Tout à gagner : libertés au travail
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Tout à gagner : libertés au travail
Tout à gagner : libertés au travail -6 – LES DROITS DU SALARIE FACE AU DROIT DISCIPLINAIRE DE L’EMPLOYEUR Le pouvoir disciplinaire de l'employeur fait partie intégrante de ses prérogatives, il est toutefois encadré par le Code du travail afin de protéger les salariés. Le juge en contrôle l’application afin de sanctionner les abus éventuels. L’employeur établit des règles que le salarié est tenu de respecter sous peine de sanctions. 6.1. Une faute du salarié, un manquement à ses obligations professionnelles, est exigée pour que l’employeur puisse sanctionner. Mais il n’existe aucune définition générale de la faute disciplinaire. Elle est aussi diverse que le comportement du salarié. Le comportement du salarié est fautif dès lors qu’il ne correspond pas à l’exécution normale du contrat de travail. Il ne sera pas fautif si le salarié ne fait qu’exercer un droit dont il dispose : droit de grève, droit d’expression, droit d’exercer une activité syndicale, droit de refuser de passer à temps partiel, droit de refuser de suivre une formation hors temps de travail… Le règlement intérieur de chaque entreprise peut décider quel comportement sera jugé comme constitutif d’une faute susceptible d’être sanctionnée. 6.2. Une fois la faute constatée, l’employeur a deux mois - à compter du jour où il en a eu connaissance exacte et complète des faits reprochés - pour la soulever et la sanctionner (art. L. 1332-4 du Code du travail). Dans le cas contraire, la faute sera prescrite. Elle pourra toutefois être invoquée à l’occasion d’une nouvelle faute. La sanction est libre : l’employeur a une latitude d’exercice pour sanctionner la faute. La sanction doit être qualifiée comme telle par l’employeur. La sanction est définie comme « toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié, considéré par lui comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération » (art. L1331-1 du Code du travail). La sanction doit cependant être proportionnée et justifiée par rapport aux faits reprochés au salarié. Il peut s’agir d’un avertissement (écrit ou verbal), d’un blâme, d’une mise à pied disciplinaire (suspension temporaire du contrat de travail, d’une mutation, d’une rétrogradation ou encore d’un licenciement. 6.3. Certaines sanctions sont interdites par la loi et la jurisprudence. Les sanctions discriminatoires, prises en raison de l’origine du salarié, de son sexe, de ses mœurs, de sa situation de famille, de ses activités syndicales, de ses convictions religieuses, etc. (art. L122-45 du Code du travail). L’employeur ne peut pas fonder sa sanction sur des éléments appartenant à la vie privée du salarié et qui ne doivent pas entrer dans le champ professionnel. Il ne peut pas, par ailleurs, apporter des restrictions aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché (art. L1121-1 du Code du travail). Les sanctions pécuniaires sont interdites et toute disposition ou stipulation contraire est réputée non écrite (art. L1331-2 du Code du travail), mais la sanction disciplinaire ayant des répercussions FGMM-CFDT juin 2010 12 Tout à gagner : libertés au travail pécuniaires est légale (exemple de la mise à pied disciplinaire qui correspond à la période de suspension du contrat de travail pendant laquelle le salarié n’est pas payé). Les sanctions sont prescrites par trois ans et il ne peut y avoir cumul de sanctions. Une sanction antérieure de plus de trois ans à l’engagement de poursuites disciplinaires ne peut pas être invoquée, par l’employeur, pour sanctionner plus gravement les faits reprochés au salarié (art. L1332-5 du Code du travail). 6.4. Une procédure disciplinaire doit être respectée. Conventionnelle (prévue par le règlement intérieur de l’entreprise), ou légale (art. L1332-2 du Code du travail), elle comporte deux phases : l’entretien préalable et la notification de la sanction. Avant la notification de la sanction, un entretien préalable doit avoir lieu, c’est une obligation légale, sauf si la sanction envisagée est « un avertissement ou une sanction de même nature qui n’a pas d’incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l’entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié » (art. L1332-2 du Code du travail). La lettre de convocation est soit remise contre récépissé, soit adressée par lettre recommandée, dans le délai de deux mois fixé à l'article L. 1332-4. Elle doit comporter les informations suivantes article L1332-2 : - l’objet de l’entretien, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n'ayant pas d'incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié, - la date, l’heure, le lieu de l’entretien, - et la possibilité pour le salarié de se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise. Au cours de l’entretien, l’employeur indique le motif de la sanction envisagée et recueille les explications du salarié. Le salarié peut se défendre, apporter des explications concernant les faits qui lui sont reprochés. La sanction ne peut intervenir moins d'un jour franc, ni plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien. Elle est motivée et notifiée à l'intéressé. 6.5. Recours Le salarié sanctionné a la possibilité de contester la sanction disciplinaire devant le Conseil des prud’hommes qui va apprécier la régularité de la procédure suivie, et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L’employeur fournit les éléments retenus pour la sanction afin de prouver que cette dernière était régulière, justifiée, proportionnée. Si un doute subsiste, il profite au salarié (article L1333-1 du Code du travail). Le juge peut annuler la sanction s’il constate qu’elle était disproportionnée, irrégulière ou injustifiée (pas une obligation, mais une faculté). Le juge peut décider de seulement prononcer des dommages et intérêts (art. L1235-2 indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire et L1235-5 du Code du travail). Si le juge annule la sanction disciplinaire, le salarié retrouve ses droits dans l’entreprise. Les effets de la sanction disparaissent. Mais l’employeur pourra prendre une nouvelle sanction si cette dernière a été jugée disproportionnée aux faits. En revanche, il lui sera impossible de prendre une nouvelle sanction si elle a été déclarée irrégulière ou injustifiée. FGMM-CFDT juin 2010 13