Monsieur - Tribunal de Commerce d`Abidjan

Transcription

Monsieur - Tribunal de Commerce d`Abidjan
REPUBLIQUE
DE
COTE
D’IVOIRE
----------------COUR D’APPEL D’ABIDJAN
---------------TRIBUNAL DE COMMERCE
D’ABIDJAN
---------------
AUDIENCE PUBLIQUE DU 22 AVRIL 2015
Nous, TOURE AMINATA, Juge délégué dans les fonctions du
Président du Tribunal de commerce d’Abidjan, statuant en
matière d’urgence ;
RG N° 1512/2015
-------------
Assisté de Maître KODJANE MARIE-LAURE épouse
NANOU, Greffier ;
L’an deux mil quinze
Et le vingt-deux avril
ORDONNANCE DU JUGE DE Avons rendu l’ordonnance dont la teneur suit :
L’EXECUTION
-------------Par exploit d’huissier en date du 27 avril 2015, la société Mc
Affaire :
CROFT TOBACCO Côte d’Ivoire a fait servir assignation à
monsieur VREMEN SERGE YVON d’avoir à comparaître devant
-LA SOCIETE Mc CROFT
la juridiction présidentielle de ce siège pour entendre lui
TOBACCO Côte d’Ivoire
accorder un délai de grâce de douze (12) mois pour le paiement
de sa dette ;
Maître TIABOU ISSA
Au soutien de son action, la société Mc CROFT TOBACCO Côte
Maître ABIE MODESTE
d’Ivoire expose que par jugement N° 1534/14 en date du 23
octobre 2014 le Tribunal de commerce d’Abidjan l’a condamnée
contre
à payer à monsieur VREMEN SERGE YVON les sommes de
9.000.000 FCFA à titre d’indemnités et 150.000.000 FCFA à
-Monsieur VREMEN
titre de dommages-intérêts, tout en ordonnant l’exécution
SERGE YVON
provisoire en ce qui concerne le montant des indemnités;
-------------DECISION :
Contradictoire
Recevons la société Mc CROFT
TOBACCO Côte d’Ivoire en son action ;
L’y disons partiellement fondée ;
Lui accordons un délai de grâce de huit
(8) mois par le report du paiement de sa
dette ;
Disons que la demande tendant à la
suspension provisoire des poursuites est
surabondante ;
Déboutons la demanderesse du surplus de
ses prétentions ;
Mettons les dépens de l’instance à la
charge de la société Mc CROFT
TOBACCO Côte d’Ivoire.
Elle explique que ce jugement lui a été signifié le 27 janvier 2015
et que le créancier a, par exploit d’huissier en date du 10 février
2015, fait pratiquer une saisie vente sur tous les biens de l’usine
notamment les machines ancrées au sol, les engins roulants, les
mobiliers de bureaux et autres objets, sans lesquels l’usine n’a
plus de consistance véritable ;
Elle fait noter que la vente aux enchères publiques est prévue
pour le 24 avril 2015 et que s’agissant d’une décision exécutoire,
elle n’entend pas s’y dérober ;
Toutefois, précise-t-elle, l’exécution immédiate et intégrale de
cette décision provoquerait sans aucun doute l’arrêt de ses
activités et la fermeture de l’entreprise ;
Aux dires de la demanderesse, elle a été sinistrée suite aux
évènements sociopolitiques de l’année 2011 et a été reprise par
de nouveaux actionnaires en 2013 ;
Le management de la société, du reste décrié par le conseil
d’Administration, a engendré des difficultés de trésorerie
insupportables, ce qui a d’ailleurs valu le départ de monsieur
VREMEN SERGE YVON le Directeur Général ;
Le chiffre d’affaires réalisé par la société ne peut plus faire face
aux charges fiscales et salariales ;
Elle a dû procéder à un licenciement collectif de la majeure
partie de son personnel ;
N’étant pas en mesure dans l’immédiat de payer la somme de
150.000.000 FCFA au défendeur à titre de dommages et
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intérêts, elle sollicite conformément à l’article 39 de l’acte
uniforme portant organisation des procédures simplifiées de
recouvrement et des voies d’exécution, un délai de grâce de
douze mois pour payer sa dette ;
En réplique monsieur VREMEN SERGE YVON fait valoir que la
demanderesse ne rapporte pas la preuve des difficultés
financières alléguées ;
Il ajoute que l’argument tiré de la qualité d’entreprise sinistrée
de la demanderesse est inopérant dans la mesure où elle ne
produit aucune déclaration et que si tel était le cas, les parts
sociales de la société n’auraient pas été cédées en Mai 2013 à
630.666.984 FCFA ;
La société Mc CROFT TOBACCO Côte d’Ivoire, dit-il, ne fait
