MONSIEUR VREMEN SERGE YVON - Tribunal de Commerce d

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MONSIEUR VREMEN SERGE YVON - Tribunal de Commerce d
KF/AE
AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 23 OCTOBRE 2014
REPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE
------------------COUR D’APPEL D’ABIDJAN
--------------TRIBUNAL DE COMMERCE D’ABIDJAN
--------------RG N° 1534/14
------------JUGEMENT CONTRADICTOIRE
du 23/10/2014
----------------Affaire :
MONSIEUR VREMEN SERGE YVON
(SCPA TOURE - AMANI - YAO & Associés)
Contre
1/ SOCIETE MC CROF TOBACCO CÔTE
D’IVOIRE
2/ MONSIEUR ALANIS MARWAN MAHMUDHAMD
(TIABOU Issa)
----------------DECISION :
------Contradictoire
----Rejette l’exception d’incompétence et se déclare
compétent ;
Déclare Monsieur VREMEN
recevable en son action ;
SERGE
YVON
Constate la non conciliation des parties ;
L’y dit partiellement fondé ;
Le Tribunal de Commerce d’Abidjan, en son
audience publique ordinaire du vingt-trois octobre de
l’an deux mil quatorze tenue au siège dudit Tribunal,
à laquelle siégeaient :
Docteur
Tribunal ;
- neuf millions (9.000.000) de francs CFA au titre de
ses indemnités de novembre, décembre 2013 et de
janvier 2014 ;
- cent cinquante millions (150.000.000) de francs
CFA à titre de dommages-intérêts ;
Ordonne l’exécution provisoire s’agissant de la
somme de neuf millions (9.000.000) de francs CFA ;
KOMOIN,
Président
du
Madame ESSO Millie Blanche épouse
ABANET, Messieurs KACOU Bredoumou Florent,
Ignace FOLOU, NIAMKEY Paul, SILUE Daoda et
N’GUESSAN Gilbert,
Assesseurs,
Avec l’assistance
Gertrude, Greffier,
de
Maître
KOUTOU
A.
A rendu le jugement dont la teneur suit dans la
cause entre :
MONSIEUR VREMEN SERGE YVON, né le 05
octobre 1972 à Abidjan, de nationalité ivoirienne,
Auditeur Financier, ex-Directeur Général de la société
MC CROFT TOBACCO-CI, demeurant à Abidjan,
Rue des Pêcheurs, Zone 3C, 18 BP 1468 Abidjan
18 ;
Demandeur représenté par son conseil, la SCPA
TOURE-AMANI-YAO, Avocats près la Cour d’Appel
d’Abidjan ;
Met hors de cause Monsieur ALANIS MARWAN
MAHMUD HAMAD ;
Condamne la société MC CROFT TOBACCO
COTE D’IVOIRE à lui payer les sommes suivantes :
François
d’une part,
Et
1/ LA SOCIETE MC CROFT TOBACCO CÔTE
D’IVOIRE,
Société
anonyme
avec
conseil
d’administration, dont le siège social est sis à
Abidjan-Yopougon, Zone Industrielle, 16 BP 422
Abidjan 16, prise en la personne de son représentant
légal, Monsieur ALANIS MALEK, Directeur Général ;
1
Déboute Monsieur VREMEN SERGE YVON du
surplus de sa demande ;
Condamne la société MC CROFT TOBACCO
COTE D’IVOIRE aux dépens ;
2/ MONSIEUR ALANIS MARWAN MAHMUD-HAMD,
Président du Conseil d’Administration de la Société
MC CROFT TOBACCO CÔTE D’IVOIRE, demeurant
à Abidjan zone 4C, 18 BP 597 Abidjan 18 ;
Défendeurs représentés par leurs conseils, Maître
TIABOU Issa, Avocat près la Cour d’Appel d’Abidjan ;
d’autre part,
Enrôlée pour l’audience du 05 juin 2014, l’affaire a
été appelée et renvoyée au 26 juin 2014 pour
conciliation ;
A la date de renvoi, le tribunal a constaté l’échec de
la conciliation et a ordonné une instruction du dossier
confiée au juge KACOU Bredoumou avant de
renvoyer la cause à l’audience publique du 24 juillet
2014 ;
Cette instruction a fait l’objet d’une ordonnance de
clôture n° 1116/14 du 23 juillet 2014 ;
L’affaire a subi deux autres renvois dont le dernier en
date du 02 octobre 2014 pour retenue. Puis elle fut
mise en délibéré pour décision être rendue le 23
octobre 2014 ;
Advenue cette audience, le tribunal a vidé son
délibéré comme suit :
LE TRIBUNAL
Vu les pièces du dossier ;
Vu l’échec de la tentative de conciliation ;
Ouï les parties
conclusions ;
en
leurs
fins,
demandes
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
2
et
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS
DES PARTIES
Suivant exploit de maître KOUAKOU KOUAKOU
NOGUES, huissier de justice à Abidjan, en date du
26 mai 2014, Monsieur VREMEN Serge Yvon a
assigné la Société MC CROFT TOBACCO CÔTE
D’IVOIRE
et
Monsieur
ALANIS
MARWAN
MAHMUD-HAMD à comparaître, le 05 juin 2014
devant le tribunal pour s’entendre :
-
condamner solidairement les défendeurs à lui
payer la somme de neuf millions (9.000.000)
de francs CFA au titre de ses indemnités
mensuelles et celle de trois cent millions
(300.000.000) de francs à titre de dommagesintérêts ;
-
ordonner l’exécution
toute voie de recours ;
-
condamner aux dépens;
provisoire nonobstant
Au soutien de son action, Monsieur VREMEN
SERGE YVON explique que suivant procès-verbal du
conseil d’administration du 22 mai 2013, il a été
nommé directeur général de la société MC CROFT
TOBACCO COTE D’IVOIRE, fonction qu’il a assumé
avec dévouement jusqu’au 30 janvier 2014 où le
conseil d’administration, l’accusant d’être à l’origine
des mauvais chiffres de l’entreprise, l’a révoqué.
