagmatique la cause de l'obligation
d'une partie réside dans l'obligation de l'autre partie, et qu'en l'espèce la cause
de l'engagement des époux Miller était la mise à leur disposition des
cassettes vidéo, et que, d'autre part, les motifs déterminants ne peuvent
constituer la cause du contrat que dans le cas non relevé par la cour d'appel
où ces motifs sont entrés dans le champ contractuel ;
Mais attendu qu'ayant relevé que, s'agissant de la location de cassettes vidéo
pour l'exploitation d'un commerce, l'exécution du contrat selon l’économie
voulue par les parties était impossible, la cour d'appel en a exactement déduit
que le contrat était dépourvu de cause, dès lors qu'était ainsi constaté le
défaut de toute contrepartie réelle à l'obligation de payer le prix de location
des cassettes, souscrite par M. et Mme Piller dans le cadre de la convention
de création d'un " point club vidéo " ;
Que l'arrêt est ainsi légalement justifié ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.
III. La sanction de l’illicéité de la cause du contrat
L’illicéité de la cause du contrat est sanctionnée par la nullité absolue
Civ. 1ère, 22 janvier 1975
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches : attendu que, selon les
énonciations de l'arrêt infirmatif attaqué, B. et dame Pastorelly ont contracté
mariage en 1953 sous le régime de la séparation de biens ;
qu'en 1957, dame Pastorelly s'est rendue adjudicataire d'un mobilier
provenant
d'une
succession
échue
a
son
mari
;
que le 6 mars 1959, les époux ont conclu une convention aux termes de
laquelle dame Pastorelly s'engageait à rendre à son mari le mobilier lui
appartenant moyennant versement d'une somme de 260000 francs ;
que le divorce des époux B.-Pastorelly a été prononcé en novembre 1959 et
12
qu'après s'ère remariée, dame Pastorelly est décédée le 29 décembre 1965
laissant a sa survivance R., son époux en secondes noces, et sa fille Cécile,
mineure
issue
de
sa
seconde
union
;
qu'après ce décès, B. a assigné R. tant en son nom personnel qu'es qualité
d'administrateur légal des biens de sa fille Cécile, afin d'obtenir l'exécution
de
l'accord
du
6
mars
1959
;
qu'il a été débouté de sa demande au motif que la convention susvisée,
matérialisant des accords antérieurs établis par deux lettres des 7 et 16
octobre 1958 dans lesquelles dame Pastorelly acceptait que son mari rachetât
le mobilier provenant de la succession de sa mère, était entachée de nullité
comme ayant été conclue en vue de faciliter le divorce des époux ;
attendu qu'il est reproché à la cour d'appel d'avoir ainsi statué, alors, d'une
part, que, selon le pourvoi, la convention du 6 mars 1959 révélait que B. était
propriétaire du mobilier, que ses termes différaient de ceux de la lettre du 7
octobre 1958 dans laquelle l'épouse, consentant au rachat de ce mobilier, se
présentait comme en étant la propriétaire et qu'en conséquence, la cour
d'appel, qui a déclaré nulle la convention précitée au motif qu'elle était
intervenue en exécution des accords antérieurs, n'aurait pas justifié
légalement sa décision, alors, d'autre part, qu'en sollicitant la confirmation du
jugement, B. aurait fait valoir que la convention du 6 mars 1959 établissait
qu'il était reste propriétaire des meubles que détenait son épouse, que cette
convention n'avait d'autre but que de définir les modalités de la reprise des
différents biens lui appartenant et qu'en conséquence, la cour d'appel ne
pouvait déclarer que les accords relatifs à la reprise du mobilier avaient une
cause illicite, sans rechercher si la convention précitée ne reflétait pas la
situation réelle des parties à l'égard de ce mobilier, l'engagement même
souscrit à la veille d'une procédure de divorce par l'un des époux de restituer
à l'autre les biens qui lui appartenaient procédant nécessairement d'une cause
étrangère
au
divorce
lui-même
;
mais attendu que la cour d'appel relevé souverainement que le libellé de la
convention et des lettres qui l'ont précédée font apparaître à l'évidence que
les accords ainsi conclus entre les parties tendaient a leur faciliter l'accès au
divorce que, des lors, elle a pu décider que la convention du 6 mars 1959
ayant une cause illicite se trouvait frappée d'une nullité absolue comme
contraire
à
l'ordre
public
;
qu'elle
a
ainsi
légalement
justifié
sa
décision
;
d'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
par ces motifs : rejette le pourvoi forme contre l'arrêt rendu le 20 janvier
1972 par la cour d'appel d'aix-en-provence.
Pour être prononcée, la nullité n’est pas subordonnée à la connaissance
par l’autre partie de l’illicéité du motif qui a conduit l’un des contractants
à s’engager.
Civ. 1ère, 7 octobre 1998
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu que, par acte sous seing privé du 17 juin 1981, M. X... a reconnu
devoir à son épouse une somme, remboursable avec un préavis de trois mois
; qu'après leur divorce, Mme X..., devenue Mme Y..., a, par acte du 14 juin
1989, accepté que le prêt lui soit remboursé sous forme d'une augmentation
de la pension alimentaire que lui versait son ex-mari ; qu'en 1993, elle l'a
assigné en remboursement du solde du prêt ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué (Versailles, 23 février 1996)
d'avoir annulé pour cause illicite l'acte du 14 juin 1989 et fait droit à la
demande de son ex-épouse, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en ne
13
constatant pas que l'accord avait eu pour motif déterminant des déductions
fiscales illégales et en ne recherchant pas s'il n'avait pas eu pour motif
déterminant de réaliser l'étalement du remboursement du prêt dont le
paiement était susceptible d'être réclamé à tout moment, la cour d'appel a
privé sa décision de base légale au regard de l'article 1131 du Code civil ; et
alors, d'autre part, qu'une convention ne peut être annulée pour cause illicite
que lorsque les parties se sont engagées en considération commune d'un
motif pour elles déterminant ; qu'ayant constaté que Mme Y... déclarait à
l'administration fiscale l'intégralité des sommes reçues de M. X..., il s'en
évinçait que Mme Y... ne pouvait avoir eu pour motif déterminant de son
accord la déductibilité, par M. X..., des sommes à elles versées, en sorte que
la cour d'appel, en retenant une cause illicite, a violé l'article précité ;
Mais attendu qu'un contrat peut être annulé pour cause illicite ou immorale,
même lorsque l'une des parties n'a pas eu connaissance du caractère illicite
ou immoral du motif déterminant de la conclusion du contrat ; que l'arrêt
ayant retenu que l'acte du 14 juin 1989 avait une cause illicite en ce qu'il
avait pour but de permettre à M. X... de déduire des sommes non fiscalement
déductibles, Mme Y... était fondée à demander l'annulation de la convention ;
qu'ainsi, la cour d'appel, qui n'avait pas à effectuer la recherche inopérante
visée à la première branche du moyen, a légalement justifié sa décision
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi

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