aucune offre concrète de paiement ;
Les supposées difficultés de la demanderesse ne lui sont pas
opposables ;
Il soutient que si le juge de l’exécution doit accorder un délai de
grâce, qu’il tienne compte de ce qu’il est sans ressources, et exige
donc le paiement d’un acompte de 75.000.0000 FCFA et
échelonne le paiement du reliquat sur une période de six mois ;
La demanderesse a les moyens de payer, surtout que la société
STTI SARL actionnaire majoritaire s’est engagée à lui procurer
des sommes importantes soit 2.000.000.000 FCFA ;
DES MOTIFS
EN LA FORME
Sur le caractère de la décision
Le défendeur a comparu et conclu ;
Il y a lieu de statuer par décision contradictoire ;
Sur la recevabilité de l’action
L’action ayant été initiée dans le respect des prescriptions
légales de forme et de délai, il y a lieu de la recevoir ;
AU FOND
Sur la demande de délai de grâce
La société Mc CROFT TOBACCO Côte d’Ivoire sollicite un délai
de grâce de douze mois pour payer sa dette au motif qu’elle
rencontre en ce moment des difficultés financières ;
L’article 39 de l’Acte Uniforme relatif aux procédures de
recouvrement et aux voies d’exécution dispose : « Le débiteur
ne peut forcer le créancier à recevoir en partie le paiement
d'une dette, même divisible.
Toutefois, compte tenu de la situation du débiteur et en
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considération des besoins du créancier, la juridiction
compétente peut, sauf pour les dettes d'aliments et les dettes
cambiaires, reporter ou échelonner le paiement des sommes
dues dans la limite d'une année.
Elle peut également décider que les paiements s'imputeront
d'abord sur le capital.
Elle peut en outre subordonner ces mesures à
l'accomplissement, par le débiteur, d'actes propres à faciliter
ou à garantir le paiement de la dette » ;
Il en découle que pour moduler le paiement de la dette du
débiteur poursuivi, le juge doit tenir compte de sa situation mais
aussi de celle du créancier ;
En l’espèce la demanderesse produit différentes pièces d’où il
ressort qu’elle rencontre des difficultés de trésorerie qui sont
telles qu’elle n’arrive pas à faire face au paiement de ses impôts,
des salaires et cotisations sociales et qu’elle est poursuivie par
les administrations chargées du recouvrement de ces droits et
taxes ;
Ces pièces révèlent également que l’établissement de la
demanderesse est menacé de fermeture pour défaut de
paiement par l’administration fiscale ;
Il s’ensuit que la preuve des difficultés financières de la
demanderesse est suffisamment faite ;
Il sied conformément à l’article 39 de l’acte uniforme sus
indiqué, en tenant compte également des intérêts du créancier
d’accorder à la société Mc CROFT TOBACCO Côte d’Ivoire un
délai de grâce de huit (8) mois par le report du paiement de sa
dette ;
Sur la demande
poursuites
de
suspension
provisoire
des
La demanderesse sollicite également la suspension provisoire
des poursuites contre elle ;
Toutefois elle ne justifie point cette demande qui au demeurant
devient surabondante dès lors que le délai de grâce accordé, a
pour effet de suspendre l’exécution de la décision dont bénéficie
le créancier saisissant pendant le temps imparti ;
Il sied en conséquence de juger ainsi ;
Sur les dépens
S’agissant d’une mesure gracieuse profitant à la demanderesse,
il y a lieu de lui faire supporter les dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant
publiquement,
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contradictoirement,
en
matière
d’exécution et en premier ressort ;
Recevons la société Mc CROFT TOBACCO Côte d’Ivoire en son
action ;
L’y disons partiellement fondée ;
Lui accordons un délai de grâce de huit (8) mois par le report du
paiement de sa dette ;
Disons que la demande tendant à la suspension provisoire des
poursuites est surabondante ;
Déboutons la demanderesse du surplus de ses prétentions ;
Mettons les dépens de l’instance à la charge de la société Mc
CROFT TOBACCO Côte d’Ivoire.
ET AVONS SIGNE, LE PRESIDENT ET LE GREFFIER.
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