Il avance qu’il a été lié à la société MC CROFT
TOBACCO COTE D’IVOIRE par un mandat social et
que sa rémunération mensuelle s’élevait à trois
millions (3.000.000) de francs CFA. Il ajoute que les
raisons alléguées pour justifier sa révocation à savoir
la baisse catastrophique des ventes de cigarettes des
mois de décembre 2013 et de janvier 2014 ne sont
pas de son fait car la situation critique de l’entreprise
résulte plutôt d’un manque de moyens financiers. En
réalité, sa révocation, motivée par la volonté de
président du conseil d’administration d’installer son
fils à ce poste, est abusive et vexatoire. Pour preuve,
sa compétence n’est pas remise en cause puisqu’il a
été nommé conseiller consultant.
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Il soutient enfin que ses indemnités de novembre,
décembre 2013 et de janvier 2014 n’ont pas été
payées.
Il sollicite pour tout cela la condamnation des
défendeurs à lui payer les sommes susmentionnées.
La société MC CROFT TOBACCO COTE D’IVOIRE
et Monsieur ALANIS MARWAN MAHMUD-HAMD
répliquant, allèguent que la présente contestation
s’analyse en un différend de travail qui ressortit à la
compétence du tribunal du travail, de sorte que le
tribunal de commerce doit se déclarer incompétent
pour en connaître. Au fond, ils soutiennent que le
conseil
d’administration
ayant
relevé
des
insuffisances quant à la prestation du demandeur, a
mis fin à son contrat de travail.
Ils concluent au débouté de celui-ci de sa demande
en paiement mal fondée.
SUR CE
En la forme
Sur le caractère de la décision
Les défendeurs ayant fait valoir leurs moyens et
prétentions, il y a lieu de statuer contradictoirement à
leur égard.
Sur le taux du ressort
La demande dont le tribunal est saisie est une
demande en paiement de la somme totale de trois
cent neuf millions (309.000.000) de francs CFA,
inférieure à un milliard (1.000.000.000) de francs
CFA. Il y a lieu en application de l’article 8 de loi
organique N° 2014-424 du 14 juillet 2014 portant
création, organisation et fonctionnement des
juridictions de commerce de statuer en premier et
dernier ressort.
Sur la compétence du tribunal de commerce
La société MC CROFT TOBACCO COTE D’IVOIRE
4
et Monsieur ALANIS MARWAN MAHMUD-HAMD,
pour soulever l’incompétence du tribunal de ce siège,
allèguent que les faits de l’espèce s’analysent en un
différend de travail qui met en cause un employeur et
son salarié.
Il ressort cependant des résolutions du procès-verbal
des délibérations du conseil d’administration de la
société MC CROFT TOBACCO COTE D’IVOIRE en
date du 22 mai 2013 que monsieur VREMEN SERGE
YVON y a été nommé en qualité de directeur général.
Il exerce donc un mandat social qui lui a été confié
par le conseil d’administration. Le litige actuel est
relatif à ce mandat social, et, en tant que tel, ressortit
à la compétence du tribunal de commerce, de sorte
qu’il y a lieu de rejeter l’exception d’incompétence
soulevée et de se déclarer compétent.
Sur la recevabilité
L’action de Monsieur VREMEN SERGE YVON a été
régulièrement introduite ; Il y a lieu de la recevoir ;
Au fond
Sur la mise hors de cause de monsieur ALANIS
MARWAN MAHMUD-HAMD
Monsieur VREMEN SERGE YVON sollicite la
condamnation solidaire de la société MC CROFT
TOBACCO COTE D’IVOIRE et de monsieur ALANIS
MARWAN MAHMUD-HAMD à lui payer des sommes
d’argent.
L’article 161 de l’acte uniforme relatif au droit des
sociétés commerciales et du groupement d’intérêt
économique dispose que « sans préjudice de la
responsabilité éventuelle de la société, chaque dirigeant
social est responsable individuellement envers les tiers
des fautes qu’il commet dans l’exercice de ses fonctions ».
Il ressort du procès-verbal du conseil d’administration
du 30 janvier 2014 que la révocation de Monsieur
VREMEN SERGE YVON a été décidée par le conseil
d’administration de la société MC CROFT
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TOBACCO.
Dans la mesure où il n’est pas rapporté que Monsieur
ALANIS MARWAN MAHMUD-HAMD, Président du
conseil d’administration de la société MC CROFT
TOBACCO COTE D’IVOIRE, a commis une faute
personnelle susceptible d’engager sa responsabilité,
il y a lieu de le mettre hors de cause.
Sur la demande en paiement de la somme de neuf
millions (9.000.000) de francs CFA au titre des
indemnités mensuelles
Monsieur VREMEN SERGE YVON affirme que ses
indemnités de novembre, décembre 2013 et de
janvier 2014 n’ont pas été payées et sollicite pour
cela de la somme de neuf millions (9.000.000) de
francs CFA ; ce que justifient les pièces produites au
dossier.
Il y a lieu de condamner la société MC CROFT
TOBACCO Côte d’Ivoire qui, du reste, ne conteste
pas cela, à verser au demandeur la somme de neuf
millions (9.000.000) de francs CFA réclamée au titre
des indemnités mensuelles ;
Sur la demande en paiement de la somme de trois
cent millions (300.000.000) de francs CFA à titre
de dommages-intérêts
Monsieur VREMEN SERGE YVON, pour soutenir sa
demande en réparation, allègue le caractère abusif et
vexatoire de sa révocation.
Il est constant que la société MC CROFT TOBACCO
Côte d’Ivoire est une société anonyme. A cet égard le
principe est celui de la révocation ad nutum des
dirigeants sociaux.
Toutefois, il est admis que le dirigeant révoqué peut
obtenir des dommages-intérêts si sa révocation est
abusive ou si elle intervient brutalement ou dans des
circonstances injurieuses ou vexatoires.
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En l’espèce, la révocation du demandeur est assise
sur le fait que « des imperfections et autres
insuffisances ont été constatées » à l’encontre de
celui-ci. Cela, la société MC CROFT TOBACCO Côte
d’Ivoire ne le prouve guère. En outre, il est constant
qu’elle a confié au demandeur les fonctions de
conseiller consultant ; ce qui apparaît paradoxal,
l’incompétence de celui-ci ayant été avancée comme
raison de sa révocation.
Le tribunal, au vu de ce qui précède, considère alors
que la révocation du demandeur est abusive et ouvre
droit à son profit à réparation.
Toutefois la somme de trois cent millions
(300.000.000) de francs réclamée est excessive eu
égard aux circonstances de la cause ;
Il y a lieu de la ramener à la somme de cent
cinquante millions (150.000.000) de francs CFA,
jugée raisonnable en fonction des éléments de la
cause, et de condamner la société MC CROFT
TOBACCO COTE D’IVOIRE à payer ce montant au
demandeur à titre de dommages-intérêts.
Sur l’exécution provisoire
Aux termes de l’article 146 du code de procédure
civile commerciale et administrative, « l’exécution
provisoire peut sur demande, être ordonnée lorsque
la somme a un caractère alimentaire et dans tous les
autres cas présentant un caractère d’extrême
urgence» ;
Il est constant que la somme de neuf millions
(9.000.000) de francs CFA que la défenderesse lui
doit au titre des rémunérations mensuelles a un
caractère alimentaire. L’exécution provisoire se
justifie pour cela.
Par contre s’agissant des dommages-intérêts,
Monsieur VREMEN SERGE YVON ne démontre pas
en l’espèce l’extrême urgence qu’il y a à voir exécuter
la présente décision ;
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Il y a lieu de le débouter sur ce point.
Sur les dépens
La société MC CROFT TOBACCO COTE D’IVOIRE
succombant ; il y a lieu de la condamner aux dépens
de l’instance;
PAR CES MOTIFS
Statuant
publiquement, contradictoirement,
premier et dernier ressort ;
en
Rejette l’exception d’incompétence et se déclare
compétent ;
Déclare Monsieur VREMEN
recevable en son action ;
SERGE
YVON
Constate la non conciliation des parties ;
L’y dit partiellement fondé ;
Met hors de cause Monsieur ALANIS MARWAN
MAHMUD HAMAD ;
Condamne la société MC CROFT TOBACCO COTE
D’IVOIRE à lui payer les sommes suivantes :
- neuf millions (9.000.000) de francs CFA au titre de
ses indemnités de novembre, décembre 2013 et de
janvier 2014 ;
- cent cinquante millions (150.000.000) de francs CFA
à titre de dommages-intérêts ;
Ordonne l’exécution provisoire s’agissant de la
somme de neuf millions (9.000.000) de francs CFA ;
Déboute Monsieur VREMEN SERGE YVON du
surplus de sa demande ;
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Condamne la société MC CROFT TOBACCO COTE
D’IVOIRE aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour,
mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.
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